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Full text of "Récréations mathématiques"

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Presented  to  the 
LiBRARY  of  the 

UNIVERSITY  OF  TORONTO 

by 

THE 
DEPARTMENT 
OF 
MATHEMAÏICS 


^^ 


RECREATIONS 


MATHÉMATIQUES 


7> 


RÉCRÉATIONS 

MATHÉMATIQUES 


% 


M.  Edouard  LUCAS. 


Les  mathématiciens  sont  comme  les  amants...  ; 
accordez  à  un  mathématicien  le  moindre  prin- 
cipe, il  va  vous  en  tirer  une  conséquence  qu'il 
faudra  que  vous  lui  accordiez  aussi,  et  de  cette 
conséquence  une  autre;  et,  malgré  vous-même,  ii 
vous  porte  à  perte  de  vue,  à  peine  le  pouvez-vous 
croire.  Ces  deux  sortes  de  gens,  les  mathémati- 
ciens et  les  amants,  prennent  toujours  plus  qu'on 
ne  leur  donne. 

FONTENELLE. 


IV  s 

Le  Calendrier  perpétuel .  —  L'A  rithmétique  en  boules.  \ 

L'A  rithmétique  en  bâtons.  —  Les  cMérelles  < 

au  XIIF  siècle.  —  Les  Carrés  magiques  de  Fermât.  | 

Les  Réseaux  et  les  T>ominos.  —  Les  Régions  \ 

et  les  quatre  Couleurs.  —  La  zMachine  à  marcher,  s 


PARIS, 

G.-\UTHIF.R-VTI-LARS  ET  FILS.  IMPRIMEURS-LIBR  MRF.S, 

QUAI     DES    GRANDS-AUGUSTINS,     55, 

1894 
Tous  droits  réservés.) 


pi  k 


to  tt;e 

^mùcrBttg  of  Toronto 
Çrofessor  ^Alfreh  ^aker 


Hfune,  1940 


AVERTISSEMENT 


Nous  donnons  aujourd'hui  le  quatrième  et  dernier  Vo- 
lume des  Récréations  mathématiques  d'Edouard  Lucas. 
Les  dédicaces  placées  ea  tête  de  cinq  des  Récréations 
contenues  dans  ce  Volume  figurent  sur  le  manuscrit,  tout  entier 
de  la  main  de  Lucas.  Les  trois  autres  Récréations  ne  portent  pas 
de  dédicaces  ;  nous  n'avons  pas  cru  devoir  y  suppléer,  pour  les 
motifs  indiqués  dans  l'Avertissement  du  Tome  IIL 

Il  existait,  dans  les  papiers  de  Lucas,  trois  cahiers  intitulés: 
Arithmétique  amusante,  et  divisés  en  quatre  Chapitres  : 

Chapitre      L  —  Calculs  élémentaires. 
Chapitre    II.  —  Le  calcul  rapide. 
Chapitre  III.  —  Les  progressions  arithmétiques. 
Chapitre  IV.  —  Les  progressions  géométriques. 

Ce  manuscrit  représente  en  quelque  sorte  une  Introduction 


Avertissement. 


aux  Récréations  mathématiques,  auxquelles  il  sert  de  prépa- 
ration. 

L'accueil  fait  à  ces  dernières  par  le  public  scientifique  nous 
permettra  de  livrer  à  l'impression  ce  dernier  travail  de  Lucas, 
qui  a  été  commencé  en  1888  et  terminé  peu  de  temps  avant  sa 
mort. 

Nous  espérons  que  la  publication  de  V Arithmétique  amusante 
pourra  avoir  lieu  dans  un  assez  court  délai. 

H.  Delannoy,    C.-A.  Laisanï,    E.  Lemoine, 

Membres  de  la  Société  Mathématique  de  France. 


Paris,  Juillet  1894. 


PREMIÈRE  RÉCRÉATION. 

LE  CALENDRIER  PERPÉTUEL 

ET 

LE   CALCUL  AUTOMATIQUE   DES  RÉSIDUS. 

A  Son  Excellence  le  Prince  Baltha-{ar  Boncompagni. 

«  J'aime!  voilà  le  mot  que  la  nature  entière 
Crie  au  vent  qui  l'emporte,  à  l'oiseau  qui  le  suit 
Sombre  et  dernier  soupir  que  poussera  la  Terre, 
Quand  elle  tombera  dans  l'éternelle  nuit. 
Oh!  vous  le  murmurez  dans  vos  sphères  sacrées. 
Etoiles  du  matin,  ce  mot  triste  et  charmant  ! 
La  plus  faible  de  vous,  quand  Dieu  vous  a  créées, 
A  voulu  traverser  les  plaines  éthérées 
Pour  chercher  le  Soleil,  son  immortel  amant. 
Elle  s'est  élancée  au  sein  des  nuits  profondes. 
Mais  une  autre  l'aimait  elle-même;  —  et  les  mondes 
Se  sont  mis  en  voyage  autour  du  firmament.  » 
(  Musset.  —  Poésies  nouvelles.  ) 


E.  Lucas.  —  Récréations  mailiém.,  IV. 


PREMIERE    RECREATION. 

LE  CALENDRIER  PERPÉTUEL 
ET  LE  CALCUL  AUTOMATIQUE  DES  RÉSIDUS. 

LE   CALENDRIER   JULIEN    ET   GREGORIEN. 

NOUS  n'avons  l'idée  de  la  succession  des  instants  que  par 
le  mouvement.  Les  divisions  du  temps  ne  peuvent  être 
marquées  que  par  des  espaces  parcourus.  Mais,  pour  que 
la  mesure  soit  exacte,  il  faut  que  le  mouvement  soit  constant  et 
uniforme.  Il  n'en  est  point  de  tel  sur  la  terre.  L'âme  qui  souffre 
et  l'âme  qui  jouit  ne  comptent  pas  de  même;  et  le  temps,  qui  se 
traîne  en  vieillard  dans  les  jours  de  la  douleur,  a  la  course  rapide 
du  jeune  homme  pendant  les  courts  instants  d'une  jouissance 
agréable  et  vive.  Le  seul  mouvement  constant  et  uniforme  est 
celui  des  corps  célestes.  Ces  corps  marchent  d'un  pas  égal  et 
tranquille  dans  l'espace  de  l'univers  avec  une  constance  qui  a  été 
refusée  à  l'homme,  avec  une  durée,  peut-être  sans  limites,  qui 
n'est  pas  dans  sa  nature.  Il  emprunta  de  l'Astronomie  la  mesure 


Première  récréation. 


du  temps.  L'intervalle  d'un  lever  du  soleil  à  l'autre  est  une  me- 
sure qui  fut  appelée  jour.  Mais  la  société  a  besoin  de  mesurer 
de  plus  longs  espaces;  on  fit  donc  usage  des  mouvements  du 
soleil  et  de  la  lune.  En  effet, le  retour  des  mêmes  phases  delà 
lune  ou  des  mêmes  saisons  donnait  des  intervalles  sensiblement 
égaux.  Les  peuples  s'y  réunirent;  les  uns  comptèrent  par  lunes 
ou  par  mois;  les  autres,  par  les  révolutions  du  soleil  ou  par 
^wnee^;  d'autres  comptèrent  par  mois  et  années.  [Ba.ii.ly  ,  Histoire 
de  l'Astronomie.) 

La  combinaison  de  ces  mouvements  et  de  leurs  révolutions 
nous  a  donné  la  mesure  du  temps,  par  le  Calendrier,  qui  devait 
servir  beaucoup  plus  tard  à  formuler  les  lois  du  mouvement  des 
corps  célestes  par  l'attraction  universelle! 


<^gs^ 


DE    ROMULUS    A    JULES    CESAR. 

Depuis  Numa  jusqu'à  Jules  César,  le  Calendrier  romain, d'oii 
le  nôtre  dérive,  n'avait  aucune  règle  précise.  La  correspondance 
de  l'année  lunaire  de  12  lunaisons  formant  355  jours,  avec  l'an- 
née solaire  qui  règle  les  saisons,  avait  lieu  au  moyen  d'intercala- 
tions  fixées  arbitrairement.  La  dernière  année  de  ce  Calendrier, 
que  Ton  a  appelée  Vanne'e  de  confusion  (46  avant  J.-C),  fut  de 
455  jours. 


Le  Calendrier  perpétuel. 


LA   REFORME   JULIENNE. 


Le  Calendrier  julien  est  dû  à  Jules  César,  assisté  de  Sosigène, 
célèbre  astronome  et  mathématicien  d'Alexandrie.  L'année  ju- 
lienne est  communément  de  365  jours;  tous  les  quatre  ans,  on 
ajoute  un  jour  intercalaire  après  le  28  février,  à  la  date  du  2g. 
On  forme  ainsi  l'année  bissextile dt  366  jours; les  années  bissex- 
tiles du  Calendrier  julien  sont  toutes  celles  dont  l'ensemble  des 
deux  derniers  chiffres  du  millésime  se  compose  de  deux  zéros, 
ou  forme  un  nombre  exactement  divisible  par  quatre.  La 
durée  moyenne  est  donc  de  365  \  jours  solaires  moyens.  Mais 
cette  durée  est  un  peu  trop  grande,  puisque  l'année  tropique, 
intervalle  de  deux  équinoxes  de  printemps,  se  compose  de 
365  jours,  2422042;  cette  différence  fait  à  peu  près  7  jours  en 
neuf  siècles.  Aussi,  dès  l'année  1414,  on  commença  à  s'apercevoir 
que  les  équinoxes  du  printemps  et  de  l'automne  devançaient  de 
plus  en  plus  les  époques  du  21  mars  et  du  21  septembre,  aux- 
quelles ils  se  rapportaient  primitivement.  La  réforme  du  Calen- 
drier fut  dès  lors  constamment  réclamée.  Cette  réforme  eut 
lieu  enfin  sous  le  pontificat  de  Grégoire  XIII,  qui  en  ordonna 
l'exécution  par  une  bulle  du  24  février  i582.  Elle  fut  adoptée 
aussitôt  dans  tous  les  pays  catholiques,  et  successivement,  mais 
beaucoup  plus  tard,  chez  les  nations  protestantes.  La  Russie  et 
la  Grèce  sont  maintenant  les  seules  contrées  de  l'Europe  qui  ont 
conservé  le  vieux  style  (Calendrier  julien);  depuis  1800,  la  diffé- 
rence des  deux  Calendriers  est  de  12  jours,  elle  sera  de  i3  jours 
au  mois  de  mars  de  l'année  igoo. 


k 


Première  récréation. 


LA    KEFORMË    GREGORIENNE. 

Cette  réforme  consiste  dans  Vomission  nominale  des  dix  Jours 
qui  suivirent  le  4  octobre  1 582,  le  jour  suivant  ayant  été  compté 
pour  Je  I  5  au  lieu  du  5,  et  dans  la  suppression  du  jour  interca- 
laire dans  trois  années  séculaires  sur  quatre.  Dans  le  Calendrier 
grégorien,  l'année  séculaire,  terminée  par  deux  zéros,  est  bis- 
sextile lorsque  le  millésime  est  divisible  par  quatre,  après  la  sup- 
pression des  deux  zéros.  Ainsi  1600  et  2000  sont  des  années 
bissextiles;  1700,  1800,  1900,  2100  ne  le  sont  pas. 

Pour  voir  l'approximation  de  la  règle  grégorienne,  cherchons 
le  nombre  de  jours  contenus  dans  cent  siècles  grégoriens;  de  i  à 
loooo,  il  y  a  25oo  nombres  divisibles  par  quatre;  pour  les  an- 
nées séculaires,  de  i  à  100.  il  y  a  2  5  nombres  divisibles  par 
quatre,  et  75  qui  ne  le  sont  pas;  par  suite,  dans  100  siècles  gré- 
goriens, il  y  a  2425  années  bissextiles  et  3  652425  jours;  la  durée 
moyenne  de  Tannée  grégorienne  est  donc  de  365  jours,  2425, 
valeur  encore  un  peu  trop  forte,  donnant  moins  d'un  jour  sur 
3ooo  ans. 

BUT    DU    CALENDRIER. 

Notre  Calendrier  perpétuel  [Jîg.  1  )  a  pour  objet  de  donner  ure 
méthode  pour  trouver  rapidement  le  nom  du  jour  de  la  semaine 
qui  correspond  à  une  date  donnée  du  Calendrier  julien  ou  grégo- 
rien. L'application  en  est  simple,  puisqu'il  suffit  de  savoir  addi- 
tionner quatre  nombres  ne  dépassant  pas  six,  dont  le  total  ne 


Le  Calendrier  perpétuel. 


dépasse  jamais  vingt-quatre.  Quant  à  la  formation  du  Calendrier, 
on  la  comprendra  facilement.  Une  date  quelconque  se  compose  de 
quatre  données  :  le  Qiiantième,  ou  numéro  du  jour  dans  le  mois; 
le  nom  du  Mois;  le  numéro  de  ï Année  dans  le  siècle,  et  le  nu- 
méro du  Siècle  (julien  ou  grégorien).  Vérifions  d'abord  l'un  ou 
l'autre  des  deux  Calendriers  pour  une  date  quelconque,  celle  du 
jour  présent,  par  exemple. 

Cela  posé,  on  conçoit  que  la  somme  des  quatre  nombres  Q,  M, 
G  ou  J,  et  A,  augmente  d'une,  de  deux,  de  trois,  ...  unités, 
quand  le  Quantième  augmente,  et  que  l'on  peut  supprimer  tous 
les  multiples  de  sept.  Aussi  la  colonne  Q  contient  le  reste  de  la 
division  du  Quantième  par  sept,  et  l'on  peut  se  passer  du  premier 
tableau  des  Quantièmes.  De  même,  en  passant  de  Mars  à  Avril, 
le  nombre  M  augmente  de  3  ;  il  est  devenu  6  ;  cela  tient  à  ce  que 
Mars  a  3i  jours,  c'est-à-dire  quatre  semaines  plus  trois  jours;  en 
passant  d'Avril  à  Mai,  on  doit  augmenter  M  de  2  unités,  puis- 
qu'Avril  a  3o  jours,  ou  quatre  semaines  et  deux  jours  en  plus;  M 
devient  donc  8,  ou  en  supprimant  sept  jours,  M  devient  i,  et  ainsi 
de  suite.  On  observera  d'ailleurs  que  nous  avons  reporté  à  la  fin 
du  tableau  des  Mois,  les  mois  de  Janvier  et  de  Février,  parce  que 
le  jour  intercalaire  de  l'année  bissextile  se  trouve  après  le  28  Fé- 
vrier, et  ainsi  pour  trouver  un  jour  de  Janvier  ou  de  Février 
de  Tannée  1800,  par  exemple,  on  doit  se  reporter  à  l'année  1799. 

L'Année  commune  se  compose  de  cinquante-deux  semaines  et 
d'un  jour  en  plus;  l'Année  bissextile,  de  deux  jours  en  plus;  aussi 
les  nombres  A,  en  passant  d'une  année  à  l'autre,  augmentent 
trois  fois  d'un,  et  une  fois  de  deux,  en  supprimant  les  multiples 
de  sept.  Enfin,  pour  les  Siècles  juliens,  en  y  reportant  l'Année 
bissextile  séculaire,  un  Siècle  se  compose  d'un  nombre  exact  de 


CALENDRIER  PERPETUEL 


QUANTIÈMES. 

Q 

1 

JOURS. 

I 

8 

i5 

22 

29 

Dimanche. 

2 

9 

i6 

23 

3o 

2 

Lundi. 

3 

lO 

17 

24 

3i 

3 

Mardi. 

4 

1 1 

i8 

25 

— 

4 

Mercredi. 

5 

12 

19 

26 

— 

5 

Jeudi. 

6 

i3 

20 

27 

— 

6 

Vendredi. 

7 

H 

21 

28 

— 

0 

Samedi. 

SIECLES    GREGORIENS. 


i5 

19 

23 

27 

3i 

16 

20 

24 

28 

32 

17 

21 

25 

29 

33 

18 

22 

26 

3o 

34 

MOIS. 

M 
3 

Mars. 

Avril. 

6 

Mai. 

1 

Juin. 

4 

Juillet. 

6 

Août. 

2 

Septembre. 

5 

Octobre. 

0 

Novembre. 

3 

Décembre. 

5 

Janvier  (') 

1 

Février  (^) 

4 

{'')  Pour  les  mois  de 
Janvier  et  de  Février, 
on    doit   diminuer    de 
un  la  date  de  l'année. 

On  suppose  que  l'année 


REGLE  POUR  LE  CALENDRIER  JULIEN. 

Ajouter  les  quatre  nombres  Q,  M,  J,  A,  qui  correspondent  à  la  date 
donnée;  chercher  le  total  dans  le  tableau  des  Quantièmes  et  prendre  le  jour 
correspondant. 

Exemple.  —  Déterminer  le  jour  qui  correspond  au  12  Octobre  1492  (dé- 
couverte du  Nouveau-Monde). 

Quantième  12  Q  =  5 

Mois Octobre  M  =;  0 

Siècle 14  J  =  5 

Année ....  92  A  —  3 

Réponse..      Vendieai  Total  =  13 

Ce  Calendrier,  encore  en  usage  en  Russie  et  en  Grèce  et  chez  les  Chrétiens 
d'Orient,  est  valable  à  partir  du  i""  Janvier  46  avant  notre  ère. 


JULIEN  ET  GRÉGORIEN 


ÈCLES 

J 

LIENS 

H 

5 

i5 

4 

i6 

3 

'7 

2 

i8 

1 

•9 

0 

20 

6 

21 

5 

22 

4 

23 

3 

24 

2 

23 

i 

26 

0 

27 

6 

ANNÉES 

A 

ANNÉES 

A 
3 

00 

28 

56 

84 

0 

H 

42 

70 

98 

01 

29 

57 

85 

1 

i5 

43 

71 

99 

4 

02 

3o 

58 

86 

2 

16 

44 

72 

— 

6 

o3 

3i 

59 

87 

3 

17 

45 

73 

— 

0 

04 

32 

60 

88 

5 

18 

46 

74 

— 

1 

o5 

33 

61 

89 

6 

19 

47 

75 

— 

2 

06 

34 

62 

90 

0 

20 

48 

76 

— 

4 

07 

35 

63 

91 

1 

21 

49 

77 

— 

5 

08 

36 

64 

92 

3 

22 

5o 

78 

— 

6 

09 

37 

65 

93 

4 

23 

5i 

79 

— 

0 

10 

38 

66 

94 

5 

24 

52 

80 

— 

2 

1 1 

39 

67 

95 

6 

25 

53 

81 

— 

3 

12 

40 

68 

96 

1 

26 

H 

82 

— 

4 

i3 

41 

69 

97 

2 

27 

55 

83 

— 

5 

nmence  qu'au  1"  mars. 


REGLE  POUR  LE  CALENDRIER  GRÉGORIEN. 

Ajouter  les  quatre  nombres  Q,  M,  G,  A,  qui  correspondent  à  la  date 
donnée  ;  chercher  le  total  dans  le  tableau  des  Quantièmes  et  prendre  le  nom 
du  jour  correspondant. 

Exemple.  —  Déterminer  le  jour  qui  correspond  au  i5  Octobre  i582 
(origine  de  la  réforme  grégorienne). 

Quantième  i5  0=1 

Mois Octobre  M  —  O 

Siècle i5  6=1 

Année  . .   .  8i  A  =  4 


Réponse..      Vendredi         Total  =  6 

Ce  Calendrier  est  indéfiniment  valable  à  partir  du  i5  Octobre  i582.  Pour 
l'Angleterre,  il  commence  en  1752. 


Première  récréation. 


semaines  augmenté  de  loo  jours,  plus  25  pour  les  Années  bis- 
sextiles; ce  qui  fait  un  nombre  exact  de  semaines  diminué  d'un 
jour;  aussi  les  nombres  J  décroissent-ils  successivement  de  l'unité, 
d'un  Siècle  au  suivant,  tandis  que  les  nombres  G  décroissent  de 
deux,  à  partir  de  7  ou  o,  et  de  l'unité  seulement  en  passant  de 
i5oo  à  16000U  de  1900  à  2000. 

Ainsi,  dans  notre  Calendrier  perpétuel,  on  suppose  que  l'Année 
ne  commence  qu'au  i*^""  Mars.  En  la  faisant  commencer  au 
i*""  Janvier,  on  eût  obtenu  une  contexture  beaucoup  moins 
simple.  Afin  de  ne  pas  laisser  oublier  cette  disposition  au  lecteur, 
nous  lui  donnerons  cette  jolie  description  poétique  du  mois 
de  Mars,  avec  lequel  commence  ce  Calendrier. 

Du  pauvre  mois  de  Mars  il  ne  faut  pas  médire. 

Bien  que  le  laboureur  le  craigne  justement  : 

L'univers  y  renaît;  il  est  vrai  que  le  vent, 

La  pluie  et  le  soleil  s'y  disputent  l'empire. 

Qu'y  faire?  Au  temps  des  fleurs,  le  monde  est  un  enfant. 

C'est  sa  première  larme  et  son  premier  sourire. 

(Musset.  —  Poésies  nouvella.) 


CALCUL    MENTAL    DES    DATES. 

Nous  donnerons  maintenant  un  moyen  de  calculer  très  rapi- 
dement, sans  le  secours  de  la  plume  ou  du  crayon,  et  par  un 
petit  effort  de  calcul  mental,  les  notnbrcs  de  notre  Tableau. 

Calcul  mental  du  nombre  Q  des  Quantièmes.  —  Ce  nombre 
est  égal  au  reste  de  la  division  par  sept  du  nombre  qui  exprime 
le  Quantième. 


Le  Calendrier  perpétuel. 


Calcul  mental  du  nombre  H  des  Mois.  —  On  suppose  que 
Tannée  ne  commence  que  le  i*^""  Mars;  ainsi  Mars  est  le  pre- 
mier mois,  Avril  le  second,  Septembre  le  septième,  Octobre,  No- 
vembre, Décembre,  les  huitième,  neuvième  et  dixième  mois,  Jan- 
vier le  onzième,  et  Février  le  douzième. 

On  prend  le  double  plus  deux  du  numéro  du  mois  augmenté 
de  deux  unités,  on  ajoute  à  ce  nombre  le  triple  de  son  dixième, 
le  reste  de  la  division  par  sept  de  l'entier  de  ce  total  donne  le 
nombre  M. 

Calcul  mental  du  nombre  J  des  Siècles  juliens.  —  On  ajoute 
deux  unités  au  numéro  du  siècle,  on  divise  le  total  par  sept  et 
l'on  retranche  le  reste  de  sept. 

Calcul  mental  du  nombre  G  des  Siècles  grégoriens.  — 
Ce  nombre  est  zéro,  si  le  reste  de  la  division  du  numéro  du  siècle 
par  quatre  est  zéro;  dans  le  cas  contraire,  on  retranche  de  sept  le 
double  de  ce  reste. 

Calcul  mental  du  nombre  A  des  Années.  —  Au  numéro  de 
l'année  dans  le  siècle,  on  ajoute  l'entier  de  son  quart  et  l'on  prend 
le  reste  de  la  division  par  sept. 

UTILITÉ    DU    CVLENDRÎER    PERPETUEL. 

L'utilité  de  ce  Calendrier  se  comprend  d'elle-même  pour  les 
recherches  historiques,  et  nous  l'expliquerons  par  les  circonstances 
lêmes  qui  lui  ont  donné  naissance.  Dans  notre  voyage  à  Rome, 
)ur  la  publication  des  Œuvres    de    Fermât,    nous  avons  pu 


Première  récréation. 


obtenir  de  la  générosité  et  du  désintéressement  du  prince 
Boncompagni  la  communication  de  deux  volumes  contenant 
des  lettres  inédites  de  Fermât,  de  Mersenne,  et  de  plusieurs 
autres  savants.  Quelques-unes  de  ces  lettres  ne  portent  pas  la 
date  de  l'année,  mais  seulement  le  mois,  le  quantième  et  le  jour 
de  la  semaine;  il  fallait  les  classer;  nous  avons  dû  faire  un  pre- 
mier travail  pour  retrouver  le  chiffre  de  Tannée,  à  six  ou  sept 
années  près,  ce  qui  suffit  amplement,  avec  le  contenu,  pour 
retrouver  la  date  précise.  Telle  est  l'origine  de  ce  Calendrier. 

Grégoire XI II  mourut  peu  de  temps  après  la  réforme  du  Calen- 
drier, le  10  avril  i585;  ce  fut  un  pape  éclairé,  car  il  confirma 
l'établissement  de  la  congrégation  de  l'Oratoire;  il  fut  charitable, 
car  ses  aumônes  montèrent  à  deux  millions  d'écus  d'or.  Avant 
son  élévation  au  pontificat,  le  i3  mai  1572,  il  était  marié  et  père 
de  famille.  C'est  donc  avec  une  émotion  respectueuse  que  nous 
dédions  ce  modeste  travail,  comme  un  faible  témoignage  de  notre 
reconnaissance,  à  l'un  de  ses  plus  illustres  descendants,  éclairé 
et  généreux  comme  lui,  à  Son  Excellence  le  prince  Balthazar 
Boncompagni. 


LE  CALCUL  AUTOMATIQUE  DES  RÉSIDUS. 

Nous  avons  publié  en  i885  (M  un  Calendrier  qui  ne  diffère 
du  précédent  que  par  l'adjonction  d'une  roulette  mobile  autour 
de  son  axe.  Cette  roulette  porte  les  noms  successifs  des  jours  de 

{^)  Calendrier  perpétuel  à  roulette.  —  Paris,  chez  Belin,  rue  de  Vaugi- 
rard,  32. 


Le  Calendrier  perpétuel. 


i3 


Fig.  2. 


la  semaine  sur  les  sept  divisions  égales  formées  par  des  secteurs. 
On  fait  apparaître  successivement  les  jours  par  une  lucarne,  et 
l'addition  des  nombres  Q,  M,  G,  A  est  remplacée,  dans  le  mouve- 
ment de  la  roulette,  par  le  passage  d'un  nombre  égal  de  crans.  Le 
reste  de  la  division  par  sept  s'obtient  sans  calcul,  de  telle  sorte 
que,  dans  ce  Calendrier,  il  ne  reste  d'autre  trace  d'opération 
arithmétique  que  la  lecture  même  des  Tableaux. 

Nous  donnerons  encore  une  autre  disposition  du  Calendrier, 
beaucoup  plus  simple  dans  son  application  que  la  précédente  et 
qui  peut  s'adapter,  non  seulement  à  tous  les  Calendriers  des  dif- 
férents peuples,  mais  qui  constitue  un  procédé 
très  simple  pour  le  calcul  des  résidus,  c'est-à-dire 
pour  trouver  automatiquement  les  restes  de  la  di- 
vision d'un  nombre  quelconque  par  un  nombre 
qui  ne  dépasse  pas  soixante.  Nous  expliquerons 
ce  procédé  sur  le  calcul  des  restes  de  la  division 
par  sept  d'un  nombre  écrit  dans  le  système  déci- 
mal; l'appareil  se  modifie  légèrement  pour  un 
système  de  numération  dont  la  base  est  quel- 
conque, et,  par  exemple,  pour  le  système  duo- 
décimal. 

Une  première  tablette  fixe  {fig.  2)  contient  les 
nombres  plus  petits  que  le  diviseur,  à  savoir  :  o, 
il,  2,  3,  4,  5, 6,  sur  des  lignes  horizontales  équi- 

istantes.  En  général,  pour  un  diviseur  quel- 

)nque,  le  nombre  des  lignes  de  la  tablette  fixe 

st  égal  au  nombre  des  unités  du  diviseur,  quel  que  soit  le  sys 

ime  de  numération  employé. 


RESTES 

par  sept. 


—  I 

—  2 

—  3 

—  4 

—  5 

—  6 


La  fig.  3  représente  le  Tableau  des  unités;  on  peut  le  sup- 


14 


Première  récréation. 


poser  imprimé  des  deux  côtés  et  collé  sur  des  feuillets  de  carton 
réunis  par  de  petites  bandes  de  toile,  de  manière  à  pouvoir  les 
plier  selon  les  lignes  de  division  verticales.  On  peut  aussi  découper 
le  Tableau  en  sept  réglettes  collées  sur  carton;  on  peut  aussi  le 


t-ig    3. 

UNITÉS 
6 

UNITÉS 
5 

UNITÉS 

UNITÉS 
3 

UNITÉS 
9  ou  2 

UNITÉS 
Sou  1 

UNITÉS 
7  ou  0 

V^ 

1 

1 

% 

A/  \ 

Tableau  des  unités. 


coller  sur  un  rouleau  de  manière  à  n'apercevoir  par  une  lucarne 
que  l'une  des  colonnes  de  ce  Tableau.  Pour  plus  de  commodité 
dans  l'explication  et  dans  la  construction,  nous  supposerons  le 
Tableau  des  unités  découpé  en  sept  réglettes.  Si  Ton  place  l'une 
d'elles  en  avant  de  la  tablette  de  la  Jîg.  2,  et  si  l'on  suit  le  trait 
le  plus  élevé  à  la  gauche,  son  extrémité  à  droite  indique  immé- 
diatement le  reste  de  la  division  par  7. 

La  disposition   des  lignes  du  Tableau  des  unités  s'explique 
d'elle-même  et  serait  identique  pour  un  système  quelconque  de 


Le  Calendrier  perpétuel. 


numération.  Il  suffirait,  pour  le  système  duodécimal,  d'ajouter 
les  chiffres  qui  représentent  dix  et  onze,  dans  leurs  colonnes  res- 
pectives, en  haut  du  Tableau,  ainsi  que  nous  l'avons  fait;  mais, 
pour  les  Tableaux  qui  correspondent  aux  unités  des  ordres  supé- 


Kig.  4. 


DIZAINES 
6 

DIZAINES 
5 

DIZAINES 

--■ 

DIZAINES 

3 

DIZAINES 
9  ou  2 

DIZAINES 
8  ou   1 

DIZAINES 
7  ou   0 

f 

1 

1 

Am:^ 

/  \ 

Tableau  des  dizaines. 


rieurs,  il  suffit  de  permuter  les  colonnes  du  Tableau  des  unités. 
Pour  les  dizaines,  nous  observons  que  les  restes  de  la  division  de 

00  ou  70,   10  ou  80,  20  ou  90,  3o,  40,  5o,  60 
par  sept  sont  respectivement 

o,  3,  6,  2,     5,     I,    4. 

Il  nous  suffit  donc  de  disposer  dans  l'ordre  o,  3,  6,  2,  5,  i,  4, 
ù  partir  de  la  gauche,  les  colonnes  du  Tableau  des  unités  portant 
les  chiffres  correspondants  (Jîg.  4). 


k 


iG 


Première  récréation. 


Pour  obtenir  le  Tableau   des  réglettes  pour  les  centaines, 
nous  observons  que  les  restes  de  la  division  de 

ooo,  loo,  200,  3oo,  400,  5oo,  600, 

par  sept  sont  respectivement 

o,      2,       4,       6,        I,       3,      5; 

c'est  l'ordre  des  tablettes  des  unités  ;\  partir  de  la  gauche,  en  y 
remplaçant  les  chiffres  de  la  ligne  précédente  par  ceux  de  la  ligne 
au-dessus. 

Et  ainsi  de  suite. 

Cela  posé,  supposons  que  l'on  ait  construit  le  Tableau  des  ré- 


Fig.  5. 

CENT- MILLE 

DIX-MILLE 

MILLE 
8^  1 

CENTAINES 
9  ou  2 

DIZAINES 
S 

UNITÉS 
7  ou  0 

Restes 

par 

Sept 

2 

1 

0 

1 

2 

3 

^ 

5 

6 

Le  reste  de  la  division  de  241  257  par  7  est  2. 

gleltes  OU  des  rouleaux  jusqu'aux  centaines  de  mille  ;  on  obtiendra 
immédiatement,  sans  aucun  calcul,  le  reste  de  la  division  d'un 


I 


Le  Calendrier  yerpétuel. 


nombre  de  six  chiffres  au  plus,  par  le  nombre  7.  Considérons, 
par  exemple,  le  nombre  241  257,  en  plaçant  les  re'glettes  corres- 
pondantes dans  l'ordre  convenable  ijîg-.  5),  et,  en  suivant  le  trait 
supérieur  de  gauche,  on  trouve  le  reste  2. 


•^^ 


CALENDRIER    PERPETUEL    A    REGLETTES. 

Il  est  facile  de  former  un  calendrier  automatique  au  moyen  de 

Fig.  6. 


Le  rouleau  des  Mois. 
Eglettes  analogues  à  celles  qui  ont  servi  pour  le  calcul  des  ré- 


Une  première  réglette  porte  l'indication  des  quantièmes. 
Un  second  groupe  de  sept  réglettes  ijig.  6  )  donne  les  mois. 
E.  Llcas.  —  Récréatiois  ma'.héin  ,  IV.  ■■« 


i8 


Première  récréation. 


Un  troisième  groupe  de  sept  réglettes  {Jîg.  7)  comprend  les 
siècles  juliens. 

Un  quatrième  groupe  de  quatre  réglettes  (Jig.  8)  comprend 
les  siècles  grégoriens  jusqu'au  trentième  siècle.  Les  siècles  mar- 


Fig.  7. 


Le  rouleau  des  Siècles  julien*;. 

qués  d'un  astérisque  sont  ceux  dont  le  millésime  est  divisible  par 
quatre. 

Un  cinquième  groupe  de  sept  réglettes  {Jîg.  9)  renferme  les 
années.  L'astérisque  désigne  les  années  bissextiles. 

Enfin  sur  une  dernière  réglette  se  trouvent  inscrits  les  noms 
des  sept  jours  de  la  semaine. 

Si  l'on  demande  à  quel  jour  correspond  la  date  du  10  mai  1889, 
il  suffit  de  disposer  les  réglettes  comme  l'indique  là  Jîg-.  10. 

A  côté  de  la  réglette  des  quantièmes,  on  met  la  réglette  du  mois 


Le  Calendrier  perpéluel. 


Fig.  8.  —  Le  rouleau  des  Siècles  grégoriens. 


ANNEE  j  ANNEE   ANNEE   ANNEE  j  ANNEE    ANNÉE 

0^06  17  23'oi  07  if  18:02  13  13  21-*'03  Oa*!"*-  25  Of*  )0'21'27loS 
28[3'ff5  51:29  35  W'^C  130  >!  W'52*31  36*  1^2  53  3^38  fS  55133 
5^62,73,79  57,63i6^i7'f  58,69j75i80'59.6V*i70  81  eo^es  177  183  61 
8*,i90|_|_  85(91 13^_  8Gi97|-|-  87|95n98!_  8^|9*- !  _  |  _  l89 


ANNEE 


ill  |l^22j09ilS'2(r26 
;39|'M^'i50i37;M;'^6^5'^ 
67  172*78  6S!71J76*82 

iasi-l-  93l99 


Fig.  9.  —  Le  rouleau  des  Années. 


Premièi'e  récréation. 


de  mai,  puis  celle  du  siècle  grégorien  tS.  ensuite  la  réglette  cor- 

Fig.   lo. 


QUANTIÈ 

ME 

MOIS 

Janvier  31 
Mai  -^  31 

SIÈCLE 
GRÉGORIEN 

ANNÉE 

05  11  161 22 
33  39  Mf  50 
61  67  7T78 
89  95  _    - 

Jour 

de  la 

Semaine 

L'année  ne 

commence  que 

le  I^Mars 

18 22 

26—30 

1 

8 

15 

22 

29_ 

•■ 

—  Dimanche 

s 

2 

9 

tB 

23 

30  _ 

_  Lundi 

3 

10 

17 

2'f 

3t_ 

^"~y^ 

_  Mardi 

W 

11 

18 

25 

-  - 

-  Mercredi 

5 

12 

19 

26 

-  — 

_  Jeudi 

6 

13 

20 

27 



_  Vendredi 

7 

\l¥ 

21 

28 

__. 

?^\/    \ 

_  Samedi 

Calendrier  du  mois  de  mai  li 


et  de  janvier  i8qo. 


respondant  à  l'année  89,  et  enfin  celle  des  jours  de  la  semaine. 
En  partant  de  la  ligne  oîi  est  inscrit  le  quantième  10  et  en  sui- 
vant le  tracé  jusqu'à  la  colonne  des  jours,  on  voit  immédiate- 
ment que  le  10  mai  1889  était  un  vendredi. 


DEUXIÈME   RÉCRÉATION. 


L^ARITHMÉTIQ_UE  EN    BOULES. 


A  Monsieur  Paul  Mansion,  professeur  à  r  Université 
de  Gand. 


»  Je  forme  un  triangle,  ô  merveille! 
Le  peuple  des  lois  endormi 
S'agite  avec  lenteur,  s'éveille 
Et  se  déroule  à  l'infini. 

«  Avec  trois  lignes  sur  le  sable, 
Je  connais,  je  ne  doute  plus! 
Un  triangle  est  donc  préférable 
Aux  mots  sonores  que  )'ai  lus?  » 

Sully  Prud'homme. 


DEUXIÈME  RECREATION. 


L'ARITHMÉTIQUE  EN  BOULES. 


CETTE  récréation  a  pour  but  l'exposition  de  quelques 
principes  de  Calcul,  et  même  d'Arithmétique  supé- 
rieure, par  des  procédés  de  démonstration  qui  ne  sup- 
posent au  lecteur  d'autres  connaissances  mathématiques  que  les 
quatre  premières  règles  et  les  définitions  de  la  Géométrie  élémen- 
taire. C'est  encore  un  essai  de  restauration  des  méthodes  dont 
se  servaient  peut-être  les  ancêtres  de  la  Science,  dans  la  Chine 
et  dans  l'Inde,  pour  arriver  à  la  découverte  des  propriétés  et  des 
lois  du  nombre  et  de  l'étendue.  Nous  n'ignorons  pas  que  les 
savants  qui  s'occupent  des  origines  de  l'Arithmétique  et  de  la 
Géométrie  sont  divisés  sur  la  question  de  savoir  si  les  solutions 
des  problèmes  relatifs  à  la  mesure  des  surfaces  et  des  volumes 
ont  ou  n'ont  pas  précédé  celles  des  problèmes  de  même  ordre 
dans  le  calcul  des  nombres  polygonaux  et  des  nombres  figurés 
que  nous  définissons  plus  loin;  nous  devons  dire  que  cette  Ré- 
création et  la  suivante  viennent  apporter  un  nouvel  appoint  à 
ceux  qui  prétendent  que  l'étude  de  l'Arithmétique  a  précédé  celle 
de  la  Géométrie;  mais  nous  n'y  reviendrons  que  plus  tard,  pour 


24  Deuxième  récréation. 


demeurer  fidèle  à  notre  méthode  d'enseignement  et  de  vulgari- 
sation qui  consiste  toujJurs  à  passer  du  simple  au  composé  ;  nous 
commencerons  par  les  questions  les  plus  élémentaires. 

L^DtolTION. 

Avec  des  boules,  des  billes,  des  noix,  ou  mieux  encore  avec 
les  pions  d'un  ou  de  plusieurs  jeux  de  dames,  nous  pouvons  suc- 

Fig.   II. 

.•        #-#        #-#-# 

Un  Deux  Trois 


Quatre  Cinq 

Les  cinq  premiers  nombres. 

Cessivement  représenter  les  nombres  entiers  1,2,   3,  4,  5,  ..., 
ainsi  que  nous  indiquons  ci-dessus  [Jîg.  1 1  ). 

L'Arithmétique  et,  par  suite,  toutes  les  Mathématiques  repo- 

Fig.   12. 

#  Set  I 

^  et2 
3  et  3 
2et4 
I  et  9 

L'addition. 

sent  sur  cet  axiome,  que  le  nombre  est  toujours  égal  à  la  somme 


L'Arithmétique  en  boules. 


de  ses  unités,  quelle  que  soit  la  manière  de  les  assembler  ou  de  les 
grouper.  Ainsi,  en  partageant  le  nombre  6  en  deux  parties,  on 
peut  obtenir  les  dispositions  représente'es  sur  l^fig.  12. 

Donc  le  nombre  6  est  la  somme  de  5  et  de  i,  par  définition, 
mais  aussi  de  4  et  2,  de  3  et  3,  de  2  et  4,  et  enfin  de  i  et  5.  Par 
suite,  la  somme  de  deux  nombres  ne  change  pas  lorsque  l'on 
intervertit  l'ordre  des  nombres  ajoutés;  il  en  est  de  même  pour  la 
somme  d'autant  de  nombres  que  l'on  voudra. 

(^^^^ 

LA   MULTIPLICATION. 

La  multiplication  de  4  par  6  est  l'addition  de  six  nombres 
égaux  à  4;  nous  l'avons  représentée  [fig.  1 3  ];  le  résultat  s'appelle 

Fig.  i3.  Fig.  14. 

4 

4- 
4 


Le  produit.   ^x6      Le  produit  renversé.  6X4 

le  produit  de  la  multiplication  ou  le  nombre  rectangulaire  de 
côtés  4  et  6.  Si  l'on  fait  tourner  la  figure  d'un  quart  de  tour,  le 
nombre  des  unités  ne  change  pas;  on  obtient  alors  le  rectangle 
{Jig.  14)  provenant  de  la  multiplication  de  6  par  4. 

La  comparaison  des  fig.  1 3  et  14  démontre  cette  proposition, 


Deuxième  récréation. 


que  le  produit  de  deux  nombres  ne  change  pas  lorsque  l'on  inter- 
vertit l'ordre  des  facteurs,  ainsi  qu'on  peut  le  constater  sur  la 
Table  de  multiplication.  Celte  démonstration  est  classique. 


'J^^if^ 


LES    NOMBRES    TRIANGULAIRES. 


Supposons  toujours  les  nombres  représente's    par  des  boules 
juxtaposées  en  ligne  droite  et  plaçons  successivement  [fig.  i  5  )  le 


Fif 


•     A 


A  A 


10 


15 


Les  triangulaires. 


premier  nombre  sur  le  second,  les  deux  premiers  sur  le  troisiènie, 
les  trois  premiers  sur  le  quatrième,  les  quatre  premiers  sur  le 
cinquième,  et  ainsi  de  suite.  Nous  formons  ainsi  successivement 
ce  que  l'on  appelle  les  nombres  triangulaires. 

Si  l'on  veut  construire  la  Table  des  nombres  triangulaires,  et  la 
conduire  aussi  loin  qu'on  voudra,  on  écritsur  une  première  ligne 
les  unités  I,  i,  i,  ...;  sur  une  seconde  ligne  les  nombres  successifs 


L'Arithmétique  en  boules. 


I,  2,  3, ...,  dételle  sorte  que  chaque  nombre  de  cette  ligne  soit  la 
somme  de  celui  qui  le  précède  dans  la  ligne  et  de  l'unité  i  qui  est 
au-dessus  de  lui;  c'est  la  loi  même  de  formation  des  nombres  en- 
tiers. 


Unités.. 

I 
I 

I 

I 

2 

3 

I 
3 
6 

4 

lO 

I 

5 
i5 

I 

ô 

2  1 

I 

7 
28 

I 

S 
36 

I 

9 

43 

I 

Entiers. 

1 0 

Triangu 

aires. 

bb 

Sur  une  troisième  ligne,  on  forme  la  suite  des  nombres  trian- 
gulaires en  ajoutant  au  dernier  nombre  obtenu  celui  qui  se 
trouve  au-dessus  dans  la  colonne  suivante;  ainsi,  par  exemple, 
28  =  21  -f-  7,  et  de  même  pour  tous  les  autres.  Pour  avoir  les 
cent  premiers  triangulaires,  on  a  donc  à  faire  cent  additions  suc- 
cessives de  deux  nombres. 

LA  PILE  d'obus. 

Mais  il  vient  se  placer  ici  tout  naturellement  une  question  im- 
portante. Comment  peut-on  déterminer  directement  le  centième 
triangulaire,  ou  plus  généralement,  comment  peut-on  calculer 
un  triangulaire  de  rang  donné? 

On  sait  que,  dans  les  arsenaux,  les  projectiles  emmagasinés 
sont  de  deux  espèces  :  les  uns  sont  des  boulets  destinés  aux 
pièces  lisses;  les  autres,  qui  servent  à  la  charge  des  pièces  rayées, 
ont  une  forme  cylindro-conique.  Nous  ne  nous  occuperons 
pour  l'instant  que  de  ces  derniers  Une  première  tranche  ver- 
ticale représente  un  nombre  triangulaire  dont  le  profil  est  re- 
présenté y?g".  16.   Pour  donner  plus  de  solidité  à  la  pile,   on 


2<S 


Deuxième  récréation. 


place  plusieurs  rangées  verticales  semblables;  et  le  nombre  total 
des  obus  est  le  produit  du  nombre  des  tranches  par  le  triangu- 
laire correspondant  qu'il  s'agit  donc  de  calculer. 

Pour  cela,  considérons,  par  exemple,  le  cinquième  triangu- 

Fis.  i6. 


^  .#1#;^#I^,^ 


La  pile  d'obus. 

laire  et  plaçons  à  côté,  en  sens  inverse  [fig.  17),  le  même  trian- 
gulaire représenté  par  des  boules  blanches;  nous  formons  ainsi 


Fig.   18. 


un  parallélogramme;  chaque  ligne  contient  (5+  i)  boules  et, 
puisqu'il  y  a  cinq  lignes,  le  nombre  total  des  boules  qui  repré- 
sente le  double  du  cinquième  triangulaire  est  le  produit  de  5  par 
5  -I- 1  ou  6;  ainsi  le  cinquième  triangulaire  est  la  moitié  du  pro- 
duit de  5  par  6. 


L'Arithmétique  en  boules. 


CALCUL    DIRECT    DES   TRIANGULAIRES. 

Par  cette  démonstration  absolument  pareille  à  celle  qui  prouve 
(Jîg.  i8)  que  l'aire  du  triangle  est  la  moitié  de  l'aire  du  parallé- 
logramme de  même  base  et  de  même  hauteur,  on  voit  que  : 
Le  double  d'un  nombre  triangulaire  de  rang  quelconque  est 
le  produit  du  nombre  qui  indique  son  rang  par  le  nombre 
suivant. 

Le  rang  est  d'ailleurs  égal  au  nombre  de  boules  sur  le  côté,  et 
nous  considérons  ces  deux  expressions  comme  équivalentes. 

Ainsi,  en  résumé,  on  peut  calculer  les  nombres  triangulaires 
par  additions  successives,  de  manière  à  les  obtenir  tous;  mais 
aussi  on  peut  les  calculer  isolément  par  une  seule  multiplication, 
ainsi  que  nous  venons  de  le  voir.  Le  second  procédé  sert  de  vé- 
rification au  premier  en  calculant  directement  les  triangulaires 
de  dix  en  dix. 

Le  Tableau  précédent  peut  être  allongé  indéfiniment  dans  le 
sens  de  la  longueur,  en  ajoutant  autant  de  colonnes  que  l'on 
veut;  mais  on  peut  aussi  l'allonger  dans  le  sens  de  la  largeur  en 
ajoutant  des  lignes.  Il  existe  deux  procédés  d'extension  absolu- 
ment différents  :  le  premier  donne  la  théorie  des  nombres  poly- 
gonaux ;  c'est,  pour  ainsi  dire,  {'Arithmétique  de  Diophante; 
nous  l'exposerons  dans  cette  Récréation.  Le  second  procédé  donne 
la  théorie  des  nombres  figurés  ;  c'est  plus  spécialement  V  Arith- 
métique de  Fermât;  nous  l'exposerons  dans  la  Récréation 
suivante  intitulée  :  ^Arithmétique  en  bâtons. 


3o  Deuxième  récréation. 


LES    NOMBRES    CARRES. 

Plaçons  des  boules  aux  sommets  de  carre's  égaux  distribués 
comme  ceux  des  cases  d'un  échiquier.  Nous  avons  représenté 
dans  la^^.  19  le  carré  de  5;  ce  carré  est  un  nombre  rectangu- 
laire dont  les  côtés  sont  égaux;  par  conséquent,  le  nombre  des 
unités  qu'il  renferme  est  5  x  5  ou  25.    Nous  savons  donc  cal- 

Fig.  19. 


Le  carré  de  cinq. 

culer,  par  multiplications  successives,  tous  les  carrés;  ainsi  le 
nombre  des  cases  de  l'échiquier  de  8  cases  de  côté  est  64;  le 
nombre  des  cases  du  damier  de  10  cases  de  côté  est  100;  mais, 
pour  le  nombre  des  sommets  de  toutes  les  cases,  on  doit  aug- 
menter le  côté  d'une  unité.  Ainsi,  dans  \^Jîg.  19,  il  y  a  16  cases 
et  25  sommets;  de  même,  le  nombre  des  sommets  de  l'échiquier 
est  81,  et  le  nombre  des  sommets  du  damier  est  121. 

Contrairement  à  ce  que  nous  avons  fait  pour  les  nombres  trian- 
gulaires, nous  trouvons  ici  tout  d'abord  le  procédé  de  calcul  pour 
chaque  carré  pris  isolément  ;  nous  allons  chercher  le  procédé  par 
lequel  on  peut  les  obtenir  par  additions  successives.  Dans  ce 
but,  nous  déterminerons  ce  qu'il  faut  ajouter  à  un  carré  pour 
obtenir  le  carré  suivant;  nous  avons  représenté  par  des  boules 


L'Arithmétique  en  boules. 


blanches,  dans  la  /ig.  20,  le  nombre  qu'il  faut  ajouter  à  chacun 
des  carrés  pour  obtenir  le  carré  suivant.  Ce  nombre,  que  l'on  ap- 
pelle accroissement,  excès  ou  différence,  est  formé  d'une  ligne 
brisée  à  angle  droit  et  renferme  successivement  3,  5,  7,  9  unités, 
c'est-à-dire  continuellement  2  en  plus;  il  en  sera  toujours  de 


Fig.  20. 

(xxp 


00 


Les  accroissements  des  carre's. 

même,  comme  il  est  facile  de  s'en  convaincre.  Ainsi  les  accrois- 
sements des  carrés  sont  représentés  par  les  nombres  impairs,  et 
l'on  voit  alors  d'une  manière  évidente  que  le  second  carré  est  la 
somme  des  deux  premiers  impairs  i  et  3;  que  le  troisième  carré 
est  la  somme  des  trois  premiers  impairs;  que  le  quatrième  carré 
est  la  somme  des  quatre  premiers  impairs,  et  ainsi  de  suite.  On  a 
donc  cette  proposition  :  La  somme  des  premiers  impairs  à  partir 
de  I  est  égale  au  carré  de  leur  nombre.  On  la  trouve  dans 
l'Arithmétiquî  de  Nicomaque,  de  Gérase,  qui  vivait  vers  la  fin 
du  i^'  siècle  de  l'ère  chrétienne. 


?S^^) 


32  Deuxième  récréation. 


LA    TABLE    DES    CARRES. 

2222  222  2  2  2 

Impairs i     3     5      7      9     11      i3     i5     17       19 

Carrés i     4    9     i(3     2  5     36    40    6f    81     100 

Nous  profiterons  du  théorème  précédent  pour  construire  rapi- 
dement la  Table  des  carrés.  Sur  une  première  ligne,  on  écrit  con- 
stamment le  nombre  2  ;  sur  une  deuxième  ligne,  on  forme  succes- 
sivement les  impairs  en  ajoutant  2  au  dernier  impair  obtenu  ;  sur 
une  troisième  ligne,  on  forme  les  carrés  en  ajoutant  au  dernier 
carré  obtenu  le  nombre  placé  au-dessus  dans  la  colonne  suivante; 
ainsi,  par  exemple,  49=  36  H-  i3.  On  vérifie  d'ailleurs  le  cal- 
cul en  plaçant  à  l'avance  les  carrés  des  nombres  terminés  par 
des  zéros,  et  l'on  doit  les  retrouver  dans  le  courant  de  l'opération. 

La  Table  des  carrés  est  d'une  extrême  importance  pour  l'Arith- 
métique théorique  et  pratique,  et  nous  pensons  que  son  emploi 
est  beaucoup  plus  utile  et  plus  étendu  que  celui  de  la  Table  des 
logarithmes.  Nous  y  reviendrons  plus  d'une  fois  dans  le  courant 
de  cet  Ouvrage.  Nous  supposerons  donc  que  l'on  possède  une 
telle  Table,  que  l'on  peut  rapidement  construire  soi-même  d'après 
les  indications  précédentes.  Il  n'est  pas  douteux  que  c'est  par  son 
secours  que  Fermât  a  obtenu  et  démontré  la  plupart  de  ses  inven- 
tions arithmétiques. 

Nous  nous  servirons  de  cette  Table  pour  résoudre  diverses 
questions.  On  reconnaîtra  tout  d'abord  si  un  nombre  est  carré  en 
le  cherchant  dans  la  Table,  puisque  les  carrés  sont  rangés  par 
ordre  de  grandeur,  et  nous  supposerons  d'ailleurs  que  ce  nombre 
ne  dépasse  pas  les  limites  de  cette  Table,  et,  par  exemple,  cent 
millions,  si  l'on  a  calculé  la  Table  des  dix  mille  premiers  carrés. 


i 


L'Arithmétique  en  boules. 


33 


Comment  reconnaître  maintenant,  avec  la  Table  des  carrés,  si  un 
nombre  donné  est  triangulaire;  on  se  servira  pour  cela  du  théo- 
rème suivant  que  l'on  trouve  dans  l'Arithmétique  de  Diophante  : 
Voctiiple  d'un  triangulaire  augmenté  de  l'unité  est  toujours 

Fig.  21. 


Théorème  de  Diophante. 

un  carré.  La  démonstration  de  ce  théorème  résulte  immédiate- 
ment de  la  vue  de  la  Jîg.  2 1  ci-dessus. 

Inversement,  tout  carré  impair  diminué  de  V unité  est  Voc- 
tuple  d'un  triangulaire. 

Par  conséquent,  pour  savoir  si  55  est  un  triangulaire,  on  le 
multiplie  par  8  et  l'on  ajoute  i ,  ce  qui  fait  441  ou  le  carré  de  21  : 
donc  55  est  un  triangulaire;  pour  avoir  son  côté,  on  prend  la 
moitié  du  côté  de  carré  diminué  préalablement  de  i  et  l'on  trouve 
10.  Ainsi  55  est  le  dixième  triangulaire. 


E.  Lucas.  —  Récréations  mathém.,  IV 


34  Deuxième  récréation. 


LES    RESTES    DES    CARRES. 

A  la  seule  inspection  de  la  Table  des  carrés,  on  reconnaît  im- 
médiatement que  ceux-ci  sont  terminés  par  l'un  des  chiffres 
o,  5,  I,  4,  6,  9  et  ne  sont  jamais  terminés  par  l'un  des  quatre 
chiffres  2,  3,7,  8  ;  cela  résulte  de  ce  que  le  dernier  chiffre  d'un 
produit  est  le  même  que  celui  du  produit  de  ses  deux  derniers 
chiffres.  On  peut  donc  affirmer  que  si  un  nombre  est  terminé 
par  2,  3,  7,  8^  il  ne  peut  être  un  carré  parfait.  On  dit  que  les 
nombres  o,  5,  i,  4,  6,  9  sont  les  restes  des  carrés  par  10,  et  que 
les  autres  sont  des  non-restes  ou  des  non-résidus. 

De  même,  les  triangulaires  ne  sont  jamais  terminés  par  l'un 
des  chiffres  2,  4,  9,  7,  parce  que  leur  octuple  augmenté  de 
l'unité  donnerait  pour  dernier  chiffre  un  non-reste  de  carré;  ces 
observations  permettent  de  simplifier  dans  beaucoup  de  cas  les 
recherches  pour  savoir  si  un  nombre  est  triangulaire  ou  carré. 


LES    DECOMPOSITIONS    D  UN    CARRE. 

Si  nous  plaçons  au-dessous  du  Tableau  des   triangulaires  la 
ligne  des  carrés,  nous  obtenons  ainsi  la  nouvelle  Table  : 

Unités I      I     I       I       I       I        I        I  I  I 

Entiers 12345678  9  10 

Triangulaires...  i     3    6     10     i5    21     28    36  46  55 

Carrés i    49     i6    25     36    49    64  81  100 

On  reconnaît  immédiatement  que  tout  carré  est  la  somme  du 


I 


V Arithmétique  en  boules. 


triangulaire  de  même  rang  et  du  triangulaire  précédent.  Celte 
propriété  est  visible  sur  Iz.  fig.  22;  de  même  \di  Jîg.  23  nous 

Fig-  22.  Fig.  23. 


montre  que  tout  nombre  carré  est  égal  à  son  côté  augmenté  de- 
deux  fois  le  triangulaire  de  rang  précèdent. 


LES    NOMBRES    PENTAGONAUX. 

La  fig.  24  représente  le  cinquième  nombre  pentagonal  ;  on 
formerait  le  sixième  nombre  pentagonal  en  ajoutant  des  boules 
au  delà  du  contour  EPQR.  Ainsi  les  nombres  pentagonaux  sont 
formés  par  des  boules  placées  sur  des  enceintes  ou  contours  suc- 
cessifs d'un  pentagone  régulier;  le  premier  pentagonal  est  repré- 
senté par  la  boule  A  ;  le  second  pentagonal  par  cette  boule  et  les 
quatre  boules  blanches  aux  sommets  du  pentagone  régulier  de 
côté  AB;  le  troisième  pentagonal  par  les  boules  précédentes  et 
-lies  qui  se  trouvent  sur  le  pentagone  de  côté  AG,  et  ainsi  de 
suite. 

Puisque  le  contour  extérieur  EPQR  a  trois  côtés,   EP,  PQ, 


36 


Deuxième  récréation. 


QR,  on  voit  que,  d'un  contour  au  suivant,  le  nombre  des  boules 
augmente  de  trois  unités.  Par  suite,  le  Tableau  des  pentagonaux 
se  fait  comme  celui  des  carrés,  mais  en  remplaçant  la  première 


Fig.  24. 


ABC      DE 

Le  cinquième  pentagonal. 


ligne  des  nombres  tous  égaux  à  2,  par  des  nombres  tous  égaux 
à  3. 


LA    TABLE    DES    PENTAGONAUX. 


Triples  moins  214 
Pentagonaux i       5 


3 

3 

3 

3 

3 

3 

3 

7 

10 

i3 

16 

19 

22 

25 

2 

22 

35 

5i 

70 

92 

117 

145 


Ainsi,  en  continuant  le  Tableau  précédent,  on  peut  calculer 
tous  les  pentagonaux  par  additions  successives;  mais,  si  l'on  veut 
calculer  isolément  un  pentagonal  de  rang  donné,  il  suffit  de  con- 
sulter la  _/î^.  25,  qui  nous  montre  immédiatement  Texactitude 
de  cette  proposition  : 


L'Arithmétique  en  boules. 


Tout  pentagonal  est  égal  à  son  côté  AB  augmenté  de  trois 
fois  le  triangulaire  de  rang  précédent. 

Cette  proposition  correspond  à  celle  qui  résulte,  pour  le  carré, 
de  la  vue  de  l^fig.  23,  mais  si  l'on  ajoute  le  côté  ABde  lajig.  2  5 
au  triangle  placé  au-dessus  et  formé  de  boules  blanches,  on  en 
déduit  la  propriété  correspondante  à  celle  de  la.Jig.  22  pour  le 
carré  et  que  l'on  énonce  ainsi  :  Tout  p enta gonal  est  la  somme  du 


Fig.  25. 


r 


triangulaire  de  même  rang  et  du  double  du  triangulaire  pré- 
cédent. 

Il  nous  reste  maintenant  à  résoudre  la  question  suivante  : 
Comment  reconnaître  qu'un  nombre  donné  est  pentagonal?  Mais 
il  résulte  immédiatement  de  l'étude  de  la.Jig.  26  que  :  Le  triple 
de  tout  nombre  pentagonal  est  un  nombre  triangulaire  dont  le 
rang  est  le  triple  moins  un  du  rang  du  pentagonal.  Inverse- 
ment, tout  triangulaire  dont  le  rang  est  un  triple  moins  un  est 
le  triple  d'un  pentagonal.  Ainsi,  un  nombre  étant  donné,  pour 
savoir  si  ce  nombre  est  un  pentagonal,  on  le  multiplie  par  3,  et 
le  produit  doit  être  un  nombre  triangulaire.  Par  conséquent, 
en  appliquant  le  théorème  de  Diophante  :  Le  produit  par  24. 


38 


Deuxième  récréation. 


■d'un  nombre  pentagonal  étant  augmenté  de  l'unité  donne  un 
carré  dont  le  côté  est  le  sextuple  moins  un  du  côté  du  pentago- 
Jial.  Inversement,  tout  triangulaire  dont  le  rang  est  un  sextuple 


Oi  B,  Aï 

Le  triple  pentagonal. 

moins   un   est   le   produit   plus    un    d'un   nombre  pentagonal 
•par  24. 

On  reconnaît  encore  facilement  qu'un  nombre  pentagonal  ne 
peut  être  terminé  par  l'un  des  chiffres  4,  8,  3,  9,  parce  que,  s'il 
en  était  ainsi,  le  triple  de  ce  nombre  serait  terminé  par  2,  4,  9,  7 
et  que  l'un  de  ces  chiffres  ne  peut  être  le  dernier  chiffre  d'un 
^nombre  triangulaire. 


cJl^^e^ 


J 


L'Arithmétique  en  boules. 


OQ 


LES    NOMBRES    HEXAGONAUX. 


La  Jîg'.  2-  représente  le  cinquième  nombre  hexagonal  ;  il  est 
formé  en  plaçant  des  boules  à  égale  distance  sur  les  contours  suc- 


Fig.  27. 


Le  cinquième  hexagonal. 

cessifs  d'hexagones  réguliers  ayant  pour  sommets  communs  le 
sommet  A,  et  dont  les  côtés  sont  respectivement  i,  2,  3,  4;  on 
pourrait  construire  la  Table  des  nombres  hexagonaux  en  rempla- 
çant, dans  la  première  ligne  de  la  Table  des  carrés  ou  des  penta- 
gonaux,  les  nombres  2  ou  les  nombres  3  par  le  nombre  4;  on  peut 
aussi  calculer  directement  un  nombre  hexagonal  de  rang  quel- 
conque en  observant  (/ig'-  27)  que  :  Tout  nombre  hexagonal  est 
égal  à  son  côté  AE  augmenté  de  quatre  fois  le  triangulaire  de 
rang  précédent. 
Si  l'on  réunit  les  boules  blanches  du  triangle  P  à  celles  du  côté 
\,  on  a  encore  cette  proposition  :  Tout  hexagonal  est  la  somme 
triangulaire  de  même  rang  et  du  triple  du  triangulaire  pré- 
ident. 


40 


Deuxième  récréation. 


Mais  le  calcul  de  la  Table  des  nombres  hexagonaux  est  inutile, 
et  les  résultats  se  déduisent  de  la  Table  des  triangulaires,  car  il 
résulte  de  la  proposition  précédente  et  de  la  vue  de  la^^.  28que: 

Fis.  28. 


MA 


Tout  hexagonal  est  un  t7~iangulaire  de  côté  impair  et  récipro- 
quement. 


LES   NOMBRES    POLYGONAUX. 


En  continuant  le  mode  de  construction  des  nombres  pentago- 
naux  et  hexagonaux,  on  apprend  à  construire  tous  les  nombres 
polygonaux.  Pour  cela,  on  figure  un  polygone  régulier  d'un 
nombre  quelconque  de  côtés  en  plaçant  une  boule  à  tous  les  som- 
mets. Si  l'on  joint  un  sommet  déterminé  à  tous  les  autres  et  si 
l'on  place  des  boules  à  une  distance  double,  triple,  quadruple  de 
ce  sommet,  on  obtient  des  sommets  de  polygones  de  côtés  doubles, 
triples,  quadruples.  Puis  l'on  place  sur  les  côtés  de  ces  polygones 
des  boules  dont  la  distance  est  toujours  égale  au  côté  du  polygone 


L'Arithmétique  en  boules. 


41 


primitif.  On  a  les  deux  propositions  suivantes  analogues  à  celles 
qui  ont  été  indiquées  plus  haut  : 

Tout  polygonal  est  égal  à  son  rang  augmenté  d'autant  de 
fois  le  triangulaire  précédent  qu'il  y  a  d'unités  dans  son  rang 
diminué  de  deux. 

Tout  polygonal  est  égal  au  triangulaire  de  même  rang 
augmenté  d'autant  de  fois  le  triangulaire  précédent  qu'il  y 
a  d'unités  dans  son  rang  diminué  de  trois. 


Fig.  29. 


vim^ 


A, 


Mi 


Le  nonuple  triangulaire. 

D'ailleurs,  pour  construire  tous  les  polygonaux  dont  le  nombre 
des  côtés  est  donné,  il  suffit  de  remplacer  dans  la  Table  des  carrés 
ou  des  pentagonaux  la  première  ligne  contenant  les  nombres  2 
ou  les  nombres  3,  par  des  nombres  tous  égaux  au  nombre  des 
côtés  diminué  de  deux  unités. 

Nous  donnons  ci-après  la  Table  des  dix  premiers  nombres 
triangulaires,  carrés^  pentagonaux,  hexagonaux,  heptagonaux, 
octogonaux,  nonagonaux  et  décagonaux. 


42 


Deuxième  récréation. 


TABLE  DES  NOMBRES  POLYGONAUX. 


NOMBRE 

1" 

2" 

3» 

4e 

5" 

6' 

7° 

8« 

9- 

10" 

55 

Triangulaire.. 

3 

6 

10 

i5 

21 

28 

36 

45 

Carré  

4 

9 

16 

25 

36 

49 

64 

81 

100 

Pentagonal.. . 

5 

12 

22 

35 

5i 

70 

92 

117 
■i53 

145 

Hexagonal 

6 

i5 

28 

45 

66 

91 

120 

148 

190 

Heptagonal... 

7 

i8 

34 

55 

81 

1 12 

189 

235 

Octogonal 

I 

8 

21 

40 

65 

96 

i33 
i54 

176 



204 

225 

280 

Nonagonal  . . . 

9 

24 

46 

75 

I II 

261 

325 
370 

Décagonal 

lO 

27 

52 

85 

126 

175 

232 

297 

Les  nombres  octogonaux  donnent  lieu  à  la  proposition  sui- 
vante :  Le  triple  plus  un  d'un  octogonal  est  un  carré  dont  le 
côté  est  le  triple  moins  un  du  côté  de  Voctogonal. 

Mais,  pour  démontrer  ce  théorème,  nous  remarquerons  d'abord  | 
que  tout  octogonal  est  égal  au  pentagonal  de  même  rang  aug- 
menté du  triple  du  triangulaire  de  rang  précédent;  cette  propriété 
résulte  de  la  décomposition  d'un  pentagonal  par  une  diagonale 
menée  du  sommet  qui  correspond  à  l'unité.  Cela  posé,  la  fig.  29 
nous  montre  que  :  Le  nonuple  plus  un  dhin  triangulaire  est  un 


I 


L'Arithmétique  en  boules.  43 

triangulaire  dont  le  côté  est  le  triple  plus  un  du  côté  du  pre- 
mier. Si  l'on  superpose  le  côté  A,  A3  de  cette  figure  sur  le  côté 
A  2  A3  de  ]a.  Jig.  26.  en  tenant  compte  de  la  décomposition  de 
l'octogonal  en  un  pentagonal  et  trois  triangulaires" de  rang  précé- 
dent, on  démontre  lavant-dernière  proposition,  car  on  forme  ainsi 
un  losange  dont  le  nombre  des  boules  est  un  carré. 

Par  suite,  un  octogonal  ne  peut  être  terminé  par  l'un  des 

Fig.  3o. 


AV^Î^YA 


Le  double  décagonal. 


chiffres  7,  4,  2,  9;  car,  s'il  en  était  autrement,  son  triple  plus  un 
qui  est  un  carré  serait  terminé  par  2,  3,  7,  8;  ce  que  nous  avons 
reconnu  impossible. 

Les  nombres  décagonaux  donntnl  lieu  à  la  propriété  suivante  : 
Le  double  plus  un  d'un  décagonal  est  un  triangulaire  dont  le 
rang  est  le  quadruple  moins  deux  de  celui  du  décagonal. 

En  effet,  tout  décagonal  vaut  un  triangulaire  de  même  rang 

augmenté  de  sept  triangulaires  de  rang  précédent}  or,  en  ajoutant 

fig.  3o)  l'un  des  triangulaires  ombrés  aux  sept  triangulaires 


44  Deuxième  récréation. 


en  boules  blanches  ou  noires,  on  forme  le  décagonal.  Il  résulte 
de  cette  proposition  qu'un  décagonal  ne  saurait  être  terminé  par 
l'un  des  chiffres  3,  4,  8,  9. 

^^ 

DEUX  PROBLÈMES  DE  FERMAT. 

La  théorie  des  nombres  polygonaux  se  trouve  dans  V Arithmé- 
tique de  Diophante,  et  les  formules  qui  servent  à  les  calculer  sont 
reproduites  dans  la  Géométrie  de  Boèce,  et  dans  un  recueil  en- 
cyclopédique du  xv"  siècle,  ayant  pour  titre  :  Margarita philoso- 
phica.  Cette  théorie  semble  avoir  été  abandonnée  à  cause  de  son 
peu  d'application  pratique  ;  mais  elle  a  occupé  les  plus  grands 
géomètres  et,  en  particulier,  Fermât.  Nous  indiquerons  la  solu- 
tion de  deux  problèmes  fondamentaux;  cette  solution  est  beau- 
coup plus  simple  que  toutes  celles  qui  ont  paru  jusqu'ici  dans 
les  essais  de  restauration  d'un  passage  obscur  de  Diophante.  Ces 
deux  problèmes  sont  les  suivants  :  1°  Etant  donné  un  nombre, 
trouver  de  combien  de  manières  ce  nombre  peut  être  polygo- 
nal; 2°  Trouver  un  nombre  qui  soit  polygonal  autant  de 
fois  qu'on  voudra  et  trouver  le  plus  petit  de  ceux  qui  satis- 
font à  la  question. 

Pour  résoudre  ces  deux  problèmes,  nous  aurons  recours  à  la 
Table  des  nombres  polygonaux  (p.  42),  que  l'on  consulte  comme 
la  Table  de  Pythagore, 

A  l'inspection  de  ce  Tableau,  on  reconnaît  facilement  qu'il 
est  plus  simple  de  le  calculer  par  colonnes,  car,  en  passant  dans 
chacune  d'elles  d'une  ligne  à  la  suivante,  tous  les  nombres  aug- 
mentent d'une  même  quantité,  à  savoir  le  triangulaire  de  la  co- 
lonne précédente.  Par  suite,  pour  savoir  de  combien  de  manières 


L'A  j-ithmétiqiie  en  bdtous.  45 

un  nombre  donné  est  polygonal,  il  suttii  de  le  diviser  par  les 
triangulaires  successifs  en  ne  conservant  que  les  divisions  dans 
lesquelles  le  reste  représente  le  triangulaire  qui  précède  le  divi- 
seur. Le  second  problème  se  ramène  de  même  à  déterminer  un 
nombre  qui,  divisé  par  des  nombres  donnés,  fournisse  des  restes 
donnés;  la  solution  en  est  connue. 


LA  TABLE  DES  QUARTS  DE  CARRES, 

Les  Tables  des  carrés  et  des  Quarts  de  carrés  sont  fort 
importantes  pour  les  calculs  exacts  de  l'Arithmétique  théorique 
et  de  l'Arithmétique  pratique.  Dans  la  pratique,  on  trouve  un 
procédé  rapide  de  calcul  qui  remplace,  comme  dans  le  système 
des  logarithmes,  la  multiplication  par  une  addition.  Dans  la 
théorie,  on  trouve  un  procédé  plus  rapide  encore  pour  la  décom- 
position des  grands  nombres  en  facteurs  premiers;  ce  procédé 
fort  expéditif  était  connu  de  Fermât. 

En  1690,  Ludolf  publiait  une  Table  des  carrés  des  cent  mille 
premiers  nombres  et  expliquait,  dans  son  introduction,  que  cette 
Table  pouvait  donner  les  produits  de  deux  nombres  a  et  b  par  la 
formule  des  quarts  de  carrés 

ab  =  -'a-hb]-'  —  -{a  —  bY-; 
4  '  4  ■ 

on  a  donc  pour  la  multiplication  une  Table  à  simple  entrée, 
tandis  que  celle  de  Pythagore  est  à  double  entrée.  La  première 
Table  des  quarts  de  carrés,  que  l'on  construit  comme  celle  des 
carrés,  par  additions  successives,  a  été  publiée  par  Voisin,  sous 


46  Deuxième  récréation. 


le  titre  :  Tables  des  multiplications,  ou  logarithmes  des  nombres 
entiers  depuis  i  jusqu'à  20000,  au  moyen  desquelles  on  peut 
multiplier  tous  les  nombres  qui  n  excèdent  pas  20000  (Paris, 
.1817).  Par  le  mot  logarithme,  Voisin  entend  un  quart  de  carré, 

et  ainsi -a^  est  le  logarithme  de  a;  par  suite,  la  formule  précé- 

4 

dente  s'énonce  ainsi  : 

Le  logarithme  d'un  produit  est  égal  à  la  différence  des  loga- 
rithmes de  la  somme  et  de  la  différence  des  facteurs. 

Il  existe  une  Table  des  quarts  de  carrés  jusqu'à  100  000,  publiée 
par  Laundy,  en  Angleterre,  et  une  Table  manuscrite  jusqu'à 
200000  par  le  général  Shortrede  (^), 

Sylvester  a  donné,  dans  le  Philosophical  Magasine  de  1854, 
la  généralisation  de  la  formule  des  quarts  de  carrés  en  exprimant 
le  produit  de  n  quantités  par  une  somme  de  puissances  d'expo- 
sant 71. 

Lorsque  la  somme  {a-\-b)  des  deux  facteurs  à  multiplier  dé- 
passe les  limites  de  la  Table,  on  peut  encore  effectuer  le  produit, 
lorsque  les  facteurs  a  et  b  sont  contenus  dans  la  Table,  par  la 
formule 


ab 


4r'^î''-i"'-"^]' 


mais  alors  il  faut  entrer  trois  fois  dans  la  Table,  et  doubler  ensuite 
le  résultat. 

Nous  terminerons  cette  Récréation  en  indiquant  quelques  exer- 
cices de  calcul  qui  se  rapportent  à  notre  sujet. 

(')  J.-W.-L.  Glaisher.    On  multiplication  by  a  table  of  single  entry. 
{Philos.  Mag.,  nov.  1878J. 


L'Arithmétique  en  boules.  47 

Exercice  i.  —  Le  chiffre  des  dizaines  d'un  carré  terminé  par  i  ou  par  9 
est  un  nombre  pair. 

Le  chiffra  des  dizaines  d'un  carré  terminé  par  5  est  2. 

Le  chiffre  des  dizaines  d'un  carré  terminé  par  4  est  un  nombre  pair. 

Le  chiffre  des  dizaines  d'un  carré  terminé  par  6  est  un  nombre  impair. 

Un  nombre  n'est  pas  un  carré  parfait,  si  l'ensemble  de  ses  deux  derniers 
chiffres  n'est  pas  l'un  des  vingt-deux  nombres 

00;     01,  2  1,  41,  61,  81  ;    09,  29,  49,  69,  89; 
25;    04,  24,  44,  64,  84;     16,  36,  56,  76,  96. 

Exercice  2.  —  Etendre  les  résultats  précédents  à  un  système  quelconque 
,e  numération,  et  en  particulier  au  système  duodécimal. 

Combien  y  a-t-il  de  nombres  de  deux,  trois,  ...  chiffres  qui  terminent 
les  carrés  des  nombres  écrits  dans  un  système  de  numération  de  base 

donnée  r 

Exercice  3. —  Toute  somme  de  deux  carrés  a  un  nombre  pair  de  dizaines. 
si  elle  est  terminée  par  i,  par  5  ou  par  9,  et  un  nombre  impair,  si  elle  est 
terminée  par  3  ou  par  7. 

Lorsqu'un  carré  est  terminé  par  i  ou  par  9,  la  moitié  du  nombre  de  ses 
dizaines  est  de  même  parité  que  le  nombre  des  centaines. 

Exercice  4.  —  Le  carré  d'un  nombre  terminé  par  8212  890  625  se  ter- 
mine de  la  même  façon,  ainsi  que  toutes  ses  puissances;  et  il  n'y  a  qu'un 
seul  autre  nombre  de  dix  chiffres,  en  exceptant  dix  zéros  ou  neuf  zéros 
suivis  de  un,  qui  possède  la  même  propriété  :  c'est  le  nombre  i  787  109  376. 

Les  nombres  de  dix  chiffres  du  système  de  base  six,  dont  toutes  les  puis- 
sances se  terminent  par  les  mêmes  dix  chiffres,  sont 

3  22i35o2i3      et      2334205344. 

De  même,  dans  le  système  duodécimal  où  l'on  désigne  dix  par  a  et  onze 
par  b,  ce  sont  les  nombres 

2  166  103  854      et      9  a o5  a 08  369 

Exercice  5.  —  Trouver  les  «  derniers  chiffres  d'un  nombre,  connaissant 
les  n  derniers  chiffres  de  son  carré. 
Par  exemple,  si    les  n   derniers   chiffres  du  carré   d'un   nombre  sont 


48  Deuxième  récréation. 


224  466  889,  les  neuf  derniers  chiffres  de  ce  nombre  sont  parmi  les  sui- 
vants : 

265  8ioo83,    765  8ioo83,    363  466  333,    863  466  333, 
734  189  917,    234  189  917,    636  533  667,     i36  533  667. 

PZxERCicE  6.  —  Connaissant  le  produit  d'un  nombre  par  le  nombre  ren- 
versé, retrouver  les  facteurs  du  produit. 

Exercice  7.  —  Former  les  puissances  successives  de  2.  —  En  doublant 
continuellement,  on  forme  la  suite  des  nombres 

2,  4,  8,  16,  32,  64,  128,  256,  5i2,  1024 

On  vérifie  les  calculs  par  les  résultats  suivants  : 

2"  =  65  536 

2"  =  42  949    67  296 

2"=  18446    74407    37095    5i6i6. 

La  puissance  de  2  d'exposant  196,  égale  à  seize  fois  le  cube  de  la  précé- 
dente, se  compose  des  soixante  chiffres  suivants  : 

10043     36277    66186    89222     13726    30771 
32266    26576    37687     1 1  142    45522    o6336. 

La  notation  des  exposants  est  due  à  Nicolas  Chuquet;  on  la  trouve  dans 
son  Ouvrage  intitulé  Triparty  en  la  Science  des  nombres,  écrit  en  1484  et 
publié  pour  la  première  fois  par  M.  Aristide  Marre,  en  1880,  dans  le 
Bullettino  di  Bibliografia  (t.  XIII)  du  prince  B.  Boncompagni, 

Exercice  8.  —  Former  les  puissances  successives  de  5.  —  Le  lecteur  les 
trouvera  dans  l'intéressante  préface  de  la  Table  des  Logarithmes  de  Callet. 
—  Démontrer  que  le  chiffre  des  dizaines  de  mille  d'une  puissance  quelconque 
de  5  ne  peut  être  ni  un  3,  ni  un  8.  (Laisant.  ) 

Exercice  9.  —  On  considère  le  tableau  des  neuf  quantités 

;;»  +  ^' —  ?•=  —  s»,  2{qr-^ps),  2{qs  —  pr), 

2{qr—ps),  p'-^r'  —  q'—s',  2  {rs -h  pq), 

2{qs-t-pr),  2{rs  —  pq),  p' -h  s"  —  q-— r\ 


L'Arithmétique  en  boules.  49 

Vérifier  que  la  somme  des  carrés  des  nombres  contenus  dans  une  même 
iigne  ou  dans  une  même  colonne  est  égale  au  carré  de  p-  -h  q''  ~  r-  -t-  s'. 

Exercice  10.  —  Trouver  quatre  nombres  tels  que  leurs  produits  deux 
à  deux,  augmentés  de  l'unité,  soient  des  carrés.  (Diophante,  Liv.  I\', 
Prob.  XXI.)  —  Si  l'on  pose 

a  =  r, 

b  =  s  (  r5  -!-  2  ), 

c  =  {5 -T-  I  )  (rs  -H  r -j- 2  ), 

rf  =  4(r5  4-  I)  {r5-+-  r-H  1)  (rs' +  r5  +  2S  -1-  i  ). 

les  carrés  des  six  expressions 

«  +  I, 

rs  -r-  r  -T-  I , 

2  y- s-  -+-  2  r'5  -T-  ^rs  +  2r  -i-  i, 

rs'  -^  rs  -^  z  s  -\-  i, 

ir^s'  -^  2  r's'  4-  6rs^  -\-  ^rs  -:-  4s  -+-  :, 

2r^s'  -7-4;-' 5'  -T-  6rs"  -r-  11'' s  —  8 rs  -4-  45  4-  2  r  -h  3 

S'jnt  respectivement  égaux  aux  six  quantités 


ab  -^-  i. 

ac  -^  i. 

<ii+  I, 

bc  -¥■  I, 

bd^  I, 

cd  +  i. 

fr 


E.  Lucas.  —  Récréations  mathém..  IV. 


TROISIÈME    RÉCRÉATION. 


L  ARITHMÉTIQ_UE  EN  BATONS. 


Monsieur  Léon  Rodet,  ancien  élève  de  F  École  Polytechnique, 
Ingénieur  des  Manufactures  de  l'État. 


«  Les  questions  aisées  doivent  être  traitées  par  des 
moyens  également  faciles  ;  il  faut  réserver  l'analyse 
savante  pour  les  questions  qui  exigent  les  grands 
moyens  et  il  ne  faut  pas  ressembler  à  ce  personnage  de 
la  Fable,  qui,  pour  se  délivrer  d'une  puce,  voulait  em- 
prunter à  Jupiter  sa  foudre  ou  à  Hercule  sa  massue.  » 

{  ÛELAMBRE.  } 


TROISIEME     RECREATION. 


L'ARITHMÉTIQUE  EN   BATONS. 


DANS    L  INDE,    AU    TEMPS    DE    CLOVIS. 

AYANT  rendu  hommage  à  Brahma,  à  la  Terre,  à  la  Lune, 
à  Mercure,  à  Vénus,  au  Soleil,  à  Mars,  à  Jupiter,  à 
Saturne,  et  aux  Constellations,  Aryabhata,  en  la  Cité 
des  fleurs,  expose  la  science  très  vénérable. 

Les  lignes  qui  précèdent  sont,  d'après  M.  Léon  Rodet  ('),  in- 
génieur des  Manufactures  de  l'État,  la  traduction  du  premier 
distique  àts  Leçons  de  Calcul  d' Aryabhata,  mathématicien,  né  en 
l'année  475  ou  476  de  notre  ère,  qui  enseignait  l'Arithmétique  et 
l'Astronomie  de  5oo  à  55o,  à  Pâtaliputra,  l'antique  capitale  des 
premiers  monarques  historiques  de  l'Inde.  Ces  leçons  se  com- 
posent de  diverses  règles  de  calcul  condensées  dans  trente-trois 
distiques  qui  forment  pour  ainsi  dire  le  programme  de  son  cours. 
En  particulier,  les  distiques  XXI  et  XXII  contiennent  les  règles 
que  l'on  démontre  actuellement  dans  les  cours  de  Mathématiques 

')  Leçons  de  Calcul  a" Aryabhata,  par  M.  Léon  Rodet,  (Extrait  du 
Journal  Asiatique).  Paris,  Imprimerie  nationale;  1879. 


54  Troisième  récréation. 

pour  la  préparation  à  nos  Ecoles  du  gouvernement  et  dont  on  se 
sert  couramment  dans  les  arsenaux  pour  calculer  le  nombre  des 
boulets  d'une  pile  à  base  triangulaire  ou  à  base  carrée.  De  plus, 
le  second  vers  du  distique  XXI I  est  traduit  ainsi  :  Le  carré  de 
la  pile  des  nombres  simples  est  le  volume  de  la  pile  des  cubes. 
L'Ouvrage  en  question  ne  contient  aucune  méthode,  aucune 
démonstration ,  aucun  indice  permettant  de  faire  une  restauration  ; 
mais  nous  devons  dire  que  l'on  trouve  deux  démonstrations  de 
cette  dernière  proposition  dans  un  Ouvrage  de  la  fin  du  dixième 
siècle  ( '). 

LK   FAKHUÎ    d'aLKARKHÎ, 

Il  est  intitulé  :  Al  Fakhrî,  traité  d'Algèbre  composé  par  Aboû 
Beqr  Mohammed  ben  Alhaçan,  surnommé  Alkarkhî,  le  Calcula- 
teur; il  est  dédié  à  Aboû  Ghâlib  Mohammed  ben  Khalaf,  sur- 
nommé Fakhr  Almoulq,  la  Gloire  du  gouvernement,  vizir  de 
Behâ  Aldaoulah,  qui  mourut  le  3  septembre  1016  de  notre  ère. 
Le  manuscrit  qui  contient  le  Fakhrî,  et  coté  953  au  supplément 
arabe  de  la  Bibliothèque  nationale,  a  été  traduit  par  Wœpcke; 
il  se  termine  ainsi  :  «  J'ai  exclu  de  mon  présent  ouvrage  ce  qui 
ne  s'y  rapporte  pas.  J'avais  désiré  y  ajouter  quelque  chose  en  fait 
des  particularités  des  figures,  du  cercle  et  des  testaments.  Mais 
je  ne  l'ai  pas  fait  pour  deux  raisons  dont  l'une  est  mon  aversion 
pour  la  prolixité;  la  seconde  est  que  j'ai  déjà  composé  sur  chacun 

(')  D'autre  part,  M.  Maurice  Cantor,  professeur  à  l'Université  de  Heidel- 
berg,  a  récemment  retrouvé  cette  formule  de  la  sommation  des  cubes  dans 
rOu'/rage  d'Epaphroditus,  qui  devait  vivre  sous  l'Empire  romain,  et  peut-être 
au  temps  de  Trajan  (die  rômischen  Agrimensoren,  p.  117.  Leipzig,  1875  j. 


L'Arithmétique  en  bâtons.  35 

de  ces  sujets  un  ouvrage  étendu  embrassant  leurs  théories  exactes, 
et  la  solution  des  problèmes  les  plus  subtils  avec  leur  méthode. 
Louanges  sans  bornes  et  sans  fin  à  Celui  qui  donne  l'intelligence 
et  qui  nous  délivre  de  l'erreur!  Que  sa  bénédiction  soit  sur  notre 
Seigneur,  Mohammed,  le  prophète,  son  élu  parmi  ses  créatures, 
et  sur  sa  famille  et  ses  compagnons  les  purs,  les  saints! 
)i  Ceci  fut  écrit  et  achevé  par  Sâliq  le  Pauvre.  Fin.  » 
L'étude  de  la  figure  renfermée  dans  ce  manuscrit  nous  a  per- 
mis de  perfectionner  la  démonstration  et  de  retrouver  des  procé- 
dés probablement  fort  analogues  à  ceux  dont  se  sont  servis  les 
anciens  pour  obtenir  les  règles  du  calcul  concernant  le  volume 
des  pyramides. 

®® 

LES    NOMBRES    EN    B.\GUETrES, 

Prenons  des  règles  d'écolier,  de  même  grosseur,  et  supposons, 
pour  fixer  les  idées,  que  la  largeur  et  l'épaisseur  aient  un  centi- 

■t  Les  nombres  simples. 

^Bètre  ;  portons  successivement  sur  une  règle  des  longueurs  égales 
W.,  .,  3,  4,  5,  ...  centimètres  et,  par  quelques  traits  de  scie, 
coupons  cette  règle  en  petits  morceaux;  nous  figurons  ainsi  les 
premiers  nombres  par  ce  que  l'on  appelle  des  parallélépipèdes 
rectangles  [fig.  3i )  ;  l'addition  de  plusieurs  nombres  se  fait  en 
les  plaçant  bout  à  bout,  et  l'on  peut  ainsi  expliquer  aux  enfants 
les  diverses  propriétés  de  l'addition. 


56  Troisième  récréation. 


Prenons  maintenant  deux  règles  de  même  longueur,  plaçons- 
les  à  côté  l'une  de  l'autre  et  avec  de  la  colle  forte  réunissons-les, 
comme  ferait  un  ébéniste,  de  manière  à  former  une  règle  plate 
dont  la  largeur  est  double  de  la  hauteur;  portons  encore  sur  cette 
règle  des  longueurs  égales  à  i,  2,  3,4,  ...  centimètres,  et,  par  quel- 

Fig.  32. 


wm^^ 


Les  nombres  doubles. 


ques  traits  de  scie,  coupons  cette  règle  en  petits  morceaux  ;  nous 
figurons  ainsi  les  nombres  doubles  2,  4,  6,  8,  ...  {fig.  32). 
Avec  trois  règles  accolées  et  découpées  comme  nous  l'avons 

Fig.  33. 


Les  nombres  triples. 

fait  précédemment,  nous  représentons  les  nombres  triples  3,  6, 
9,  12,  ...  [fig.  33). 

Et  en  accolant  4,  5,6,  7,  8,  9,  10  règles  et  découpant  comme 
précédemment  nous   représenterons  les    nombres  quadruples, 

Fig.  34. 


Les  nombres  quadruples. 

quintuples,  sextuples,  septuples,  octuples,  nonuples  et  décuples 

{fis-  H)- 


i 


L'Arithmétique  en  bâtons. 


57 


TABLE  DE  MULTIPLICATION  DES  ARABES. 

Par  conséquent,  nous  représentons  ainsi  les  produits  des  nom- 
bres I,  2,  3,  4,  5.  ...  respectivement  par  i,  2,  3,  4,  5,  ... ,  c'est- 
à-dire  que  nous  formons  la  Table  de  Pythagore.  En  effet,  réunis- 
sons bout  à  bout  les  nombres  simples;  plaçons  à  côté  les  nombres 
doubles,  et  ainsi  de  suite,  nous  obtenons  pour  les  quatre  premiers 
nombres  la  Jîg.  35  ;  c'est  la  Table  de  Pythagore  rendue  maté- 
rielle; mais  nous  pouvons  aussi  la  disséquer,  et  pour  ainsi  dire 
en  disloquer  tous  le  éléments.  Par  suite,  en  combinant  et  en 
assemblant  tous  les  morceaux  de  diverses  manières,  nous  pouvons 
obtenir  les  démonstrations  d'un  très  grand  nombre  de  théorèmes 
d'Arithmétique  élémentaire. 

Au  lieu  de  se  servir  de  règles  d'écolier,  on  peut  découper  une 


Fig.  35. 


La  Table  de  Pythagore  en  briquettes. 

lanchette  dont  l'épaisseur  est  égale  au  côté  du  petit  carré  A 
fig.  35),  par  des  traits  de  scie  représentés  par  les  lignes  de  l'in- 
rieur  du  carré.  Cette  figure  est,  avec  quelques  différences  peu 
)tables,  la  reproduction  de  celle  dont  nous  avons  parlé  plus 
lut  et  que  l'on  trouve  dans  le  Fakhrî  d'Alkarkhî  [fig.  36).  M.  le 
)lonel  Laussedat  a  fait  construire,  sur  nos  indications,  une  Table 


58 


Troisième  récréation. 


de  cette  nature,   pour  les  démonstrations  des  cours  publics  et 

Fig.  36. 


5 

10 

15 

20 

25 

4 

8 

n 

16 

20 

3 

6 

9 

12 

15 

2 

it 

G 

0         1           10 

1 

2 

3                 /,          1             5            1 

Tirée  du  Fakhrî. 

que  l'on  trouvera  dans  les  galeries  du  Conservatoire  des  Arts  et 
Métiers. 


LES    NOMBRES    PYRAMIDAUX  A    BASE    TRIANGULAIRE. 

Avec  les  nombres  simples  de  la  première  ligne  de  la  Table  de 

Fig.  37. 


Le  sixième  triangulaire. 

multiplication,  on  peut  représenter  un  nombre  triangulaire; 
ainsi  l^fig.  "ij  représente  le  sixième  triangulaire;  on  peut  dé- 
montrer encore  que  le  double  d'un  triangulaire  [fig.  38)  est  égal 


L'Arithmétique  en  bâtons.  5q 

à  son  rang  multiplié  par  le  nombre  suivant.  Mais  l'emploi  de 
nos  briquettes  nous  permet  d'obtenir  des  démonstrations  nou- 
velles qu'il  serait  plus  difficile  de  figurer  avec  des  boules.  Nous 
commencerons  par  établir  la  formule  qui  permet  de  calculer  la 
somme  des  triangulaires  à  partir  de  l'unité;  c'est  aussi  le  nombre 
des  boulets  d'une  pile  triangulaire.  En  effet,  une  telle  pile  est 
formée,  à  la  base,  de  boulets  tangents  entre  eux  et  dont  les  cen- 

Fi2.  38. 


Le  double  triangulaire. 

très  sont  aux  sommets  de  triangles  équilatéraux  tous  égaux;  par 
suite,  le  nombre  des  boulets  de  cette  base  est  représenté  par  le 
triangulaire  dont  le  rang  est  égal  au  nombre  des  boulets  sur 
chaque  côté. 

Le  second  étage  est  formé  de  boulets  placés  dans  les  interstices 
des  boulets  de  la  base  inférieure  et  forme  le  triangulaire  pré- 
cédent, et  ainsi  de  suite,  de  telle  sorte  que  l'étage  supérieur  est 
formé  par  un  seul  boulet  représentant  le  premier  triangulaire. 

On  appelle  nombre  pyramidal  triangulaire  le  nombre  égal  à 
la  somme  des  unités  contenues  dans  tous  les  triangulaires  à  partir 
du  premier,  qui  vaut  un,  et  le  rang  du  pyramidal  est  égal  au 
rang  du  dernier  des  triangulaires  dont  on  a  fait  la  somme.  Par 
suite,  il  est  facile  de  construire  la  Table  des  pyramidaux  suc- 
cessifs. 


6o 


Troisième  récréation. 


TABLE    DES    PYRAMIDAUX    TRIANGULAIRES. 

Unités iiii        I        II  I  I  I... 

Entiers 1234567  8  9  10... 

Triangulaires i     3      6     10     i5    21     28  36  45  55     ... 

Pyramidaux i     4     10    20     35     56    84  120  i65  220     ... 

La  ligne  qui  correspond  aux  pyramidaux  se  calcule  par  addi- 
tions successives  en  ajoutant  chaque  pyramidal  au  triangulaire 
placé  au-dessus  et  à  droite  dans  la  colonne  suivante;  ainsi,  par 
exemple,  i65  =  120  +  45.  On  peut  donc,  par  ce  moyen,  conti- 
nuer cette  Table  aussi  loin  qu'on  le  voudra. 

Mais  comment  déterminer  directement,  sans  calculer  tous  les 
précédents,  un  pyramidal  triangulaire  dont  le  rang  est  donné? 
Pour  cela,  nous  commencerons  par  doubler  tous  les  triangulaires, 
en  les  remplaçant  par  des  rectangulaires  [fig.  38);  plaçons-les 
par  étages  successifs,  ainsi  que  nous  l'avons  fait  [fig.  39),  nous 

Fig.  39. 

Z  B 


Le  cinquième  pyramidal. 

obtenons  le  double  pyramidal  qui  se  trouve  ainsi  adossé  à  deux 
des  faces  OZAY  et  OZBX  d'un  parallélépipède  [fig.  41).  Con- 
struisons à  côté  et  dans  une  même  orientation  un  second  double 


L'Arithmétique  en  bâtons. 


6i 


pyramidal  égal  au  précédent;  faisons-le  tourner  d'un  quart  de 
tour  autour  d'une  verticale,  dans  le  sens  XCY,  puis  faisons-le 
basculer  d'un  quart  de  tour  autour  d'une  droite  parallèle  à  CX, 
nous  l'amènerons  sur  le  premier.  La  fig.  40  représente  l'accole- 
ment  de  ces  doubles  pyramidaux;  on  voit  tout  de  suite  que  le 

Fig.  40. 


V  c 

Le  sextuple  pyramidal. 

vide  ZAYC  du  parallélépipède  rectangle  peut  être  rempli  par  un 
troisième  double  pyramidal  identique. 

On  forme  donc  ainsi  une  sorte  de  tas  de  pavés,  dont  il  est  facile 
de  déterminer  le  nombre  des  pavés;  la  hauteur  AY  est  égale  au 
rang  du  pyramidal;  la  largeur  CX  est  égale  à  ce  rang  augmenté 
de  l'unité,  et  la  longueur  ZB  est  égale  à  ce  rang  plus  deux  ;  on  a 
donc  cette  propriété  : 

Le  sextuple  d'un  pyramidal  triangulaire  est  le  produit  de 
trois  nombres  entiers  consécutifs  et  croissants  dont  le  premier 
est  le  rang  du  pyramidal. 

Veut-on,  par  exemple,  obtenir  le  nombre  des  boulets  d'une 
pile  triangulaire  dont  la  base  contient  100  boulets  sur  le  côté  : 
il  suffit  de  prendre  le  j  de  100  x  loi  x  102,  ce  qui  fait 
17 1700  boulets. 


62 


Troisième  récréation. 


La  méthode  géométrique  pour  trouver  le  volume  de  la  pyra- 
mide résulte  [fig.  41  )  de  l'équivalence  des  trois  pyramides  ayant 


Fig.  41. 


Le  parallélépipède. 

pour  sommet  commun  le  point  Z  et  pour  bases  respectives  les 
trois  rectangles  ayant  pour  sommet  commun  le  point  C,  à  savoir 
CXOY,  CXBD,  CDAY. 

f^  ircij 


LES    PYRAMIDAUX    QUADRANGULAIRES. 

Une  pile  de  boulets  à  base  carrée  est  formée,  à  la  base,  de  bou- 
lets tangents  entre  eux  dont  les  centres  sont  aux  sommets  de  carrés 
égaux;  par  suite,  le  nombre  des  boulets  de  cette  base  est  le  carré 
du  côté,  le  second  étage  est  formé  de  boulets  placés  dans  les  in- 
terstices des  boulets  de  la  base  inférieure  et  forme  le  carré  précé- 
dent, et  ainsi  de  suite,  de  telle  sorte  que  l'étage  supérieur  est 
formé  par  un  seul  boulet  représentant  le  premier  carré. 

On  peut  former  la  Table  des  pyramidaux  quadrangulaires 
comme  celle  des  pyramidaux  triangulaires,  en  ajoutant  une  ligne 
à  la  Table  des  carrés  [voir  p.  32  )  ;  mais  si  l'on  veut  calculer  di- 


L'Arithmétique  en  bâtons.  63 

rectement  le  pyramidal  quadrangulaire  de  rang  donné,  il  suffit 
de  se  rappeler  que  tout  carré  est  égal  au  triangulaire  de  même 
rang  augmenté  du  triangulaire  précédent;  par  suite,  on  aura  cette 
proposition  :  Le  pyramidal  quadrangulaire  est  égal  au  pyra- 
midal triangulaire  de  même  rang,  augmenté  du  pyramidal 
triangulaire  de  rang  précédent. 

En  multipliant  par  6  et  en  se  rappelant  la  formule  du  triangu- 
laire, et  en  observant  que  les  parallélépipèdes  qui  représentent 
deux  sextuples  pyramidaux  triangulaires  consécutifs  ont  deux 
dimensions  communes  qui  permettent  de  les  placer  bout  à  bout, 
on  a  cette  nouvelle  proposition  : 

Le  sextuple  d'un  pyramidal  quadrangulaire  est  le  produit  de 
son  rang  par  le  nombre  suivant,  puis  par  le  double  de  son  rang 
plus  un. 

Il  est  facile  d'avoir  des  résultats  analogues  pour  les  pyramides 
polygonales  obtenues  en  étageant  successivement  les  polygonaux 
d'un  même  nombre  de  côtés. 

LES    PILES    DE    BOULETS. 

Dans  les  arsenaux,  les  boulets  sont  rangés  suivant  trois  sortes 
de  piles.  Les  piles  triangulaires  ne  sont  employées  que  rare- 
ment, et  seulement  pour  un  petit  nombre  de  projectiles,  à  cause 
de  l'espace  qu'elles  exigent  ;  lespiles  carrées  ou  quadr angulaires 
sont  aussi  peu  usitées,  et  le  plus  souvent  on  emploie  les  piles 
rectangulaires.  Dans  ces  dernières,  la  base  est  un  rectangle 
allongé;  l'étage  au-dessus  est  formé  de  boulets  en  rectangle  dont 


64  Troisième  récréation. 


les  côtés  sont  plus  petits  d'une  unité  que  les  côtés  du  rectangle  de 
base,  et  ainsi  de  suite,  de  telle  sorte  que  l'étage  supérieur  est  for- 
mé d'une  seule  file  de  boulets. 

Pour  déterminer  le  nombre  des  boulets  de  cette  pile,  on  la  dé- 
compose facilement  en  deux  autres,  une  pile  à  base  carrée,  et 
un  prisme  dont  les  boulets  sont  disposés  comme  dans  la  pile 
d'obus. 

Il  est  facile  de  retenir  les  diverses  formules  qui  servent  à  cal- 
culer les  boulets  des  quatre  piles  que  nous  avons  considérées,  en 
les  condensant  dans  une  formule  simple  qui  s'applique  à  toutes  : 

Le  nombre  des  projectiles  d'une  pile  d'obus,  d'une  pile  trian- 
gulaire, d'une  pile  quadrangulaire  ou  d'une  pile  rectangu- 
laire, est  égal  au  nombre  triangulaire  qui  représente  le  nombre 
des  boulets  d'une  face  triangulaire  par  le  tiers  du  nombre  des 
projectiles  contenus  dans  Vensemble  de  trois  files  parallèles 
partant  des  sommets  de  la  face  considérée. 

En  Géométrie,  on  retrouve  le  théorème  correspondant  pour  le 
volume  du  prisme  triangulaire,  de  la  pyramide  à  base  triangu- 
laire ou  carrée,  et  du  prisme  tronqué.  C'est  encore  un  exemple  de 
l'analogie  des  formules  concernant  simultanément  la  science  des 


nombres  et  la  science  de  l'étendue. 


LA  PILE  DES  CUBES. 


Nous  démontrerons  maintenant  le  théorème  d'Aryabhata,  dont 
il  est  parlé  au  commencement  de  cette  Récréation,  sur  la  pile  des 
cubes.  Reprenons  la  Table  de  Pythagore  [fig.  35)  et  rangeons  les 


I 


U Arithmétique  en  bâtons. 


65 


briquettes  par  étages  successifs,  sur  les  nombres  carrés  de  la  Table 
qui  sont  placés  sur  la  diagonale  AZ.  En  prenant  pour  chaque 
carré  de  base  les  briquettes  placées  à  la  gauche  dans  la  même 
rangée,  et  au-dessous  dans  la  même  colonne,  on  reconnaît  facile- 
lement  que  l'on  forme  ainsi  les  cubes  successifs  de  i,  2,  3,  4,  . . . 


Fig.  42. 


La  pile  des  cubes. 

de  côté  [fig.  42)  ;  mais,  d'autre  part,  le  côté  de  la  Table  renferme 
un  nombre  d'unités  égal  au  triangulaire;  par  suite,  et  en  conser- 
vant la  forme  de  l'énoncé  d'Aryabhata,  la  pile  des  cubes  est  le 
carré  de  la  pile  des  nombres. 


E.  Lucas.  —  Récréations  malhém  ,  IV. 


QUATRIÈME  RÉCRÉATION. 

LE  JEU  DES  MÉRELLES  AU  Xlir  SIÈCLE, 


«  En  Ci  moyen  entra  en  affection  d'icelle  sciencc- 
numérale,  et  tous  les  jours  après  disner  et  souper  y 
passoit  temps  aussi  plaisatatement  qn'il  souloit  es  dec 
ou  es  chartes.  9 

(Rabelais.  —  Gargantua.) 


QUATRIEME   RECREATION. 


LE   JEU  DES  MÉRELLES  AU  XIII*  SIÈCLE. 


L 


A  Bibliothèque  de  l'École  de  Médecine  de  Montpellier 
possède  un  curieux  manuscrit  in-8°  sur  vélin,  qui  a  pour 
titre  Ci: 


Livre  du  jeu  d'Escheis,  tables  et  des  merelles  et  sapelle  le 
dict  Hure  Bacot  imienté  par  Nembrot  qui  fonda  la  tour  de 
Babylone. 

M.  de  Fontenay,  receveur  principal  des  postes  en  retraite,  a 
bien  voulu  nous  adresser  une  copie  de  ce  manuscrit  pour  ce  qui 
concerne  les  parties  de  merelles;  c'est  d'après  ce  travail  que 
nous  présenterons  à  nos  lecteurs  l'un  des  jeux  favoris  de  nos 
ancêtres. 

Ce  manuscrit  du  xiii*  siècle,  sans  nom  d'auteur,  débute  ainsi  : 

(•)  Récréations  mathématiques,  t.  II,  p.  9g. 


70 


Quatrième  récréation. 


Chi    commenche 

H    H  lire  s    de    par 

titres  des  Esches,  et  de 

Tables  et  de  Merelles 

et  se  claime  cis  Hures 

Bakot  et  le  trouva 
Nebron  le  ioiant  qui  Jist  premiers  en  Babylone 
la  tour  qu'on  claime  Babel,  ou  li  langage  furent 
mue  par  la  volente  nostre  Segneur.  qui  vit  lor 
outre  cuidanche.  et  de  la  fu  Bakot  aportés  a 
troie   la  grant.    et   de   troie   en  gresse.    Après 

la    destruction    de 

troie  et  de    gresse 

vint     en    fr anche 

et   encore    i   est. 

GO  00  00  GO  GO 


Ce  volume  contient  206  parties  d'échecs,  48  parties  de  Tables 
{tric-trac)  et  28  parties  de  marelles,  avec  autant  de  figures.  Nous 
ne  nous  occuperons  que  de  ces  dernières  qui  se  rapportent  à  l'une 
des  dispositions  que  nous  avons  appelée  Marelle  triple. 

Elle  est  représentée  dans  la.  Jig.  43  ;  elle  se  compose  de  vingt- 
quatre  cases  réunies  trois  à  trois  par  des  lignes  droites.  Chacun 
des  joueurs  prend  neuf  pions,  les  uns  blancs,  les  autres  noirs,  et 
les  place  alternativement  sur  les  cases.  Quand  tous  les  pions  sont 
posés,  chacun  des  joueurs,  à  tour  de  rôle,  peut  les  faire  glisser 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiu*  siècle. 


7» 


sur  une  case  immédiatement  voisine,  à  la  condition  de  suivre 
l'une  des  lignes  tracées  sur  la  figure.  Le  but  est  de  faire  un  terne, 
c'est-à-dire  d'amener,  soit  en  posant,  soit  en  poussant,  trois  pions 
sur  une  même  ligne  droite.  Lorsque  l'un  des  joueurs  y  parvient, 

Fig.  43. 


18  Q 


Ôl* 


U  12  13 

Notation  de  la  Marelle  triple. 


il  prend  un  pion  à  son  choix  dans  le  jeu  de  son  adversaire  qui 
continue  la  partie  à  son  tour.  Lorsque  l'un  des  joueurs  n'a  plus 
que  quatre  pions,  il  peut  leur  faire  franchir,  sur  une  même  ligne 
droite,  la  station  intermédiaire  inoccupée;  il  peut  aussi,  suivant 
convention,  sauter  sur  une  case  vide  quelconque. 

Nous  donnons  ci-dessous  les  diverses  parties  de  l'auteur. 
Toutes  les  parties  du  manuscrit  sont  figurées  en  deux  couleurs; 
les  pions  (ou  mérelles]  sont  représentés  par  des  signes  différents, 
tels  que  la  Croix,  l'Étoile,  la  Lune  ou  Croissant,  ÏÉcu,  le  Carré, 
la  Ronde,  etc.  C'est  probablement  à  cause  de  ces  dénominations 
diverses  que  les  commentateurs  ont  pensé  que  les  règles  de  ce  jeu 


I 


72  Quatrième  récréation. 


étaient  différentes  des  règles  actuelles;  mais  on  pourra  se  con- 
vaincre qu'il  n'en  est  rien.  Nous  engageons  le  lecteur  à  étudier 
chaque  partie,  la  mérelle  à  la  main,  ainsi  que  je  l'ai  fait  moi- 
même  avec  mon  ami  Delannoy. 

Nous  désignerons  chacune  des  cases  par  deux  chiffres,  le  pre- 
mier chiffre  distingue  par  I,  2,  3,  les  trois  carrés  de  l'extérieur 
à  l'intérieur;  le  second  chiffre  indique  pour  chaque  carré,  de  i  à 
8,  à  partir  d'un  coin,  le  rang  de  chaque  case  sur  le  périmètre  du 
carré,  en  tournant  toujours  dans  le  même  sens.  Avec  un  peu 
d'habitude,  on  peut  retenir  de  mémoire  la  place  et  le  numéro  de 
chacune  des  vingt-quatre  stations. 

Problème  I. — Blancs  :  i\,     i6,     17,     22,     23,     32. 
Noirs  :  25,     27,     34,     36,     38. 

Les  blancs  jouent  en  premier  et,  par  convention,  leur  pion 
1 1  est  seul  mobile,  et  s'il  est  enfermé,  ils  ont  perdu.  —  Partie 
nulle. 

Les  blancs  jouent  11  en  12,  font  terne  et  prennent  36  ;  les  noirs, 
de  38  en  37.  —  Blancs,  de  12  en  i3;  noirs,  de  34  en  35,  sinon 
ils  perdraient  la  partie.  —  Si  les  blancs  revenaient  de  i3  en  12 
pour  former  un  terne,  ils  prendraient  l'un  des  quatre  pions  noirs 
25,  27,  35,  37,  mais  perdraient  la  partie,  attendu  que  les  noirs 
feraient  terne  en  deux  coups;  mais  les  blancs  jouent  i3  en  14. 
Un  joueur  inhabile  pourrait  penser  que  les  noirs  ont  perdu; 
ceux-ci  perdraient,  en  effet,  en  jouant  sur  36,  car  les  blancs 
feraient  terne  de  14  en  i5,  enlèveraient  le  pion  noir  36  et  refor- 
meraient le  même  terne  en  deux  coups;  mais  les  noirs  jouent 
25  en  24.  —  Si  les  blancs  faisaient  terne  de  14  en  i5,  lisseraient 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiii*  siècle.  y'i 

obligés  de  prendre  le  pion  24,  sinon  ils  seraient  enfermés  ;  alors 
les  noirs  feraient  un  terne  en  deux  coups  par  27  en  26  et  36,  et 
gagneraient  la  partie;  mais  les  blancs  reviennent  en  i3.  Pour 
annuler  la  partie,  les  noirs  jouent  24  en  25  et  l'on  retrouve  une 
position  précédente. 

Cependant  si  le  pion  blanc  23  n'existait  pas  au  début  de  la 
partie,  les  noirs  gagneraient.  En  effet,  ils  remplacent  alors  leur 
dernier  coup  par  24  en  14.  Les  blancs,  obligés  de  faire  un  terne, 
prennent  nécessairement  27,  car  autrement  les  noirs  feraient  terne 
en  deux  coups.  —  Les  noirs  jouent  14  en  1 3  et  font  reculer  le 
seul  pion  blanc  mobile  en  i  r,  et  finissent  par  l'enfermer  sur  l'une 
des  cases  du  carré  intérieur.  Mais  cette  tactique  ne  vaudrait  rien 
pour  les  noirs,  si  le  pion  23  existait,  car  les  blancs  viendraient 
taire  un  terne  en  21  en  passant  par  18  et  28. 

Problème  IL — Blancs:  14,     16,     25,     36. 

Noirs  :    II,     i3,     22,     27,     3i,     33. 

Le  trait  aux  blancs;  par  convention,  le  pion  14  ne  peut  être 
déplacé  qu'une  seule  fois.  —  Partie  nulles  si  les  deux  adver- 
saires jouent  correctement. 

Les  blancs  jouent  25  en  26  et  prennent  22;  noirs,  27  en  28. 
—  Blancs,  26  en  25  ;  noirs,  3i  en  32.  —  Blancs,  25  en  26  et 
prennent  32  ;  noirs,  28  en  21. 

Si  les  blancs  jouaient  le  pion  26,  ils  perdraient,  car  le  pion 
noir  33  viendrait  en  32  et,  quelque  pion  que  prissent  les  blancs, 
les  noirs  feraient  ensuite  terne  les  premiers.  Les  blancs  joueront 
donc  j6  en  17,  et  les  noirs  33  en  32.—  Blancs,  i4en  i5,  ce  pion 


Quatrième  récréation. 


ne  pourra  plus  se  mouvoir;  noirs,  21  en  22.  —  Blancs,  26  en  16 
et. prennent  22  ;  noirs,  32  en  22.  —  Blancs,  36  en  26,  sinon  ils 
perdraient;  si  les  noirs  prennent,  ils  ont  perdu;  il  en  est  ds 
même  s'ils  jouent  le  pion  t3.  Ils  joueront  donc  11  en  18.  — 
Blancs,  de  26  sur  une  case  voisine;  noirs,  22  en  12.  Ces  deux 
coups  doivent  être  Joués  indéfiniment.  Celui  des  joueurs  qui 
prendrait  perdrait  la  partie. 

Il  y  a  beaucoup  de  joueurs  qui  font  cette  partie  sans  le  pion 
blanc  14,  et  alors  les  noirs  gagnent. 

Problème  III.  —  Blancs:  35,     36,     38. 

Noirs  :    16,     17,     18,     21,     23,     32. 

Les  blancs  Jouent  et  gagnent. 

Les  blancs  jouent  38  en  87,  font  terne  et  prennent  23  ;  noirs,  de 
16  en  26.  — Blancs,  de  37  à  38;  noirs,  de  22  à  21.—  Les  blancs 
jouent  38  en  37,  font  terne  et  prennent  21 .  —  Puis  les  blancs  font 
la  navette  de  35  à  34  et  de  34  à  35  et  gagnent  la  partie. 

L'auteur  fait  observer  que  «  cette  parture  est  commune  et 
soutive  ».  En  effet,  si  les  blancs  prenaient  un  pion  autre  que 
23  et  21,  ils  perdraient. 

Problème  IV.  —  Blancs  :  35,     36,     38. 

Noirs   .•12,     16,     17,   18,     21,     23. 

La  position  initiale  de  cette  partie  ne  diffère  de  la  pré- 
cédente que  par  le  déplacement  d'un  pion  noir  de  32  en  12. 
—  Les  blancs  jouent  et  perdent. 

Les  blancs  jouent  38  en  37,  font  terne  et  prennent  12  ;  noirs,  de 


I 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiu°  siècle.  70 

20  à  24.  —  Les  blancs  jouent  un  coup  quelconque;  les  noirs,  de 

21  à  22.  —  Les  blancs  font  terne  et  sont  obligés  de  prendre  17, 
sinon  les  noirs  feraient  terne  en  deux  coups  par  11  et  17  ou  i5 
et  17:  noirs,  de  24  à  14.  —  Les  blancs  jouent  un  coup  quel- 
conque; les  noirs  jouent  de  22  à  12  et  occupent  les  milieux  des 
quatre  côtés  12,  14.  16,  18  du  carré  extérieur.' —  Les  blancs  font 
terne,  mais  perdent  la  partie. 

Problème  V.  —  Blancs  :  12,     22,     3i,     33. 
Noirs    :    16,     26,     35,     37. 

Les  noirs  ont  le  trait;  mais  le  pion  35  est  supposé  immo- 
bile. —  Partie  nulle. 

Les  noirs  jouent  de  26  à  36,  font  terne  et  prennent  22  ;  blancs, 
de  12  à  22.  —  Noirs,  de  16  à  26,  sinon  les  blancs  feraient  terne 
et  gagneraient;  blancs,  de  3i  à  38,  car  s'ils  faisaient  terne,  ils 
perdraient  en  deux  coups.  —  Noirs,  de  26  à  une  case  voisine; 
blancs,  de  38  à  3  i  ;  on  retrouve  une  position  précédente  et  la 
partie  est  nulle. 

Si  le  pion  35  était  mobile,  les  noirs  gagneraient  la  partie. 

Problème  VI.  —  Blancs  :  12,     22,     3i,     32,     33, 
Noirs    :    16,     26,     35,     36,     37. 

Les  noirs  ont  le  trait;  mais  le  pion  35  est  supposé  immo- 
bile. —  Partie  nulle. 

Les  noirs  jouent  de  26  à  25;  les  blancs,  de  22  à  23.  —  Les 


yô  Quatrième  récréation. 


noirs,  de  25  à  26,  font  terne  et  prennent  23;  blancs,  de  32  à  22. 
—  Noirs,  coup  quelconque;  les  blancs,  de  22  à  32,  font  terne 
et  prennent  un  pion  noir  autre  que  35.  —  On  est  ramené  à  la 
partie  précédente. 

Problème  VII.  —  Blancs  ;  3i,     32,     33. 

Noirs   :    16,     25,     26,     27,     36,     37. 

Par  conve?2tion,  la  partie  est  gagnée  par  le  joueur  qui  fait 
terne  le  premier,  et  les  blancs  et  les  noirs  peuvent  sauter  sur 
une  case  vide  quelconque.  —  Les  blancs  jouent  et  gagnent. 

Les  blancs  jouent  de  3i  en  35;  les  noirs,  en  34  ou  3i. —  Les 
blancs  de  35  en  3 1  ou  34  font  terne,  et  par  conséquent,  gagnent. 

«  Cette  partie  est  de  peu  de  valeur,  dit  l'auteur;  toutefois,  elle 
pourrait  bien,  par  hasard,  valoir  contre  quelques-uns.  » 

Problème  VIII.   —  Blancs  .12,     21,     22,     23,     32. 
Noirs    :    16,     25,     27,     36. 

Les  noirs  ont  le  trait  et  perdent  la  partie,  même  en  suppo- 
sant que  les  pions  blancs  21  et  28  sont  immobiles. 

Noirs,  de  16  en  26,  font  terne  et  prennent  22  ;  blancs,  de  1 2  ou 
de  32  en  22  et  prennent  16.  —  Noirs,  de  36  en  26,  font  terne  et 
ont  perdu,  quel  que  soit  le  pion  qu'ils  prennent. 

Problème  IX.  —  Mêmes  positions  que  dans  la  partie  pré- 
cédente; les  pions  blancs  12  et  82  sont  immobiles.  Les  noirs 
ont  le  trait  et  gagnent. 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiii*  siècle.  77 

Noirs,  de  2  5  en  24;  blancs,  de  21  à  28.  —  Noirs,  de  27  à  26, 
font  terne  et  prennent  23  ;  blancs,  de  28  à  21  ou  de  22  à  23.  —  Dans 
le  premier  cas,  noirs  de  24  à  2  3,  et  gagnent  la  partie.  Dans  le 
second  cas,  noirs  de  26  à  27;  les  blancs  font  terne  et  prennent 
l'un  des  quatre  pions  noirs,  ou  bien  jouent  de  28  à  21,  —  Noirs 
font  terne,  prennent  l'un  des  pions  blancs  immobiles  et  gagnent 
la  partie. 

Problème  X.  —  Blancs  :   11,     22,     32. 

Noirs   :    i5,     16,     17,     26. 

Les  pions  noirs  i5  et  17  sont  supposés  immobiles.  Les  blancs 
ont  le  trait  et  gagnent  la  partie. 

Si  les  blancs  faisaient  terne  avec  le  pion  11,  ils  perdraient, 
quelque  pion  qu'ils  prissent.  Ils  joueront  de  22  à  21  ;  noirs,  de 
26  à  36.  —  Blancs,  de  1 1  à  1 2  ;  noirs,  de  36  à  26. 

Les  noirs  sont  obligés  de  jouer  indéfiniment  ces  deux  mêmes 
coups,  sinon  ils  perdraient  immédiatement.  Les  blancs  jouent 
successivement  de  32  à  22,  de  22  à  23,  de  21  à  28,  de  12  à  22, 
de  28  à  27,  de  27  à  26;  ils  finissent  par  enfermer  le  pion  noir  16, 
ils  font  terne  et  gagnent  la  partie. 

Problème  XI.  —  Blancs  :  12,     22,     3i,     33. 

Noirs    :    16,     25,     26,     27,     36. 

^"-  Les  blancs  ont  le  trait.  Les  noirs  gagnent  la  partie,  même 
en  supposant  que  leurs  pions  25  et  2  j  sont  immobiles. 

Blancs,  de  22  a  32,  font  terne  et  prennent  26;  noirs,  de  16  à  17. 


yS  Quatrième  récréation. 


Quel  que  soit  alors  le  coup  joué  par  les  blancs,  les  noirs  font 
terne  en  portant  36  en  26  et  prennent  un  pion  tel  qu'ils  puissent, 
sans  remuer  26,  ramener  17  en  16  au  moment  où  les  blancs  sont 
sur  le  point  de  faire  terne.  Quel  que  soit  le  pion  que  prennent 
alors  ces  derniers,  ils  perdent  la  partie. 

Si,  au  début,  les  blancs  avaient  joué  de  3i  à  32  et  pris  26,  les 
noirs  auraient  fait  terne  et  pris  3i.  Les  blancs  auraient  fait  terne 
de  nouveau,  pris  un  pion  quelconque  et  perdu  la  partie. 

Problème  XII.   —  Blancs  ;   12,     21,     23,     32. 

Noirs   :    16,     25,     26,    27,     36. 

Le  joueur  qui  a  le  trait  perd  la  partie. 

L'auteur  engage  à  dire  à  l'adversaire  :  a  Choisis  la  couleur  que 
tu  veux  et  joue  le  premier,  ou  bien  laisse-moi  choisir  et  jouer 
(bien  qu'on  ne  désire  pas  qu'il  accepte  cette  dernière  offre);  il 
choisira  plus  hardiment  et  perdra  la  partie,  comme  tu  peux  le 
voir  par  toi-même.  » 

Problème  XIII.  —  Blancs  ;   12,     21,     22,     32. 

Noirs   :   3i,     33,     34,     36,     38. 

Comme  dans  le  problème  précédent,  le  joueur  qui  a' le  trait 
perd  la  partie;  il  est  facile  de  le  vérifier. 

Problème  XIV.  —  Blancs  :   12,     21,     23,     32. 

Noirs    :    26,     3i,     33,     34,     36,     38. 

Les  blancs  ont  le  trait  et  gagnent  la  partie. 


i 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiii*  siècle.  79 


Les  blancs,  de  21  à  22,  font  terne  et  prennent  26.  On  retombe 
sur  la  partie  précédente,  et  les  noirs  perdent  parce  qu'ils  sont 
forcés  de  jouer  les  premiers. 

Les  blancs  auraient  perdu  s'ils  avaient  pris  36,  caries  noirs  au- 
raient joué  26  en  36.  Les  blancs  auraient  été  obligés  de  ramener 
22  en  21  ;  les  noirs  auraient  fait  terne,  pris  32  et  gagné  la  partie. 

Problème  XV.   —  Blancs  :  21,     22,     23. 

Noirs    .-15,     16,     17,    26,    27,     36. 

Les  pions  peuvent  sauter  oii  ils  veulent,  et  le  joueur  qui  fait 
terne  le  premier  gagne  la  partie.  Les  blancs  ont  le  trait  et 
gagnent. 

Blancs  jouent  de  21  à  25  et  font  forcément  terne  au  coup  sui- 
vant. 

Ce  problème  ne  diffère  du  septième  que  par  la  position  des 
pions.  La  solution  est  la  même  dans  les  deux  cas. 

Problème  XVI.  —  Blancs:    11,     12,     18,     26,     35,     36. 
Noirs    :    14,     25,     34. 

Les  noirs  ont  le  trait  et  perdent  la  partie. 

Noirs,  de  25  à  24,  font  terne  et  prennent  26;  blancs, de  12  à  i3. 
—  Noirs,  de  24  à  25  ;  blancs,  de  36  à  26.  —  Noirs,  de  25  à  24, 
font  terne  et  prennent  1 1  ou  18;  blancs,  de  26  à  2  5.  —  Les  noirs 
jouent  un  pion  quelconque;  les  blancs  prennent  la  case  aban- 
donnée par  les  noirs,  assemblent  leurs  pions,  font  terne  et  ga- 
gnent la  partie. 


8o  Quatrième  récréation. 


Problème  XVII.  —  Blancs  :    ii,     12,     i3,     32,     28. 
Noirs    :    14,     17,     26,     36. 

1-65  noirs  ont  le  trait.  —  Partie  nulle. 

Noirs,  de  14  à  24;  blancs,  de  28  à  27.  —  Noirs,  de  24  à  2  i  ; 
blancs,  de  27  à  28,  et  ainsi  indéfiniment. 

Le  joueur  qui  joue  autrement  perd  la  partie.  Si,  par  exemple, 
les  blancs  jouaient  de  28  à  21,  les  noirs  joueraient  de  24  à  25, 
puis  feraient  terne  et  gagneraient  en  prenant  convenablement, 
a  Étudie  cette  partie  par  toi-même,  dit  Tauteur,  car  elle  est  forte 
et  belle.  »  Elle  présente,  en  effet,  un  grand  nombre  de  combinai- 
sons, quand  l'un  des  joueurs  cesse  de  jouer  les  deux  coups  pri- 
mitifs, et  la  moindre  faute  suffira  pour  faire  perdre  le  joueur  qui 
aurait  dû  gagner. 

Problème  XVIII. — Blancs  :  12,     14,     16,     18,     36. 
Noirs  :  21,     22,     32,     34. 

Les  noirs  ont  le  trait.  —  Partie  nulle. 

Noirs, de  32  en  33;  blancs, de  36  en  35.  Si  les  noirs  retournent 
à  leur  place  primitive,  les  blancs  font  de  même,  et  ainsi  de  suite 
indéfiniment. 

Si  les  blancs  avaient  joué  de  36  à  37, les  noirs  joueraient  34  en 
35.  —  Les  blancs  n'auraient  rien  de  mieux  à  faire  que  de  rame- 
ner 35  en  34.  Les  noirs  feraient  terne  et  gagneraient  la  partie. 

La  position  des  pions  doit  être  erronée.  Nous  ne  nous  expli- 
quons pas  la  manière  de  jouer  indiquée  par  l'auteur.   Il  nous] 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiii*  siècle.  8 1 

semble  que  les  blancs  auraient  dû  faire  terne  en  deux  coups  sur 
une  des  lignes  extérieures  et  auraient  gagné  la  partie. 

Problème  XIX.  —  Blancs  :  12,     21,     23,     32. 

I^oirs  :    li,     i3,     i5,     17,     26,     3i,     26. 

Les  blancs  ont  le  trait  et  gagnent  la  partie. 

Il  laut  pour  cela  que,  après  avoir  fait  terne  avec  1 3,  ils  prennent 
[5  ou  17. 

Si  les  blancs  prenaient  26,  les  noirs  gagneraient,  car  ils  joue- 
raient 36  en  26;  les  blancs  reviendraient  de  32  à  33.  Les  noirs 
feraient  terne  et  prendraient  1 2  ;  les  blancs  feraient  terne  en  allant 
de  32  à  22  et  prendraient  16.  Alors  les  noirs  iraient  de  i5  à  14, 
puis  de  3 1  à  38  et  gagneraient  en  deux  coups,  quel  que  fût  le  pion 
pris  par  les  blancs. 

Problème  XX. — Blancs  :  ii^     14,     22,     23,     32,     34. 
Noirs  :   16,     25,     27,     36. 

Les  noirs  ont  le  trait  et  perdent  la  partie. 

Noirs, de  27  a  26,  font  terne  et  prennent  23;  blancs, de  34  à  33. 
Noirs,  de  26  à  27;  blancs,  de  14  à  i3. 
[Noirs,  de  27  à  26,  font  terne,  prennent  un  pion  quelconque  et 
perdent  la  partie. 

Problème  XXI. — Blancs  :  iZ^     14,     16,     26,     36. 

Noirs:    11,   12,  21,  22,  23,  3i,  32,  33. 

Les  blancs  ont  le  trait  et  gagnent  la  partie. 

E.  Lucas.  —  Récréations  mathém.,  IV.  6 


^3  Quatrième  récréation. 


Blancs,  de  i6  à  i5,  font  terne  et  prennent  1 1  ;  noirs,  de  12  à  1 1. 
—  Blancs,  de  i3  à  12;  noirs,  un  coup  quelconque.  Les  blancs 
ramènent  12  en  i3,  font  terne  et  prennent  un  pion  tel  que  les 
noirs  ne  puissent  faire  terne  en  un  coup;  noirs,  un  pion  quel- 
conque. Blancs,  de  i5  à  16,  font  terne,  prennent  un  pion  conve- 
nable et  finissent  par  gagner  en  prenant  un  pion  à  chaque  coup. 

Si,  au  commencement,  il  y  avait  eu  un  pion  blanc  en  i5  au 
lieu  de  16,  les  blancs  auraient  perdu. 

Problème:  XXII.  —  Blancs  ;   16,     25,     36. 
Noirs  :    22,     23,     27. 

Les  noirs  ont  le  trait.  —  Partie  nulle. 

Noirs,  de  27  à  26  ;  blancs,  de  25  à  24.  —  Noirs  reviennent  de  26 
à  27;  blancs,  de  24  à  25,  et  ainsi  indéfiniment. 

Si  les  noirs,  après  le  premier  coup,  avaient  cherché  à  faire  mar- 
cher 22,  puis  23  vers  le  pion  27  pour  faire  terne,  les  blancs  Tau- 
raient  fait  avant  eux  et  auraient  gagné  la  partie. 

Problème  XXIII.  —  Blancs  :  16,     33,     34,     36. 
Noirs  :     11,     12,     i3,     32. 

Les  blancs  ont  le  trait  et  gagnent  la  partie. 

Blancs, de  16  à  i  5;  noirs, de  12  ou  de  32  à  22.  —  Blancs, de  36 
à  35,  font  terne  et  prennent  22  ;  les  noirs  jouent  en  22. —  Blancs, 
de  i5  à  14;  noirs  font  terne,  prennent  un  pion  quelconque  et 
perdent  la  partie,  les  blancs  faisant  terne  en  deux  coups. 

La  manière  de  jouer  eût  été  analogue  si,  au  début,  il  y  avait! 
eu  un  pion  blanc  en  26  au  lieu  de  16. 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiii"  siècle. 


Problème  XXIV.  —  Blancs  :  i3,     23,     33, 
Noirs  :    14,     24,     34. 

Les  noirs  ont  le  trait  et  perdent  la  partie. 

Quel  que  soit  le  pion  joué  par  les  noirs,  le  pion  blanc  corres- 
pondant le  suit.  Ainsi,  les  noirs  allant  de  34  à  35,  les  blancs 
jouent  de  33  à  34.  Quoi  que  fassent  les  noirs,  les  blancs  iront  de 
23  à  22,  puis  de  1 3  à  1 2  et  gagneront  la  partie. 

Si,  au  début,  il  y  avait  eu  un  pion  blanc  en  2  5  au  lieu  de  2  3, 
les  blancs  auraient  encore  gagné.  Ils  auraient  occupé  la  case  aban- 
donnée par  les  noirs,  puis  amené  leurs  deux  autres  pions  en  35 
et  en  1 5  et  auraient  gagné  avant  que  les  noirs  fussent  parvenus 
à  faire  terne. 

Problème  XXV.  —  Blancs  :  i5,     17,     25,     26,     27, 
Noirs  :     12,     21,     22,     23,     32. 

Les  blancs  ont  le  trait,  et,  par  convention,  leur  pion  26  est 
seul  mobile.  Ils  gagnent  la  partie. 

Blancs,  de  26  à  36 ;  noirs,  de  2 1  à  28.  —  Blancs, de  36  à  26,  font 
terne  et  prennent  23.  Après  quoi  le  pion  blanc  qui  est  en  26 
prendra  à  tout  coup  et  les  blancs  gagneront. 

Si  les  noirs  avaient  joué  le  pion  32  au  lieu  du  pion  21,  les 
blancs  auraient  pris  1 2  et  auraient  encore  gagné. 

Problème  XXVI.  — Blancs:  16,     25,     36, 

Noirs  :    11,     i3,     22,     27,     3i,     33. 

Les  blancs  ont  le  trait  et  perdent  la  partie. 


84  Quatrième  récréation. 


Blancs,  de  25  à  26,  font  terne  et  prennent  22;  noirs,  de  27  a  28. 
—  Blancs,  de  26  à  25;  noirs,  de  3i  à  32.  —  Blancs  font  terne  et 
prennent  82;  noirs,  de  28  à  21.  —  Blancs, de  26  à  25;  noirs,  de  33 
à  32.  —  Blancs  font  terne,  prennent  un  pion  quelconque  et  per- 
dent la  partie,  les  noirs  faisant  terne  en  deux  coups. 

Problème  XXVII.  —  Blancs  :   ^\,     22..     32, 

Noirs:     i5,     17,     26,     35,     37. 

Les  blancs  ont  le  trait.  Les  pions  blancs  22,  32  et  les  pions 
noirs  35  et  J7  sont  supposés  immobiles.  Les  noirs  gagnent  la 
partie. 

Blancs,  de  1 1  à  12,  font  terne  et  prennent  26;  noirs,  de  i5  en 
1 4.  —  Blancs,  de  1 2  à  1 1  ;  noirs,  de  1 7  à  18. 

Les  blancs  font  terne  et  prennent  un  pion  quelconque. 

Les  noirs  jouent  en  1 1  ou  en  1 3  et  finissent  par  faire  terne  ou 
par  enfermer  en  36  le  pion  blanc  mobile. 

Problème  XXVIII.  — Huit  pions  de  même  couleur  sont  placés 
sur  les  cases  11,  i3,  i5,  ij,  22,  24,  26,  28.  Faire  six  ternes 
en  six  coups  et  enlever  un  pion  après  chaque  terne,  de  manière 
qiiil  ne  reste  plus  que  deux  pions. 

De  28  à  18,  on  prend  18.  —  De  26  à  16,  on  prend  17. 

De  24  à  14,  on  prend  i5.  —  De  16  à  1 5,  on  prend  i5. 

De  22  à  12,  on  prend  i3.  —  De  14  à  1 3,  et  l'on  prend  un  quel 
conque  des  trois  derniers  pions. 

Pour  donner  une  idée  de  la  manière  assez  obscure  de  l'auteur, 
nous  reproduirons  le  dernier  problème  selon  le  manuscrit. 


I 


Le  jeu  des  Mérelles  au  xiii*  siècle.  85 

Après  la  figure  qui  indique  les  positions  des  huit  pions,  on 
trouve  ce  qui  suit  : 

Ceste  pture  est  tele  q  tu  vois  et  samble  q'ii  ait  moût  petit  a 
faire.  Mais  cex  le  cuideroit  faire  q'i  faudrait,  fai  por  une 
VI  fois  et  en  prent  cascun  coq  une  pq°  i,  il  ne  demeure  q  deu\. 
pren  celi  de  qoi  tu  fais  por  une  au  p'mier  cop.  après  pren 
selonc  ce  q  tiijues.  car  ie  ne  quier  plus  deviser. 
Explicit  des  pfures  des  Mérelles. 


CINQUIÈME  RÉCRÉATION. 

LES  CARRÉS  MAGIQUES  DE  FERMAT. 


«  Les  géomètres,  sans  s'épuiser  en  principes  sur 
la  logique  et  u'avant  que  le  sens  naturel  pour  guide, 
parviennent,  par  une  marche  toujours  sûre,  aux  vérités 
les  plus  détournées  et  les  plus  abstraites;  tandis  que 
tant  de  philosophes,  ou  plutôt  d'écrivains  en  philo- 
sophie, paraissent  n'avoir  mis  à  la  tête  de  leurs  ou- 
vrages de  grands  traités  sur  l'art  du  raisonnement  que 
pour  s'égarer  ensuite  avec  plus  de  méthode,  semblables 
à  des  joueurs  malheureux  qui  calculent  longtemps  et 
finissent  par  perdre.  » 

(d'Alembert.) 


CINQUIÈME  RECREATION. 


LES  CARRÉS  MAGIQUES  DE  FERMAT. 


ON  appelle  carré  magique  l'ensemble  de  nombres  égaux 
ou  inégaux  placés  dans  les  cases  d'un  carré  de  telle 
sorte  que  la  somme  des  nombres  renfermés  dans  cha- 
cune des  lignes,  des  colonnes  et  des  diagonales  soit  toujours  la 
même  et  égale  à  un  nombre  fixe  appelé  la  constante  du  carré. 

Autrefois,  on  ne  considérait  que  les  carrés  magiques  formés  par 
la  suite  des  nombres  entiers  consécutifs  ;  mais  on  a  dû  amplifier 
cette  définition  à  cause  de  la  question  des  carrés  dits  à  enceintes. 
Dans  une  lettre  bien  connue  de  Fermât  à  Mersenne,  on  trouve 
un  carré  incomplet  de  ce  genre  avec  144  cases  remplies  par 
Fermât  ;  mais  «  parce  que  le  temps  me  manque,  écrit-il,  je  dif- 
fère à  vous  envoyer  les  cinq  enceintes  qui  manquent,  pour  par- 
faire le  carré  entier  de  22,  jusqu'au  départ  du  prochain  courrier. 
Après  cela,  vous  devez  croire  que,  dès  que  j'aurai  le  loisir,  j'irai 
aussi  avant  sur  ce  sujet  qu'il  est  possible.  »  Nous  donnerons  plus 
tard  la  restauration  complète  de  ce  carré  ;  cette  restitution,  qui 
portait  sur  la  recherche  de  340  nombres,  a  été  faite  d'une  manière 


90  Cinquième  récréation. 


fort  remarquable  par  M.  V.  Coccoz,  commandant  d'artillerie  en 
retraite;  mais  nous  espérons  plus  et  donner  le  nombre  des  so- 
lutions du  problème  d'après  les  indications  de  Fermât. 

Nous  ferons  observer  que  la  plupart  des  auteurs  qui  ont  écrit 
sur  les  carrés  magiques,  et  ils  sont  nombreux,  paraissent  s'être 
trompés  en  ne  considérant  la  question  qu'au  point  de  vue  arith- 
métique; c'est,  avant  tout,  une  question  d'algèbre  pure.  Il  s'agit 
de  trouver  pour  le  carré  de  quatre,  par  exemple,  seize  nombres 
assujettis  à  dix  conditions  :  quatre  pour  les  lignes,  quatre  pour 
les  colonnes,  et  deux  pour  les  diagonales.  On  pourrait  donc  ap- 
pliquer les  méthodes  ordinaires  de  la  discussion  d'un  système 
d'équations  du  premier  degré  et  exprimer  les  inconnues  en  fonc- 
tion de  six  d'entre  elles.  Mais  on  voit  immédiatement  que  les 
conditions  du  problème  ne  sont  pas  distinctes,  et  que  l'une 
d'elles  est  la  conséquence  des  neuf  autres.  En  effet,  lorsque  l'on 
a  imposé  aux  seize  nombres  les  conditions  telles  que  la  somme  i 
des  quatre  lignes  et  des  trois  premières  colonnes  soit  la  même,  il 
est  bien  évident  qu'il  en  est  ainsi  delà  quatrième  colonne.  Mais, 
si  l'on  supprime  cette  condition,  le  problème  devient  dissymé-  '; 
trique,  pour  amsi  dire,  et  fort  difficile  à  résoudre  parles  procédés  i 
ordinaires.  Si  l'on  traite  la  question  des  carrés  magiques  par  la  , 
théorie  des  déterminants  ou  par  la  résolution  algébrique  des 
équations  suivant  la  méthode  ordinaire,  on  est  conduit  à  d'é- 
normes calculs.  C'est  peut-être  la  première  marche  suivie  par 
Fermât  lorsqu'il  écrit  dans  une  autre  lettre  à  Mersenne  que  les 
inventions  de  Frénicle  le  ravissent,  et  qu'il  désirerait  connaître 
quelques-unes  de  ses  méthodes,  en  avouant  que  les  siennes,  pour 
le  sujet  des  carrés  magiques,  comme  pour  d'autres,  conduisent  à 
de  grands  calculs. 


Les  carrés  magiques  de  Fermât.  91 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  théorie  complète  des  carrés  magiques 
paraissait  une  énigme  dont  on  devait  attendre  longtemps  encore 
la  solution,  lorsque  nous  avons  eu  le  bonheur  de  mettre  la  main 
sur  des  manuscrits  originaux  et  inédits  de  Fermât;  ces  manus- 
crits se  composent  de  quatorze  cahiers  et  de  feuillets  détachés.  La 
présente  Récréation  a  pour  but  de  montrer  la  marche  suivie  par 
Fermât  dans  la  formation  des  carrés  pairs,  d'après  l'étude  des 
dessins  et  des  carrés  du  manuscrit.  La  méthode  est  loin  d'être 
développée;  chaque  page  contient  quelques  dessins  faits  d'un 
trait  de  plume  et  des  carrés  magiques  avec  des  lettreS;,  presque 
toujours,  et  quelquefois  des  chiffres.  Au-dessous,  une  ou  deux 
lignes  indiquant  par  le  signe  00  ou  œg^  l'égalité  de  nombres  com- 
pris dans  les  cases  indiquées  et  réunies  par  un  trait  sur  le  dessin; 
puis  le  nombre  des  solutions  pour  chaque  dessin  et  pour  chaque 
carré.  Nous  avons  cherché  à  reproduire  aussi  fidèlement  que 
possible  la  pensée  de  notre  auteur  favori  ;  mais,  pour  la  rendre 
intelligible  à  tous  ceux  qui  s'occupent,  aux  heures  de  loisir,  des 
questions  de  cette  nature,  nous  l'avons  rendue  aussi  élémentaire 
que  possible,  puisqu'il  suffit,  pour  la  comprendre,  de  connaître  les 
quatre  premières  règles  de  l'Arithmétique.  Le  lecteur  admirera 
l'art  merveilleux  et  incomparable  avec  lequel  l'illustre  génie  qui 
surpassa  tous  les  géomètres  de  l'antiquité  et  que  nul  n'a  surpassé 
depuis,  a  su  se  débarrasser  de  tous  les  calculs. 


92 


Cinquième  récréation. 


LES  CARRÉS  MAGIQUES  DE  TROIS. 

On  peut  placer  les  neuf  premiers  nombres  dans  les  cases  d'un 
carré  conformément  au  tableau  [fig.  44):  cette  figure  possède 
les  propriétés  suivantes  : 

Fig.  44. 


a 

9 

4 

7 

5 

3 

6 

1 

8 

Carré  de  trois. 

•        •         • 

•        •         • 

•         •         • 

*       •        é 


Colonnes. 


Lignes.  Diagonales. 

Les  carrés  de  trois. 


1°  La  somme  des  nombres  renfermés  dans  une  même  colonne  ' 
est  égale  à  quinze  pour  chacune  des  trois  colonnes  ; 

2°  La  somme  des  nombres  renfermés  dans  une  même  ligne  es! 
encore  égale  à  quinze  pour  chacune  des  trois  lignes  ; 

3°  La  somme  des  nombres  renfermés  dans  chacune  des  deu^ 
diagonales  est  encore  égale  à  quinze. 

On  dit  que  cette  figure  est  un  carré  magique  de  trois;  oi 
peut  réaliser  cette  figure  avec  les  neuf  premières  boules  du  jeu  ai 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


q3 


loto  ou  encore  avec  les  dés  d'un  jeu  de  dominos  dont  les  en- 
sembles de  points  représentent  successivement  les  neuf  premiers 
nombres,  ou  encore  avec  les  cartes  de  même  couleur,  depuis  Tas 
jusqu'au  neuf  d'un  jeu  de  whist. 


LA   ROTATION   ET   LA  SYMETRIE. 


Si  l'on  fait  tourner  le  carré  magique  [fig.  44)  d'un  quart  de 
tour  autour  de  son  centre,  il  reste  magique  :  car  les  lignes  de- 

Fig.  45. 


2 

9 

4 

4 

3 

8 

7 

& 

3 

9 

5 

1 

6 

1 

8 

2 

7 

6 

8 

1 

6 

6 

7 

2 

3 

5 

1 

1 

5 

9 

4 

9 

2 

8 

3 

4 

La  rotation  des  carrés  magiques. 

viennent  les  colonnes,  les  colonnes  deviennent  les  lignes  et  les 
deux  diagonales  s'échangent  l'une  dans  l'autre.  On  se  rend 
mieux  compte  encore  de  celte  propriété  en  faisant  tourner  les 


94 


Cinquième  récréation. 


tigures.  En  continuant  le  mouvement,  il  en  est  de  même;  par 
suite,  la  rotation  d'un  carré  magique  en  donne  trois  autres.  Nous 
avons  représenté  {Jig.  45  )  les  quatre  carrés  qui  se  déduisent  les 
uns  des  autres  par  rotation. 
Séparons  les  lignes  horizontales  de  l'un  quelconque  des  quatre 


Fig.  46. 


6 

I 

8 

2 

7 

6 

7 

5 

3 

g 

5 

1 

2 

9 

4 

4 

3 

8 

La  symétrie  des  carrés  magiques. 


carrés  que  nous  venons  d'obtenir  et,  au  lieu  de  les  supposer  dans 
l'ordre  de  haut  en  bas,  plaçons-les  dans  l'ordre  de  bas  en  haut, 
nous  obtenons  encore  (Jîg.  46)  quatre  carrés  magiques. 

Ainsi  tout  carré  magique  donne  huit  solutions  distinctes, 
parce  que  tous  les  nombres  du  carré  sont  inégaux  entre  eux  deux 
à  deux.  Maison  a  amplifié  la  définition  des  carrés,  et,  dans  cette 
définition  plus  générale,  on  ne  suppose  pas  qu'il  soit  nécessaire 
de  prendre  des  nombres  consécutifs  à  partir  de  un,  ni  des  nombres 
tous  distincts.  Nous  représentons  [Jig:  47)  des  carrés  magiques 


i 


Z^s  carrés  magiques  de  Fermât, 


q5 


contenant  plusieurs  nombres  égaux  ;  les  principes  de  rotation  et 
de  symétrie  ne  donnent  plus  que  quatre  solutions  distinctes  au 
lieu  de  huit. 

Enfin,  si  tous  les  nombres  du  carré  sont  égaux,  il  n'y  a  plus 


Fig-  47' 


t 

.               « 

s 

3 

1      3 

2 

6 

2 

X 

S 

2 

3 

3 

3 

« 

1 

i 

« 

S 

2 

1 

3 

6 

» 

S 

2 

2 

3 

« 

S 

3 

1 

2 

3 

4 

Carrés  magiques  à  nombres  égaux. 

qu'une  seule  solution  ;  il  est  d'ailleurs  facile  de  voir  que  tout 
carré  de  trois  donne  i ,  4  ou  8  solutions,  et  jamais  plus. 


LES    CARRÉS   MAGIQUES   DE    QUATRE. 

Ecrivons  les  seize  premiers  nombres  suivant  l'ordre  naturel, 
dans  les  seize  cases  d'un  carré  de  quatre  [fig.  48)  ;  lorsque  nous 
désignerons  plus  tard  une  case  par  un  numéro,  ce  sera  toujours 
par  le  nombre  correspondant  de  cette  figure. 


96 


Cinquième  récréation. 


Échangeons  entre  eux  les  huit  nombres  qui  se  trouvent  placés 
deux  par  deux  sur  les  cases  représentées  par  les  boules  noires 
opposées  [fig-  49),  nous  obtenons  ainsi  le  carré  magique  de 
la  fig.  5o.  On  trouve  ce  carré  dans  Fermât  et  dans  le  Mémoire 
de  Frénicle  dont  il  est  parlé  plus  loin,  avec  l'indication  du  pro- 


Fig.  48. 


1 

2 

3 

it 

5 

6 

' 

8 

» 

10 

11 

12 

13 

M 

15 

16 

Fig.  49. 


Fig.  5o. 


1 

15 

1* 

4 

12 

6 

7 

9 

8 

10 

11 

5 

1 

13 

3 

2 

16 

J 

cédé  qui  sert  à  le  construire.  Mais,  si  l'on  place  toutes  les  lignes] 
dans  l'ordre  inverse,  on  obtient,  par  symétrie,  le  carré  magique] 
qui  se  trouve  représenté  sur  la  célèbre  gravure  Melencholia  d'Al- 
bert Durer,  burinée  en  1 5 1 4  ;  la  date  de  cette  gravure  est  d'ailleurs] 
indiquée  par  les  deux  nombres  i  5  et  14  de  la  ligne  inférieure. 


DE  L  ADDITION  ET  DE  LA   MULTIPLICATION  DES  CARRES. 


Les  carrés  magiques  se  prêtent  à  diverses  transformations  gé- 
nérales évidentes  : 

1°  Un  carré  reste  magique  si  l'on  augmente  ou  si  l'on  diminue 


Les  carrés  magiques  de  Fermât.  97 

tous  les  éléments  d'une  même  quantité;  en  les  diminuant  de 
leur  moyenne  arithmétique,  c'est-à-dire  du  quotient  de  leur 
somme  par  leur  nombre,  on  peut  supposer  la  constante  nulle  ;  oa 
introduit  ainsi  des  éléments  négatifs,  mais  cet  inconvénient  est 
compensé  par  la  simplification  des  calculs  ; 

2°  Un  carré  reste  magique  lorsque  l'on  multiplie  ou  que  Toa 
divise  tous  les  nombres  par  une  même  quantité  ; 

3*  En  ajoutant  les  nombres  des  cases  correspondantes  de  deux, 
carrés  magiques,  on  obtient  encore  un  carré  magique;  dans  le  cas^ 
oîi  les  carrés  ne  sont  pas  de  même  grandeur,  mais  de  même  parité,, 
on  peut  border  le  plus  petit  de  quatre,  huit,  douze, . . .  rangées  en 
plaçant  des  zéros  ou  des  nombres  égaux  dans  les  cases  ajoutées^ 

Mais  ces  transformations  altèrent,  dans  le  cas  général,  les  élé- 
ments du  carré;  voici  une  transformation  qui  conserve  les  mêmes 
nombres  lorsque  ceux-ci  sont  complémentaires  deux  à  deux,  c'est- 
à-dire  tels  que  si  on  les  range  par  ordre  de  grandeur  et  si  on  les. 
désigne  par 

somme  des  nombres  placés  à  égale  distance  des  extrêmes  soit 
constamment  la  même.  Ainsi,  l'on  suppose 

a  ^  a  ^=  b  -i-  b'  =:  c  -\-  c'  =^  d  -h  d'  =z  . . .  =  s. 

En  effet,  considérons  un  carré  magique  quelconque  formé  avec 
de  tels  nombres,  et  remplaçons  l'un  par  l'autre  chaque  nombre 
complémentaire.  Les  éléments  d'une  même  ligne,  d'une  même 
colonne  ou  d'une  même  diagonale  se  trouvent  remplacés  par  leurs 
compléments,  et  ainsi 

0,    p,     q,     r,     ... 
E.  Lucas.  —  Récréations  mathém.,  IV.  7 


<)8 


Cinquième  récréation. 


par 


s  —  p, 


s  —  r 


la  somme  de  chaque  rangée  n'est  donc  pas  altérée. 

Nous  devons  faire  observer  que  cette  méthode  de  transforma- 
tion, quenous  appellerons  méthode  par  complément,  nedonne  pas 
toujours  de  nouveaux  carrés;  ainsi,  en  l'appliquant  à  la  fig.  5o, 
on  retrouve  un  carré  que  l'on  pourrait  obtenir  par  rotation  et 
par  symétrie.  On  se  rendra  facilement  compte  du  résultat  pour 
tout  carré  en  joignant  par  des  droites  les  centres  des  cases  con- 
tenant les  nombres  complémentaires  et  en  regardant  si  le  dessin 
obtenu  est  ou  n'est  pas  symétrique  par  rapport  au  centre  ou  aux 
médianes  du  carré. 

En  prenant  quatre  nombres  a,  b,  c,  d  tels  que 

a  -\'  d^=.h  -\-  c. 

on  dit  que  ces  nombres  forment  une  équidifférence ^  et  lorsque 
Ton  prend  au  hasard  les  deux  premiers  a  et  b,  on  obtient  tou- 
jours une  équidifférence  en  les  augmentant  tous  deux  d'un 
même  nombre  quelconque;  si  l'on  augmente  maintenant  lesj 
quatre  nombres  a,  b,  c,  d  d'une  même  quantité,  on  forme  une 
nouvelle  équidifférence  e,f,g,  h. 

Les  méthodes  de  Fermât  pour  le  carré  de  quatre  s'appliquent' 
ainsi  à  huit  nombres  a^  b,  c,  d,  e,  f,  ^,  h  formant  une  doublai 
équidifférence,  et  à  huit  nombres  complémentaires  obtenus  enj 
retranchant  les  huit  premiers  d'un  même  nombre  s. 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


99 


TRANSFORMATIONS  GENERALES  DES  CARRES. 


Tout  carré  pair,  c'est-à-dire  celui  dont  le  côté  contient  un 
nombre  pair  de  cases,  se  divise  en  quatre  quartiers  par  deux 
lignes  médianes;  cela  posé,  on  a  la  proposition  suivante  :  Tout 
carré  pair  reste  magique,  si  Von  échange  simultanément,  sans 
les  tourner,  les  quartiers  opposés.  Nous  désignerons  dans  la 

Fig.  5i. 


j    i         2    ; 

Éini 


Échange  des  quartiers. 

suite  les  quartiers  par  les  n"'  i,  2,  3,  4  comme  dans  le  carré  à 
gauche  {fig.  5i);  en  échangeant  les  quartiers  i  et  3,  2  et  4,  on 
>btient  le ,  carré  à  droite.  On  constate  immédiatement  sur  ces 
leux  carrés  que  les  rangées  et  les  deux  diagonales  conservent  les 
lêmes  nombres  dans  un  ordre  différent.  On  démontre  de  même 
la  proposition  suivante  :  Tout  carré  impair  reste  magique  si 
l'on  échange  simultanément,  sans  les  tourner,  les  quartiers 
apposés  ainsi  que  les  fragments  opposés  des  deux  rangées  mé- 
lianes  [fig-  S 2). 

Ces  transformations  ne  donnent  pas  de  nouveaux  carrés  pour 
le  carré  de  trois;  mais,  pour  celui  de  quatre,  elles  en  donnent 


Cinquième  récréation. 


Fig.  52. 


'>-:^    V 


m 


Si 


m 


^1^4 


Fig.  53. 


a 

& 

o 

cb 

e 

f 

9 

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i  • 

J 

lo 

V 

771/ 

IV 

o 

P 

«V 

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b 

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9 

f 

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o 

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P 

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h 

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o 

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b 

9 

fv 

e 

f 

N°   2. 


/ 

h. 

» 

9 

n. 

P 

m/ 

o 

b 

d- 

a/ 

C' 

J 

L 

i/ 

A- 

N»  3.  N»  4. 

Echanges  des  quartiers  et  des  médianes. 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


d'autres  que  ceux  que  l'on  aurait  obtenus  par  rotation  ou  par  sy- 
métrie. On  démontre  de  même  l'exactitude  de  la  transformation 
suivante  qui  s'applique  indistinctement  aux  carrés  pairs  et  aux 
carrés  impairs  :  Tout  carré  reste  magique  si  Von  échange  deux 
hori:{ontales,  puis  deux  verticales  qui  sont  toutes  les  quatre  à 
la  même  distance  du  centre.  Nous  laissons  au  lecteur  le  soin  de 
vérifier  cette  proposition  en  construisant  la  figure. 

Si  l'on  applique  cette  transformation  après  l'échange  des  quar- 
tiers opposés,  on  obtient  encore  un  nouveau  carré  ;  par  suite,  tout 
carré  donne,  par  l'échange  des  rangées  ou  des  quartiers,  trois 
autres  carrés  magiques.  Nous  donnons  ifig.  53)  les  quatre  carrés 
que  l'on  déduit  d'un  seul  carré  de  quatre  par  les  échanges  que 
nous  venons  de  démontrer. 


m^%> 


LES    TABLES    DE   FRENICLE. 

Les  Ouvrages  de  Frénicle  ont  été  publiés  dans  un  volume  im- 
primé au  Louvre  en  lôgS,  par  les  soins  du  mathématicien  de  la 
H  ire,  et  réimprimés  dans  le  tome  V  des  Mémoires  de  l'Acadé- 
mie des  Sciences  (Paris,  1729).  On  y  trouve  la  Table  géné- 
rale des  Quarre\  de  Quatre;  cette  Table,  de  45  pages  in-4'', 
contient  les  880  solutions  du  problème  pour  tous  les  carrés  faits 
avec  les  seize  premiers  nombres  entiers;  en  tenant  compte  de  la 
rotation  et  de  la  symétrie,  on  obtient  donc  7040  carrés  différents. 

Mais,  si  l'on  se  reporte  à  la  théorie  des  échanges  que  nous  ve- 
nons d'exposer,  on  s'aperçoit  immédiatement  que  les  Tables  de 
Frénicle  peuvent  être  réduites  au  quart  de  leur  étendue,  et  qu'il 


Cinquième  récréation. 


sulfir,  pour  classer  tous  les  carrés,  de  supposer  que  l'un  quel- 
conque des  seize  nombres  du  carré,  le  plus  petit,  par  exemple, 
peut  toujours  être  ramené  dans  l'une  des  cases  i  ou  2  [fig.  48). 
En  effet,  d'après  le  principe  de  rotation,  on  peut  toujours  sup- 
poser un  nombre  quelconque  dans  le  premier  quartier,  c'est-à-dire 
sur  l'une  des  cases  i,  2,  5,  6;  en  outre,  par  symétrie,  si  le  nombre 
choisi  est  placé  sur  la  case  5,  on  peut  le  ramener  sur  la  case  2,  et 
par  échange  des  quartiers,  lorsqu'il  est  placé  sur  la  case  6,  on  peut 
le  ramener  sur  la  case  i  ;  d'ailleurs,  nous  montrerons,  dans  ce  qui 
suit,  l'inutilité  de  cette  Table.  Cependant  on  trouve  dans  le  Mé- 
moire de  Frénicle  quelques  propositions  générales  sur  les  carrés 
de  quatre;  nous  en  ajouterons  quelques  autres  tirées  de  nos  ma- 
nuscrits et  complétées  par  M.  Delannoy. 


EGALITES    A    QUATRE    BOULES. 

Théorème  I .  —  Dans  tout  carré  de  quatre,  la  somme  des 
angles  du  carré  extérieur,  celle  des  angles  du  petit  carré  in- 
térieur^ les  sommes  des  angles  de  chacun  des  deux  rectangles 
médians  sont  égales  à  la  constante. 

Cette  proposition  se  démontre  immédiatement  sur  chacun  des 
carrés  (Jîg.  54),  en  ajoutant  les  nombres  placés  sur  les  quatre 
traits  pleins  et  retranchant  ceux  qui  sont  placés  sur  les  traits 
pointillés.  On  observera  d'ailleurs  que  le  second  carré  se  déduit 
du  premier  par  échange  des  quartiers  opposés,  et  le  quatrième 
du  troisième  par  rotation. 

Ainsi,  tout  carré  de  quatre  contient  quatorze  fois  la  constante 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


sur  des  lignes  régulières  :  quatre  lignes,  quatre  colonnes,  deux 

Fig.  54. 


-: <* f y 

•       /      '  ,        • 

'^ (» 41 ^ 


•           •          .1 
(» ^-r — y^ <» 

(» — /    '^'.^ — <► 


diagonales,  deux  rectangles  médians,  le  petit  carré  intérieur  et 
le  grand  carré  extérieur. 

Théorème  11.  —  Dans  tout  carré  de  quatre,  la  somme  des 
quatre  boules  noires  de  l'un  des  carrés  (Jig.  55)  égale  la  somme 
des  boules  blanches  du  carré  opposé  par  rapport  au  centre,  et 
la  somme  de  Vun  de  ces  carrés  augmentée  du  carré  adjacent 
formé  de  croix  ou  de  points  vaut  deux  fois  la  constante. 

La  seconde  partie  de  cette  proposition  se  démontre  en  faisant 
la  somme  des  nombres  placés  sur  les  traits  pleins  ou  sur  les  traits 
pointillés,  et  la  première  partie  en  retranchant  ces  deux  sommes 
l'une  de  l'autre.  Nous  désignerons  sous  le  nom  de  carrés  de  trois 


104 


Cinquième  récréation. 


•chacun  des  quatre  carrés  formés  de  boules  noires  ou  blanches,  de 
croix  ou  de  points  dans  la  partie  droite  (Jig.  55  ).  On  observera, 

Fig.  55. 


• • y. y. 

• • * * 

•  •  (j)         <j) 

•  •  Ô  Ô 


i 

;' 

• 

<> 

• 

0 

1 

• 

1 

6 

m 

ô 

<l'ailleurs,  que  ce  carré  se  déduit  du  précédent  par  échange  simul- 
tané des  quatre  rangées  intérieures. 

ÉGALITÉS    A   DEUX    BOULES. 

Théorème  III.  —  Dans  tout  carré  de  quatre,  la  somme  des 

Fig.  56. 


-extrémités  d'une  rangée  extérieure  égale  la  somme  des  nombres 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


intérieurs  de  la  rangée  extérieure  opposée;  la  somme  des 
extrémités  d'une  rangée  intérieure  égale  la  somme  des  nombres 
intérieurs  de  la  rangée  voisine,  et  la  somme  des  extrémités 
d'une  diagonale  égale  la  somme  des  nombres  intérieurs  de 
l'autre  diagonale  {fig.  56). 

Pour  démontrer  cette  proposition,  on  ajoute  les  nombres  con- 
tenus sur  les  trois  traits  pleins  et  Ton  retranche  les  nombres 
situés  sur  les  trois  traits  pointillés.  On  observera  de  plus  que  le 
troisième  carré  se  déduit  du  précédent  par  l'échange  des  quar- 
tiers opposés. 

Cette  égalité  entre  deux  boules  noires  et  deux  boules  blanches 


Fig.  5: 


Fig.  58. 


Fig.  59. 


•  •         •  • 


donne  lieu,  par  rotation  et  par  symétrie,  à  dix  équations  homo- 
gènes qui  remplacent  avantageusement  les  dix  équations  de  la 
définition  des  carrés  magiques  de  quatre.  En  effet,  l'ensemble 
des  quatre  boules  forme  un  grand  trapèze  [fig.  5j),  un  petit  tra- 
pèze {Jîg.  58)  ou  un  losange  {/îg.  59).  Par  conséquent,  si  l'on 
ajoute  les  boules  blanches  de  l'un  des  grands  trapèzes  (y?^,  57) 
aux  boules  noires  de  l'autre,  on  constate  l'égalité  des  lignes  exté- 
rieures; en  ajoutant  les  boules  de  même  couleur  de  chacun 
d'eux,  on  en  déduit  l'égalité  des  lignes  extérieures  au  grand 


io6  Cinquième  récréation. 


carré  extérieur,  et  à  l'un  des  rectangles  moyens;  puis,  par  rota- 
tion, on  en  déduit  que  les  lignes  extérieures,  les  colonnes  ex- 
térieureSj  le  grand  carré  et  les  deux  rectangles  médians  ont  la_ 
même  somme.  En  considérant  les  deux  petits  trapèzes  {Jig.  58] 
on  conclut  l'égalité  des  lignes  intérieures,  des  colonnes  inté- 
rieures, du  petit  carré  intérieur  et  des  deux  rectangles  moyens. 
En  considérant  les  deux  losanges  (Jîg'.  5g),  on  conclut  l'égaliti 
des  diagonales,  du  carré  intérieur,  du  carré  extérieur;  donc,  er 
rassemblant  les  résultats  de  ces  trois  figures, le  carré  est  magique, 

Corollaire  I.  —  Pour  former  un  carré  avec  seize  nombres  prÎ! 
au  hasard,  il  faut  qu'en  prenant  les  sommes  de  toutes  les  combi- 
naisons des  nombres  deux  à  deux,  on  trouve  dix  sommes  de  deuj 
nombres  égales  à  dix  sommes  de  deux  autres  nombres. 

Corollaire  II.  —  Si,  parmi  les  seize  nombres  donnés,  il  ei 
existe  un  seul  plus  petit  que  tous  les  autres,  un  seul  plus  granc 
que  tous  les  autres,  ces  deux  nombres  ne  peuvent  occuper  ei 
même  temps,  l'un  la  place  d'une  boule  noire,  l'autre  la  place 
d'une  boule  blanche  pour  les  dix  positions  qui  correspondent 
chacun  des  huit  trapèzes  ou  des  deux  losanges  des^^.  56,  5/ 
58  et  59;  car,  sans  cela,  le  théorème  111  ne  serait  pas  vérifié. 

Corollaire  111.  —  Si,  parmi  les  nombres  donnés,  il  en  exist 
deux  plus  petits  ou  deux  plus  grands  que  tous  les  autres,  ces  deu: 
nombres  ne  peuvent  occuper  en  même  temps  les  places  de  deu: 
boules  noires  ou  de  deux  boules  blanches  pour  les  dix  positio 
que  nous  venons  de  considérer. 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


107 


DES  CARRES  A  QUARTIERS  EGAUX. 


Lorsque  la  somme  des  angles  de  l'un  des  quartiers  est  égale  à 
la  constante,  il  en  est  de  même  des  trois  autres,  ainsi  que  cela 
résulte  immédiatement  du  théorème  II;  on  dit  alors  que  le  carré 
est  à  quartiers  égaux  [fig.  60),  On  a  ainsi  cinq  petits  carrés 
ombrés  dont  la  somme  est  égale  à  la  constante.  Ces  carrés  pos- 
sèdent plusieurs  propriétés  qui   viennent  s'ajouter   aux  précé- 


Fig.  60. 


Fig.  61. 


Fig.  62. 


•        f — O 


•       .o • 


V, 

— { 

» 

• 

^>-. 

'  ' 

'\^ 

x^ 

•       < 

^ 

-^ 

dentés,  et  permettent  de  trouver,  de  vingt-quatre  manières  dif- 
férentes, quatre  nombres  placés  régulièrement  dont  la  somme  est 
toujours  égale  à  la  constante. 

En  effet,  si  l'on  ajoute  deux  quartiers  opposés  et  si  l'on  retranche 
la  diagonale  commune,  on  voit  immédiatement  que  la  somme 
des  boules  noires  du  rectangle  diagonal  (^^.  61)  égale  la  con- 
stante; réciproquement,  si  la  somme  des  quatre  boules  de  ce  rec- 
tangle est  égale  à  la  constante,  les  quartiers  sont  égaux. 

D'autre  part,  si  l'on  remplace  les  quartiers  opposés  [fig.  61) 
par  les  carrés  de  trois  \fig.  62),  on  démontre  encore  que,  si  l'un 
des  carrés  est  égal  à  la  constante,  il  en  est  de  même  de  tous  les 


io8 


Cinquième  récréation. 


autres  et  d'un  rectangle  diagonal,  et  réciproquement.  Ainsi  donc, 
dans  tout  carré  de  quatre,  lorsque  l'un  des  quartiers,  l'un  des 
carrés  de  trois  ou  l'un  des  rectangles  des_^^.  6i,  62  est  égal  à  la 
constante,  il  en  est  de  même  des  neuf  autres. 

Voici  quatre  autres  propriétés  des  carrés  à  quartiers  égaux  sur 


Fig.  63. 


• 

• 

•       « 

*      ^\ 

• 

•        « 

• 

0 

Fig.  64. 


•^ 

•         •         • 

• 

p 

• 

'• 

• 

c 

Fig.  65. 


Fig.  66. 


• 

•' 

--- 

- 

... 

-0-- 

---0 

• 

• 

■.i^ 

• 

• 

• 

• 

• 

• 

T 1      • 

^ O- L O 

•  •  •  • 


les  égalités  à  somme  variable  entre  vingt-quatre  groupes  de  deux 
boules  noires  et  de  deux  boules  blanches  correspondantes.  Elles 
sont  indiquées  sur  les  fig.  63,  64,  65,  66. 

Ces  propriétés  se  démontrent  immédiatement  en  ajoutant  les 
nombres  situés  aux  angles  de  l'un  des  carrés  ou  se  trouvent  deux 
boules  noires  et  en  retranchant  la  diagonale  ou  la  ligne  repré- 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


loq 


sentée  en  traits  pointillés  ;  ces  figures  se  transforment  les  unes 
dans  les  autres  par  e'change  simultané  des  quartiers  ou  des  ran- 
gées intérieures. 

Les  deux  propositions  qui  correspondent  aux^^.  63  et  64 
m'ont  été  indiquées  par  M.  Delannoy,  les  deux  autres  figures 
sont  tirées  des  manuscrits  de  Fermât. 

On  a  encore  une  autre  égalité  entre  deux  boules  blanches  et 

Fig.  67. 


deux  boules  noires  [fig-  67  )  ;  on  la  démontre  en  ajoutant  les 
boules  du  rectangle  diagonal  représenté  en  traits  pleins  et  en 
retranchant  celles  du  rectangle  médian  figuré  en  traits  pointillés; 
les  quatre  boules  sont  aux  sommets  d'un  carré.  Nous  verrons 
plus  loin  que,  dans  le  cas  général,  il  ne  saurait  exister  d'autres 
égalités  de  ce  genre. 


LA   TABLE   D  ADDITION. 


Ainsi  que  nous  l'avons  vu,  il  résulte  des  considérations  de  ro- 
tation et  de  symétrie,  et  des  deux  premiers  échanges  par  rangées 
ou  par  quartiers,  que  Ton  peut  toujours  supposer  l'un  des  nombres 


Cinquième  récréation. 


quelconques  du  carré  dans  le  premier  quartier  sur  l'une  des  cases 
I  ou  2  :  ces  remarques  s'appliquent  à  tous  les  carrés  et  donnent 
lieu  à  leur  classification  naturelle  (^).  Pour  dresser  une  Table  des 
carrés  de  quatre,  il  suffit  donc  de  ne  considérer  que  ceux  qui  ont 
le  plus  petit  nombre  sur  la  case  i  ou  sur  la  case  2.  Mais,  pour 
les  carrés  à  quartiers  égaux,  cette  Table  devient  inutile,  puisque 

Fig.  68. 


Oy 

i        i        ' 

b      \     c     \     d/ 

p 

ap 

bp     \     cp      \     dp 

9 

(UJ 

bq     \     cq      \     dq 

r 

ar 

br     '     c     1     dr 

j" 

as 

bj      \     es      1      ds 

Ton  peut  les  déduire  tous  des  transformations  régulières  d'une 
Table  d'addition. 

Formons  avec  quatre  nombres  quelconques  <î,  b,  c,  ^,  et 
quatre  autres  nombres  quelconques  p,  ^,  r,  5,  une  Table  d'addi- 
tion^ comme  celle  de  Pythagore  pour  la  multiplication,  mais  en 
adoptant  cette  notation  que  ap.  par  exemple,  signifie  la  somme 
et  non  le  produit  de  a  tlp  {fig.  68  ). 

Si  l'on  échange  deux  lignes  ou  deux  colonnes  quelconques,  les 
seize  nombres  de  la  Table  changent  de  place  mais  non  de  valeur; 

(')  D'après  une  remarque  de  M.  Delannoy,  Frénicle  aurait  rangé  la  Table 
des  carrés  suivant  la  grandeur  du  nombre  se  trouvant  sur  la  case  i,  et  pour 
les  carrés  ayant  le  même  nombre  dans  cette  case,  d'après  le  nombre  situé 
sur  la  case  6  (contiguë  en  diagonale). 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


il  en  est  de  même  si  l'on  remplace  les  lignes  par  les  colonnes,  ou 
inversement;  on  obtient  de  cette  façon  2  (  r.2.3.4)-  ou  1 152  Ta- 
bles d'addition  distinctes,  si  les  seize  nombres  de  la  Table  sont 
différents;  d'ailleurs,  il  ne  peut  y  avoir  d'autres  solutions  si  les 
nombres  donnés  sont  arbitraires,  puisque  l'on  peut  supposer  que 
p,  q,  r,  5  et  a,  b,  c,  d  représentent  des  nombres  mesurés  par  pes 
unités  d'espèces  différentes. 

Ainsi  donc,  toute  Table  d'addition  de  16  nombres  donne 
1 1  52  Tables  distinctes  dans  le  cas  général  ;  mais  on  doit  diviser 
ce  nombre  par  8  et  le  ramener  à  144  si  l'on  ne  considère  pas 
comme  différentes  les  sept  Tables  déduites  d'une  première  par  ro- 
tation ou  par  symétrie. 

Ces  Tables  jouissent  de  propriétés  remarquables  ;  on  observera 
d'abord  que  la  somme  des  termes  de  chacune  des  diagonales  reste 
constante  et  égale  à 

a-hb-hc-i-d-\-p-\-q-+-r-hs; 

plus  généralement,  si  l'on  prend  quatre  termes  de  telle  sorte  qu'il 
n'y  en  ait  pas  deux  dans  une  même  ligne  ou  dans  une  même 
colonne,  la  somme  des  termes  reste  constamment  la  même  et 
égale  à  la  précédente.  D'ailleurs,  le  nombre  de  ces  groupes  de 
quatre  termes  est  évidemment  égal  au  nombre  des  permutations 
I.  2.  3.  4  des  quatre  premiers  nombres,  comme  dans  le  problème 
des  quatre  tours  sur  l'échiquier  de  quatre  cases  de  côté. 

De  plus,  si  l'on  considère  quatre  nombres  placés  aux  sommets 
d'un  carré  ou  d'un  rectangle  quelconque  de  la  Table,  on  reconnaît 
immédiatement  que  la  somme  des  nombres  d'une  diagonale  égale 
la  somme  des  nombres  de  l'autre  diagonale  ;  on  a  ainsi  trente- 


Cinquième  récréation. 


SIX  égalités  à  deux  boules  et  pas  plus,  dans  le  cas  général.  On  a 
donc  le  théorème  suivant  : 

Toute  Table  générale  d addition  de  sei^e  nombres  don?ie 
II 52  Tables  distinctes;  elle  renferme  toujours  vingt-quatre 
sommes  de  quatre  nombres  égales  à  la  constante^  et  trente-six 
égalités  de  sommes  variables  entre  deux  groupes  de  deux 
nombres. 

On  a  évidemment  un  théorème  semblable  pour  une  Table  de 
multiplication,  en  remplaçant  les  sommes  par  des  produits. 


(^^Ir 


LE  CARRE  MAGICO-MAGIQUE. 

Prenons  l'une  quelconque  des  Tables  d'addition,  échangeons 
entre  eux  les  nombres  opposés  par  rapport  au  centre  du  carré,  en 
exceptant  ceux  des  diagonales  ;  puis,  échangeons  le  quartier 
supérieur  de  droite  avec  le  quartier  inférieur  de  gauche;  nous 
obtenons  le  carré  fondamental  magico-magique  de  Fermât.  Ce 
carré  a  ses  quartiers  égaux.  A  toute  Table  d'addition  correspond 
un  carré  à  quartiers  égaux,  les  vingt-quatre  égalités  à  la  constante 
donnent  les  vingt-quatre  égalités  à  quatre  boules  que  nous  avons 
démontrées  plus  haut;  il  en  est  de  même  pour  les  trente-six  éga- 
lités à  deux  boules.  Réciproquement,  tout  carré  à  quartiers  égaux 
donne  naissance  à  une  Table  d'addition,  puisque,  par  la  transfor- 
mation inverse,  les  trente-six  égalités  à  deux  boules  sont  les  con- 


Les  carrés  magiques  de  Fermât.  1 1 3 

dirions  d'existence  d'une  Table  d'addition.  On  a  donc  le  théorème 
suivant: 

Pour  former  avec  sei:{e  nombres  pris  au  hasard  un  carré 
magique  à  quartiers  égaux,  il  faut  et  il  suffit  que  l'on  puisse 
former  avec  ces  sei:{e  nombres  une  Table  d'addition  ;  et  si  tous  les 
nombres  sont  distincts,  le  nombre  des  carrés  est  égal  à  1 152 
ou  8  X  144. 

Il  résulte  encore  de  la  remarque  qui  termine  le  paragraphe  pré- 
cédent que  l'on  peut  construire  des  carrés  magiques  tels  que  les 
sommes  soient  remplacées  par  des  produits;  il  suffit  de  remplacer 
la  Table  d'addition  par  une  Table  de  multiplication  correspon- 
dante, ap  désignant  alors  le  produit  et  non  la  somme  de  a  et  j». 

FORMULES   d'arithmétique. 

Reprenons  le  carré  fondamental;  considérons  ap,  bq,  ..., 
comme  des  produits  ;  faisons  la  somme  des  nombres  de  chaque 
ligne  en  donnant  le  signe  —  aux  nombres  de  la  première  diago- 
nale, et  faisons  le  carré  des  sommes  obtenues;  nous  avons 

[  —  ap  -h  es  -h  dq  -T-  br]- 
■+■  [-f-  dr  —  bq  -r-  as  4-  cp]'- 
-h  [-h  bs  -h  dp  —  cr  -T-  aq]' 
-\-  [ -r-  cq  -h  ar  -{-  bp  —  dsY 

En  faisant  la  somme,  les  doubles  produits  disparaissent   à 

E.  Llcas.  —  Récrcatio:s  matltâm.,  IV.  8 


114  Cinquième  récréation. 


cause  des  égalités  à  deux  boules  ;  il  ne  reste  que  des  carrés  dont 
la  somme  représente  le   produit  des  deux  sommes  de  quatre 

carrés 

[a'  -^b'-  +  c'--\-  d'-)  ip'-  +  ^2  ^  r^  4-  s-]. 

Le  procédé  que  nous  venons  d'exposer  est  plus  simple  que  tous 
ceux  qui  ont  été  donnés  jusqu'ici  pour  obtenir  cette  formule.  Si, 
sans  changer  a,  b,  c,  d,  on  permute  de  toutes  les  manières  pos- 
sibles les  nombres  p,  q,  r,  s,  on  obtient  ainsi  vingt-quatre  for- 
mules, et  d'ailleurs  on  ne  peut  en  obtenir  davantage  avec  un 
seul  terme  négatif  dans  chaque  parenthèse.  Si  l'on  change  ensuite 
le  signe  des  termes  contenant  j?  dans  ces  formules,  on  en  obtient 
vingt-quatre  autres  dans  lesquelles  chaque  somme  contient  deux 
signes  —  ou  n'en  contient  aucun. 

Ainsi,  la  question  de  la  décomposition  du  produit  des  sommes 
de  quatre  carrés  en  quatre  carrés  est  inséparable  de  la  théorie  des 
carrés  magiques  à  quartiers  égaux. 


<%gë%^ 


LES    NEUF    TYPES    DES    CARRES    A   QUARTIERS. 

Nous  appellerons  conjugués  les  nombres  d'une  Table  d'addition 
symétriquement  placés  par  rapport  au  centre  de  la  Table;  ainsi, 
dans  la  Table  de  l^fig.  68,  ap  et  ds  sont  conjugués,  ainsi  que  aq 
et  dr.  Dans  le  carré  fondamental,  les  nombres  conjugués  sont 
encore  placés  deux  par  deux,  symétriquement  par  rapport  au 
centre  du  carré.  Si  Ton  joint  ces  nombres  par  des  lignes,  on  ob- 
tient la  figure  que  nous  appellerons  le  type  A  ou  carré  conjugué 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


par  rapport  au  centre.   Par  des  échanges  successifs,  qui  s'ap- 
pliquent à  tous  les  carrés  à  quartiers  égaux,  nous  allons  en  obtenir 


Fig.  69. 


S    °r 

es 

dq 

h-      i 

dr 

iq 

as 

'T         ; 

bs 

dp 

cr 

cq 

«V 

ai> 

Ip 

ds 

Fig.  70  (Type  a;. 


l*autres;  et  les  divers  traits  réunissant  les  nombres  conjugués 
)roviennent  des  huit  égalités  des  groupes  de  deux  boules  opposées 
'de  la  Table  d'addition. 

Par  l'échange  des  deux  dernières  lignes,  puis  des  deux  dernières 


Fig.  71. 


Fig.  72  (Type  B}. 


ap 

es 

br 

d^ 

dr 

bq 

'y 

as     \ 

°} 

ca- 

ds 

bp 

dp 

<u, 

cr 

colonnes,  nous  obtenons  le  type  B  que  nous  appellerons  con- 
jugué par  diagonales  des  carrés  de  trois. 

L'échange  des  quartiers  opposés  conserve  les  types  A  et  B  ; 
réchange  des  rangées    intérieures  conserve    le  type  A,   mais 


ii6 


Cinquième  récréation. 


transforme  le  type  B  dans  le  type  G  que  nous  appellerons  con/'z/- 
gué  par  diago7:ales  de  quartiers. 


Fîg.  73. 


ap 

br 

M 

^  ! 

«V 

cb 

or 

bp 

<&. 

CP 

h 

,u      1 

bs 

CUf 

dp 

cr 

Fig.  74  (Type  C^, 


Échangeons  dans  chacun  des  quartiers  du  carré  G  les  nombres 
-des  secondes  lignes;  puis  échangeons,  sans  les  tourner,  les  quar- 


Fig.  76.  (Type  D). 


Fig 

75. 

ap 

br 

es 

d^ 

ds 

cq 

bp 

or 

hq 

as 

dr 

cp 

cr 

dp 

eu, 

hs 

tiers  inférieurs  :  nous  obtenons  le  type  D  ou  carré  conjugué  par 
lignes  voisines  [fig.  75  et  76). 

En  opérant  par  colonnes  sur  le  type  G,  comme  nous  avons 
opéré  par  lignes,  c'est-à-dire  en  échangeant,  dans  chacun  des 
•quartiers  du  carré  G,  les  nombres  des  secondes  colonnes;  puis, 
sans  les  tourner,  les  deux  quartiers  de  droite,  nous  obtenons  le 


Les  carrés  massiques  de  Fermai. 


117 


tvpe  D'  ou  carré  conjugué  par  colonnes  voisines  [fig.  77  et  78), 
Fig.  77.  Fig.  78  (Type  D')- 


ap 

as 

txj 

c 

«7 

Ir 

dp 

es 

dr 

aq 

Cl 

bp 

bs 

«y 

ai' 

dq 

• — •  • — • 

• — •  • — • 

• — •  • — • 

• — •  • — • 


Bien  que  les  figures  des  types  D  et  D'  soient  symétriques  l'une 


Fig.  80  (Type  E). 


Fig. 

79- 

ap 

es 

br 

dq 

^ 

dr 

as 

f 

1      d^ 

bp 

"7 

ar 

1 

aq 

dp 

is 

Fig.  81. 


ap 

^ 

ds 

cr 

dr 

os 

aq 

bp 

«»? 

dp 

br 

as 

hs 

ar 

9» 

éq 

Fig.  82  (TypeE'V 


le  l'autre  par  rapport  à  la  première  diagonale,  les  carrés  obtenus 


ii8 


Cinquième  récréation. 


sont  bien  distincts,  car,  si  la  première  ligne  de  D'  est  identique 
à  la  première  colonne  de  D,  il  n'en  est  plus  de  même  pour  les  se- 
condes rangées. 

Si,  dans  le  type  D,  on  fait  l'échange  des  rangées  intérieures,  on 
obtient  le  type  E  ou  carré  conjugué  par  lignes  alternées 
{fig.  79  et  80);  de  même  du  type  D'  on  déduit  le  type  E'  ou 
carré  conjugué  par  colonnes  alternées  [fig.  81  et  82). 

Enfin,  si  dans  les  types  E  et  E'  on  échange  les  deux  dernières 

Fig.  84  (Type  ¥]. 


Fig. 

83. 

ap 

^ 

es 

hi 

cr 

&r 

CUJ 

dp 

h 

cp 

dr 

as 

ds 

an 

hp 

'^ 

Fig. 

85. 

ap 

cr 

h 

1 
d^ 

bs 

A, 

or 

cp 

dr 

bp 

es 

a^ 

C7 

as 

dp 

hr 

Fig.  86 

(Type  F'). 

•     ~~-« 

•'■'     #^ 

— «^^^ 

•"■"^ 

=i~~~~^ 

lignes,  puis  les  deux  dernières  colonnes,  on  obtient  le  type  F 
[fig.  83  et  84)  ou  carré  conjugué  par  lignes  opposées,  et  le 
type  F'  conjugué  par  colonnes  opposées  [fig.  85  et  86). 

En  se  reportant  à  la  Table  d'addition  et  à  toutes  ses  trans- 


Les  carrés  magiques  de  Fermât.  1 1 9 

formations,  on  obtient  ce  théorème  :  Les  carrés  à  quartiers 
égaux  se  partagent  également  en  neuf  types  distincts  ;  en  im- 
posant à  un  élément  quelconque  une  case  déterminée,  le  nombre 
des  solutions  pour  chaque  type  est  égal  à  128. 

l'addition  d'équidifférences. 

Reprenons  la  Table  d'addition  de  seize  nombres;  nous  suppo- 
serons rt,  b,  c,  d  et  p,  5,  r,  s  rangés  dans  l'ordre  croissant  et  de 

plus 

b  ^p<  a-h  q, 

de  telle  sorte  que  ap  et  bp  sont  les  deux  plus  petits  nombres  delà 
Table. 

Si  l'on  échange  la  première  ligne  des  quartiers  de  droite  avec 
la  seconde  ligne  des  quartiers  de  gauche,  on  obtient  la  Table  II; 
mais,  pour  que  cette  nouvelle  figure  représente  une  Table  d'ad- 
dition, il  faut  et  il  suffit  que  l'on  ait  les  deux  relations 

a-^  d=:b  -i-  c        et        p  -{-s  =^r  -h  q. 

Si,  dans  la  Table  II,  on  échange  deux  quartiers  opposés,  par 
exemple,  le  quartier  supérieur  de  droite  avec  le  quartier  inférieur 
de  gauche,  on  obtient  une  nouvelle  Table  d'addition.  D'ailleurs, 
il  ne  saurait  exister  plus  de  trois  Tables  distinctes;  on  observera, 
en  outrCj  que  les  nombres  conjugués  se  trouvent  toujours  accou- 
plés deux  par  deux,  comme  dans  la  première,  et  que  les  nombres 
placés  sur  les  deux  diagonales  sont  les  mêmes  dans  les  trois 
Tables. 


Cinquième  récréation. 


Chacune  des  Tables  d'addition  fournit  un  nombre  égal  de 
carrés  à  quartiers;  on  a  ainsi 

8  X  433  =  3456 

carrés  qui  correspondent  aux  carrés  a,  p,  y  des  Tables  de  Fré- 
nicle. 

On  a,  en  résumé,  les  théorèmes  suivants  : 

Si  l* on /orme  avec  deux  équidifférences 

a.b  :  c.d        et        p.q  :  r.s 

c'est-à-dire  avec  huit  nombres  différents.,  mais  tels  que 

a  -+-  d=  b  -h  c        et       p  -h  s  =  q  -\-r, 

trois  Tables  d'addition;  d'après  les  Tables  I,  II,  III,  on  pourra 
former  ensuite  3456  carrés  magiques  à  quartiers  égaux. 

La  somme  des  huit  nombres  placés  dans  les  deux  diagonales 
égale  la  sommeldes  huit  autres  nombres. 

Il  en  est  de  même  de  la  somme  des  carrés  et  de  la  somme  des 
cubes. 


LES  CARRÉS^S  DES  TABLES  DE  FRENICLE. 

Si,  dans  le  carré  du  type  F  {Jîg.  83),  on  échange  les  nombres 
des  cases  intérieures  des  lignes  extrêmes,  on  obtient  un  autre 
carré;  mais,  pour  que  ce  nouveau  carré  soit  magique,  il  faut  et  il 
suffit  que  la  somme  des  boules  ar  et  dq  soit  égale  à  la  somme  des 


Les  carrés  magiques  de  Fermât. 


i 


boules  bp  et  cs^  c'est-à-dire  que  Ton  ait 

a-hd — \b -\- c)  =.p -it- s  —  'q-[- r). 

Par  conséquent,  lorsque  cette  relation  sera  vérifiée,  on  déduira 
du  type  F  et  du  type  F'  deux  nouveaux  carrés;  mais,  bien  que 
ceux-ci  conservent  le  type  primitif,  nous  les  désignerons  par  G 
etc. 

Dans  le  cas  particulier  de  la  Table  d'addition  de  deux  équi- 
différences,  la  relation  précédente  se  trouve  vérifiée,  puisque  les 
deux  membres  sont  nuls;  dans  ce  cas,  le  nombre  des  carrés  G  et 
G'  est  triplé,  on  a  donc  384  G  et  384  G'  qui  correspondent  à 
96  carrés  0  de  Frénicle,  que  l'on  doit  multiplier  par  8,  à  cause  de 
la  rotation  et  de  la  symétrie;  dans  le  cas  particulier  de  deux  équi- 
différences,  les  deux  carrés  médians  ont  des  sommes  égales  à  la 
constante  ;  ainsi  cela  a  lieu  pour  les  carrés  que  nous  venons  de 
former  pour  bq.  cp.,  bs,  cr  et  aq.  dp,  as,  dr. 


SIXIÈME   RÉCRÉATION. 

LA   GÉOMÉTRIE   DES  RÉSEAUX 
ET    LE   PROBLÈME   DES   DOxMINOS. 


À  Monsieur  G.    Tarry, 
sous-directeur  des  contributions  diverses^  à  Alger. 

«  Combien  de  temps  une  pensée, 
Vierge  obscure,  attend  son  époux!  » 

(BÉRANGEB.  ) 

«  Les  mêmes  pensées  poussent  quelquefois  tout  autre- 
ment dans  un  autre  que  dans  leur  auteur;  infertiles 
dans  leur  champ  naturel,  abondantes  étant  trans- 
plantées. » 

(Pascal.  —  Pensées.) 


SIXIÈME   RECREATION. 

LA  GÉOxMÉTRIE  DES  RÉSEAUX 
ET   LE  PROBLÈME  DES   DOMINOS. 


SUR    LE   JEU    DE    DOMINOS. 

ON  s'était  proposé,  depuis  bien  des  années,  de  recher- 
cher le  nombre  de  toutes  les  manières  possibles  d'ali- 
gner les  vingt-huit  dés  d'un  jeu  de  dominos,  en  se 
conformant  à  la  règle  ordinaire.  Mais  on  ne  connaissait  Jusqu'à 
présent  qu'une  seule  solution  de  ce  problème  fort  difficile  qui 
semblait  rebelle  à  toutes  les  méthodes  d'investigation.  Le  nombre 
des  solutions  du  problème  des  dominos  a  été  donné  pour  la 
première  fois  en  1859  par  le  D""  Reiss,  de  Francfort,  auquel  on 
doit  encore  la  théorie  mathématique  du  Jeu  du  Solitaire  [Ré- 
créations mathématiques,  t,  I,  p.  118).  Le  travail  du  D'  Reiss 
sur  le  jeu  de  dominos  a  été  publié,  après  la  mort  de  l'auteur, 
dans  les  Annali  di  Matematica,  à  Milan,  en  1871.  Mais  son 
Mémoire,  bourré  de  chiffres,  remplit  cinquante-huit  pages  in-4". 


120  Sixième  récréation. 


et  les  développements  qu'il  comporte  renferment  des  tableaux 
numériques  et  des  calculs  nombreux,  trop  compliqués  pour  être 
intéressants  et  trop  exclusifs  puisqu'ils  n'avaient  d'autre  but  que 
la  solution  du  problème  en  question.  Dans  le  second  Volume  de 
nos  Récréations  (p.  67),  nous  avions  même  émis  quelques  doutes 
sur  l'exactitude  de  la  solution,  mais  nous  devons  avouer  que  notre 
critique  était  mal  fondée.  Le  résultat  obtenu  est  celui-ci  :  Le 
nombre  des  manières  de  disposer  en  lignes,  en  comptant  pour 
distinctes  les  mêmes  dispositions  rectilignes  de  droite  à  gauche 
et  de  gauche  à  droite,  est 

7  959   229  931    520  :=  2*^.  3*.  5.  7.  423  I  . 

Ce  nombre  doit  donc  être  considéré  comme  exact  ;  nous  avions 
déjà  reçu  en  i885  un  travail  assurément  ingénieux  de  M.  l'abbé 
Jolivald,  qui  simplifiait  beaucoup  la  solution  du  problème  et  qui 
confirmait  l'exactitude  du  résultat  donné  par  le  D'  Reiss. 


UNE   REMARQUE    DE   M     LAISANT. 

M.    Laisant  avait  fait  la  jolie  remarque  suivante,  que  nous'i 
avions  publiée  à  la  fin  de  notre  second  Volume  (Note  I,  p.  22g]. i 
Si  l'on  supprime  les  doubles  du  jeu  de  dominos,  il  reste  vingt  et 
un  dés  que  Ton  peut  figurer  de  la  manière  suivante  (Jîg:   87 
On  trace  un  heptagone  et  l'ensemble  de  toutes  ses  diagonales;  en 
d'autres  termes,  on  prend  sept  points  que  l'on  désigne  par  0,1, 
2,  3,  4,  5,  6,  et  que  l'on  joint  deux  à  deux  de  toutes  les  manières 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  127 

possibles.  La  ligne  i-3,  par  exemple,  représente  l'as-trois;  la 
ligne  0-4  représente  le  blanc-quatre  et  ainsi  des  autres.  Par  consé- 
quent, le  problème  de  placer  en  rond  les  vingt  et  un  dés  du  jeu 
de  dominos,  sans  les  doubles,  revient  à  décrife  d'un  seul  trait 
continu  l3.Jîg.  87,  en  passant  sur  toutes  les  lignes  une  seule  fois, 
sans  faire  sauter  la  plume  ou  le  crayon,  et  sans  fragmenter  les 

Fig.  87. 


Jeu  de  dominos. 

diagonales.  Mais,  puisque  chaque  double  peut  occuper  trois 
places  dans  une  disposition  circulaire,  et  qu'il  y  sept  doubles,  on 
multipliera  le  résultat  obtenu  par  3"^  =:  2187  pour  avoir  les  dis- 
positions circulaires  des  vingt-huit  dés  du  jeu  de  dominos.  Il 
taudra  multiplier  le  dernier  résultat  par  28  pour  obtenir  le 
nombre  des  dispositions  rectilignes. 


I2S  Sixième  récréation. 


SOLUTIONS   DE    MM.    JOLIVALD    ET   TARRY. 

/ 

Au  Congrès  de  V Association  française  pour  l'avancement  des 
Sciences,  tenu  à  Nancy  en  1886,  M.  G.  Tarry,  contrôleur  des 
contributions  diverses,  aujourd'hui  sous-directeur  à  Alger,  a  pré- 
senté un  Mémoire  fort  intéressant  qui  venait  confirmer  de  nou- 
veau les  résultats  obtenus  par  le  docteur  Reiss  et  l'abbé  Joli vald, 
La  simplicité  de  la  méthode  employée,  qui  repose  sur  la  remarque 
précédente,  et  la  rapidité  du  procédé  permettent  d'appliquer  ce 
mode  de  recherches  à  un  grand  nombre  d'autres  questions  de  la 
Géométrie  de  situation.  M.  Tarry  et  M.  l'abbé  J oli vald  ont  appli- 
qué la  même  méthode,  chacun  de  leur  côté,  à  la  recherche  du 
nombre  des  dispositions  rectilignes  des  dés  d'un  jeu  de  dominos 
allant  jusqu'au  double  huit.  En  d'autres  termes,  ils  ont  trouve 
le  nombre  des  circuits  formés  par  les  côtés  et  les  diagonales  (non 
fragmentées)  d'un ennéagone  régulier; ce  nombre  est  le  suivant: 

91 1  520057021  235  200. 

La  décomposition  de  ce  nombre  en  facteurs  donne 

2'«.3".52.7i  1.40787. 

La  méthode  de  M.  Tarry  constitue  donc  un  très  grand  progrè 
dans  l'étude  des  questions  de  ce  genre.  Mais,  si  l'on  tient  comptl 
de  la  décomposition  en  facteurs  pour  le  nombre  précédent  et  poul 
celui  de  Reiss,  on  doit  penser  que  l'on  finira  bien  par  trouver  de3 
méthodes  encore  plus  expéditives. 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  129 

Avant  d'exposer  cette  méthode,  nous  placerons  ici  quelques 
considérations  générales  sur  plusieurs  problèmes  de  la  Géométrie 
de  situation;  ces  problèmes  se  rapportent  directement  à  l'Arith- 
métique, car  leur  solution  dépend  de  la  théorie  des  combinai- 
sons. 

LES  RÉSEAUX  GÉOMÉTRIQUES. 

Un  réseau  géométrique  est  le  système  formé  par  des  points 
A,  B,  C.  ...,  disposés  d'une  manière  quelconque  dans  le  plan 
ou  dans  l'espace  et  reliés  entre  eux  par  une  ou  plusieurs  lignes 
droitesou  courbes  que  Ton  appelle  chemins.  Les  points  A,  B,C. ... 
sont  appelés  carrefours  ;  un  carrefour  est  dit  pair  ou  impair, 
suivant  que  le  nombre  des  chemins  qui  y  aboutissent  est  pair  ou 
impair.  Un  réseau  est  continu  quand  un  mobile  placé  sur  l'un 
des  chemins  ou  l'un  des  carrefours  peut  se  rendre  à  un  autre 
point  quelconque  sans  quitter  les  chemins. 

Cela  posé,  on  a  le  théorème  suivant,  dû  à  Euler,  dont  nous 
avons  déjà  donné  une  démonstration  moins  simple  [Récréations 
mathématiques,  t.  I,  p.  238).  Lorsqu'un  réseau  renferme  des 
carrefours  impairs,  ceux-ci  sont  en  nombre  pair.  En  effet,  si  l'on 
compte  le  nombre  de  tous  les  chemins  qui  aboutissent  à  chacun 
des  carrefours,  la  somme  de  tous  les  nombres  obtenus  est  un 
nombre  pair,  puisque  chaque  [chemin  a  été  compté  deux  fois. 
Cette  somme  étant  un  nombre  pair,  il  faut  nécessairement  que, 
parmi  les  nombres  entiers  qui  l'ont  fournie,  ceux  qui  sont  im- 
pairs soient  en  nombre  pair. 

E.  Lucas.  —  Récréations  mathém..  IV.  9 


Sixième  récréation. 


Nous  croyons  intéressant  de  donner  quelques  exercices  relatifs 
aux  réseaux  géométriques. 

Exercice  I.  —  Calculer  le  nombre  des  sauts  du  cavalier  des 
échecs  sur  un  échiquier  rectangulaire  formé  de  p  lignes  et  de 
q  colonnes. 

On  peut  passer  de  l'une  des  [q  —  i)  premières  colonnes  à  la 
colonne  suivante  par  [p  —  2)  sauts  descendants  et  par  le  même 
nombre  de  sauts  ascendants  ;  on  a  donc 

2[p—2]   [q~  i) 

sauts,  et  un  nombre  égal  en  chevauchant  de  la  droite  vers  la 
gauche. 

De  même,  en  passant  à  la  ligne  précédente  ou  à  la  suivante,  il 
y  a  un  nombre  de  sauts  égal  au  double  de 

2  (j?— i)   {q  —  2). 

Donc,  le  nombre  des  sauts  du  cavalier  sur  Véchiquier  rectan- 
gulaire de  pq  cases,  en  comptant  V  aller  et  le  retour  y  est  égal  au 
double  de 

[2p—?>]  [2q—3]  -  I. 

Plus  généralement,  si  le  saut  du  cavalier  se  compose  de  r  pas 
dans  un  sens  et  de  s  pas  dans  l'autre,  en  supposant  r  et  5  plus 
petits  que  p  et  q,  le  nombre  des  sauts  du  cavalier,  en  comptant 
l'aller  et  le  retour,  est  le  double  de  l'expression 

[zp  —  r — s)  [2q  —  r  —  s]  —  (r  —  sY\ 

cependant,  on  doit  diviser  ce  nombre  par  2,  lorsque  l'un  de| 
nombres  r,  5,  ou  (r  —  s]  est  nul. 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  t3i 

On  calcule  le  nombre  des  pas  du  roi  en  considérant  celui-ci 
comme  l'ensemble  de  deux  cavaliers  dont  l'un  des  pas  est  i  et 
l'autre  o  ou  i.  On  trouve  ainsi  le  double  de 

4.pq  —  3p —  3^-T-  2. 

Sur  l'échiquier  dep-  cases,  la  tour  peut  être  considérée  comme 
ll'ensemble  de  cavaliers  dont  l'un  des  pas  est  nul,  et  dont  l'autre 
(est  l'un  quelconque  des  entiers  plus  petits  que^.  On  trouve  ainsi 
|ue  le  nombre  des  déplacements  de  la  tour  sur  l'échiquier  de  ^- 
ises  est  le  double  de 

Sur  l'échiquier  de  p-  cases,  le  système  des  deux  fous  peut  être 

[considéré  comme  l'ensemble  de  cavaliers  dont  les  pas  égaux  sont 

)us  les  nombres  entiers  plus  petits  que  p.  On  trouve  ainsi  que 

nombre  des  déplacements  des  fous  sur  l'échiquier  de  p^  cases 

st  le  double  de 

\p{p—l)    12^  —  1). 

Enfin  la  reine  peut  être  considérée,  dans  son  mouvement, 
"bomme  l'ensemble  d'une  tour  et  des  deux  fous;  par  suite,  le 
nombre  de  ses  déplacements  est  le  double  de 


^^p[p—i]  (5p—  i 


Exercice  II.  —  Le  nombre  des  manières  de  placer  deux  reines 
sur  l'échiquier  de/»^  cases,  de  telle  sorte  qu'elles  ne  soient  pas  en 
prise,  c'est-à-dire  qu'elles  ne  soient  pas  situées  sur  une  même 


i32  Sixième  récréation. 


ligne  parallèle  aux  bords  et  aux  diagonales  de  l'échiquier,  est 

^P  (P— 0    (P  — 2)  (3p—i). 

En  effet,  ce  nombre  est  égal  à  l'excès  du  nombre  des  combi- 
naisons des  jp^  cases  prises  deux  à  deux  sur  la  moitié  du  nombre 
des  déplacements  possibles  de  la  reine,  ou 

pi  (t7- —  I  ) pip —  I  )  {3p  —  I  ) 

2  3 

Le  même  calcul  peut  s'appliquer  à  d'autres  pièces  de  l'échiquier, 
et  l'on  trouve  pour  deux  rois 

{p—  l)   ip  —  2)  [p^  -i-  3p  —  2  ), 

et  pour  deux  cavaliers 

^{p  —  i)  (p^—p^---Sp-\-i6). 

Exercice  III.  Le  problème  des  reines.  —  Ce  problème  est 
traité  complètement  jusqu'aux  échiquiers  de  1 1  cases  de  côté 
dans  nos  Récréations  mathématiques  (t.  I,  2®  édition). 

Le  lecteur  trouvera,  dans  la  Récréation  sur  le  Saut  du  Cavalier 
au  Jeu  des  Echecs ^  d'autres  exercices  du  même  genre  ('  ). 

(•)  Nous  avons  trouvé,  dans  les  manuscrits  de  notre  ami  si  regretté,  trente 
à  quarante  pages  de  notes  sur  cette  Récréation;  mais  les  lacunes  étaient  trop 
nombreuses  pour  que  nous  ayons  osé  nous  permettre  de  rédiger  la  récréa- 
tion sur  le  Saut  du  Cavalier.  (  Voir  la  Note  I.)  D. 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  1 33 


DU   TRACE   DES   RESEAUX. 

La  question  de  décrire  d'un  seul  trait,  sans  omission  ni  répéti- 
tion, un  réseau  géométrique  a  été  exposée  pour  la  première  fois, 
par  Euler,  dans  son  Mémoire  des  Ponts  de  la  Pregel.  Plus  récem- 
ment, cette  question  a  été  développée  par  M.  Emile  Lemoine,  au 
congrès  d'Alger  (  i88i  ),  et  par  M.  l'abbé  Lecointe,  dans  le  Cos- 
mos. Les  résultats  obtenus  se  réduisent  aux  théorèmes  suivants 
dont  on  trouvera  les  démonstrations  dans  le  premier  Volume  de 
nos  Récréations  (t.  1,  p.  47  et  239). 

Théorème  1.  —  Tout  réseau  continu  qui  ne  contient  que  des 
carrefours  pairs  peut  être  décrit  d'un  seul  trait  formant  un  circuit 
fermé,  sans  omission  ni  répétition,  quel  que  soit  le  point  de  départ 
qui  coïncide  avec  le  point  d'arrivée.  (Euler.) 

Théorème  II.  —  Tout  réseau  continu  à  2n  points  impairs  peut 
être  décrit  en  n  traits  continus,  sans  omission  ni  répétition,  et 
non  en  un  moindre  nombre.  (Glausen.  ) 

Théorème  III.  —  Tout  réseau  continu  peut  être  décrit  d'un 
seul  trait,  en  passant  deux  fois  sur  les  lignes  du  réseau  sans  qu'il 
soit  nécessaire  d'en  connaître  le  dessin.  (Trémaux.) 

Mais  les  théorèmes  précédents  ne  portent  que  sur  la  possibilité 
ou  l'impossibilité  de  la  description  des  réseaux  en  un  ou  plusieurs 
traits,  et  non  pas  sur  le  nombre  des  tracés  différents.  Le  théorème 
de  M.  Tarry  sur  la  suppression  successive  des  carre/ours,  et  le 


i34  Sixième  récréation. 


théorème  que  nous  avons  ajouté  sur  la  suppression  des  impasses 
permettent  de  résoudre  la  question  dans  les  cas  les  plus  simples. 


<^^ 


PROCEDE    DE   M.  FLEURY. 

M.  Fleury,  chef  d'institution  à  Marseille,  a  publié  une  petite 
Note  indiquant  un  procédé  assez  simple  pour  décrire  les  figures 
d'un  seul  trait  (^).  La  figure  étant  tracée  à  la  craie  sur  le  ta- 
bleau noir,  la  question  consiste  à  en  décrire  une  pareille,  ou  à 
en  effacer  successivement  les  lignes  avec  le  doigt  ou  un  chiffon. 
Pour  faciliter  l'explication,  nous  supposerons  que  c'est  un  pin- 
ceau qui  suit  et  efface  à  mesure  les  lignes  de  la  figure  donnée  et 
que  la  figure  a  deux  points  impairs.  Si  tous  les  points  sont  pairs, 
il  suffit  d'effacer  un  fragment  d'un  chemin  quelconque,  pour 
donner  à  la  figure  deux  points  impairs.  Nous  appellerons  figure 
réduite  toute  figure  composée  seulement  des  lignes  qui  ne  sont 
pas  encore  effacées;  point  d'arrivée,  le  point  où  se  trouve  à  un 
instant  quelconque  le  pinceau  qui  efface,  et  point  final  celui  par 
lequel  doit  se  terminer  l'opération.  Le  point  d'arrivée  et  le  point 
final  sont  nécessairement  les  deux  carrefours  impairs  de  la  figure 
réduite.  Il  n'y  a  qu'au  moment  où  le  pinceau  passe  parle  point 
final  que  la  figure  a  tous  ses  carrefours  pairs.  Pendant  toute  l'o- 
pération, le  nombre  des  points  impairs  étant  nécessairement  deux 
ou  zéro,  une  figure  réduite  ne  peut  devenir  impossible  à  décrire 

(')  Journal  de  Mathématiques  élémentaires,  i885,  p.  aSy,  — Deux  pro- 
blèmes de  Géométrie  de  situation. 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  i35 

qu'en  se  partageant  en  deux  parties  qui  ne  communiquent  plus 
entre  elles.  Nous  appellerons  chemin  isolant  un  chemin  réunis- 
sant deux  carrefours  A  et  B,  de  telle  sorte  que  la  suppression  du 
chemin  divise  la  figure  en  deux  réseaux  isolés  l'un  de  l'autre. 
Cela  posé,  la  règle  très  sûre  et  très  simple  pour  décrire  le  réseau 
d'un  seul  trait,  c'est  de  ne  prendre  un  chemin  isolant  que  lors- 
qu'il n'en  reste  plus  d'autre  à  prendre. 

Cette  condition  est  nécessaire,  car,  si,  arrivé  en  A,  nous  prenons 
le  chemin  isolant  AB,  lorsqu'un  autre  chemin  partant  du  carre- 
four A  n'a  pas  été  parcouru,  la  figure  réduite  sera  partagée  en 
deux  réseaux  partiels  isolés.  La  condition  est  d'ailleurs  suffisante, 
car  le  point  A  étant  impair,  comme  point  d'arrivée,  il  devient 
pair  par  la  suppression  du  chemin  AB,  et  alors  on  peut  décrire 
le  réseau  partiel  qui  aboutit  au  point  A,  et  revenir  en  A,  après 
quoi  l'on  prendra  le  chemin  AB,  pour  aller  décrire  l'autre  réseau 
partiel  qui  contient  le  point  final;  car,  si  ce  point  était  sur  le  ré- 
seau partiel  contenant  A,  ce  réseau  n'aurait  qu'un  seul  point 
impair,  ce  qui  est  impossible. 


c^^lr 


PEREGRINATIONS   D  UNE   FOURMI. 

Lorsque  l'on  prend  pour  point  de  départ  un  point  quelconque 
d'un  réseau  à  carrefours  pairs,  on  peut  partir  de  ce  point  dans 
deux  sens  différents  pour  revenir  au  point  initial;  par  conséquent, 
le  nombre  des  circuits  complets  est  toujours  un  nombre  pair,  et 
le  nombre  des  circuits  est  le  même,  quel  que  soit  le  point  de  dé- 


i36  Sixième  récréation. 


part.  Nous  donnerons,  comme  premier  exemple,  le  problème  sui- 
vant; on  pourrait  en  faire  un  sujet  de  fable  avec  moralité  sur  la 
gourmandise  :  Le  Melon  et  la  Fourmi. 

Un  melon  a  douze  côtes;  une  fourmi  visite  successivement 
les  douze  vallons  qui  séparent  les  côtes  et  revient  à  son  point  de 
départ.  Quel  est  le  nombre  des  manières  d'accomplir  ce  voyage 
de  pérégrinations?  —  La  fourmi,  placée  en  un  point  d'un  vallon, 
peut  d'abord  choisir  entre  deux  sens;  mais,  arrivée  à  l'un  des 
pôles  du  melon,  elle  a  le  choix  entre  onze  vallons,  et,  lorsque  l'un 
de  ceux-ci  est  parcouru,  il  lui  en  reste  dix  autres,  et  ainsi  de  suite. 
Par  conséquent,  le  nombre  cherché  est  le  double  du  produit  des 
onze  premiers  nombres,  ou  39916800.  Dans  le  cas  général,  pour 
un  melon  quelconque,  c'est  le  double  du  produit  de  tous  les 
nombres  entiers  plus  petits  que  le  nombre  des  côtes. 

On  doit  observer  qu'on  ne  trouverait  pas  le  même  résultat  en 
partant  du  pôle  d'un  melon.  En  effet,  en  partant  àtcQ  point,  on  a 
le  choix  entre  douze  chemins,  puis  onze,  puis  dix,  ...,de  telle 
sorte  que  le  nombre  des  chemins  est  égal  au  produit  des  douze  pre- 
miers nombres,  c'est-à-dire  à  six  fois  le  résultat  précédent.  Mais 
ces  parcours,  distincts  dans  le  temps,  ne  sont  pas  distincts  comme 
circuits  dans  l'espace.  Il  y  a  une  différence  de  même  nature  dans 
le  nombre  de  permutations  d'objets  disposés  sur  une  ligne  droite 
ou  sur  une  circonférence,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  expliqué 
dans  le  calcul  du  nombre  des  dîners  sur  la  table  ronde  (Re'cr. 
math.,  t.  I,  p.  196).  Aussi,  afin  d'éviter  toute  confusion,  nous 
évaluerons  le  nombre  des  circuits  d'un  réseau  en  partant  d'un 
point  et  non  d'un  carrefour. 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  iSy 


LtS   RESEAUX    A    POINTS    IMPAIRS. 

On  ramène  la  recherche  du  nombre  des  tracés  complets  des 
réseaux  à  points  impairs  à  la  détermination  du  nombre  des  cir- 
cuits des  réseaux  à  carrefours  tous  pairs,  par  le  théorème  sui- 
vant : 

Pour  décrire  sans  omission  ni  répétition  un  réseau  ayant  2« 
carrefours  impairs  en  n  traits  et  n  sauts  pour  revenir  au  point 
de  départ,  on  joint  ces  points  de  toutes  les  manières  possibles,  en 
nombre  N  égal  à 

N=I.   3.3...   ;2W  —  3        2  72  li—  :  . 

'  2".  H  I 

et  le  nombre  cherché  est  la  somme  des  nombres  des  circuits  des 
X  réseaux  à  points  pairs  ainsi  obtenus.  On  observera  que  l'on 
ne  doit  sauter  que  d'un  carrefour  impair  à  un  autre  impair,  et 
que  le  nombre  des  tracés  est  indépendant  de  la  position  du  point 
de  départ. 


FERMETURE   D  UNE   IMPASSE. 

On  appelle  impasse  tout  chemin  dont  les  deux  extrémités 
aboutissent  à  un  seul  carrefour,  et  qui  ne  passe  par  aucun  autre 
carrefour;  soit  I  une  impasse  aboutissant  au  carrefour  A  {Jîg.SS) 
auquel  aboutissent  en  outre  d'autres  chemins  en  nombre  pair, 
au  nombre  de  six,  sur  la  figure.  Dans  chacun  des  parcours  com- 
plets du  labyrinthe,  on  passera  trois  fois  au   point  A;  à  Pun 


i38 


Sixième  récréation. 


quelconque  de  ces  passages  on  peut  parcourir  l'impasse   dans 
deux  sens.  Par  conse'quent,  chaque  fois  que  l'on  ferme  une  im- 

Fig.  88. 


Fermeture  d'une  impasse. 

passe,  il  faut  multiplier,  par  la  moitié  du  nombre  des  autres  che- 
mins du  labyrinthe  réduit  qui  passent  au  carrefour,  le  nombre 
des  parcours  complets  du  labyrinthe  réduit. 


LABYRINTHES    A   UN    SEUL   CARREFOUR. 

Les  labyrinthes  à  un  seul  carrefour  peuvent  affecter  des  formes 
Fig.  89  et  90. 


Labyrinthes  à  carrefour  unique. 

diverses_,  mais  ils  sont  uniquement  formés  d'impasses.  En  appli- 
quant le  résultat  précédent,  en  fermant  successivement  une  im- 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  i3q 

passe,  on  voit  que  le  nombre  des  parcours  des  labyrinthes  des 
fig.  89  et  90  est  égal  à 

6x4x2x2  =  96. 

Le  dernier  facteur  2  représente  les  deux  sens  du  parcours  de  la 
dernière  impasse.  En  général,  le  nombre  des  parcours  d'un  laby- 
rinthe à  un  seul  carrefour  est  le  double  du  produit  de  tous  les 
nombres  pairs  plus  petits  que  le  nombre  des  chemins  qui  abou- 
tissent au  carrefour. 


CHEMIN  DE  FER  A  DOUBLE  VOIE. 


Lorsqu'un  labyrinthe  ne  contient  que  des  impasses,  mais  à 
carrefours  différents,  on  peut  encore  appliquer  le  même  procédé, 
et  ainsi,  par  exemple,  résoudre  le  problème  suivant  :  Un  chemin 

Fig.  91. 

A  B  C  D  E  F  & 

Chemin  de  fer  à  double  voie. 

de  fer  à  double  voie  renferme  sept  stations,  et  le  train  peut 
changer  de  voie  à  chacune  d'elles  ;  déterminer  le  nombre  des 
parcours  complets.  En  supprimant  successivement  l'impasse  A 
fig.  91),  puis  B,  etc.,  on  trouve 

2  X2X2X2X2X2=64. 


140 


Sixième  récréation. 


et,  en  général,  le  produit  des  facteurs  égaux  à  2  dont  le  nombre 
est  égal  au  nombre  des  intervalles  entre  les  stations. 


^^m 


CHEMIN   DE   FER   DE   CEINTURE. 


Pour  déterminer  le  nombre  des  parcours  complets  d'un  chemin 
de  ceinture  à  double  voie  (Jig.  92),  on  doit  observer  que,  si  les 


Chemin  de  fer  de  ceinture. 

deux  voies  d'un  intervalle  entre  deux  stations  sont  parcourues 
successivement,  aller  et  retour,  le  reste  du  chemin  revient  à  celui 
de  la.  Jîg.  91  ;  mais  chaque  intervalle  peut  être  parcouru  ainsi  à 
l'exclusion  de  tous  les  autres;  ce  qui  fait  six  fois  le  nombre  précé- 
dent; enfin,  si  les  deux  voies  d'un  intervalle  ne  sont  jamais  par- 
courues successivement,  on  a  encore  une  fois  ce  nombre;  donc 
en  tout  (6h-  i)  X64,  et  en  général  pour  n  stations,  il  y  a 
(n -+- i)  2'*  parcours.  La  solution  précédente  a  été  donnée  par 
M.  Delannov. 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  141 


THEOREMES   DES    IMPASSES. 

Nous  venons  de  traiter  le  cas  d'une  impasse  simple,  formée 
d'un  seul  chemin  dont  les  extrémités  aboutissent  à  un  même 
carrefour.  Plus  généralement,  nous  appellerons  impasse  toute 
fraction  d'un  réseau  qui  n'a  d'autres  points  communs  avec  le 
reste  du  réseau  que  les  extrémités  de  deux  chemins,  de  telle  sorte 
que  la  suppression  de  l'extrémité  de  chaque  chemin  détermine  la 
séparation  du  réseau  en  deux  autres  ;  le  réseau  total  se  compose 
alors  de  deux  réseaux  partiels,  dont  le  plus  simple  est  l'impasse. 
Mais  deux  cas  peuvent  se  présenter,  suivant  que  les  deux  che- 
mins de  l'impasse  aboutissent  à  un  même  carrefour  du  réseau 
partiel  ou  à  deux  carrefours  différents.  Le  premier  cas  a  été 
étudié  par  M.  Tarry;  nous  y  avons  ajouté  le  second  cas. 

Premier  cas.  —  Supposons  que  les  deux  chemins  a  et  ^  de 
l'impasse  aboutissent  à  un  carrefour  A  du  réseau  partiel  [fig.  gS  ); 

Fig.  93. 


Impasse  aboutissant  à  un  seul  carrefour. 

désignons  par   I  et   R  les  nombres  de  circuits  de  l'impasse  et 
du  réseau  partiel,  et  par  2p  le  nombre  des  chemins  du  réseau 


142 


Sixième  récréation. 


restant  qui  aboutissent  au  carrefour  A,  sans  compter  les  deux 
chemins  a  et  b.  Dans  un  circuit  du  réseau  partiel,  on  passe  p 
fois  au  carrefour  A,  et  à  l'un  quelconque  des  passages  il  faut 
nécessairement  décrire  complètement  l'un  des  circuits  de  l'im- 
passe; par  suite,  le  nombre  des  circuits  du  réseau  total  est^IR. 
Si  le  point  A  était  un  point  simple  du  réseau  restant,  on  ferait 
2?  rr:  2  ;  si  l'impasse  était  formée  d'un  seul  chemin  dont  les  extré- 
mités viendraient  aboutir  au  carrefour  A,  on  ferait  1  =  2.  Enfin, 
si  q  impasses  indépendantes  les  unes  des  autres  aboutissent  au 
carrefour  A.  et  si  l'on  distingue  par  des  indices  les  nombres  de 
leurs  circuits  séparés,  on  trouve,  par  la  suppression  successive 
des  impasses,  que  le  nombre  des  circuits  du  réseau  total  est  égal 
au  produit 


p  [p-h  i)  ...  {p-^q—  i)  lil^l, 


I^R. 


Deuxième  cas.  —  Supposons  que  les  deux  chemins  a  pA  b  de. 

Fig.  94. 


Impasse  aboutissant  à  deux  carrefours. 

l'impasse  I  aboutissent  à  deux  carrefours  A  et  B  du  réseau  restant 
ijig.  94);  alors  ces  carrefours  sont  impairs,  ainsi  que  les  premiers 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  143 

carrefours  C  et  D  de  l'impasse  que  l'on  rencontre  immédiatement 
par  les  chemins  a  et  b.  Pour  évaluer  le  nombre  des  circuits  du  ré- 
seau total,  partons  du  point  a  de  AC;  nous  avons  deux  sens;  en 
partant  suivant  aA,  nous  décrivons  le  réseau  partiel  augmenté 
du  chemin  ab  dans  un  seul  sens;  puis  nous  arrivons  en  b  et,  au 
lieu  de  décrire  ^a,  nous  suivons  le  chemin  èDC  et  nous  parcou- 
rons l'impasse  dans  un  seul  sens  pour  revenir  en  a;  par  consé- 
quent, le  nombre  total  des  parcours  dans  les  deux  sens  est  la 
moitié  du  produit  des  nombres  de  circuits  de  l'impasse  et  du  ré- 
seau partiel. 

On  observera,  d'ailleurs,  que  l'application  de  ce  théorème  est 
illusoire,  si  l'impasse  I  se  compose  d'un  seul  chemin. 


THEOREME   DES   CARREFOURS. 

Pour  évaluer  le  nombre  des  tracés  d'un  réseau  quelconque,  on 
ramène,  ainsi  que  nous  l'avons  vu,  les  réseaux  à  carrefours  im- 
pairs à  des  réseaux  à  carrefours  tous  pairs.  Cela  fait,  on  commence 
par  supprimer  toutes  les  impasses  qui  peuvent  exister,  en  rem- 
plaçant le  réseau  total  par  des  réseaux  partiels.  Considérons  donc 
un  réseau  n'ayant  plus  aucune  impasse;  pour  déterminer  le 
nombre  de  ses  circuits,  on  le  remplace  par  d'autres  ayant  un 
carrefour  de  moins,  et  ainsi  de  suite,  jusqu'à  ce  que  tous  les  ré- 
seaux obtenus  ne  contiennent  plus  que  deux  carrefours  ;  on  re- 
vient alors  aux  pérégrinations  delà  fourmi. 

Si  2n  chemins  a,  t,  c,  rf,  ....  aboutissent  u  un  même  carre- 
four, on  décompose  le  réseau  en  N  autres  réseaux  obtenus  en  sou- 


144  Sixième  récréation. 


dant  deux  par  deux,  de  toutes  les  manières  possibles,  les  2  n  che- 
mins a,  b,  c,  d,  . . . .  D'ailleurs,  en  soudant  un  premier  chemin 
avec  un  autre,  on  a  le  choix  entre  (2W  —  i)  chemins;  puis,  en 
soudant  un  autre  chemin  avec  un  autre,  on  a  le  choix  entre 
(2M  —  3)  chemins,  et  ainsi  de  suite.  On  a  donc 

■NT  net  -,         (2n]\ 

N  =  1.3.5  ...  {2n  —  il  = ; 

^  2".  ni' 

c'est  le  nombre  des  manières  de  remplacer  un  produit  de  2n  fac- 
teurs, premiers  entre  eux  deux  à  deux,  par  un  produit  de  n  fac- 
teurs, en  groupant  les  facteurs  deux  par  deux. 

C'est  encore  le  nombre  que  nous  avons  trouvé  pour  ramener  à 
un  réseau  à  carrefours  tous  pairs,  un  réseau  ayant  2  m  points  im- 
pairs. 

Dans  l'application  de  ce  théorème,  on  doit  faire  les  deux  re- 
marques suivantes  :  1°  Si  la  suppression  d'un  carrefour  amenait 
la  désagrégation  du  réseau,  on  recommencerait  l'opération  en 
appliquant  d'abord  le  théorème  des  impasses;  cette  observation 
s'applique  aussi  bien  aux  réseaux  partiels  qui  remplacent  le  ré- 
seau primitif;  2°  les  N  labyrinthes  obtenus  par  la  suppression 
d'un  carrefour  ne  sont  pas  toujours  tous  distincts;  deux  réseaux 
sont  équivalents  lorsqu'ils  possèdent  le  même  nombre  de  carre- 
fours, et  que  deux  carrefours  quelconques  sont  réunis  parle  même 
nombre  de  chemins. 


^j^isir 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos. 


14? 


DESCRIPTION    DU   PENTAGONE. 

Nous  appliquerons  la  méthode  précédente  à  la  Jîg^  95 ,  formée 
fig-  95.  Fig.  96. 


Fig. 

97- 

Fig. 

98. 

cG 

X 

:©B 

nQ    ^. 

■/TN  < 

f 

r^Sv 

Î 

1^ 

X 

/      /^ 

\ 

.\ 

— -^ 

)D 

.d 

Y 

—Y 

par  les  côtés  et  les  diagonales  d'un  pentagone,  c'est-à-dire  au  jeu 
de  dominos  terminé  au  double  quatre  {fig.  95). 

En.  O  aboutissent  quatre  chemins  a,  h,  c,  d;  on  peut  les  souder 
ensemble  deux  à  deux,  de  toutes  les  manières  possibles  : 

ab  d'une  part,  et  cd  d'autre  part,  donne  fig,  96. 
ac  —  bd  —  fig.  97. 

ad  —  bc  —  fig.  98. 

Le  carrefour  O  se  trouve  supprimé,  et  le  nombre  des  tracés  de  la 
fig.  95  est  égal  à  la  somme  des  nombres  de  parcours  des  trois 
autres  figures. 

Mais  ces  trois  nouveaux  labyrinthes  sont  équivalents,  puisque 
E.  Lucas.  —  Récréations  mathém.,  IV.  i 


146  Sixième  récréation. 


les  carrefours  A  et  B,  G  et  D  sont  réunis  par  deux  chemins,  et 
que  les  autres  jonclions  ont  lieu  par  un  seul.  Il  suffit  donc  de 
tripler  le  nombre  des  parcours  des  labyrinthes  [Jig-.  98). 

On  peut  supprimer  le  carrefour  D  de  trois  manières,  comme 
précédemment.  La  soudure  de  e  el  f  donne  la  Jîg-,  99,  et,  après 


Fi^.  100. 


suppression  de  l'impasse,  la  Jig:  100;  nous  nous  trouvons  ainsi  ^ 
dans  le  cas  de  la  fourmi  :2XiX2x3oui2  tracés. 

La  soudure  de  e  et  ^  ou  de  e  et  ^  donne  deux  fois  la  Jîg'.  10 1 . 


Fk 


AQè^ 


Celle-ci,  par  la  suppression  du  carrefour  C,  donne,  par  soudure  de 
i  et  j,  la  Jîg.  102,  qui  donne  8  tracés. 

Et,  par  soudure  de  i  et  k,  ou  de  i  et  /,  deux  fois  Idjîg.  100.  Donc 
encore  24  tracés. 

Ainsi,  au  total,  deux  fois  (  12  H-  8  H-  24)  ou  88. 

La  Jîg.  98  se  décrit  donc  de  88   manières,  et  le   pentagone' 
(Jîg.  95),  de  264  manières  différentes. 

On  trouvera  de  même  que  le  nombre  des  circuits  formés  par 
les  arêtes  d'un  octaèdre  régulier  est  égal  à  7^)4.  Ainsi  encore,  si' 
l'on  supprime  une  station  du  chemin  de  fer  de  ceinture  {Jg.  92' 
contenant  n  stations,  et  si  l'on  désigne  par  R„  le  nombre  des  cir- 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos.  147 


cuits,  on  trouve 


-h  I 


et 


R, 


d'où  l'on  tire,  ainsi  que  M.  Delannoy  l'avait  trouvé  par  une  mé- 
thode différente, 

R„  =  (n-f-  1)2". 


DESCRIPTION    DE    L  HEPTAGONE. 


La  suppression  d'un  carrefour  de  l'heptagone  conduit  à  la  des- 
cription d'un  hexagone  H  [fig.  io3  ),  dont  trois  côtés  sont  redou- 


blés; par  conséquent,  si  l'on  désigne  par  X  le  nombre  des  tracés 
de  l'heptagone,  et  par  H  le  nombre  des  tracés  de  l'hexagone,  on 
a,  par  le  théorème  de  Tarry, 

X  =  i5H. 


14» 


Sixième  récréation. 


La  suppression  de  Tua  des  carrefours  de  l'hexagone  donne 

Fig.  104. 


\y 


Les  quatre  pentagones. 


lieu,  après  suppression  des  impasses,  à  la  description  des  quatre 
pentagones  Pi,  P2,  P3,  P4  [Jîg:  104),  et  l'on  a 

H=38P,H-4P2H-  8P3+4P4; 

Par  la  suppression  du  carrefour  supérieur  de  chacun  des  quatre 
pentagones  et  des  impasses  qui  se  produisent,  on  est  conduit  à 
hi  description  de  six  quadrilatères  Qj,  Q2,  Q3,  Q4,  Qs,  Qe  [Jig- 1  o  5  ) , 
c:  l'on  a 

l\=z  6Qi+4Q,+  16Q3+  16  Q4, 

P2=8Qi4-  l6Q3-r-   2Q5-f    lôQo, 


La  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos. 


140 


Par  la  suppression  de  l'un  des  carrefours  supérieurs  des  six 


Les  six  quadrilatères. 

quadrilatères  et  des  impasses  qui  se  produisent,  on  est  conduit  à 


Les  cinq  triangles. 

la  description  de  cinq  triangles  Tj,  T,,  T3,  T.,  T5  [fig.  106),  et 
l'on  a 


i 


Q,=  6T,-h  24X2-1-48X3, 
Q,=  8X,-i-24X,-i-  64 X;, 

Q3=:2X,-f-2X,, 


Qi---2X2-i-  4X3. 
Q5=  48X2+ 24X3, 

Q,=  2X,-r-2X,. 


i5o 


Sixième  récréation. 


Enfin,  par  la  suppression  du  carrefour  supérieur  de  chacun 
des  cinq  triangles,  et  des  impasses  qui  se  produisent,  on  est  con- 


Les  trois  réseaux  à  deux  carrefours. 


dait  à  la  description  de  trois  réseaux  à  deux  carrefours  D,,  D,, 
D3  [fig-.  107),  et  l'on  a 

T,=r  6D1+ 144D2,      T4=2D,+  4D3, 


T2-^2Di-^  16  Ds, 

T3—    f2D2, 


T,^  D,. 


Enfin,  comme  dans  le  problème  de  la  fourmi^  on  a 

Dj:i=:240,  Dj—  12,  D.^=2. 

En  reprenant  les  calculs  en  sens  inverse,  on  en  déduit 
T,=  3i68,  T,=  672,  T3=r  144,  T^-^z  32,  T^ 
puis,  pour  les  quadrilatères, 

0,^42048,        Q2  =  43520,         Q3=9024, 
Q,=    1920,        Q5=38oi6,        Q6=i824; 

pour  les  pentagones. 

Pi  =601472,         P2=585  984, 
P3=i279i6,        P4=i22ii2; 

et,  enfin,  pour  l'hexagone  et  l'heptagone, 

H=    86665o88, 
X  =  129976320. 


240; 


i^a  Géométrie  des  réseaux  et  le  problème  des  dominos. 


Nous  indiquerons,  avant  de  terminer,  les  trois  exercices  sui- 
vants : 

Exercice  i.  —  Les  sommets  consécutifs  A  et  B  d'un  rectangle  ABCD  sont 
réunis  par  {ip  —  i  )  chemins;  les  sommets  C  et  D  par  { iq —  i  )  chemins  ; 
A  et  D,  ainsi  que  B  et  C,  sont  réunis  par  un  seul  chemin.  Le  nombre  des 
circuits  du  rectangle  est  égal  à.  7.{2p —  i)!{2^— i)! 

Exercice  2.  —  Le  nombre  des  circuits  de  la  figure  formée  par  les  côtés  et 
les  diagonales  d'un  polygone  régulier  de  (2h  -f-  i)  côtés  est  égal  au  nombre 
des  tracés  en  n  traits  et  n  sauts  de  la  figure  formée  par  les  côtés  et  les  dia- 
gonales d'un  polygone  régulier  de  2n  côtés. 

Exercice  3.  —  Si  l'on  désigne  par  a^Uîn  le  nombre  des  circuits  formés 

Fis.  108. 


par  2 n  circonférences  {fig.  108)  et  par  2'»+i  U2„  +  ,  le  nombre  des  circuits 
formés  par  (2  n  -f-  i  )  circonférences  tangentes,  on  a  les  deux  formules 


Uj^-i  =  jU,,,. _2-f-U2/j_j  ; 

U2«=Wn,  U2n-i  =M„  — i/„_,, 

«„  =  5Urt_i  —  M„_2, 

formule  de  récurrence  qui  permet  de  calculer  U». 


et  si  l'on  pose 

i!  en  résulte 


SEPTIÈME   RÉCRÉATION. 


LA  GÉOMÉTRIE  DES  RÉGIONS, 

LE  PROBLÈME  GÉOGRAPHIQUE 

DES  QUATRE  COULEURS 

ET  LES  RÉSEAUX  A  POINTS  TRIPLES. 


A   Monsieur  Samuel  Roberts. 


<  Les  extrémités  de  nostre  perquisition  tombent  toutes 
en  esblouissement;...  les  plus  grossières  et  puériles 
rayasseries  se  trouvent  plus  en  ceulx  qui  traictent  les 
choses  plus  haultes  et  plus  avant,  s'abysmants  en  leur 
curiosité  et  présumption.  La  fin  et  le  commencement 
de  science  se  tiennent  en  pareille  bestise.  » 

(Montaigne.  — Essais,  Liv.  If,  Chap.  XII  ) 


SEPTIEME  RECREATION. 


LA  GEOMETRIE  DES  REGIONS, 

LE   PROBLÈME  GÉOGRAPHIQUE    DES   QUATRE    COULEURS 

ET  LES  RÉSEAUX  A  POINTS  TRIPLES. 


AVANT  de  donner  l'énoncé  et  la  solution  de  ce  problème 
fort  curieux,  nous  commencerons  par  exposer  quelques 
considérations  générales  sur  la  division  du  plan  en  ré- 
gions au  moyen  de  droites  ou  de  circonférences  tracées  sur  ce 
plan,  et  la  division  de  Tespace  par  les  plans  et  les  sphères.  Ces 
questions  se  rapportent  encore  à  la  Géométrie  de  situation. 


1^ 


LES    REGIONS. 


Un  point  placé  sur  une  droite  indéfinie  dans  les  deux  sens  la 
divise  en  deux  fragments  indéfinis  ;  deux  points  d'une  droite  la 
divisent  en  deux  fragments  indéfinis  et  un  segment  fini  ;  en  gé- 


r56 


Septième  récréation. 


néral,  n  points  d'une  droite  la  divisent  en  deux  fragments  indé- 
finis et  (« — i)  fragments  finis;  donc,  si  l'on  désigne  par  A  le 
nombre  des  segments  finis  ou  infinis,  par  a  le  nombre  des  seg- 
ments finis,  par  a  le  nombre  des  segments  infinis,  et  enfin  par  S 
le  nombre  des  points  considérés  sur  cette  droite,  on  a  les  for- 
mules 

A— (3  + a,  S  — A — I, 

a  =:  2 ,  s  ;.-  a  4-  I  . 

Une  droite  illimitée  tracée  dans  un  plan  le  divise  en  deux  ré- 
gions indéfinies,  c'est-à-dire  en  deux  parties  telles  qu'on  ne  peut 
aller  d'un  point  de  l'une  à  un  point  de  l'autre  sans  rencontrer  la 
droite,  à  la  condition  de  ne  pas  sortir  du  plan.  De  même,  des 
droites  parallèles  [Jig:  109)  divisent  le  plan  en  régions  indéfinies 


Fig.  109, 


Fig.  1 10. 


dont  le  nombre  surpasse  de  l'unité  le  nombre  des  parallèles  ;  ces 
régions  peuvent  être  garnies  de  deux  couleurs,  de  telle  sorte  que 
deux  régions  voisines  aient  des  couleurs  différentes. 

Un  système  de  droites  concourantes  [Jîg:  1 10)  divise  le  plan 
en  régions  indéfinies  dont  le  nombre  est  égal  au  double  du 
nombre  des  droites  concourantes;  ces  régions  peuvent  être  recou- 
vertes de  deux  couleurs,  de  telle  sorte  que  de  part  et  d'autre 


La  Géométrie  des  régions. 


,57 


de  chaque  ligne  de  séparation,  les  couleurs  soient  différentes. 

Des  droites  parallèles  en  nombre  p  et  une  transversale  divisent 
le  plan  [Jîg.  \\i    en  (2/74-1)  régions  illimitées. 

Un  système  de  p  droites  parallèles  et  un  second  système  de 
<.;  droites  parallèles  divisent  le  plan  en  (p-i-  i)  (g+  i)  régions, 


Fig.  III. 


Fig.  lie 


parmi  lesquelles  2[p-^q)  d'entre  elles  sont  illimitées;  on  peut 
encore  les  recouvrir  de  deux  couleurs,  de  telle  sorte  que  de  part  et 
d'autre  de  chaque  ligne  de  séparation  les  couleurs  soient  diffé- 
rentes [fig.  112). 
Si  l'on  prolonge  les  côtés  d'un  triangle  (fig.  1 13),  le  plan  est 


Fig.   II 3. 


Fig.  114 


divisé  par  les  trois  droites  en  sept  régions  dont  six  sont  illimitées 


i58  Septième  récréatioyi. 

et  une  seule  finie,  qui  est  l'intérieur  du  triangle.  Si  l'on  prolonge 
les  côtés  d'un  quadrilatère  quelconque,  on  forme  onze  régions 
dont  huit  sont  illimitées  [Jîg.  114).  Lorsque  l'on  considère  un 
plus  grand  nombre  de  droites,  il  faut  tenir  compte,  en  même 
temps,  des  points  de  concours  et  des  segments  ;  pour  évaluer  les 
divers  éléments  de  la  figure^  nous  prendrons  les  notations  sui- 
vantes : 

Nombre  des  points  de  concours S. 

i  finis a. 

infinis a. 

finis  et  infinis A. 

(  finies /. 

Nombre  des  régions. .  j  infinies 9. 

(  finies  et  infinies ¥ . 

On  a  d'abord,  par  définition. 

Gela  posé,  si  l'on  considère  n  droites  d'un  plan,  non  parallèles 
deux  à  deux,  et  telles  que  trois  quelconques  d'entre  elles  ne  con- 
courent pas  en  un  même  point,  on  a,  en  désignant  par  G^  le 
nombre  des  combinaisons  de  n  objets  pris  deux  à  deux, 

S=iG^,,         A  i-n^,  a  =  277, 

F  ;:=  Cf, -h  n  4-  I  ,  0--=2  77. 

En  effet,  supposons  ces  formules  vérifiées  pour  un  système  de 
n  droites,  et,  par  exemple,  pour  n  ==  3  et  pour  7î  =  4  ;  nous  allons 
démontrer  que  ces  formules  s'appliquent  encore  lorsque  l'en 
trace  une  nouvelle  droite  XY  non  parallèle  à  l'une  quelconque 
des  précédentes  et  ne  passant  par  aucun  point  de  concours.  Nous 


La  Géométrie  des  régions.  iSg 

supposerons  d'abord  que  la  droite  XY  a  été  tracée,  de  telle  sorte 
que  tous  les  points  d'intersection  des  premières  droites  soient 
au-dessous  de  XY  {Jîg.  ii5).  Nous  calculerons  les  accroisse- 
ments des  cinq  quantités  S,  A,  a,  F,  o  ;  on  voit  d'abord  que  S 
augmente  du  nombre  n  des  points  situés  sur  XY,  que  a  aug- 
mente des  deux  segments  indéfinis  de  cette  droite,  que  A  aug- 
mente des  [n-r-i]  segments  de  XY  et  des  n  segments  finis  des 

Fig.  ;i5. 


n  droites  qui  aboutissent  à  XY,  ou  au  total  de  (2n  -t-  i  ).  Enfin, 
on  constate  que  o  augmente  des  deux  régions  infinies  au-dessous 
c^e  X  Y,  et  que  F  augmente  de  ces  deux  régions  et,  en  outre,  des 
[n —  i)  régions  finies  au-dessous  de  XY.  Ce  sont  précisément 
les  nombres  dont  augmentent  les  seconds  membres  des  formules 
précédentes,  lorsqu'on  y  remplace  n  par  (/n- i  ;  ces  formules 
sont  donc  générales. 

On  voit,  de  plus,  que  l'adjonction  de  XY  permet  encore  de 
recouvrir  les  régions  situées  au-dessus  de  XY  de  deux  couleurs 
seulement  et  de  telle  sorte  que  deux  régions  adjacentes  à  un 
même  segment  soient  garnies  de  couleurs  différentes.  En  outre, 
il  est  facile  de  voir  que  les  résultats  précédents  subsistent,  lorsque 
la  droite  XY  se  déplace  parallèlement  à  elle-même  et  traverse  le 
point  de  concours  de  deux  droites.  Noua  ferons  d'ailleurs  ob- 
server que  ces  résultats  s'étendent  à  des  figures  tracées  sur  le  plan , 


i6o  Septième  récréation. 


dans  lesquelles  les  droites  sont  remplacées  par  des  traits  indé- 
finis dans  les  deux  sens,  tels  que  chacun  d'eux  ne  se  recourbe  pas 
sur  lui-même  ;  deux  traits  indéfinis  qui  ne  se  rencontrent  pas 
seront  considérés  comme  des  droites  parallèles  ;  de  plus,  deux 
traits  indéfinis  quelconques  sont  censés  ne  se  rencontrer  qu'en 
un  seul  point,  en  se  traversant  mutuellement.  On  peut  aussi 
remplacer  le  plan  par  une  surface  simple  indéfinie  dans  tous  les 
sens,  comme  le  plan  gauche  ou  paraboloïde  hyperbolique. 


f-mg^^ 


LES   POINTS   MULTIPLES. 

Nous  allons  étudier  les  modifications  qu'il  faut  apporter  aux 
formules  précédentes,  lorsque  p  droites  viennent  concourir  en  un 
même  point  ou  lorsque  p  droites  deviennent  parallèles. 

1°  Lorsque  j?  droites  viennent  concourir  en  un  même  point, 
le  nombre  des  points  de  concours  diminue  de  C^^  —  i ,  puisque  le 
nombre  des  points  d'intersection  de  cesp  droites  ne  compte  plus 
que  pour  un  seul  point.  Le  nombre  x  des  segments  infinis  et  le 
nombre  9  des  régions  infinies  ne  changent  pas.  Le  nombre  A  des 
segments  finis  et  infinis  diminue  de  {p'  —  2p)  et  le  nombre  F 
des  régions  finies  et  infinies  diminue  de  [Cf, — p  -h  i  ). 

2°  Lorsque  p  droites  deviennent  parallèles,  le  nombre  des 
points  de  concours  diminue  de  CJ,  ;  le  nombre  F  des  régions  finies 
et  infinies  diminue  aussi  de  CJ,  et  le  nombre  A  des  segments  finis 
et  infinis  diminue  de  {p^  — p). 

Par  conséquent,  si  l'on  désigne  par  G^  le  nombre  des  droites  de 


La  Géométrie  des  restions.  i6i 

direction  unique,  parç^  le  nombre  des  groupes  contenant/?  droites 
parallèles,  par  Sp  le  nombre  des  points  de  concours  de  p  droites, 
on  a 

(l)  n  =  rr, -i- 2cîj-i- 3c;j-!-  ...  +^5,,  4-  ..., 

(  2  )  S  =  .?!  -i-  5j  -i-  ^3  -r-  .  .  .  -T-  ^/,  -+-  .  .  .  ; 

Si  toutes  les  droites  avaient  des  directions  différentes,  on  aurait 
S  =  C,;,  ainsi  que  nous  l'avons  vu;  donc,  en  tenant  compte  des 
diminutions,  on  a 

(3)  CJ^^s,-^Zs,-~...^Cls„^  ... 

4-  (Tj  -h  3  7^  -H  ...  4-  C^  1/,  -4-  ...  ; 

on  trouve  de  même 

(4)  A  =  25,4- 3^3  4-  .  .  .  4-jP5,,  4-  .  .  . 

4-7i4-2  7j  +  ...  4-^5^4- 

On  peut  démontrer  directement  cette  formule  en  observant  que 
de  chaque  point  de  concours  de  p  droites  partent  ^p  segments,  et 
que  pour  toute  direction  de  p  droites  parallèles,  il  y  a  2  ^p  seg- 
ments indéfinis;  d'ailleurs,  ces  segments  sont  tous  comptés  deux 
fois.  Si  l'on  calcule  F,  on  trouve  la  relation 

(5)  S4-F  =  A-hi, 

que  l'on  peut  vérifier  a  posteriori.  Enfin,  s\fp  est  le  nombre  des 
régions  à  j?  lignes  de  contour,  on  a  les  deux  formules 

:  2  A  -./,  -H  2/i  4-  .  .  .  4-i7//,  4-   .  .  . . 

Exercice  i.  —  Considérons  q  points  tels  que  trois  d'entre  eux  ne  soient 
E.  Lucas.  — Récréations  mathém.,  IV.  1 1 


102  Septième  récréation. 


pas  en  ligne  droite,  et  que  quatre  d'entre  eux  soient  sur  deux  droites  pa- 
rallèles. Les  droites  qui  les  joignent  se  rencontrent  en  3  C*  nouveaux  points; 
le  nombre  des  segments  finis  et  infinis  sur  chaque  droite  est  égal  à  Cj,_  2  +  3; 
le  nombre  total  des  segments  est 


A  = 

qq-. 

d'où  l'on  tire,  par  la  formule 

(5), 

F==qq. 

.  +  3q 

c'est-à-dire 

3q, 


\-q  —  3C'*j, 


-Le 
des  régions  est 


Autrement.  —  Le  nombre  des  lignes  de  jonction  étant  w  =  CL  le  nombre 


F  ^  I  -f-  „  +  c  ;,  -  ^  [  I  -  (  ^  - ,  )  +  q  _ ,  ] . 

parce  que  les  droites  se  coupent  au  nombre  de  q —  i  en  ^  points;  on  re- 
trouve, après  simplification,  l'expression  précédente. 

Exercice  2.  —  Un  système  de  n  cercles  partage  le  plan  en  «  («  —  i  )  +  2  re'- 
gions  au  plus,  dont  une  seule  est  illimitée. 

Exercice  3.  —  Si  l'on  trace  dans  un  plan  «  systèmes  de  cercles  concen- 
triques contenant  respectivement  c„  c,,  c,,  ...,  c„  circonférences,  le  plan 
sera  partagé  en  i  +  2  Sc,c,  régions,  au  plus,  dont  une  seule  est  illimitée. 

Exercice  4.  —  Si  l'on  trace  dans  un  plan  «  systèmes  de  cercles  concen- 
triques et  m  systèmes  de  parallèles  en  nombre  <3„  a„  .. .,  am,  et  si  l'on  fait 

A  =  ï^„  A'  =  Lc„ 

le  plan  sera  partagé  au  plus  en 

I  -I- A-t-  B-H  2AA'  +  2  B' 

régions,  dont  28  au  plus  sont  illimitées. 

Si  l'on  ajoute  b  droites  et  d  circonférences  quelconques,  le  nombre  pré- 
cédent augmente  de  CJ,  -f-  2  C^. 

Les  trois  théorèmes  précédents  sont  dus  à  Steiner. 


®âB 


La  Géométrie  des  régions. 


LES    POLYEDRES. 

Nous  commencerons  par  démontrer  le  théorème  suivant  (')  : 
Dans  tout  polyèdre  convexe,  le  nombre  des  arêtes  augmenté 
de  deux  est  égal  au  nombre  des  faces  augmenté  du  nombre  des 
sommets.  En  d'autres  termes,  si  Ton  désigne  respectivement  par 
A,  F,  S  les  nombres  des  arêtes,  des  faces  et  des  sommets  du 
polyèdre,  on  a  l'égalité 

F  -h  S  =  A  4-  2. 

Considérons  d'abord  une  surface  polyëdrale  convexe  ouverte, 

terminée  à  une  ligne  brisée  plane  ou  gauche.  Si  l'on  conserve  les 

notations  précédentes,  les  éléments  de  cette  surface  vérifieront  la 

relation 

F  H-  S=  A  -h  I. 

En  effet,  cette  formule  est  exacte  dans  le  cas  d'une  seule  face; 
car,  pour  un  polygone,  F  =  i  et  S  =  A.  Il  suffit  donc  de  prouver 
que  la  formule  étant  vérifiée  pour  un  certain  nombre  F  de  faces, 
l'est  encore  pour  une  face  en  plus.  Pour  cela,  modifions  la  ligne 
brisée  qui  termine  la  surface  polyédrale,  en  ajoutant  à  cette  sur- 
face un  polygone  ayant  m  côtés  et  m  sommets.  Cette  nouvelle 
face  laisse  encore  la  surface  ouverte,  et  son  contour  ne  pourra 
coïncider  entièrement  avec  celui  de  la  ligne  terminale  primitive; 
si  elle  touche  cette  ligne  par  p  arêtes  communes,  elle  aura  avec 

{')  Ce  remarquable  théorème  est  habituellement  attribué  à  Euler  (Novi 
comm.  Petrop.,  1752);  on  le  trouve  dans  les  Œuvres  inédites  de  Descartes, 
publiées  par  M.  Foucher  de  Careil  (i.  II,  p.  214;  Paris,  1860).  La  dé- 
monstration que  nous  donnons  ici  est  due  à  Cauchy. 


164  Septième  récréation. 


elle  (;?  +  I  )  sommets  communs.  En  de'signant  par  A',  F'.  S'  le 
nombre  des  arêtes^  des  faces  et  des  sommets  de  la  nouvelle  surface 
polyédrale,  on  aura  donc 

F'  =  F+i,       S'=:S-}-m— (j?4- i)       A'=:A+m— j7, 

et  par  suite 

F'  +  S'  =  A'  +  i . 

Et  ainsi  de  suite,  tant  qu'on  ne  fermera  pas  le  polyèdre. 

Cela  posé,  revenons  au  cas  d'un  polyèdre  convexe  ;  pour  obte- 
nir une  surface  polyédrale,  il  suffit  d'enlever  une  face,  ce  qui  ne 
modifie  pas  le  nombre  des  sommets  et  des  arêtes  ;  donc  la  relation 
proposée  est  vérifiée. 

Si  l'on  désigne  par/];,  le  nombre  des  faces  à  p  arêtes,  par  Sp  le 
nombre  des  sommets  des  angles  polyèdres  à  p  arêtes,  on  a  les 
formules 

S  =  53  4-  5;  -+-   ...  +  Sp-\-   .  .  .  , 

2  A  —  3/3  +  4/4  +  ...+;?/;,  -h  ... , 
2  s  =  3  53  +  4i'4  +  . . .  +  ;:'5/,  +  . . .  ; 

on  en  déduit  facilement 

2  F  =  4  +  53  -H  2  54  -h  3  5^  -t-  .  .  . , 
2  s  =  4  +/3  +  2/4  +  3/5  ^  . . . . 

Si  l'on  conçoit  la  surface  d'un  polyèdre  convexe  décomposée  en 
plusieurs  portions,  chaque  portion  étant  une  face  seule,  le  théo- 
rème de  Descartes  a  lieu  entre  le  nombre  des  portions  dont  il 
s'agit,  et  l'on  retrouve  les  théorèmes  sur  les  réseaux  géomé- 
triques. 


La  Géométrie  des  régions.  i65 

FlxERCicE  I.  —  Il  n'existe  aucun  polyèdre  convexe  qui  ne  renferme  au 

moins  une  face  triangulaire  ou  un   angle   trièdre.  —  On  a,  en  effet,  la 

formule 

F3  +  S,  =  8  ^/, +5,^  2  (/,-i-sJ -H  .. .. 

Exercice  2.  —  Il  n'existe  aucun  polyèdre  convexe  dont  toutes  les  faces 
aient  plus  de  cinq  côtés  ou  dont  tous  les  angles  polyèdres  aient  plus  de 
cinq  arêtes. 

Exercice  3.  —  L'angle  droit  étant  pris  pour  unité,  la  somme  des  angles 
de  toutes  les  faces  d'un  polyèdre  convexe  est  égale  à  quatre  fois  le  nombre 
des  sommets  diminué  de  deux. 

Exercice  4.  —  Trouver  le  nombre  des  diagonales  d'un  polyèdre  convexe. 
—  Si  l'on  pose 

M  =  1.3./,  -+-  2.  4./  4-  3. 5/,  H-  ... . 
et  si  l'on  désigne  par  D  le  nombre  des  diaguoSles,  on  a 

8D  r^  (L-r-2)(L-H4)— 4M. 

Exercice  5.  —  Le  nombre  des  régions  formées  paru  plans  quelconques, 
tels  que  trois  d'entre  eux  ne  soient  pas  parallèles  à  une  même  droite  et  que 
quatre  ne  passent  pas  par  un  même  point,  est 

et  les  régions  fermées  sont  en  nombre  C,^._j. 

Exercice  6.  —  Trouver  le  nombre  des  régions  limitées  par  des  systèmes 
de  plans  parallèles.  —  Si  l'on  désigne  par/»,,/»,,  ...,/»«  les  nombres  des 
plans  parallèles  dans  chaque  système,  par  A,  B,  C  leur  somme,  la  somme 
de  leurs  produits  deux  à  deux,  la  somme  de  leurs  produits  trois  à  trois, 
le  nombre  des  régions  est  i  4-  A  -+-  B  4-  C,  dont  2B  H-  2  sont  sans  bornes, 
et  les  autres  forment  des  solides. 

Exercice  7.  —  Des  systèmes  de  plans  parallèles  et  m  plans  quelconques 
partagent  l'espace  en  un  nombre  de  régions  qui  ne  surpasse  pas 


,  4.  A  +  B  -+-  C  +  A  C  ^,.  ^  ,  -  B  m  +  C  i,  -i-  C  * ,  +  C  J 
régions  incomplètement  bornées  sont  en  nombre 
2-4-2B-*-2mA-^w(w  —  i). 


i66  Septième  récréation. 


Exercice  8.  —  On  considère  des  systèmes  de  plans  parallèles /i,,/?,,  ...,p„, 
et  de  sphères  concentriques  s„  s^,  ...,  et  l'on  désigne  par  A,  B,  C  et  par 
A',  B',  G'  les  sommes  des  nombres  p  cis  pris  un  à  un,  deux  à  deux,  trois 
à  trois;  cet  ensemble  partage  l'espace  en  un  nombre  de  régions  au  plus 
égal  à 

I  +  A  +  B  +  C  +  2(AB'-+-BA')  +  2A'  +  2C', 

Les  régions  illimitées  sont  au  nombre  de  2  B  +  2. 

Exercice  9.  —  Le  système  formé  par  »  plans  quelconques  (tels  que  trois 
d'entre  eux  ne  soient  pas  parallèles  à  un  même  plan  et  que  quatre  d'entre 
eux  ne  passent  pas  par  un  même  point)  et  m  sphères  quelconques  partage 
l'espace  en  un  nombre  de  régions  au  plus  égal  à 

I  -4-  M  -H  C,j  +  C,^  +  mn  {n  —  i)  -t-  2 m  +  2 Cf„ . 

Les  régions  illimitées  sont  au  nombre  de  2  ^-  2rj  («  —  i  ). 

f        Z"""  ■■  LKS    POLYÈDRES    RÉGULIERS    CONVEXES. 

Il  ne  peut  exister  que  cinq  espèces  de  polyèdres  convexes  dont 
toutes  les  faces  aient  le  même  nombre  p  de  côtés  et  dont  tous  les 
angles  polyèdres  aient  le  même  nombre  q  d'arêtes.  E^n  effet,  on  a 

2  A  =pF  =  qS, 

et  par  suite  la  formule  de  Descartes  donne 

F=._— -Ai— _. 

2[p-\-q)-Fq 

Puisque  F  doit  être  entier  et  positif,  on  ne  peut  faire  que  les 
hypothèses  p  =  3,  4,  5  renfermées  dans  le  Tableau  suivant  : 


La  Géométrie  des  régions. 


167 


p 

î 

FACES 

SOMMETS 

CRÊTES 

DIAGONALES 

POLYÈDRE 

3 

3 

4 

4 

6 

0 

Tétraèdre. 

3 
4 

4 
3 

8 
6 

6 
8 

12 
12 

3 
4 

Octaèdre. 
Hexaèdre. 

3 
5 

5 
3 

20 
12 

12 

20 

3o 
3o 

36 

JOO 

Icosaèdre. 
Dodécaèdre. 

Fig.  1 16.  —  Perspectives  du  tétraèdre,  de  l'hexaèdre  et  de  l'octaèdre. 


Fîg.  117.  —  Perspective  de  l'icosaèdre. 

Lorsque  les  faces  de  ces  polyèdres  sont  des  polygones  réguliers, 
les  polyèdres  sont  eux-mêmes  réguliers  'Jig.  i  16  et  117).  Il  n'y 
a  donc  que  cinq  polyèdres  réguliers  convexes. 


i68 


Septième  récréation. 


LE   PROBLÈME  GEOGRAPHIQUE 
DES  QUATRE  COULEURS  (») 

LE    COLORIAGE    DES    CARTES. 


En  jetant  les  yeux  sur  une  carte  de  Géographie  ou  sur  un  globe 
terrestre,  on  y  voit  immédiatennent  un  certain  nombre  de  lignes 
de  démarcation,  frontières  ou  limites,  qui  la  divisent  en  contrées, 


Fii 


ig.  I  ig. 


provinces,  départements,  comtés,  gouvernements  ou  districts,  etc.; 
puis,  d'autres  lignes  qui  représentent  les  fleuves,  les  rivières,  les 
canaux,  les  routes  et  les  chemins  de  fer.  Souvent  il  arrive  que  la 
multiplicité  de  ces  dernières  rend  très  difficile  la  distinction  des 
unes  et  des  autres.  Dans  les  cas  où  il  importe  que  cette  distinction 
soit  nettement  accentuée,  les  géographes  recouvrent  les  dépar- 
tements de  différentes  couleurs,  de  telle  sorte  que  les  limites  de 
ceux-ci  sont  clairement  marquées  par  les  endroits  où  commence 

(')  Revue  scientifique,  3'  série,  t   XXXII,  p.  ii  (n'-du  7  juillet  i883). 


La  Géométrie  des  régions.  169 

une  couleur  et  où  une  autre  finit;  alors  il  devient  possible  de 
supprimer  les  lignes  de  démarcation.  Si  l'on  n'a  d'autre  but  que 
la  clarté,  il  est  évidemment  inutile  de  colorier  différemment 
deux  districts  non  adjacents  ;  on  peut  même,  sans  nuire  à  la 
clarté  et  tout  en  supprimant  les  lignes  de  démarcation,  affecter 
la  même  couleur  à  des  départements  ayant  en  commun  un  ou 
plusieurs  points,  à  la  condition  que  ces  points  soient  isolés  les 
uns  des  autres,  et,  par  conséquent,  en  nombre  fini  [fig.  118). 


LES    SURFACES    SIMPLES. 

Cette  méthode  de  coloriage  peut  s'appliquera  la  représentation 
d'une  surface,  de  forme  quelconque,  divisée  en  districts;  cepen- 
dant nous  bornerons  notre  étude  au  plan  et  à  la  sphère,  et  plus 
généralement  au  cas  des  surfaces  simples.  Si  l'on  trace  sur  le 
plan  ou  sur  la  sphère  un  circuit  fermé  de  forme  quelconque, 
celui-ci  divise  la  surface  en  deux  régions  telles  qu'on  ne  peut 
aller  d'un  point  de  l'une  à  un  point  de  l'autre,  en  cheminant  sur 
la  surface,  sans  traverser  la  ligne  fermée.  Il  n'en  est  pas  toujours 
ainsi,  et,  par  exemple,  pour  la  surface  d'un  anneau,  de  l'anneau  de 
Saturne,  etc.  En  Géométrie,  la  surface  de  l'anneau  se  nomme  tore; 
de  même  que  la  surface  de  la  sphère  est  engendrée  par  la  révo- 
lution d'une  circonférence  autour  de  son  diamètre,  on  engendre 
la  surface  de  l'anneau  en  faisant  tourner  une  circonférence  on 
une  ellipse)  autour  d'une  droite  extérieure  située  dans  son  plan. 


lyo  Septième  récréation. 


SUR    L  ANNEAU    DE  SATURNE. 

Le  tore  n'est  pas  une  surface  simple;  en  effet,  si  l'on  trace  sur 
la  surface  soit  la  circonférence  génératrice  dans  l'une  de  ses  po- 
sitions, soit  le  parallèle  engendré  par  un  point  de  cette  circon- 
férence, l'une  de  ces  deux  lignes  fermées  ne  divise  pas  la  sur- 
face. Il  est,  en  effet,  facile  de  reconnaître  que  l'on  peut  aller  d'un 
point  quelconque  de  celle-ci  à  un  autre  point  quelconque,  sans 
rencontrer  l'une  ou  l'autre  de  ces  deux  lignes.  Bien  plus,  ces  deux 
lignes  prises  simultanément  ne  forment  pas  de  régions.  Cepen- 
dant deux  positions  de  la  circonférence  génératrice,  ou  deux  pa- 
rallèles, divisent  l'anneau  en  deux  régions,  tandis  que  deux  cir- 
cuits fermés,  sur  le  plan  ou  sur  la  sphère,  les  divisent  en  trois  ou 
quatre  régions,  au  moins  (*). 

Considérons  maintenant  une  surface  ou  une  portion  de  sur- 
face simple,  divisée  en  districts  d'une  manière  arbitraire  ;  recou- 
vrons au  hasard,  d'une  première  couleur,  autant  de  districts  non 
adjacents  que  nous  pourrons;  puis,  passons  à  une  autre  cou- 
leur pour  recouvrir  d'autres  districts  non  adjacents,  et  ainsi  de 
suite.  En  procédant  ainsi,  il  faudrait  un  assez  grand  nombre  de 
couleurs  pour  colorier  la  carte;  mais,  avec  un  peu  d'attention, 
on  peut  réduire  le  nombre  de  celles-ci.  D'ailleurs,  il  est  évident 
que  le  système  de  coloriage  sera  d'autant  plus  économique  que 
l'on  emploiera  le  moins  grand  nombre  de  couleurs,  tant  à  cause 
de  la  diversité  des  couleurs  que  de  la  répétition  du  tirage  pour 
l'impression  d'une  même  carte. 

(')  On  peut  diviser  la  surface  de  l'anneau  de  Saturne  en  six  régions 
toutes  adjacentes,  de  telle  sorte  qu'il  faudrait  au  moins  six  couleurs  pour 
les  distinguer  les  unes  des  autres. 


La  Géométrie  des  régions. 


LE    PROBLEME   DE    GUTHRIE. 


On  observera  d'abord  que  quatre  couleurs  sont  nécessaires 
pour  le  coloriage  d'une  carte  ou  d'un  globe  terrestre;  par  exemple, 
dans  le  cas  d'un  district  entouré  de  trois  autres  [Jig.  i  iq);  mais, 
depuis  longtemps,  les  éditeurs  de  cartes  géographiques  avaient 
reconnu,  comme  un  fait  expérimental,  que  quatre  couleurs  suf- 
fisent dans  tous  les  cas.  Cette  assertion  fut  émise  pour  la  pre- 
mière fois  par  Guthrie,  puis  par  le  professeur  de  Morgan;  mais 
il  n'existait  pas  de  démonstration  connue  de  ce  fait.  M.  Cayley, 
professeur  de  l'Université  de  Cambridge,  avait  précisé  la  ques- 
tion à  la  Société  mathématique  de  Londres,  le  i3  juin  1878; 
puis,  dans  une  courte  communication  à  la  Société  royale  de  Géo- 
graphie ('),  il  indiquait  en  quoi  consistait  la  difficulté  du  pro- 
blème, en  ajoutant,  toutefois,  qu'il  n'avait  pas  encore  trouvé  de 
démonstration  satisfaisante.  On  se  rend  compte  de  ces  difficultés 
en  observant  qu'une  très  petite  modification  des  lignes  de  dé- 
marcation oblige  souvent  à  modifier  le  coloriage  d'une  manière 
complète;  mais  cette  remarque  ne  suffit  pas  pour  résoudre  le 
problème. 

Un  géomètre  anglais,  M.  Kempe,  a  donné  en  1879  une  dé- 
monstration satisfaisante  et  fort  ingénieuse  de  la  proposition 
empirique  de  Guthrie;  sur  la  demande  de  M.  Sylvester,  professeur 
de  rUniversité  J.  Hopkins,  à  Baltimore,  et  rédacteur  en  chef  de 
the  American  Journal  ofmathematics,  M.  Kempe  a  publié  dans 
v-o  journal  un  article  très  intéressant  sur  le  sujet  qui  nous  oc- 

(')  Proceedbigs  of  the  Royal  f(eographical  Society,  t.  I,  p.  2  5ç). 


Septième  récréation. 


cupe  (*).  M.  William  E.  Story  l'a  fait  suivre  de  remarques  im- 
portantes. Nous  donnons  ci-après  le  résumé  des  considérations 
développées  par  ces  deux  éminents  géomètres. 


THEOREME    DU    COLORIAGE. 

Nous  allons  donc  exposer  la  démonstration  de  la  proposition 
suivante,  et  nous  engageons  le  lecteur  à  ne  pas  s'effrayer  du 
modeste  appareil  de  nos  formules  mathématiques,  car  les  trois 
premières  règles  suffisent  ici,  et  ces  formules  ne  sont  d'ailleurs 
que  la  sténographie  d'un  raisonnement  qu'il  serait  trop  long 
d'écrire  en  toutes  lettres  : 

Quel  que  soit  le  mode  de  division  d'une  carte  [ou  d'un  globe] 
représentant  la  terre,  un  continent,  un  royaume,  en  territoires, 
départements,  districts,  il  suffit  de  quatre  couleurs  pour  colo- 
rier cette  carte,  avec  cette  seule  condition  que  deux  districts 
aj'ant  une  limite  commune  soient  recouverts  de  couleurs  diffé- 
rentes. 

Ainsi  quatre  couleurs  suffisent  pour  distinguer  clairement  les 
uns  des  autres  les  départements,  les  arrondissements  ou  même 
les  cantons  de  la  France,  les  gouvernements  de  la  Russie,  les 
comtés  de  l'Angleterre,  les  États  de  l'Amérique  du  Nord,  etc. 

(•)  On  the  gedgraphical  problem  of  ilie  four  colows.  by  A.-B.  Kempe, 
B.-A.,  Lo.idon.  —  K^ote  on  the  preceding  paper,  by  William  F.  Story 
{Journal  de  Sylvester,  t.  II,  p.  190  et  suivantes). 


La  Géométrie  des  régions.  lyS 


DIVISION    DE    LA    CARTE. 

Supposons  que  l'on  considère  d'abord  une  surface  plane 
de  forme  quelconque,  divisée  arbitrairement  en  districts,  mais 
telle  qu'on  ait  pu  la  recouvrir  de  quatre  couleurs,  conformément 
à  la  condition  imposée  ;  nous  aurons  divisé  la  carte  en  districts 
coloriés,  par  exemple,  en  rouge,  en  vert,  en  bleu  et  en  jaune. 

Fig.   I20.  Fig.   121. 


Prenons  à  part  les  districts  recouverts  de  deux  quelconques  de 
ces  quatre  couleurs;  si  nous  choisissons  les  districts  rouges  et 
verts,  nous  observerons  qu'ils  forment  une  ou  plusieurs  régions 
détachées,  c'est-à-dire  n'ayant  aucune  ligne  de  démarcation  com- 
mune [fig  .120  et  121),  bien  que  pouvant  se  rencontrer  en  un 
ou  plusieurs  points.  Il  est  clair  que.  dans  l'une  de  ces  régions, 
dans  quelques-unes,  ou  dans  leur  ensemble,  nous  pouvons 
échanger  les  couleurs  rouge  et  verte,  et  la  carte  restera  coloriée 
conformément  à  la  condition  imposée.  Les  régions  formées  par 
les  districts  rouge  et  vert  entoureront  d'autres  régions,  formées 
des  districts  jaune  et  bleu,  ou  seront  entourées  par  celles-ci;  on 


L 


J74  Septième  récréation. 


pourra  aussi  échanger  les  couleurs  jaune  et  bleue  dans  une  ré- 
gion, dans  plusieurs,  ou  dans  la  totalité,  sans  nuire  à  la  condition 
imposée. 

CARREFOUR    DE  QUATRE  FRONTIERES. 

Examinons  maintenant  ce  qui  se  passe  lorsque  les  lignes  de 
démarcation  de  trois  districts,  ou  plus,  se  rencontrent  en  un 
même  point  que  nous  appellerons  point  de  concours. 

Si  trois  districts  ont  un  point  commun,  il  fiiut  évidemment 


trois  couleurs  différentes  pour  les  colorier.  Si  quatre  districts  se 
réunissent  en  un  même  point,  on  peut,  s'il  n'y  en  pas  d'autres, 
les  colorier  avec  deux  ou  trois  couleurs  seulement;  mais  quel- 
quefois on  pourra  se  trouver  amené  à  les  colorier  avec  quatre 
couleurs;  supposons  qu'il  en  soit  ainsi,  comme  dans  \di  fig.  122. 
Nous  allons  montrer  qu'en  modifiant  le  coloriage  des  dis- 
tricts voisins,  on  peut  n'employer  que  trois  couleurs.  En  effet  : 
1°  si  les  districts  a  Qi  c  appartiennent  à  des  régions  (rouge  et 
vert)  différentes,  nous  pouvons  échanger  les  couleurs  rouge  et 


La  Géométrie  des  rei^iuns. 


verte  dans  l'une  de  ces  régions,  sans  les  échanger  dans  l'autre;  il 
en  résultera  que  les  districts  a  et  c  seront  de  la  même  couleur, 
tous  deux  rouges  ou  tous  deux  verts  ;  2°  si  les  districts  a  et  c  ap- 
partiennent à  une  même  région  (rouge  et  vert), celle-ci  formera  un 
anneau  comme  dans  hifig.  121;  par  suite,  les  districts  ^  et  <f  se 
trouveront  dans  des  régions  (bleu  et  jaune)  différentes,  de  telle 
sorte  que  Ton  pourra  échanger  les  couleurs  bleue  et  jaune  dans 
l'une  de  ces  régions  sans  les  échanger  dans  l'autre;  il  en  résultera 
que  les  districts  b  et  d  seront  de  la  même  couleur,  tous  deux 
jaunes  ou  tous  deux  bleus.  Ainsi  l'on  peut  toujoursréduireà  trois 
le  nombre  des  couleurs  de  quatre  districts  ayant  un  point 
commun. 


CARREFOUR   DE    CINQ  FRONTIERES. 

Il  en  est  de  même  au  point  de  concours  de  cinq  lignes  de  dé- 

Fig.  123. 


marcation.  Lorsque  cinq  districts  ont  un  point  commun,  on  peut 
les  colorier  avec  trois  couleurs  seulement  ;  mais  ils  peuvent  l'être 
avec  quatre.  Dans  ce  dernier  cas,  la  Jig.  i23  montre  la  seule 
forme  que  le  coloriage  puisse  prendre,  l'une  des  couleurs  se  pré- 


176  Septicmc  récréation. 


sentant  nécessairement  deux  fois.  1°  Si  les  districts  a  et  c  appar- 
tiennent à  des  régions  jaune  et  rouge  différentes,  on  pourra  faire 
une  modification  du  coloris,  de  telle  sorte  que  a  et  c  soient  tous 
deux  jaunes  ou  tous  deux  rouges*  2°  si  les  districts  a  tx.  c  appar- 
tiennent à  la  même  région  jaune  et  rouge,  et  si  a  et  ^  appar- 
tiennent à  des  régions  rouge  et  verte  différentes,  on  modifiera  le 
coloriage  sur  l'une  d'elles,  de  telle  sorte  que  a  el  d  soient  tous 
deux  rouges  ou  tous  deux  verts;  3°  si  les  districts  a  et  c  appar- 
tiennent à  la  même  région  jaune  et  rouge,  et  si  les  districts  a  et 
d  appartiennent  à  la  même  région  verte  et  rouge,  ces  deux  ré- 
gions sépareront  b  de  c,  de  telle  sorte  que  les  régions  verte  et 
bleue  auxquelles  appartiennent  le  district  b  d'une  part  et  les  dis- 
tricts ^  et  e  d'autre  part  soient  nécessairement  différentes,  et  que 
les  régions  jaune  et  bleue  auxquelles  appartiennent  le  district  e 
d'une  part,  et  ^  et  c  d'autre  part  soient  aussi  différentes.  Donc^ 
si  l'on  échange  le  bleu  et  le  vert  dans  la  région  b,  et  le  jaune  et  le 
bleu  dans  la  région  e,  b  deviendra  vert,  e  deviendra  jaune,  a,  c,  d 
ne  changeront  pas  de  couleur.  Dans  chacun  des  trois  cas,  les 
trois  districts  n'auront  que  trois  couleurs. 

Ainsi,  lorsqu'une  carte  peut  être  coloriée  en  quatre  couleurs, 
on  peut  toujours  en  modifier  convenablement  le  coloriage,  de 
telle  sorte  que  si  quatre  ou  cinq  districts,  et  non  plus,  ont  un 
point  commun,  ces  districts  peuvent  être  recouverts,  au  plus,  de 
trois  couleurs  différentes.  Nous  démontrerons,  plus  loin,  que  l'on 
peut  toujours  disposer  le  coloriage  avec  cette  condition  restrictive, 
pour  une  carte  quelconque. 


5S^5^ 


La  Géométrie  des  régions. 


177 


LA   CONTEXTURE  D  UNE    CARTE. 


Laissons  de  côté,  pour  l'instant,  la  question  de  coloriat^e  et 
étudions  les  divers  détails  de  construction  de  la  carte.  Elle  peut 
présenter  des  districts-îles,  ou  districts  isolés  ayant  une  seule 
ligne  de  démarcation  (/îg-.  124);    des  régions-îles  [fig.  i25), 


Fig.  124. 


Fig.   125. 


composées  d'un  certain  nombre  de  districts;  des  districts-pénin- 
sules ijig.  126)  ayant  une  seule  ligne  de  démarcation  et  un  seul 


Fig.   126 


Fig.   127. 


point  de  concours;  àts  régions-péninsules  (f.g.  127),  des  dis- 
tricts complexes  comprenant  des  îles  et  des  péninsules;  enfin  des 
E.  Lucas.  —  Récréations  niathém.,  IV,  la 


178  Septième  récréation. 


districts  simples  {Jig.  128)  qui  n'en  comprennent  pas,  et  qui 
ont  autant  de  lignes  de  démarcation  que  de  points  de  concours. 
On  observera  qu'à  l'exception  des  limites  fermées,  comme  dans 


F'ig.  128. 


làfig.  1 24,  et  de  celles  qui  ont  un  seul  point  de  concours,  comme 
dans  la  fig .  126,  chaque  ligne  de  démarcation  aboutit  à  deux 
points  de  concours  et  appartient  en  outre  à  deux  districts. 


LA   GARNITURE    DES   PIECES. 


Prenons  un  morceau  de  papier  et  découpons-le  suivant  la  forme 
d'un  district  quelconque  (district  simple,  district-île  ou  district- 
péninsule),  mais  en  lui  donnant  des  dimensions  un  peu  plus 
grandes,  de  telle  sorte  qu'il  recouvre  les  lignes  de  démarcation 
qui  bornent  ce  district.  Fixons,  sur  la  carte,  ce  morceau  de  pa- 
pier, que  nous  appellerons /izèce;  prenons  un  point  quelconque  àj 
l'intérieur  et  prolongeons  les  lignes  de  démarcation  qui  abou- 
tissent au  district,  jusqu'à  ce  point,  par  des  lignes  qui  ne  s'entre- 
croisent pas;  ces  lignes  de  démarcation  existent  toujours,  sauf 


La  Géométrie  des  régions. 


dans  le  cas  d'une  île;  s'il  n'existe  que  deux  lignes  de  démarcation 
rencontrant  la  pièce,  ce  qui  est  le  cas  d'un  district-péninsule,  on 
les  réunit  par  une  ligne  traversant  la  pièce;  sans  qu'il  soit  besoin 
de  considérer  un  point  de  concours.  Ceci  fait,  la  carte  possède  un 
district  de  moins,  et  le  nombre  des  lignes  de  démarcation  di- 
minue en  même  temps.  Lajîg.  129  représente  le  district  avant 


Fig.   i3o. 


la  fixation  de  la  pièce  désignée  par  une  ligne  ponctuée;  Isijig.  i3o 
montre  les  nouvelles  lignes  tracées  sur  la  pièce  jusqu'à  leur  point 
de  concours  pris  à  l'intérieur  de  celle-ci. 

On  répète  l'application  des  pièces  tant  qu'il  reste  des  districts 
simples,  en  observant  que  les  pièces  peuvent  être  recouvertes  par 
d'autres,  partiellement,  dans  certains  cas.  De  même,  en  appli- 
quant le  procédé  aux  districts-îles  et  aux  districts-péninsules, 
nous  finirons  par  nous  débarrasser  de  chacun  des  districts  situés 
sur  la  carte;  celle-ci  se  trouvera  réduite  à  un  district  unique  dé- 
pourvu de  lignes  de  démarcation  et  de  points  de  concours.  La 
carte  sera  complètement  garnie  de  pièces. 


^"^ 


I 


i8o  Septième  récréation. 


DEVELOPPEMENT    DE    LA    CARTE. 

Maintenant,  renversons  le  procédé,  et  enlevons  les  pièces  dans 
l'ordre  inverse  de  leur  placement,  c'est-à-dire  ôtons  d'abord  celle 
qui  a  été  placée  la  dernière,  puis  celle  qui  a  été  placée  l'avant- 
dernière,  et  ainsi  de  suite;  à  mesure  que  nous  enlevons  une 
pièce,  nous  découvrons  un  district,  et  la  carte  se  trouvera  déve- 
loppée par  degrés  successifs.  Désignons,  à  une  phase  quelconque 
du  développement,  par  F  le  nombre  des  districts,  par  A  le  nombre 
des  lignes  dedémarcation,  par  S  le  nombredes  points  de  concours 
de  la  carte,  et  par  les  mêmes  lettres  accentuées  les  nombres  qu'on 
obtient  en  ôtant  la  pièce  suivante  : 

i"  Si  la  pièce  enlevée  ne  possède  ni  ligne  de  démarcation  ni 

Fig.   i3i.  Fig.  i32. 


point  de  concours,  c'est-à-dire  si  Ton  a  découvert  une  île,  on  a 
évidemment 

S'=S,     F'  =  F+i,     A'r=AH-i. 

2"  Si  la  pièce  enlevée  n'a  pas  de  point  de  concours,  mais  une 
ligne  unique,  c'est-à-dire  si  l'on  a  découvert  une  péninsule 
[fig.  126)  ou  un  district  avec  deux  lignes  de  démarcation,  comme 
dans  la  fig.  i3i,  on  a,  dans  le  premier  cas, 

S'=:S  +  i,     F'  =  F+i,     A'— A-^2, 


La  Géométrie  des  régions.  i8i 

et,  dans  le  second,  en  supposant  distinctes  les  lignes  de  démar- 
cation de  part  et  d'autre  du  district  [fig.  1 3 1  ) 

S'  =  S-h2,     F'  =  F-i-i,     A'  =  Ah-3. 

3"  Si  la  pièce  enlevée  possède  un  point  de  concours  où  abou- 
tissent X  lignes  de  démarcation  et  si  le  district  découvert  après 
l'enlèvement  de  la  pièce  a  [x  lignes  de  démarcation,  on  a 

S'r^S4-|Z—  I,     F'=F  +  i,     A'=A-4-:jl. 

Dans  chacun  de  ces  trois  cas,  on  déduit  facilement 

[a]  S'+ F'  — A'-i=S-^F  — A  — I. 

4"  Si  la  pièce  enlevée  n'a  pas  de  point  de  concours,  mais  une 
ligne  unique  faisant  partie  de  la  ligne  de  démarcation  d'un 
district-île  sur  la  carte  garnie  de  pièces,  de  telle  sorte  qu'après 
l'enlèvement  de  la  pièce  on  découvre  une  des  formes  Atsjig.  1 18 
et  1 32,  nous  avons,  dans  le  premier  cas, 

S'=S+I,       F'rrF-t-I,       A'=irA-+-i; 

et,  dans  le  second, 

S' =  S -1-2,       F'=:F-+-I,       A'=iA-h2. 

Par  suite,  dans  l'un  ou  l'autre  de  ces  deux  cas, 
-y  S'  +  F'— A'  — I  =S-+-F— A. 


'J^ieir^ 


i82  Septième  récréation. 


GENERALISATION    DU    THEOREME    DE    DESCARTES. 

Nous  appellerons  contour  un  assemblage  de  lignes  de  démar- 
cation telles  que  deux  quelconques  d'entre  elles  sont  réunies,  soit 
directement,  soit  par  d'autres  lignes  du  même  contour,  mais  ne 
se  rattachent  sur  la  carte  à  aucune  autre  ligne  de  démarcation;  j 
le  contour  sera  simple  ou  complexe,  suivant  qu'il  se  composera 
d'une  ou  de  plusieurs  lignes  de  démarcation.  Chaque  contour 
peut  être  considéré  comme  formant  une  carte  partielle  isolée  sur 
la  carte,  et  que  l'on  peut  colorier  conformément  à  la  condition 
imposée.  Par  le  procédé  de  M.  Kempe,  nous  arriverons  néces- 
sairement, en  garnissant  la  carte  de  pièces,  à  l'une  des  formes 
àQs-fig.  i32  et  1 18,  puis  à  une  île;  enfin  celle-ci  disparaîtra.  Dans 
la  marche  inverse,  on  a,  à  la  première  phase  du  développement, 

S  =  o,     F==  1,     A  =  0, 

et,  par  suite 

S  +  F  — A  — irrro; 

à  la  deuxième  phase,  d'après  la  relation  [a], 
[1]  Sh-  F  —  A  —  1=0; 

à  la  troisième  phase,  d'après  la  relation  [b], 
S4-  F  —  A —  1=1, 
et  à  chacune  des  phases  suivantes,  d'après  la  relation  [a], 
[2]  S  H-  F —  A—  \  =.1, 

Dans  le  cas  d'une  carte  formée  seulement  d'un  contour  simple, 


■    La  Géométrie  des  régions.  i83 

la  première  et  la  deuxième  phase  existent,  et  la  relation  [i]  a 
lieu.  Mais  si  la  carte  se  compose  de  C  contours  complexes,  on  a 
la  relation 

r3]  S  +  F  — A— i=G, 

c  esc-à-dire  que,  dans  toute  carte  tracée  sur  une  surface  simple, 
la  somme  des  nombres  des  points  de  concours  et  des  districts  sur- 
passe de  l'unité  la  somme  des  nombres  des  lignes  frontières  et 
des  contours  complexes. 


THEOREME  DE  KEMPE. 

Désignons,  à  une  phase  quelconque  du  développement,  par 
/\,ft,  fit  ...y  le  nombre  des  districts  qui  ont  i,  2,  3,  ...  lignes  de 
démarcation,  par  52,  S3,  s^,  ...,  le  nombre  des  points  de  concours 
où  aboutissent  3,  3,  4,  ...  lignes  de  démarcation,  nous  aurons 

S  =5, +  53 +  54  -+-  ..., 

et,  puisque  chaque  ligne  de  démarcation  appartient  à  deux  dis- 
tricts, 

2  A=/, -r2/î-i-3/,  +  .... 

D'autre  part,  puisque  chaque  ligne  de  démarcation  aboutit  à 
deux  points  de  concours,  excepté  dans  le  cas  des  îles  qui  n'ont  pas 
de  fxjint  de  concours,  et  des  péninsules  qui  n'en  ont  qu'un,  on 


Septième  récréation. 


aura,  en  désignant  par  [Xq  le  nombre  des  îles  et  par  jj-i  le  nombre 
des  péninsules  (*), 

2  A  =  S>  ;/.o  +  u-i  H-  2  5,  +  3  ^3  4-  .. .  ; 

mais  la  relation  [3]  prend  la  forme 

(6  F2  -A)  +  (6S  — 4  A)-6  (C+i)  =  o, 

on  a  donc 

5/i  -+-  4/2  +  3/3  +  2/4  +/5  — ...  =  o. 

Les  cinq  premiers  termes  de  la  relation  précédente  sont  seuls 
positifs;  par  suite,  l'une  au  moins  des  quantités  yi,  f^i/s,  /k,  fs 
ne  peut  être  nulle  ;  par  conséquent,  dans  toute  carte  tracée  sur 
une  surface  simple,  il  existe  au  moins  un  district  ayant  moins 
de  six  frontières. 

(^^^^ 

LES   PIÈCES   AUXILIAIRES. 

Nous  observerons  maintenant  qu'un  point  de  concours  où 
aboutissent  plus  de  trois  lignes  de  démarcation  peut  être  rem- 
placé par  un  certain  nombre  de  points  de  concours  où  se  rencon- 
trent trois  lignes  au  plus;  en  effet,  fixons  sur  ce  point  de  concours 
une  petite  pièce  circulaire  entourée  d'une  petite  circonférence 
dont  on  supprime  les  parties  qui  forment  les  lignes  de  démarca- 
tion entre  cette  pièce  et  l'un  quelconque  des  districts  adjacents. 

(')  Un  point  de  concours  où  aboutissent  deux  lignes  de  démarcation  compte 
pour  I  dans  .f,  et  pour  2  dans  [x,. 


La  Géométrie  des  régions.  iBd 

Le  nombre  des  districts  de  la  carte  n'est  pas  modifié  par  celte 
pièce,  que  nous  appellerons  pièce  auxiliaire,  puisque  celle-ci 
doit  être  considérée  comme  une  extension  de  l'un  des  districts, 

Cela  posé,  on  commence  tout  d'abord  par  modifier  la  carte, 
en  plaçant  des  pièces  auxiliaires  sur  tous  les  points  de  concours 
oii  se  réunissent  plus  de  trois  lignes  de  démarcation;  puis  on 
garnit  de  pièces  la  carte  modifiée,  en  couvrant  toujours  un  district 
ayant  moins  de  six  frontières,  et  fixant  une  pièce  auxiliaire  sur 
chaque  point  de  concours  où  aboutissent  quatre  ou  cinq  lignes 
de  démarcation.  Dans  ce  procédé,  il  n'y  aura  pas  de  nouveaux 
points  de  concours  ayant  plus  de  cinq  lignes  de  démarcation,  et 
deux  pièces  auxiliaires  ne  seront  jamais  placées  l'une  sur  l'autre, 
après  que  le  premier  district  aura  été  recouvert. 


^m^ 


PRATIQUE    DL'    COLORIAGE. 

Nous  arriverons  donc  à  une  carte  n'ayant  plus  qu'un  seul  dis- 
trict, sans  aucune  ligne  de  démarcation,  que  nous  recouvrirons 
de  l'une  quelconque  des  quatre  couleurs.  Puis,  en  développant  la 
carie  dans  l'ordre  inverse,  en  tenant  compte  des  pièces  auxiliaires, 
on  peint  chaque  district  à  mesure  qu'il  est  découvert.  Supposons 
qu'à  une  phase  quelconque  du  développement,  la  carte  ait  été  co- 
loriée avec  quatre  couleurs  seulement.  Enôtantla  pièce  suivante^ 
on  doit  considérer  deux  cas  :  i"  si  l'on  enlève  une  pièce  ordinaire,, 
on  découvrira  un  district  sans  aucune  ligne  de  démarcation,  ou 
ayant  une  ligne,  et  pas  de  point  de  concours,  ou  présentant  un 
point  de  concours  auquel  aboutissent  au  plus  trois  lignes  de  dé- 


[86  Septième  récréation. 


marcation;  donc,  ce  district  sera  entouré  au  plus  de  trois  autres, 
et  l'une  au  moins  des  quatre  couleurs  servira  à  le  colorier;  2°  si 
Ton  enlève  une  pièce  auxiliaire,  on  découvrira  un  point  de  con- 
cours auquel  aboutissent  quatre  ou  cinq  lignes  de  démarcation ,  et 
pas  plus  de  cinq  districts.  Les  couleurs  de  ces  districts  seront  pro- 
longées sur  leurs  portions  découvertes,  jusqu'au  point  de  concours, 
et  l'on  pourra  réduire  le  nombre  des  couleurs  à  trois  seulement 
par  le  procédé  que  nous  avons  indiqué  plus  haut.  En  ôtant  la 
pièce  suivante,  celle  sur  laquelle  est  le  point  de  concours  que  l'on 
avait  garni  de  la  pièce  auxiliaire,  on  découvrira  un  district  ayant 
quatre  ou  cinq  lignes  de  démarcation,  et  entouré  au  plus  de  cinq 
districts  à  deux  ou  trois  couleurs;  il  reste  donc  une  couleur  à 
notre  disposition  pour  le  district  découvert.  Ainsi,  à  une  phase 
quelconque  du  développement,  la  carte  est  toujours  coloriée  en 
quatre  couleurs  au  plus.  C.  Q.  F.  D. 

A-vant  de  colorier  la  carte,  on  a  le  soin  de  désigner  les  couleurs, 
au  crayon,  par  les  chiffres  1,2,  3,  4;  car  on  doit  à  certains  mo- 
ments changer  le  coloriage. 

On  peut  encore  démontrer  que  Von  peut  colorier  une  carte  en 
s'imposant  la  cojtdition  de  n'' avoir  que  trois  couleurs  au  plus,  à 
chaque  point  de  concours.  En  effet,  fixons  en  chacun  de  ces  points 
une  petite  pièce  circulaire;  nous  avons  ainsi  une  nouvelle  carte 
dans  laquelle  ces  petites  pièces  jouent  le  rôle  de  districts;  colo- 
rions alors  toute  la  carte,  puis  enlevons  les  petites  pièces,  en  com- 
plétant le  coloriage  des  parties  enlevées.  Puisque  trois  couleurs, 
au  plus,  entouraient  chaque  pièce,  il  n'y  en  aura  pas  plus  de  trois 
en  chaque  point  de  concours. 


®® 


La  Géométrie  des  régions.  1S7 


CAS    PARTICULIERS. 

Il  y  a  lieu,  en  terminant,  de  signaler  deux  cas  particuliers. 

I.  —  Lorsque,  sans  compter  les  îles  et  les  péninsules,  chaque 
district  est  adjacent  à  un  nombre  pair  d'autres  districts,  trois 
couleurs  suffisent  pour  colorier  la  carte. 

II.  —  Lorsque  les  lignes  de  démarcation  qui  aboutissent  à 
chaque  point  de  concours  sont  en  nombre  pair,  il  suffit  de  deux 
couleurs.  Ce  genre  de  cartes  s'obtient  en  traçant  un  certain  nombre 
de  lignes  continues  qui  se  coupent  un  nombre  quelconque  de  fois. 
Dans  ce  cas,  l'ensemble  des  lignes  frontières  peut  être  décrit  d'un 
seul  trait  continu,  sans  arrêt  ni  répétition,  ainsi  que  nous  l'avons 
démontré  dans  notre  Récréation  sur  le  Jeu  des  ponts  et  des  îles 
(t.  I,p.  35). 

LE    PROBLÈME    DES   LLAISONS. 

A  la  fin  du  Mémoire  cité,  M.  Kempe  ajoute  encore  les  consi- 
dérations suivantes  :  Si  l'on  place  sur  une  carte  une  feuille  de 
papier  à  calquer,  si  l'on  marque  un  point  à  l'intérieur  de  chacun 
des  districts  et  si  Ton  joint  par  des  lignes  les  points  qui  corres- 
pondent aux  districts  ayant  une  frontière  commune,  on  obtient 
un  diagramme  de  jonction  ou  de  liaison.  On  peut  alors  se  pro- 
poser le  problème  de  maïquer  les  points  du  diagramme  par  le  plus 
petit  nombre  possible  de  lettres,  mais  de  telle  sorte  que  les  deux 
points  placés  aux  extrémités  d'une  ligne  de  jonction  ne  soient  pas 


i88  Septième  récréation. 


affectés  de  la  même  lettre.  La  classification  des  diagrammes  d'après 
la  valeur  de  n  a  une  importance  considérable  sur  laquelle  nous 
reviendrons  plus  tard.  Nous  nous  bornerons  à  faire  observer,  pour 
l'instant,  que  le  diagramme  de  liaison  d'une  carte  et  cette  carte 
elle-même  peuvent  être  considérés  comme  les  représentations  de 
deux  polyèdres  polaires  réciproques. 

Enfin  M.  Kempe  termine  par  l'énoncé  d'un  théorème  qui  est 
une  conséquence  du  théorème  du  coloriage;  j'en  ai  longtemps 
cherché,  dit-il,  une  démonstration  directe  pour  en  déduire  la  so- 
lution du  problème  des  quatre  couleurs.  Ce  théorème  est  le  sui- 
vant :  Un  polyèdre  quelconque  étant  donné,  on  peut  ajouter  aux 
Jaces  de  ce  polyèdre  d'autres  polyèdres,  de  telle  sorte  que,  dans 
le  polyèdre  résultant  :  i"  toutes  les  faces  soient  des  triangles; 
2°  les  nombres  des  arêtes  aboutissant  à  chaque  sommet  soient 
des  multiples  de  trois. 

^^ 

LES  RÉSEAUX  A  POINTS  TRIPLES. 

Nous  ajouterons  ici  quelques  considérations  fort  ingénieuses 
qui  ont  été  indiquées  à  diverses  reprises  par  M.  Tait,  Téminent 
professeur  de  l'Université  d'Edimbourg  ('). 

(•)  Tait,  Note  on  a  theoreiiï  in  geometry  of  position  {Transactions  of 
the  Royal  Society),  p.  657.  Edimbourg,  1880.  —  Listing's  Topologie,  by 
Prof.  Tait.  —  Introductory  address  to  the  Edinbiirgh  mathematical  Society, 
nov.   iS83  {  Philos.  Mag.,  >anv. 


La  Géométrie  des  rés;ious. 


i8<) 


THEOREMES    DE   TAIT. 


Considérons  un  réseau  dont  les  carrefours  ne  contiennent  que 
des  points  triples  ;  ces  points  tous  impairs,  sont  en  nombre  pair; 
nous  désignerons  par  2  w  le  nombre  des  points;  le  nombre  des 
chemins  est  égal  à  3n.  Nous  dirons  que  le  réseau  possède  un 
isthme  (y?^.i33),  lorsque  la  suppression  du  chemin  correspon- 


i33. 


Fig.  134. 


Fig.   i35. 


dant  formé  par  l'isthme  désagrège  le  réseau.  Cela  posé,  on  a  le 
théorème  suivant  :  Dans  un  réseau  à  points  triples,  sans  isthmes, 
on  peut  partager  les  3n  chemins  en  trois  groupes  de  n  chemins, 
de  telle  sorte  que  les  trois  chemins  qui  aboutissent  à  un  même 
carrefour  ou  trivium  quelconque  appartiennent  à  trois  groupes 
différents.  En  d'autres  termes,  les  n  chemins  de  chaque  groupe 
aboutissent  aux  2n  points  donnés. 

Nous  désignerons  ces  groupes  par  O,  I,  II,  ainsi  que  nous  l'a- 
vons fait  [fig.  1 34  et  I  33  ).  Le  théorème  n'a  pas  lieu  lorsqu'un 
réseau  partiel  contenant  un  nombre  impair  dépeints  est  relié  par 
un  isthme  au  reste  du  réseau. 


I  go  Septième  récréation. 


On  peut  encore  énoncer  le  théorème  précédent  sous  la  forme 
suivante  :  Les  arêtes  diin  polyèdre  n'ayant  pour  sommets  que 
des  angles  trièdres  peuvent  être  divisées  en  trois  groupes  de 
telle  sorte  qu'une  arête  de  chaque  groupe  aboutisse  à  chacun  des 
sommets.  Il  en  est  ainsi  pour  le  tétraèdre,  pour  le  cube  et  pour  le 
dodécaèdre;  mais  on  doit  encore  observer  avec  l'auteur  que,  sous 
celle  seconde  forme,  le  nouvel  énoncé  est  plus  particulier  que  le 
précédent.et  ne  s'appliquerait  à  la^^.  i35  pour  laquelle  le  premier 
énoncé  se  vérifie.  Cette  figure  ne  peut  être,  en  effet,  considérée 
comme  la  déformation  ou  la  représentation  d'un  polyèdre,  à  moins 
d'étendre  le  nom  de  polyèdre  à  des  solides  tels  qu'une  lentille 
biconvexe,  par  exemple. 


'J^^eir 


THEOREME   DE    KIRKMANN. 

Le  Jeu  icosien  d'Hamilton  (t.  II,  p.  21 1)  est  une  application 
particulière  de  ce  théorème,  car  la  figure  correspondante  est  la 
représentation  d'un  dodécaèdre  pentagonal.  L'idée  de  ce  jeu  lui 
a  été  suggérée  par  cette  remarque  de  M.  Kirkmann  que,  évidem- 
ment, un  circuit  d'arêtes,  d'un  type  unique,  passe  par  tous  les  som- 
mets de  ce  polyèdre  (').  Hamilton  s'est  emparé  de  ce  résultat  et 
en  a  fait  la  base  de  son  Jeu,  ainsi  que  d'un  nouveau  calcul  d'es- 
pèce très  singulière.  Les  fig.  i36  représentent  trois  circuits  sur 
des  diagrammes  équivalant  à  la  représentation  plane  d'un  dodé- 
caèdre pentagonal.  En  chacun  des  sommets  du  polyèdre,  nous 

(')  Kirkmann,  On  the  polyhedra  [Phil.  Trans.,  i858,  p.  160). 


La  Géométrie  des  réifioris. 


pouvons  nous  diriger  à  main  droite  ou  à  main  gauche  (dans  le 
diagramme,  il  faut  inverser  la  droite  et  la  gauche  pour  le  contour 
extérieur);  désignons  ces  opérations  respectivement  par  À  et 
par  u..  Si  l'on  commence  en  un  sommet  quelconque  du  dodé- 
caèdre, la  répétition  quintuple  de  l'opération  À  ou  de  l'opéra- 
tion a  nous  ramène  au  point  de  départ,   après  avoir  décrit  les 


Fig.  i36. 


cinq  côtés  de  l'une  des  laces,  de  sorte  que  Ton  peut  considérer 

le  symbole  X  ou  a  comme  une  racine  cinquième  de  l'unité.  Dans 

cette  notation,  le   théorème  de  Kirkmann  est  représenté  par 

l'expression 

X(A.XuLÀXXuu.u.XaXaXXX(i;i.u.  =  l, 

ou,  d'une  manière  plus  abrégée,  en  observant  qu'on  n'a  pas  le 
droit  de  renverser  l'ordre  des  opérations,  ni  celui  de  leurs  sym- 
boles, 

[{Xa)»X»|x']*  =  i- 

Cette  expression  peut  être  mise  sous  un  grand  nombre  de 
formes  qui  paraissent  différentes,  mais  équivalentes  en  réalité; 
ainsi  l'on  peut  permuter  circulairement  les  facteurs,  c'est-à-dire 
que  l'on  peut  commencer  le  cycle  à  un  facteur  quelconque.  On 
peut  aussi  échanger  les  symboles  X  et  u.  à  cause  de  la  symétrie 


È. 


Septième  récréation. 


de  la  figure.  Il  est  intéressant  d'étudier,  dans  ce  cas  particulier 
des  réseaux  à  points  triples,  la  nature  des  diverses  espèces  d'essais 
nécessairement  infructueux  pour  sortir  d'un  pareil  labyrinthe. 
Si,  par  exemple,  nous  choisissons  des  routes  telles  que 

(À;i.)2XaX^     OU     X^;Jl.X^ 

qui  ne  se  rencontrent  pas  dans  le  circuit  complet  que  nous  avons 
formulé  plus  haut,  le  pas  suivant  nous  ramène  forcément  à  un 
carrefour  déjà  traversé.  Nous  obtenons  ainsi  d'autres  relations 
entre  les  symboles  X  et  u.,  et  renfermant  des  facteurs  dont  le 
nombre  peut  varier  de  7  à  19.  C'est,  sous  une  autre  forme,  !e  pro- 
blème des  impasses,  dans  le  Jeu  icosien  d'Hamilton  (t.  II,  p.  221). 
Nous  donnons  enfin  {fig.  iSy)   un  autre  diagramme  pour  l'é- 


tude du  Jeu  icosien;  on  peut  le  reproduire  sur  une  planchette  en 
fixant  des  clous  aux  sommets  de  l'icosagone.  Les  lettres  du  dia- 
gramme sont  en  concordance  avec  celles  de  lajig:  97  du  tome  II, 
page  211. 

"^"^ 


La  Géométrie  des  régions.  igi 


COROLLAIRE    DU    COLORIAGE. 

Le  théorème  de  Tait  est  une  conséquence  du  théorème  de 
Guthrie,  sur  le  coloriage.  En  effet,  considérons  un  carrefour 
quelconque  à  réseaux  triples,  mais  sans  isthme.  Entourons-le 
d'un  circuit  extérieur;  nous  pouvons,  avec  les  quatre  couleurs 
A,  B,  G,  D,  colorier  toutes  les  régions  en  nombre  n-r'i,  en 
ajoutant  celle  qui  est  bornée  par  le  circuit  extérieur.  Gela  fait,  un 
chemin  quelconque  sépare  deux  régions  de  couleurs  différentes; 
on  rangera  chacun  des  chemins  dans  les  groupes  O,  I,  II, 
d'après  le  Tableau  suivant  : 

0  entre    A  et  B    ou  entre     C  et  D, 

1  »         A  et  C  )'  B  et  D, 
II        »         ActD           »  BetG. 

Le  théorème  de  Tait  est  donc  une  conséquence  immédiate 
du  théorème  du  coloriage;  inversement,  le  problème  géogra- 
phique des  quatre  couleurs  serait  une  conséquence  du  théorème 
de  Tait,  si  l'on  connaissait  une  démonstration  directe,  le  cas 
d'exception  de  l'isthme  ne  pouvant  se  présenter.  En  effet,  si  les 
frontières  se  rencontraient  au  nombre  de  plus  de  trois  en  un 
même  point,  il  suffirait  de  recouvrir  ce  carrefour  d'une  petite 
pièce  auxiliaire,  et  alors  toutes  les  frontières  se  rencontreraient 
trois  par  trois.  Il  suffit  ensuite  de  supposer  que  la  pièce  auxi- 
liaire diminue  indéfiniment  d'étendue  jusqu'à  disparaître. 

Gette  relation  entre  les  deux  théorèmes  est  analogue  à  celle  de 
la  résolution  de  l'équation  du  quatrième  degré  que  l'on  ramène 
E.  Lucas.  —  Récréations  mathém.,  IV.  i3 


194 


Septième  récréation.  —  La  Géométrie  des  régions. 


au  troisième,  et  aussi,  par  exemple,  à  celle  de  la  recherche  des 
points  d'intersection  de  deux  coniques  par  l'étude  des  trois  couples 
de  sécantes  qui  passent  par  les  quatre  points. 

Il  y  aurait  donc  un  grand  intérêt  à  trouver  une  démonstration 
directe  et  rigoureuse  du  théorème  de  Tait;  mais,  dit  l'auteur, 
suivant  Texpression  de  l'éminent  mathématicien  Kirkmann,  que 
j'ai  consulté  sur  ce  sujet,  le  théorème  présente  cet  irritant  in- 
térêt qu'il  se  joue  aussi  bien  du  doute  que  de  la  preuve  (*). 
Peut-être  que  la  preuve  de  cette  curieuse  proposition  n'a  pu  être 
découverte  jusqu'ici,  à  cause  de  son  extrême  simplicité.  Ainsi, 
les  astrologues  sont  exposés  à  ne  pas  voir  les  beautés  des  plus 
humbles  objets  qui  s'étaient  à  leurs  pieds. 

Un  astrologue,  un  jour,  se  laissa  choir 
Au  fond  d'un  puits.  On  lui  dit  :  «  Pauvre  bête, 
»  Tandis  qu'à  peine  à  tes  pieds  tu  peux  voir, 
»  Penscs-tu  lire  au-dessus  de  ta  tcte?  » 

(')  Reprint  ofmath.  papers  from  the  Educational  Times,  1881,  p.  ii3. 


1 


HUITIÈME  RÉCRÉATION. 


LA  MACHINE  A  MARCHER. 


HUITIEME  RECREATION. 


LA  MACHINE  A  MARCHER. 


LA   MACHINE    A    MARCHER. 

L'idée  de  la  machine  à  marcher  n'est  pas  tout  à  fait  nou- 
velle; on  a  déjà  pris,  en  France,  une  quarantaine  de  bre- 
vets pour  cette  invention  qui  trouve  d'utiles  applications. 
En  temps  de  neige  et  de  verglas,  les  locomotives  avancent  diffi- 
cilement sur  les  rails,  et  l'on  a  pensé  qu'il  était  bon  d'ajouter  aux 
locomotives  des  organes  temporaires  permettant  de  remplacer  les 
roues  par  de  véritables  pattes.  C'est  ainsi  que  l'on  trouve  dans 
les  galeries  du  Conservatoire  des  Arts  et  Métiers  trois  exem- 
plaires de  locomotives  à  patins,  de  M.  A.  Fortin-Hermann  ; 
l'une  d'elles,  avec  un  seul  cylindre  moteur,  est  un  petit  modèle 
que  l'on  peut  faire  avancer  en  pressant  une  poire  en  caoutchouc; 
une  autre  porte  quatre  cylindres  moteurs;  une  troisième  est  dis- 
posée pour  des  courbes  de  petit  rayon  (').  On  comprend  bien 

(•)   Catalogue   des  collections   du   Conservatoire   national  des  Arts    et 
Métiers,  7'  édition,  1882,  p.  407,  n"  5o,  5i,  bi. 


igS  Huitième  récréation. 


encore  que  la  locomotive  à  patins  peut  être  fort  utilement  em- 
ployée dans  d'autres  conditions. 

Le  mécanisme  principal  des  machines  à  marcher  de  M.  For-i 
tin-Hermann  se  compose  soit  d'excentriques,  soit  de  parallélo- 
grammes articulés.  La  présente  récréation  a  pour  but  de  faire 
connaître  en  France  le  mécanisme  qui  a  été  imaginé  par  M.  Tche- 
bichef;  nous  devons  dire  qu'il  s'agit  ici  principalement  d'une  so- 
lution théorique;  c'est  aux  praticiens  qu'il  convient  d'étudier  les 
résultats  de  l'expérience  sur  les  indications  données  par  l'illustre 
professeur  de  l'Université  de  Saint-Pétersbourg. 

On  appelle  habituellement  en  Mécanique  parallélogramme 
articulé  un  quadrilatère  ou  une  figure  formée  de  quatre  côtés  de 
longueur  invariable,  dont  l'un  reste  fixe;  les  extrémités  de  ce 
côté  fixe,  la  base,  sont  les  centres  de  rotation  des  deux  côtés  ad- 
jacents, et  le  côté  opposé  à  la  base  se  balance  d'une  manière  plus 
ou  moins  compliquée,  suivant  la  grandeur  respective  des  côtés 
du  quadrilatère.  Le  parallélogramme  de  Watt  est  un  exemple 
bien  connu  de  ce  mécanisme;  il  est  souvent  appliqué  dans  les 
machines  à  vapeur,  pour  diriger  la  tige  d'un  piston  qui  doit  effec- 
tuer un  mouvement  aussi  rectiligne  que  possible.  M.  Tchebichel 
avait  démontré  depuis  longtemps  qu'avec  le  parallélogramme 
articulé  il  était  impossible  d'obtenir  un  mouvement  absolument, 
mathématiquement  rectiligne.  C'est  à  M.  Peaucellier,  alors  com- 
mandant du  génie,  aujourd'hui  général,  membre  du  Comité  des 
fortifications,  que  l'on  doit  la  première  solution  rigoureuse  de  la 
description,  de  la  construction  d'une  ligne  droite;  mais  cette 
solution,  publiée  en  1864,  était  restée  inaperçue  {'). 


(')  Nouvelles  Annales  de  Mathématiques  {i%6.\). 


La  machine  à  marcher.  199 


En  1870,  un  étudiant  de  l'Université  de  Saint-Pétersbourg, 
M.  Lipkine,  a  présentée  M.  Tchebichef  un  appareil  articulé,  qui 
permettait  de  tracer  mathématiquement  une  ligne  droite;  cela  ne 
détruisait  nullement  les  conclusions  du  savant  professeur  russe, 
puisque  l'appareil  articulé  n'était  plus  un  paiallélogramme  et 
comptait  sept  tiges  ou  côtés,  au  lieu  de  trois;  l'étudiant  reçut 
les  encouragements  de  son  professeur,  de  son  Université  et  de 
son  gouvernement  pour  cette  admirable  découverte;  il  avait 
retrouvé  l'appareil  Peaucellier.  Quant  au  général,  il  fut  récom- 
pensé plus  tard;  notre  Académie  des  Sciences  lui  a  donné  un  beau 
prix. 

Pour  tracer  une  ligne  droite,  on  se  sert  d'une  règle  ;  mais  tout 
d'abord  il  faut  vérifier  celle-ci;  quand  on  l'achète  chez  le  mar- 
chand, on  met  l'œil  à  l'une  des  extrémités  pour  voir  si  elle  est 
bien  conditionnée;  on  la  vérifie  d'une  manière  plus  sûre  en  tra- 
çant une  ligne  sur  l'un  des  bords  et  en  retournant  la  règle  sur 
l'autre  face,  pour  voir  si  le  second  trait  coïncide  avec  le  premier. 
Et  depuis  plus  de  quarante  siècles  que  l'on  fait  de  la  Géomé- 
trie, personne  ne  s'était  aperçu  que  l'on  ne  savait  pas  tracer  ma- 
thématiquement une  ligne  droite!  Cependant  le  professeur  de  Géo- 
métrie, dans  sa  chaire,  n'enseignait  que  des  constructions  exactes 
et  rigoureuses!  Aujourd'hui  encore,  bien  que  l'appareil  Peaucel- 
lier et  ses  congénères  aient  remplacé,  en  Allemagne,  en  Angle- 
terre, en  Russie,  le  parallélogramme  de  Watt  des  machines  à  va- 
peur, nos  Ouvrages  élémentaires  sont  muets  sur  cette  découverte, 
sur  ce  mécanisme  qui  s'explique  avec  le  carré  de  l'hypoténuse 
par  une  démonstration  claire,  limpide,  donnée  par  M.  le  colonel 
Mannheim,  professeur  à  l'École  Polytechnique. 

Mais  revenons  à  notre  sujet.  Il  ne  faut  pas  abuser  outre  mesure 


Huitième  récréation. 


des  solutions  théoriques;  ce  sont  des  renseignements,  des  guides 
pour  le  praticien;  mais  il  faut  aussi  tenir  compte  du  fonctionne- 
ment de  la  machine,  des  frottements,  du  rendement.  Au  moyen 
d'un  nouveau  genre  de  calcul  imaginé  par  M.  Tchebichef,  et  fondé 
sur  des  méthodes  arithmétiques  dont  on  trouve  le  germe  dans  les 
Ouvrages  d'Euler,  le  savant  professeur  s'est  proposé  de  rechercher 
les  dimensions  les  plus  convenables  pour  que  l'un  des  points  du 
côté  mobile,  opposé  au  côté  fixe  du  parallélogramme,  puisse 
décrire  une  droite  aussi  exactement  que  possible. 

La  fig.  1 38  représente  le  nouveau  parallélogramme;  les  points  B 


Fig.  i38. 


et  G  sont  fixes;  ce  sont  les  centres  de  rotation;  le  côté  opposé  AD 
est  de  longueur  constante;  ses  extrémités  décrivent  les  deux  cer- 
cles pointillés  de  la  figure.  Si  l'on  prolonge  la  ligne  AD  d'une 
longueur  égale,  c'est-à-dire  si  DM  =:  DA,  le  point  M  décrit  une 
courbe,  qui  n'est  plus  la  courbe  à  longue  inflexion  de  Watt, 
mais  dont  une  certaine  partie  s'approche  très  près  d'une  ligne 
droite,  aussi  près  que  possible  avec  les  conditions  imposées, 
pourvu  que  les  dimensions  du  parallélogramme  soient  les  sui- 


La  machine  à  marcher. 


vantes,  en  prenant  pour  unité  de  longueur  le  côté  AB  : 

3-^./^  ^       4  +  v^ 


CD  =  AD  =  DM 


^7 


et 


BC 


Dans  ce  cas,  et  comme  il  est  facile  de  s'en  assurer  en  con- 
struisant avec  quatre  règles  en  bois  ce  parallélogramme,  le  point 
M  décrit  une  trajectoire  sensiblement  rectiligne,  lorsque  le  som- 
met A  décrit  son  demi-cercle  de  droite.  Après  avoir  parcouru 
cette  partie  de  la  trajectoire,  le  point  M  se  lève  et  fait  sa  marche 
de  retour  en  montant  peu  à  peu,  jusqu'au  milieu  de  la  course,  et 
en  s'abaissant  suivant  la  même  loi  après  avoir  dépassé  ce  milieu. 

Supposons  maintenant  {fig.  139)  que  l'on  applique  de  tels  sys- 


Fig.  139. 


témes  à  deux  manivelles  soudées  à  un  axe,  et  directement  opposées  ; 
on  obtient  un  mécanisme  où  la  rotation  de  l'axe  se  transforme  en 
mouvement  de  deux  points  qui,  touràtour,  parcourent  une  même 
ligne  droite,  et  dont  chacun  s'élève  successivement  au-dessus  de 
cette  ligne  après  l'avoir  parcourue  quand  l'autre  s'abaisse  sur  elle 
pour  la  pvircourir.  Plaçons  à  côté,  pour  l'e'quilibre,  un  appareil 


Huitième  récréation. 


Fig.   140.  —  Position  initiale  au  repos. 


-^ — "-   7)/£rA  I  -H 


Fig.   141.  —  I,e  pied  droit  de  devant  et  le  pied  gauche  de  derrière  se  lèvent 
pour  s'avancer  vers  la  droite. 


La  machine  à  marcher. 


Fig.   142.  —  Position  plus  avancée  que  dans  la  »î^.  141. 


Fig.  143.  —  Deuxième  position  de  repos. 


204  Huitième  récréation.  —  La  machine  à  marcher. 

symétrique  par  rapport  à  un  point  central,  nombril  de  la  machine, 
et  réunissons-le  au  premier  par  une  barre  fixe;  faisons  supporter 
les  extrémités  des  quatre  leviers  M  par  quatre  pieds,  comme  par 
les  pattes  d'un  éléphant;  si  l'on  tire  vers  la  droite  avec  une 
ficelle,  tout  cet  appareil  remue,  se  met  en  train  et  marche  comme 
un  quadrupède  [fig.  140  à  143). 

Habillons  tout  cet  appareil  de  bois;  donnons-lui  de  la  chair  en 
carton;  imitons  un  éléphant,  sa  trompe,  avec  défenses  d'ivoire; 
nous  ferons  ainsi,  suivant  les  dimensions,  un  joujou  pour  l'enfant, 
ou  pour  les  grandes  personnes,  dans  la  figuration  des  théâtres  à 
grand  spectacle.  En  lui  plaçant  un  pendule  ou  un  ressort  dans 
le  ventre,  comme  au  nègre  de  la  porte  Saint-Denis,  cet  appareil 
marcherait  tout  seul.  Avec  des  jambes  de  girafe,  il  pourrait  être 
utilisé  comme  vélocipède  dans  le  département  des  Landes;  mais 
l'addition  d'aussi  longues  jambes  en  ferait  tout  naturellement 
monter  le  coût. 

Il  serait  plus  intéressant  d'expérimenter  l'appareil  pour  les  lo- 
comotives et  les  locomobiles.  Cependant,  au-dessus  de  ces  appli- 
cations diverses,  nous  terminerons  en  disant  que  ce  parallélo- 
gramme de  M.  Tchebichef  donne  la  solution  d'un  important 
problème  de  Mécanique.  En  ne  considérant  que  les  parties  recti- 
lignes  de  la  trajectoire  des  points  M,  on  reconnaît  qu'elles  pro- 
duisent, avec  une  approximation  très  suffisante,  le  même  effet 
que  les  arcs  égaux  de  la  circonférence  d'une  roue  qui  tourne, 
lorsque  le  rayon  de  celle-ci  est  très  grand.  En  d'autres  termes, 
ce  mécanisme  joue  le  rôle  d'une  roue  infiniment  grande. 


«tt*  CtlA    (tu.  CXiA.    (XUi  CXU.    OJI  (tiA    CtiA  CtiA    <tiA  CtiA    CtiA  t  iA    CtM  ctiA    CiA  rtlA    Ctii  <tlA 

TtiJ  r^v  rcî  rci>  toj  y^p  tîlj  tcj  rcp  ''ïV  '''»4>  '"'^ij  tto^  fïj  •rzj  rziy  rriy  r^x?  r^Nj  rv\> 


NOTES. 


NOTE  I. 
Le  saut  du  cavalier  au  jeu  d'échecs. 

Edouard  Lucas  avait  l'intention  de  faire,  sur  le  Saut  du  Cavalier,  une 
récréation  très  complète,  qui  aurait  rempli  près  de  la  moitié  d'un  volume. 
Il  avait  réuni,  à  cet  effet,  de  nombreux  renseignements,  mais  ce  sont  de 
simples  Notes,  présentant  trop  de  lacunes  pour  qu'il  nous  soit  possible 
d'y  suppléer. 

Nous  nous  bornerons  à  reproduire  un  article  publié  par  la  Revue  scien- 
tifique du  2  2  septembre  1882. 


DEFINITION. 

On  sait  que  le  cavalier  du  jeu  des  échecs  possède  une  marche 

Fig.  144. 


^oute  particulière  ;  il  va,  pour  ainsi  dire,  en  caracolant  et  passe 
d'une  case  blanche  sur  une  noire,  ou  inversement.  Ainsi,  lorsque 


2o6  ISÎote  I. 

le  cavalier  se  trouve  en  o  (/î^.  144),  il  peut  venir  se  placer  sur 
l'une  des  cases  numérotées  de  i  à  8. 

Nous  dirons  que  deux  cases  sont  conjuguées,  ou  battues  l'une 
par  l'autre,  lorsque  le  cavalier  peut  passer  par  un  seul  saut  de 
l'une  à  l'autre;  ces  deux  cases  sont  de  couleurs  différentes;  par 
conséquent,  après  un  nombre  pair  de  sauts  successifs,  le  cava- 
lier se  trouve  sur  une  case  de  même  couleur  que  la  case  du  dé- 
part; après  un  nombre  impair  de  sauts,  sur  une  case  de  couleur 
différente.  Une  case  étant  donnée  sur  l'échiquier  ordinaire,  le 
nombre  des  cases  conjuguées  est  8,  6,  4,  3,  ou  2;  les  cases  des 
quatre  coins  n'ont  que  deux  conjuguées,  et  ce  sont  les  seules.  Le 
lecteur  se  rendra  facilement  compte  de  ces  résultats  en  inscrivant 
sur  chaque  case  le  nombre  de  toutes  ses  conjuguées;  il  trouvera 
ainsi  que  l'échiquier  de  64  cases  contient  ;. 

Quatre  cases  ayant  deux  cases  conjuguées;  ce  qui  fait  8  sauts. 


Huit 

— 

trois 

— 

—           24      — 

Vingt 

— 

quatre 

— 

—           80      — 

Seije 

— 

six 

— 

-               Q^        — 

Sei:(e 

— 

huit 

Total 

-             128       - 

336  sau 

Il  y  a  donc,  sur  l'échiquier  ordinaire,  168  sauts  du  cavalier  et 
un  nombre  égal  de  sauts  inverses.  Sur  l'échiquier  rectangulaire 
de  dimensions^  et^,  on  démontre  facilement  que  le  nombre  des 
sauts  du  cavalier  est  le  double  de  l'expression 

{■2p 3)(2^ 3) I. 


Note  I. 


UN  PROBLEME    DE    GUARINI. 


Afin  de  familiariser  le  lecteur  avec  le  saut  du  cavalier,  nous 
donnerons  la  solution  du  problème  suivant  que  l'on  trouve  sous 
le  n°  42  dans  un  manuscrit  de  P.  Guarini  di  Forli  (  1 5 1 2  )  :  Deux 
cavaliers  blancs  et  deux  cavaliers  noirs  sont  placés,  sur  l'échi- 
quier, aux  quatre  coins  d'un  carré  de  neuf  cases  ;  on  demande  de 
faire  passer,  suivant  la  règle,  les  cavaliers  blancs  à  la  place  des 
cavaliers  noirs,  et  inversement,  sans  sertir  du  carré. 

Supposons  les  cavaliers  noirs  en  i  et  3  [fig.  145),  et  les  cavaliers 

Fig.   t45. 


7 

6 

5 

ô 

0 

^ 

1 

2 

3 

blancs  en  5  et  7;  on  joue  les  quatre  paires  de  coups  suivants  dans 
lesquelles  on  déplace  alternativement  les  deux  cavaliers  blancs  et 
les  deux  cavaliers  noirs  : 


7  à  2,     D  à 


à  4,     3à6;     2  à  5,     8  à  3,     4a  7,     6  à  i. 


Les  cavaliers  blancs  occupent  les  positions  3  et  5,  et  les  noirs 
les  positions  i  et  7;  on  joue  ensuite  les  huit  coups  suivants  : 

5  à  8,     3  à  6,     7à2,     ià4;     8  à  3,     6ài,     2  à  5,     4^7. 

Les  noirs  occupent  maintenant  les  cases  5  et  7  et  les  blancs  les 


2  08 


Note  I. 


cases  I  et  3.  L'ensemble  des  parcours  des  cavaliers  forme  un  oc- 

Fig.  146. 


•     Y  ^ 


togone  étoile,  dont  l'une  des  moitiés  est  décrite  par  chacun  des 
cavaliers  [fig.   146). 

LES    RECTANGLES    DE    I 2    CASES. 


En  suivant  les  lignes  qui  joignent  les  centres  des  cases  d'un 
rectangle  de  dimensions  3  et  4  [fig.  147,  148  et  149),  le  cavalier 


Fig.   147. 


Fig.    148. 


Fig.   149. 


V 

/ 

\ 

^ 

^ 

^ 

peut  parcourir  successivement  les  douze  cases  de  ce  rectangle; 
les  centres  des  cases  de  départ  et  d'arrivée  sont  marqués  par 


iSote  I 


20Q 


de  gros  points;  d'ailleurs,  rien  ne  distingue  la  case  initiale  de 
la  case  finale,  et  le  cavalier  peut  passer  de  l'une  à  l'autre, 
après  avoir  rencontré  une  seule  fois  les  centres  des  dix  autres 
cases. 

Nous  recommandons  ces  exercices  à  tous  les  joueurs  d'échecs; 
ils  y  trouveront  une  vue  plus  rapide  des  marches  du  cavalier  qui 
leur  permettra  d'utiliser,  dans  la  bataille,  les  ressources  de  leur 
cavalerie  f ')• 


^;@^^~ 


LES    CROIX    D  EULEU. 


Nous  ajouterons  encore  les  deux  exemples  suivants  pour  les 
parcours  sur  deux  croix  de  douze  et  de  vingt  cases  empruntés, 

Fig.  i5o. 


comme  les  précédents,  au  Mémoire  d'Euler  dont  il  sera  parlé 

(')  «Le  investigazioni  che  si  sono  adJote  ci  condurrano  allô  scopo  di 
renderlo  aile  battaglie  più  destro.  »  (T.  Ciccolini,  Del  Cavallo  degli 
scacchi,  i836.  ) 


E.  Lucas.  —  Récréations  mathém.,  W 


«4 


2IO  Note  I. 

plus  loin  [fig'.  1 5o  et  1 5  i  ) .  Dans  ces  derniers  exemples,  le  cavalier 

Fig.  i5i. 


peut  partir  d'une  case  quelconque,  parcourir  une  seule  fois  toutes 
les  cases  et  revenir  à  son  point  de  départ. 


^-^e^ 


LA    COURSE    ET    LE    CIRCUIT. 


«  Un  jour,  dit  Euler  ('),  je  me  trouvais  dans  une  compagnie 
oïl,  à  l'occasion  du  jeu  d'échecs,  quelqu'un  proposa  cette  question 
de  parcourir  avec  un  cavalier  toutes  les  cases  d'un  échiquier  sans 
revenir  jamais  deux  fois  à  la  même,  et  en  commençant  par  une 
case  donnée.  On  mettait,  pour  cette  fin,  des  jetons  sur  toutes  les 

(')  Mémoires  de  l Académie  des  Sciences  de  Berlin  pour  l'année  1759. 
Ce  Mémoire  est  reproduit  en  français  sous  le  titre  :  Solution  d'une  question 
ingénieuse  qui  ne  paraît  soumise  à  aucune  analyse,  dans  les  Commenta- 
tiones  arithmeticœ  collecta;  {PetropoW,  1849,  t-  1,  P-  33;  à  355). 


\ote  l. 


soixante-quatre  cases  de  l'échiquier,  à  l'exception  de  celle  où  le 
cavalier  devait  commencer  sa  route,  et  de  chaque  case  où  le  ca- 
valier passait  conformément  à  sa  marche,  on  ôtait  le  jeton,  de 
sorte  qu'il  s'agissait  d'enlever  de  cette  façon  successivement  tous 
les  jetons.  Il  fallait  donc  éviter,  d'un  côré,  que  le  cavalier  ne  revînt 
à  une  case  vide,  et,  d'un  autre  côté,  il  fallait  diriger  sa  course  en 
sorte  qu'il  parcourût  enfin  toutes  les  cases.  » 

Pour  exécuter  ce  problème,  et  pour  conserver  le  souvenir  de  la 

Fig.    132. 


58|23i62  15;6't-;2l!5'f;13 

6lil6  59  22ib5:i'^j51  20 

2'^|57|l0:63!l8i't9ll2;53 

9!60il7|56Mlj52|l9i50 

34 

25  361  7iWi27|*8|  5 

37 

8 

yj, 

26^5 

61^1281 

32 

35 

2 

39|30i43   ^\<V]\ 

1  |38  3^i'^'^|  3  't6;29;*2 

marche  du  cavalier,  il  est  préférable  de  se  servir  des  soixante- 
quatre  premiers  numéros  d'un  jeu  de  loto,  que  l'on  place  succes- 
sivement sur  les  cases  dans  l'ordre  numérique,  à  partir  de  la  case 
désignée,  conformément  à  la  marche  du  cavalier.  Ce  problème  a 
été  proposé  et  résolu  pour  la  première  fois  dans  un  cas  particulier 
ifig.  i52)  par  le  chevalier  de  Montmort,  auteur  de  l'£'55af  d'ana- 
lyse sur  les  jeux  de  hasard  [Y*  diû?,,  1708  eî  J714).  Deux  autres 

%    solutions  du  problème  ont  été  obtenues,  peu  de  temps  après,  par 

*    Moivre  et  de  Mairan  { 1722). 

I        D'après  V Encyclopédie  de  d'Alembert  et  de  Diderot,  ce  pro- 

1    blèrne  aurait  été  connu  très  anciennement  dans  l'Inde.  En  Eu- 


2  12  Note  I. 

rope,  on  en  a  trouvé  la  première  mention  dans  le  manuscrit  de 
Guarini  (n"  74),  puis  dans  l'Ouvrage  intitulé  :  S'EN  SUIT 
]¥A}y>.,  partis  des  Eschei,  compose:{  nouvellement  pour  récréer 
tous  nobles  cueurs  et  pour  éviter  oysiveté  à  ceux  qui  ont  vou- 
lante, désir  et  affection  de  le  scavoir  et  apprendre,  et  est  appelle 
ce  Livre,   le  jeu  des  Princes  et  Damoiselles  (Paris,  vers  i53o). 

Fig.   i53. 


Al/W  \      /  7  ~p 


Ony  trouve  ce  passage  :  «  C'est  pour  lever  tous  leseschezau  traict 
du  chevalier  en  A  et  ensuy  la  -f  de  par  Dieu;  ton  chevalier  doit 
estre  au  coing  destre  devers  ton  loueur  et  se  doit  rendre  à  l'opo- 
site.  »  Les  développements  de  l'auteur  conduisent  à  une  course 
sur  le  demi-échiquier  de  trente-deux  cases  que  nous  avons  re- 
présentée dans  la  fig.  i  53. 

On  rencontre  une  autre  course  sur  le  demi-échiquier  dans  l'Ou- 
vrage Libro  nel  quale  si  tratta  délia  maniera  di  giuocar  a 
Scacchi,  con  alcuni  sottilissimi  partiti,  nuovamente  composto 
da  HoRATio  GiANUTio  DELLA  Mantia  (Toriuo,  1597).  Nous 
avons  représenté  cette  course  dans  le  demi-échiquier  supérie'ur 
{fig.  154).  Faisons  tourner  l'échiquier  d'un  demi-tour  autour  de 
son  centre  et  reproduisons  cette  course  dans  l'autre  moitié  de 


Note  1. 


2l3 


l'échiquier;  nous  pouvons  réunir  ces  deux  courses  partielles  par 
deux  traits  pointillés  dans  la  figure  et  conformes  à  la  marche  du 
cavalier.  On  obtient  ainsi  un  polygone  fermé  de  soixante-quatre 

Fig.  154. 


\U^^><^yy^o^k^ 

^X/^i^^^^^\"^  ^\4 

S^(Sk>ô-ok>^ 

''T' 

^> 

ooKj  y 

^ 

o>^5kv7 

/ 

^^ 

^^^^^ts?^ 

/  A^ 

^ 

<r>oi^^ 

! 

^X>p^ 

côtés,  représentant  une  course  rentrante  ou  un  circuit  sur  les 
soixante-quatre  cases  de  l'échiquier  [fig.  \S^].  Cette  solution  a 
été  donnée  par  Euler  dans  le  Mémoire  cité;  il  est  curieux  de 
rapprocher  ces  deux  solutions  de  Gianutioet  d'Euler,  obtenues  à 
près  de  deux  siècles  d'intervalle,  car  nous  démontrerons  plus  loin 
que  le  nombre  des  circuits  de  cette  nature,  tracés  en  soudant  deux 
courses  partielles  identiques  sur  les  demi-échiquiers,  est  égal 
a  3872. 


214  Note  I. 


Lii  cavalip:r-sphinx. 


Les  courses  et  les  circuits  forment  des  figures  plus  ou  moins 
régulières  qui  donnent  lieu,  chaque  semaine,  à  des  problèmes  pro- 
posés dans  les  journaux  illustrés.  On  écrit,  sur  les  cases  successives 
d'une  course  ou  d'un  circuit,  les  lettres  ou  les  mots  d'une  ou  de 
plusieurs  phrases  qu'il  s'agit  de  reconstruire  en  retrouvant  la 
marche  du  cavalier,  qui  sert  de^/  d'Ariane.  Souvent  cette  phrase 
reconstruite  donne  naissance  à  de  nouvelles  questions  :  énigme, 
logogriphe,  charade,  anagramme,  etc.,  qui  présentent  pour  beau- 
coup de  lecteurs  un  grand  intérêt  de  curiosité.  L'un  des  premiers 
problèmes  de  ce  genre  a  été  donné  dans  le Palamède  (').  On  avait 
écrit  sur  les  cases  successives  d'un  circuit  les  soixante-quatre 
mots  (sans  tenir  compte  des  apostrophes)  de  ce  morceau  plus  ou 
moins  poétique,  qui  renferme  la  définition  de  notre  problème  : 

Franchir  chaque  degré  d'un  monde  noir  ou  blanc; 
Galoper  en  tous  sens  du  Midi  jusqu'à  l'Ourse, 
Voilà  ce  qu'un  cheval  peut  faire;  mais,  pourtant, 
Quatre  fois  seize  pas  doivent  borner  sa  course. 
Au  but  ainsi  marqué,  toi  qui  veux  parvenir, 
Tremble  qu'au  même  point  ton  coursier  ne  repasse, 
Tu  verrais  sous  tes  pieds  un  abîme  s'ouvrir! 
Change  toujours  d'allure  et  fuis  ta  propre  trace. 

Le  contour  polygonal  figurant  la  course  du  cavalier  ne  peut 

(■)  Le  Palamède,  revue  mensuelle  des  échecs,  etc.,  2"  série,  t.  I,  p.  322. 
Paris,  1842.  —  Cette  revue  a  été  fondée  par  de  Labourbonnais,  en  i836,  et 
continuée  de  1841  à  1848  par  F. -A.  de  Saint-Amand,  Labourbonnais,  cé- 
lèbre joueur  d'échecs,  gagnait  deux  parties,  sans  voir  l'échiquier,  contre  les 
adversaires  les  plus  renommés;  avant  lui,  Philidor,  mort  en  1795,  défendait 
trois  parties  dans  les  mêmes  conditions;  depuis,  Morphy  et  Maczuski  ont 
souvent  gagné  huit  parties  simultanées,  sans  voir  l'échiquier. 


Note  I.  21 5 

présenter,  dans  le  cas  de  l'échiquier  ordinaire  et,  en  général,  dans 
le  cas  d'un  échiquier  contenant  des  cases  en  nombre  pair,  aucun 
caractère  de  symétrie.  En  d'autres  termes,  le  contour  ne  peut  se 
composer  de  deux  parties  superposa  blés,  en  repliant  la  course 
dessinée  sur  une  feuille  de  papier,  soit  autour  de  l'une  des  mé- 
dianes, soit  autour  de  l'une  des  diagonales  de  l'échiquier.  En 
effety  si  l'on  groupe  deux  par  deux  les  côtés  du  contour,  l'un 
d'eux  reste  isolé,  puisque  leur  nombre  est  impair;  donc  ce  côté 
devrait  se  composer  de  deux  moitiés  superposables.  Ainsi,  l'un  des 
côtés  serait  perpendiculaire  à  une  médiane  ou  à  une  diagonale, 
ce  qui  est  impossible.  De  même,  la  course  sur  un  échiquier  pair 
ne  peut  être  symétrique  par  rapport  au  centre  de  l'échiquier, 
puisque  ce  centre  ne  peut  coïncider  avec  le  milieu  d'un  côté. 

Nous  avons  vu,  d'autre  part  [/îg:  1 54),  que  le  circuit  peut  être 
symétrique  par  rapport  au  centre;  mais  nous  démontrerons  plus 
loin  que  le  circuit,  bien  que  composé  d'un  nombre  pair  de  côtés, 
ne  peut  être  symétrique  soit  par  rapporta  une  médiane,  soit  par 
rapport  à  une  diagonale  de  l'échiquier  carré  de  grandeur  quel- 
conque. 

^^ 

LA    PLANCHETTE    DE    VANDEfiMONDE. 

Dans  ses  Remarques  sur  les  problèmes  de  situation,  publiées 
dans  les  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences  de  Paris,  pour 
l'année  1 77 1 ,  Vandermonde  a  indiqué  l'emploi  d'un  procédé  assez 
commode  pour  étudier  les  diverses  configurations  de  la  course  et 
du  circuit,  et  pour  vérifier  les  résultats  obtenus.  Il  dit  :  «  Faire 
parcourir  au  cavalier  toutes  les  cases  de  l'échiquier  sans  passer 


2i6  Noie  I. 

deux  fois  sur  Ja  même,  se  réduit  à  déterminer  une  certaine  trace 
du  cavalier  sur  l'échiquier,  ou  bien,  en  supposant  une  épingle 
fixée  au  centre  de  chaque  case,  à  déterminer  le  cours  d'un  fil 
passé  une  fois  autour  de  chaque  épingle,  d'après  une  loi  dont 
nous  allons  chercher  l'expression.  »  Ce  procédé  a  été  signalé  par 
Ballière  de  Laisement  dans  son  Essai  sur  les  problèmes  de 
situation  (Rouen,  1782,  in-S"  de  74  pages  et  7  planches).  Nous 
en  donnerons  une  description  plus  détaillée  d'après  l'Ouvrage  de 
M.  Paul  de  Hijo  (»). 

On  prend  une  planchette  carrée  de  20  à  25  centimètres  décote 
et  de  I  centimètre  d'épaisseur,  sur  laquelle  on  colle  un  échiquier 
en  papier.  Au  centre  de  chacune  des  soixante-quatre  cases,  on  en- 
fonce une  pointe  sans  tête  qu'on  laisse  dépasser  d'environ  5  à 
6  millimètres.  Puis,  avec  un  fil  de  soie  de  la  longueur  de  soixante- 
quatre  pas  de  cavalier,  et  attaché  par  l'un  de  ses  bouts  à  la  pointe 
de  la  case  initiale,  on  parcourt,  en  accrochant  le  fil  aux  pointes, 
les  différentes  cases  de  l'échiquier,  de  manière  à  décrire  n'importe 
quelle  chaîne  du  cavalier.  De  cette  façon,  quand  on  s'aperçoit 
qu'on  a  fait  fausse  route,  il  suffit  de  défaire  le  fil  jusqu'à  la  case 
oti  l'on  a  pris  une  mauvaise  direction  et  d'en  prendre  une  autre, 
ce  qui  ne  peut  se  faire  quand  on  essaye  de  tracer  une  chaîne  sur 
le  papier. 

On  peut  aussi,  après  avoir  garni  sa  planchette  de  pointes,,  faire 
un  échiquier  en  carton  mince,  de  la  même  dimension,  dont  toutes 
les  cases  seront  percées,  à  leur  centre,  d'un  trou  circulaire.  On 

(')  Paul  de  Huo,  Le  problème  du  cavalier  des  échecs  d'après  les  méthodes 
qui  donnent  la  symétrie  par  rapport  au  centre.  Ouvrage  contenant  plus  de 
quatre  cent  treize  mille  parcours  du  cavalier.  Grand  in-S"  de  170  pages; 
Metz,  1882. 


i\ote  I.  217 

appliquera  cet  échiquier  sur  la  planchette  en  faisant  passer  les 
pointes  par  les  trous  du  carton.  Ainsi  la  même  planchette 
pourra  servir  pour  toute  autre  méthode  ;  il  n'y  aura  qu'à  rem- 
placer le  carton  par  un  autre,  préparé  delà  même  manière,  mais 
portant  une  notation  différente. 

Le  Polygraphile  (/)  est  la  réalisation  de  l'idée  de  Vander- 
monde;  il  constitue  un  jeu  intéressant  et  varié,  facile  à  suivre^ 
même  en  voyage.  D'autre  part,  dans  un  excellent  Ouvrage  (') 
auquel  nous  avons  emprunté  plusieurs  renseignements,  M.  Cre- 
taine  conseille,  pour  l'étude  de  ces  problèmes,  l'emploi  d'une 
ardoise  sur  laquelle  on  fait  graver  un  petit  échiquier  de  8  à 
9  centimètres  de  côté,  avec  cases  ombrées,  en  se  servant  d'un 
crayon  d'ardoise,  qui  s'eflface  facilement.  Avec  l'ardoise  ou  du 
papier  quadrillé,  on  peut  réaliser  rapidement  des  solutions  di- 
verses. 

«  La  rapidité  d'exécution,  dit  M.  Cretaine,  est  aujourd'hui 
vantée  par  quelques  amateurs  qui^  par  des  méthodes  rendues  ai- 
sées, obtiennent  dix  à  douze  solutions  à  l'heure;  leur  habileté 
se  trouve  éclipsée  par  la  méthode  d'un  étranger  qui  m'honore  de 
son  amitié,  je  veux  parler  de  M.  Solvyns,  de  Bruxelles.  On  l'a 
vu,  en  1860,  par  des  combinaisons  qu'il  ne  veut  pas  faire  con- 
naître, exécuter,  à  la  Régence,  de  quarante-huit  à  cinquante  solu- 

(')  Edme  Simonot,  Le  Polygraphile,  nouveau  jeu  de  salon  et  de  jardin, 
décrit  par  so:i  inventeur.  Brochure  de  i6  pages,  avec  planchette  et  u  car- 
tons guides  (Paris,  1872).  —  L'auteur  s'attribue  à  tort  l'invention  du 
Polygraphile;  en  revanche,  il  attribue  à  Vandermonde  une  méthode  obtenue 
par  l'emploi  du  guide  n*  3,  qu'il  pourrait,  avec  plus  de  raison,  considérer 
comme  sienne. 

(')  A.  Cretaine,  Etudes  sur  le  problème  de  la  marche  du  cavalier  au 
jeu  des  échecs  tt  solution  du  problème  des  huit  dames.  In-8»  de  32  pages 
avec  25  planches  (Paris,  i865). 


2i8  Note  I. 

lions.  Il  a  répété  ces  mêmes  opérations  sous  mes  yeux,  espérant 
alors,  mais  en  vain,  de  perfectionner  sa  méthode  et  de  compter 
soixante  solutions.  »  [Loc.  cit.,  p.  23). 

^^ 

LE    CAVALIER-DOMINO. 

On  peut  considérer  le  problème  du  cavalier  des  échecs  comme 
un  cas  très  particulier  dans  la  théorie  générale  du  domino.  En 
effet,  si  l'on  numérote  les  cases  de  l'échiquier  de  i  à  64,  soit  d'une 
manière  quelconque,  soit  par  une  notation  ordonnée  suivant  les 
lignes  et  les  colonnes  de  l'échiquier,  la  droite  qui  joint  les  extré-  jl 
mités  d'un  saut  du  cavalier,  c'est-à-dire  les  centres  de  deux  cases 
conjuguées,  peut  être  considérée  comme  l'un  des  dés  d'un  jeu  de 
dominos  commençant  au  double  as  pour  finir  au  double  soixante- 
quatre;  par  conséquent,  le  contour  polygonal  de  63  côtés  repré- 
sentant une  course  correspond  à  une  disposition  rectiligne  de 
63  dominos.  Cela  posé,  joignons  deux  à  deux,  de  toutes  les  ma- 
nières possibles,  les  centres  des  cases  conjuguées  de  l'échiquier;  le 
nombre  des  traits  d'union  est  168,  ainsi  que  nous  l'avons  vu,  et 
le  problème  de  la  course  du  cavalier  revient  à  celui-ci  : 

On  prend  168  domitios  dans  un  jeu  complet  de  dominos  du 
double  as  au  double  soixante-quatre,  en  rejetant  les  doubles^  et  1 
en  ne  conservant  que  les  dés  qui  correspondent  à  tous  les  sauts 
du  cavalier  sur  V échiquier .  Former  une  disposition  rectiligne 
de  63  dominos.,  de  telle  sorte  qu'un  point  quelconque  ne  soit  pas 
répété  plus  de  deux  fois. 


Sote  1.  219 

De  même,  le  problème  du  circuit  revient  à  former  une  dis- 
position circulaire  de  64  dominos,  avec  les  mêmes  conventions. 

Il  re'sulte  de  ces  remarques  que  le  problème  de  déterminer  le 
nombre  des  courses  et  des  circuits  devient  un  problème  du  domi- 
no; et  puisque  la  solution  de  ce  dernier  n'est  connue  actuellement 
que  jusqu'au  double  neuf,  le  problème  du  cavalier  semble  présen- 
ter de  très  grandes  difficultés.  Cependant,  sans  laisser  au  problème 
toute  son  indétermination,  en  imposant  de  nouvelles  conditions, 
on  peut,  dans  certains  cas,  résoudre  le  problème.  Par  exemple,  si 
l'on  divise  l'échiquier  en  deux  rectangles  égaux  par  une  ligne 
médiane  et  si  l'on  impose  au  cavalier  la  condition  de  parcourir 
successivement  les  32  cases  de  chacun  des  fragments,  on  peut 
déterminer  le  nombre  total  des  circuits  sur  l'échiquier,  d'après  la 
méthode  de  M.  Flye-Sainte-Marie. 

LE  CAVALIER-LOTO. 

Nous  avons  vu  que,  pour  réaliser  la  course  ou  le  circuit  du 
cavalier,  il  est  commode  de  se  servir  des  64  premiers  numéros 
d'un  jeu  de  loto.  Supposons  que  l'on  exécute  ainsi  une  marche 
quelconque  du  cavalier;  d'après  la  règle  des  sauts,  la  couleur  des 
cases  change  avec  chacun  d'eux  et  passe  du  blanc  au  noir,  et  in- 
versement. Par  conséquent,  si  l'on  a  posé  le  n"  i  sur  une  case 
blanche,  le  n°  2  sera  sur  une  case  noire,  le  n°  3  sur  une  blanche, 
et  ainsi  de  suite;  donc,  en  général,  quelle  que  soit  la  marche  du 
cavalier  sur  un  nombre  arbitraire  de  cases  de  l'échiquier,  les  cases 
parcourues  de  même  couleur  sont  garnies  de  numéros  de  même 


220  Sote  I. 

parité.  Par  exemple,  si  la  case  initiale  est  blanche,  toutes  les  cases 
blanches  parcourues  seront  recouvertes  de  numéros  impairs,  et  les 
cases  noires  de  numéros  pairs  [fig.  i52). 

Supposons  que  toutes  les  cases  de  l'échiquier  soient  parcourues, 
alors  chacune  des  colonnes  contient  quatre  numéros  pairs  et  quatre 
numéros  impairs;  on  a  donc  cette  proposition  formulée  par  Euler  : 

Dans  l'échiquier  ordinaire,  la  somme  des  numéros  des  cases 
dhine  même  ligne  ou  d'une  même  colonne,  dans  la  course  ou  le 
circuit  du  cavalier,  est  toujours  un  nombre  pair. 

Il  en  est  de  même  pour  l'échiquier  carré  dont  le  côté  est  un 
multiple  de  quatre.  On  voit  encore  que  cette  somme  est  toujours 
impaire  pour  l'échiquier  carré  dont  le  côté  est  double  d'impair 
comme  pour  les  échiquiers  de  6,  lo,  14  cases  de  côté.  Enfin,  cette 
somme  est  alternativement  paire  et  impaire  pour  les  échiquiers 
dont  le  côté  renferme  un  nombre  impair  de  cases. 

D'autre  part,  on  observera  que  le  nombre  des  sauts  d'une  course 
sur  un  échiquier  de  forme  quelconque  esttoujours  égal  au  nombre 
des  cases  diminué  de  l'unité;  par  suite,  il  n'existe  aucune  course 
sur  les  échiquiers  de  forme  quelconque,  lorsque  la  différence 
entre  le  nombre  des  cases  blanches  et  celui  des  cases  noires 
n'' est  pas  égale  à  o  ou  à  1. 

De  plus,  dans  le  circuit,  le  nombre  des  sauts,  toujours  égal  au 
nombre  des  cases,  est  nécessairement  pair,  puisque  la  case  initiale 
coïncidant  avec  la  case  finale  est  de  même  couleur  que  celle-ci; 
par  conséquent,  il  n'existe  pas  de  circuit  sur  les  échiquiers  dont 
le  nombre  des  cases  est  impair. 


Note  I. 


LES  RESEAUX  GEOMETRIQUES. 


Si  l'on  joint  deux  à  deux  les  centres  de  toutes  les  cases  conjuguées 
d'un  échiquier  d'étendue  quelconque,  on  trace  ainsi  un  réseau 
géométrique.  En  général,  nous  appellerons  réseau  géométrique 
la  figure  formée  par  un  nombre  quelconque  de  points  ou  sommets, 
dans  le  plan  ou  dans  l'espace,  réunis  entre  eux  pardes  lignes  droites 
ou  courbes  en  nombre  quelconque.  Pour  plus  de  clarté,  on  suppose 
que  les  lignes  de  jonction  ne  se  rencontrent  pas  en  de  nouveaux 
points,  et  en  les  traçant  sur  un  plan,  nous  admettrons  qu'elles 
sont  placées  les  unes  au-dessus  des  autres. 

Nous  appellerons  points  doubles,  triples,  quadruples,  ceux 
où  aboutissent  deux,  trois,  quatre  lignes  de  jonction.  Ainsi  le  ré- 
seau de  l'échiquier  ordinaire  comprenant  tous  les  sauts  de  cava- 
lier contient  64  points  dont  4  doubles,  8  triples,  20  quadruples, 
16  sextuples  et  16  octuples.  Comme  dans  le  jeu  icosien  d'Ha- 
milton  (  '  ) ,  le  problème  du  cavalier  revient  à  suivre  certaines  lignes 
du  réseau,  en  passant  une  seule  fois  par  tous  les  sommets.  Cette 
considération  générale  sur  les  réseaux  donne  lieu  aux  problèmes 
suivants  qui  comprennent  un  grand  nombre  de  jeux  et  se  ratta- 
chent à  la  Géométrie  de  situation. 

Problème  I.  —  Un  réseau  géométrique  étant  donné,  parcourir 
toutes  les  lignes  du  réseau,  une  seule  fois,  par  le  nombre  mini- 
mum de  trajets  continus  (*). 

(•)  K.  Lucas,  Récréations  mathématiques,  t.  Il,  p.  210  (Paris,  Gauthier- 
Villars;  i883). 

(')  E.  Lucas,  Récréations  mathématiques,  t.  I,  p.  238  {Problème  des 
ponts  de  la  Pregel).  ^  Paris,  Gauthier-Villars;   i883). 


222  Note  I. 

Problème  IL  —  Un  réseau  géométrique  étant  donné,  par- 
courir deux  fois  toutes  les  lignes  du  réseau  par  un  seul  trajet 
continu  ('). 

Problème  III.  —  Un  réseau  géométrique  étant  donné  et  ne 
contenant  que  des  points  d'ordre  pair,  quel  est  le  nombre  des 
manières  distinctes  de  le  décrire  d'un  trait  continu?  (^). 

Problème  IV.  —  Un  réseau  géométrique  étant  donné,  de 
combien  de  manières  peut-on  visiter  une  seule  fois  tous  les 
sommets  par  un  trait  continu?  [Jeu  d'Hamilton,  problème  du 
cavalier.  ] 

Problème  V.  —  Un  réseau  géométrique  est  donné  avec  les 
sommets  numérotés  dans  un  ordre  quelconque;  on  place  sur  tous 
les  sommets  des  cubes  portant  les  mêmes  numéros,  dans  un 
ordre  arbitraire.  On  enlève  l'un  des  cubes,  et  l'on  fait  glisser  les 
autres  sur  les  lignes  de  la  figure,  jusqu'au  sommet  libre.  Replacer 
tous  les  cubes  mobiles  sur  les  numéros  correspondants  des  som- 
mets {Jeu  du  taquin  et  du  taquin  continental  (')].  Nous  n'avons 
traité  ce  problème  que  dans  le  cas  où  la  figure  contient  un  qua- 
drilatère [garage)  en  communication,  sans  isthme,  par  les  deux 
extrémités  d'un  côté  avec  toutes  les  autres  cases. 

Problème  VI.  —  On  couvre  avec  des  jetons  tous  les  sommets 

(')  E.  Lucas,  Récréations  mathématiques,  t.  I,  p.  46  et  240  {Jeu  des  la- 
byrinthes, théorie  des  Ramifications  et  des  Arbres  géométriques),  (Paris, 
Gauthier-Villars;   i883). 

(')  E.  Lucas,  Récréations  mathématiques,  t.  II,  p.  229  [Jeu  de  dominos). 

(')  E.  Lucas,  Récréations  mathématiques,  t.  I,  p.   189  et  229. 


Note  I.  22  3 

d'un  réseau  géométrique,  à  l'exception  d'un  ssul;  on  enlève 
successivement  tous  les  jetons,  tels  que  a,  en  plaçant  celui  d'un 
sommet  adjacent  b,  sur  un  autre  sommet  adjacent  de  a  supposé 
vide.  Enlever  ainsi  tous  les  jetons  [Jeu  du  solitaire,  solitaire 
icosien  {•)]. 

La  solution  de  ces  problèmes,  ignorée  dans  le  cas  général, 
donne  naissance  à  des  fonctions  arithmétiques  dont  la  nature  est 
encore  inconnue,  malgré  les  recherches  de  Leibniz  et  d'Euler,  de 
Vandermonde  et  de  Legendre;  et  nous  pouvons  dire  que  ces 
théories  ne  semblent  habituellement  délaissées  qu'en  raison  de 
leur  extrême  difficulté. 

(•)  E,  Lucas,  Récréations  mathéni-xtiques,  t.  I,  p.  89;  t.  Il,  p.  227 
(Paris,  Gauthier- Villars;  i883). 


Cj|€fi^ 


-•i-i  i-  Noie  II. 


NOTE  II. 

Nous  croyons  incéressant  de  reproduire  ici  cinq  articles  d'Edouard  Lucas, 
•qui  ont  été  publiés,  en  1891,  dans  les  Tablettes  du  Chercheur,  recueil  bi- 
hebdomadaire qui,  à  côté  de  questions  amusantes,  contient  des  problèmes 
sérieux,  souvent  difficiles.  Les  Amusements  scientifiques  sur  l'Arithmétique 
•ont  été  écrits  peu  de  temps  avant  sa  mort;  ce  sont  probablement  les  der- 
niers articles  qu'il  a  rédigés. 


LES  CARRES  MAGIQUES. 

SUR  LE  C\RRÉ  DE  3  KT  SUR  LES  CARRES  A  DEUX  DEGRES. 

Pour  trouver  tous  les  carrés  magiques  de  3,  on  commence  par 
•diminuer  tous  les  éléments  du  tiers  de  la  somme  constante;  alors 
la  somme  des  nombres  de  chaque  ligne,  de  chaque  colonne,  de 
•chaque  diagonale  est  nécessairement  égale  à  zéro. 

En  exprimant  d'abord  que  la  somme  est  nulle  pour  chaque 
ligne  et'pour  chaque  colonne,  le  carré  a  forcément  la  forme  sui- 
vante : 

a  b  —  a  —  b 

c  d  —  c  —  d 

—  a  —  c        —  b  —  d        a  -i-  c  -h  b  -^  d. 

Si  l'on  exprime  que  la  somme  des  nombres  placés  dans  chacune 
des  diagonales  est  nulle,  on  a  les  conditions 

2a-h2d  +  b-+-c:=o, 
d  —  2  a  —  b  —  c=:o; 


Note  II.  22  5 

en  ajoutant,  on  trouve  d  =  o,  et  si  Ion  pose 

b  ^  c  ^n  2p,         b  —  c^z-2.q^ 

le  Çiirré  devient 

—P  P^q  — *7 

p—q  o  q—p 

q  —p  —  q  P- 

Il  ne  peut  y  en  avoir  d'autres  à  somme  nulle.  Ce  carré  est 
formé  des  trois  progressions  arithmétiques 


I 

^— F. 

q^ 

p  +  q. 

11 

~p^ 

o, 

Py 

ni 

-P  —  q, 

—  q^ 

p  —  q 

de  même  raison  p.  Déplus,  dans  la  progression  intermédiaire  II, 
chacun  des  termes  est  égal  à  la  demi-somme  des  termes  corres- 
pondants des  deux  autres;  ces  conditions  subsistent  dans  le 
carré  magique  dont  la  constante  n'est  pas  nulle.  On  a  donc  ce 
théorème  : 

Pour  former  un  carré  magique  avec  neuf  nombres,  il  faut  et 
il  suffit  que  ces  nombres  appartiennent  à  trois  progressions 
arithmétiques  de  même  raison  et  que  le  premier  terme  de  l'une 
d'acnés  soit  égal  à  la  demi-somme  des  premiers  termes  des  deux 
autres. 

Lorsque  ces  conditions  sont  remplies,  le  problème  ne  comporte 
qu'une  seule  solution. 

K.  Lucas.  —  Récréations  matltàm  ,  IV.  i5 


220  l^ote  II. 

Si  l'on  considère  le  Tableau  des  neuf  quantités 

/>' 4- ^- —  r- —  5%  2[qr-^ps),  i{qs—pr). 

2[qr—ps],  p^-^  r'-  — q-  — s-,  2{rs-hpq), 

2{qs  -hpr),  2{rs  —pq),  p"- +  s- —  q^  —  r- , 

on  obtient  un  carré  magique  dans  lequel  la  somme  des  carrés  des 
nombres  contenus  dans  une  même  ligne  ou  dans  une  même 
colonne  est  égale  au  carré  de  {p^-h  q^-\-  r^-\-  s-).  Ce  Tableau  est 
extrait  du  tome  I  de  la  Théorie  des  Nombres  (p.  129),  qui  a  paru 
en  1891  à  la  librairie  Gauthier- Vilîars. 

Le  n»  2  des  Tablettes  du  Chercheur  contient  un  très  remar- 
quable carré  magique  de  8,  à  deux  degrés,  qui  a  éié  obtenu 
par  M.  Pfeffermann.  En  d'autres  termes,  il  s'agit  de  disposer 
les  64  premiers  nombres  sur  les  cases  de  l'échiquier,  de  telle 
sorte  que  la  somme  des  termes  de  chaque  ligne,  de  chaque 
colonne  et  de  chaque  diagonale  soit  la  même;  et,  de  plus,  que 
si  l'on  remplace  tous  les  nombres  par  leurs  carrés,  le  carré  reste 
magique. 

Nous  allons  faire  voir  que  le  problème  est  impossible  pour  le 
carré  de  3,  avec  des  nombres  inégaux,  et  qu'il  est  impossible  pour 
le  carré  de  4,  en  prenant  seize  nombres  consécutifs.  En  effet,  on 
doit  d'abord  remarquer  qu'un  carré  magique  à  deux  degrés  con- 
serve toutes  ses  propriétés  lorsqu'on  augmente  tous  les  termes 
d'un  nombre  quelconque  x.  Lorsqu'un  terme  a  devient  (a:  +  a), 
son  carré  devient 

x--^  2ax  -\-  a-\ 

par  conséquent,  en  supposant,  par  exemple,  un  carré  de  4,  et  en 
désignant  par  a,  b,  c,  d  les  termes  d'une  rangée  ou  d'une  diago- 


Note  II.  227 

nale,  on  a,  pour  les  rangées  et  les  diagonales, 

Sj  et  S2  désignant  les  constantes  pour  le  premier  degré  et  le 
second.  En  augmentant  de  x  tous  les  éléments  du  carré,  la 
somme  des  termes  d'une  rangée  devient 

[x-\-a]  +  [x  -\-b]  +  {x-^c  -^-[x  +  d]  =  .\x-Y-Si 

et  augmente  de  4  a:;  d'autre  part,  la  somme  des  carrés  des  nombres 
d'une  rangée  devient 

[x  +  a)-  +  [x  +  bY  +  [x  +  cY  +  {x  +  d)-—^x^  +  2xS,+Si'j 

elle  augmente,  pour  chacune  des  rangées  ou  des  diagonales,  de  la 
même  quantité  ^x--+-  2X  Sj. 

Au  lieu  d'augmenter  de  x,  on  peut  diminuer  tous  les  termes 
de  x;  ainsi,  pour  le  carré  de  3,  en  égalant  la  somme  des  carrés  de 
deux  lignes  ou  de  deux  colonnes,  on  obtient  ^  =  0  ou  ^  =  0. 
Donc,  //  n'existe  pas  de  carré  de  3,  à  deux  degrés,  formé  de 
nombres  tous  différents. 

De  même,  si  un  carré  de  4,  à  deux  degrés,  est  formé  de  seize 
nombres  consécutifs,  on  peut  le  supposer  formé  des  nombres 
de  I  à  16  ;  alors  S,  =:  84  et  82=  374.  Le  nombre  i6*=  256  doit 
appartenir  à  deux  rangées;  mais 

374  —  256  =  1 18 

n'est  décomposable  que  d'une  seule  manière  en  somme  de  trois 


228  Note  II. 

carrés  inégaux  deux  à  deux,  8i,  36  et  i.  Donc,  il  est  impossible 
de  faire  un  carré  magique  à  deux  degrés  avec  i6  nombres 
consécutifs . 

®® 

AMUSEMENTS     SCIENTIFIQUES 
SUR    L'ARITHMÉTIQUE. 

1°    LE    TESTAMENT    DU    NABAB. 

Problème  d'Arithmétique  indienne. 

Un  nabab  laisse  à  ses  enfants  un  certain  nombre  de  diamants 
d'égale  valeur,  dans  les  conditions  suivantes  :  Le  premier  prend 

Fig.  i55.  Fig.   i56. 

ooooo 

ooooo«  ooooo 

ooooo#  ooooo 

ooooo*  ooooo 

ooooo#  ooooo 

ooooo#  ooooo 

ooooo#  •••••• 

un  diamant  et  le  4-  de  ce  qui  reste  ;  le  second  prend  deux  diamants 
et  le  f  de  ce  qui  reste;  le  troisième  prend  trois  diamants  et  le  4-  de 
ce  qui  reste,  et  ainsi  de  suite.  Après  le  partage  de  tous  les  dia- 
mants, toutes  les  parts  se  trouvent  égales.  On  demande  le  nombre 
des  diamants  et  celui  des  enfants. 

Nous  représenterons  les  diamants  par  des  pions  noirs  ou  blancs, 
afin  de  distinguer  ceux  sur  lesquels  nous  porterons  plus  parti- 
culièrement notre  attention.  Considérons  d'abord  un  carré  de 


A'o/e  IL  229 

36  diamants  [fig.  i55},  et  portons  au-dessous  des  pions  blancs  la 
colonne  de  pions  noirs;  nous  formons  ainsi  la  fig.  i56. 

En  retirant  d'abord  le  pion  noir  à  droite,  les  pions  noirs 
forment  le  septième  de  ce  qui  reste,  puisque  la  figure  se  compose 
de  sept  rangées  égales,  et  ainsi  la  part  du  premier  enfant  se  com- 
pose de  six  diamants. 

Considérons  maintenant  le  reste,  en  désignant  par  des  pions 
noirs  les  diamants  contenus  dans  la  colonne  à  droite;  nous  for- 

Fig.  157.  Fig.  i58. 

0000   - 

oooo^  0000 

oooo«  0000 

oooo#  0000 

oooo«  0000 

oooo«  0000 
oooo# 


mons  la  fig.  1 5j  ;  plaçons  maintenant  cette  colonne  de  pions  noirs 
au-dessous  des  pions  blancs,  nous  formons  la  fig.  i58.  Laderniére 
ligne  se  compose  de  deux  diamants  et  encore  du  |  du  reste;  telle 

Fig.  i5q.       Fig.  i6o. 

ooo.    888 
88R2    888 

ooo#      000 
ooo#      000 

ooo«       •••••• 


est  la  part  du  second  enfant,  égale  à  six  diamants,  comme  celle 
du  premier  enfant. 

En  continuant  le  même  raisonnement,  par  une  semblable  ma- 
nœuvre on  forme  les^^.  i5g  et  160,  où  l'on  voitquelaparldesdia 


23o  Note  IL 

mants  du  troisième  enfant  est  représente'e  par  trois  diamants  et  le 
septième  du  reste. 

Et  ainsi  de  suite.  Le  nombre  des  diamants  est  donc  égal  à  36,  et 
les  enfants  sont  au  nombre  de  six,  prenant  chacun  six  diamants. 

Il  est  facile  de  voir  qu'il  en  est  ainsi,  lorsque  Ton  remplace  la 
fraction  im  septième  par  une  autre  quelconque,  un  n'ème;  alors  le 
nombre  des  enfants  est  égal  à  [n—  i),  et  le  nombre  des  diamants, 
au  carré  de  (n  —  i). 

Remarque.  —  On  donne  habituellement  la  solution  du  pro- 
blème précédent  au  moyen  de  formules  algébriques;  on  en  trouve 
une  de  cette  nature  dans  X Algèbre  d'EuLEu;  mais  il  nous  paraît 
fort  probable  que  la  solution  que  nous  venons  de  donner  est 
l'origine  même  de  ce  problème.  Dès  le  v^  siècle  de  notre  ère,  les 
géomètres  indiens  représentaient  les  nombres  par  des  briquettes, 
en  forme  de  parallélépipèdes  rectangles  à  base  carrée,  et  dont  la 
hauteur  était  égale  à  2,  3,  4,  5,  6,  ...  fois  le  côté  commun  de 
toutes  les  bases.  C'est  ainsi  que  la  lecture  du  Traité  cf  Arithmé- 
tique d'ARYABHATTA  nous  a  permis  de  reconstituer  la  Table 
de  multiplication  dont  il  se  servait  dans  son  cours  (à  PATALI- 
PUTRA,  la  cité  des  fleurs,  capitale  historique  des  monarques  de 
l'Inde),  pour  la  démonstration  des  propriétés  fondamentales  de 
la  théorie  des  nombres.  Le  lecteur  trouvera  un  exemplaire  de 
cette  Table  dans  la  collection  des  machines  à  calcul  du  Conserva- 
toire national  des  Arts  et  Métiers,  à  Paris.  En  remplaçant  les 
colonnes  de  pions  par  des  réglettes  de  cette  Table^  la  solution  de 
ce  curieux  problème  devient  intuitive. 

mm 


Note  IL  23 1 


2*    LA    MULTIPLICATION    RAPIDE    PAR    9,   99,  999» 

Pour  multiplier  un  nombre  quelconque  par  9,  il  n'est  pas 
nécessaire  de  savoir  la  Table  de  multiplication,  et  l'on  peut  obte- 
nir le  produit  par  une  simple  soustraction.  Soit,  par  exemple,  à 
multiplier  748  par  9;  on  multiplie  d'abord  par  10  et  l'on  ob- 
tient 7480,  el  l'on  retranche  748.  L'opération  se  fait  ainsi  : 

7480 

748 
6732 

et  le  produit  est  égal  à  6732.  Mais  il  n'est  pas  nécessaire  d'écrire 
deux  fois  le  nombre  748,  et  l'on  obtient  immédiatement  le  pro- 
duit de  la  manière  suivante  :  on  ajoute  un  zéro  à  la  droite  et  à  la 
gauche  du  nombre  et  l'on  retranche  le  chiffre  8  de  10,  puis  4 
de  8,  puis  7  de  4  et  o  de  7,  en  tenant  compte  des  retenues. 

De  même,  si  l'on  veut  multiplier  748  par  99,  cela  revient  à 
multiplier  par  100  et  à  retrancher  ensuite  748.  On  place  donc 
deux  zéros  à  la  droite  et  à  la  gauche  de  748,  et  l'on  a 

0074800. 

On  retranche  ensuite  chacun  des  chiffres  8,  4,  7,  du  deuxième 

chiffre  à  droite,  et  ainsi  8 de  o,  reste  2  et  retiens  i  ;  i  et  4,  5  deo 

reste  5  et  retiens  i  ;  i  et  7,  8  de  8,  puis  o  de  4  et  o  de  7.  On 

trouve  ainsi 

0074800 

74052 
Avec  un  peu  d'habitude,  il  n'est  pas  nécessaire  d'écrire  les  zéros. 


232 


Note  II. 


On  opère  de  même  pour  multiplier  par  999,  9999,  ..-,  et  pour 
un  nombre  formé  uniquement  de  9. 

On  peut  aussi  tenir  compte  de  ces  simplifications,  dans  la 
multiplication  de  deux  nombres  quelconques,  lorsque  le  multi- 
plicateur contient  une  ou  plusieurs  fois  le  chiffre  9,  selon  que  ces 
chiffres  sont  consécutifs  ou  ne  le  sont  pas. 

Multiplications  curieuses. 

Les  exemples  suivants  sont  extraits  de  notre  Théorie  des 
Nombres  (t.  I,  p.  8);  les  curieux  résultats  obtenus  proviennent 
de  la  théorie  que  nous  venons  d'exposer  sur  la  multiplication 
par  9.  Nous  ajouterons  encore  que,  pour  multiplier  un  nombre 
par  8,  on  peut  d'abord  le  multiplier  par  9,  et  retrancher  du  pro- 
duit le  nombre  proposé. 


I  2345679  X9=:IIIIIIII1 

12345679  X  8  =  98765432 


I  X  9  -h  2=  I 

12x9  +  3=  I 

123  X  9  +  4=  I 

1234  X  9  4-  5  =  I 

I  I  I  [ 

12345  X  9  H-  6  =::  I 

I  I  I  I  I 

123456  X  9  -H  7  =  I 

I  1  T  I  I  I 

1234567  X  9  +  8=  I 

I  I  I  I  I  I  I 

12345678  X  9  4-  9—  I 

I  1  I  I  I  I  I  I 

Note  II. 

9  X  9  -h  7  =  88 

98x9  +  6  =  888 

987x9+5=8888 

9876  X  9  +  4=88888 

98765  X  9  +  3  =  888888 

987654  X  9  +  2  =  8888888 

9876543  X  9  +  I  =  88888888 

98765432  X  9  +  o  =  888888888 

1x8+1 =9 

12  X  8  +  2  =  98 

123  X  8  +  3  =  987 

1 234  X  8  +  4  =  9876 

1 2345  X  8  +  5  =  98765 

1 23456  X  8  +  6  =  987654 

1 234567  X  8  +  7  ^  9876543 

1 2345678  X  8  +  8  =  98765432 

123456789  X  8  +  9  =  987654321 


^J^^eif^ 


y   LE   BLANC    ET    LE    NOIR. 

Lorsque  l'on  considère  une  suite  rectiligne  de  pions  noirs  et 
de  pions  blancs,  deux  cas  peuvent  se  présenterdans  l'ensemble  de 
deux  pions  consécutifs,  suivant  que  ces  deux  pions  ont  la  même 
couleur  ou  sont  de  couleurs  différentes.  Nous  dirons  que  deux 


2  34  Noie  II. 

pions  delà  même  couleur  présentent  unepermanence;  on  a  ainsi, 
dans  la ^^.  i6i  les  permanences 

Fig.  i6i. 

OO      I  . 

Permanences 

et  nous  dirons  que  deux  pions  de  couleurs  différentes  présentent 
une  variation;  on  a  ainsi,  dans  la^^.  162,  les  variations 

Fig.   162. 

o#     I     #0 

Variations. 

L'étude  des  variations  est  fort   importante  dans   un  grand 
nombre  de  questions  d'Arithmétique  et  d'Algèbre,  lorsque  l'on 

Fig.  i63. 

o  o 
000 


remplace  les  pions  noirs  et  blancs  par  les  signes  -+-  et  —  de  l'ad- 
dition et  de  la  soustraction.  Mais,  dans  ce  qui  va  suivre,  nous 
nous  servirons  des  pions  des  deux  couleurs.  Il  y  a  lieu  d'abord  de 
voir  les  modifications  qui  surviennent  dans  une  suite  de  pions, 
lorsque  l'on  introduit  un  nouveau  pion  entre  deux  pions  consé- 
cutifs de  même  couleur,  c'est-à-dire  dans  une  permanence.  Le 
nombre  des  variations,  qui  est  nul,  ne  change  pas,  si  l'on  intro- 
duit un  pion  de  même  couleur  que  les  deux  autres  [fîg.  1 63  )  ;  mais 
il  augmente  de  deux  variations  lorsqu'on  introduit  un  pion  de 
couleur  opposée  [fig.  164). 


Note  II.  2  35 

Enfin,  jorsque  l'on  place  un  pion  blanc  ou  noir  entre  deux 
pions  de  couleur  différente,  c'est-à-dire  dans  une  variation,  le 

Fig.  164, 

nombre  total  des  variations  ne  change  pas,  ainsi  qu'on  le  voit 
dans  \sijig:  i65,  qui  comporte  quatre  hypothèses  distinctes. 
En  réunissant  les  trois  cas  que  nous  venons  d'étudier,  on  en 

Fig.  i65. 

O   •    1    •  'o 


o  •   I   #0 
o#«  I   #00 

conclut  que  l'introduction  d'un  pion  entre  deux  pions  consécu- 
tifs ne  modifie  pas  le  nombre  des  variations,  ou  l'augmente  de  2, 
nombre  pair. 

En  répétant  le  même  raisonnement,  on  en  conclut  que  si,  dans 
une  suite  rectiligne  quelconque  de  pions  noirs  et  de  pions  blancs, 
on  introduit  un  nombre  quelconque  de  pions  entre  les  pions 
extrêmes,  le  nombre  des  variations  ne  peut  diminuer,  et,  s'il  aug- 
mente, il  augmente  d'un  nombre  pair  2,  4,  6,  .... 

De  ce  qui  précède,  il  résulte  immédiatement  les  deux  propriétés 
suivantes  :  entre  deux  pions  quelconques  de  couleur  contraire 
d'une  suite  rectiligne,  il  y  a  une  variation  ou  un  nombre  impair 
de  variations.  Entre  deux  pions  quelconques  de  même  couleur, 
d'une  suite  rectiligne  quelconque,  il  n'y  a  pas  de  variation,  ou 


2  36  Note  II. 

bien  il  y  en  a  un  nombre ^afr.  Pour  démontrer  ces  deux  propo- 
sitions, il  suffit  de  retirer  successivement,  entre  les  pions  extrêmes, 
chacun  des  pions  intercalés,  en  tenant  compte  des  remarques 
précédentes.  D'ailleurs,  il  est  facile  de  constater  que  ces  remar- 
ques ne  s'appliquent  pas  au  nombre  des  permanences. 

Le  nombre  des  variations  ou  des  permanences  d'une  suite  ne 

Fig.  i66. 
ABC  D         t    '■    F 

o«#ooo##oo« 
•oo#«#oo«#o 

change  pas  lorsque  l'on  change  les  signes  de  tous  les  termes,  et  les 
commencements  des  séquences  de  pions  de  même  couleur,  que 
nous  avons  désignées  par  des  lettres  de  l'alphabet,  ne  changent 
pas  déplace. 

En  considérant  chaque  pion  avec  celui  qui  est  placé  immédia- 

Fig.   167. 
ABC  D         E  F 

o##ooo##oo# 
•oo###oo«so 

tement  au-dessous,  on  ne  forme  que  des  variations.  Déplaçons 
d'un  rang  vers  la  droite  tous  les  pions  de  la  ligne  inférieure,  nous 
formons  la^^.  167;  alors  on  aperçoit  sous  chaque  pion  A,  B,  G, 
D,  E,  F,  qui  sert  de  commencement  à  une  séquence,  un  pion 
de  la  même  couleur. 

Remarque.  —  C'est  sur  une  observation  de  ce  genre  que  repose 
la  proposition  connue  sous  le  nom  de  Lemme  de  Segner,  l'un  des 
fondateurs  de  la  Météorologie.  Cette  proposition  sert  de  base  au 


.\ote  II.  23; 

Théorème  de  Descartes,  dans  la  théorie  des  équations  algé- 
briques. Si  l'on  considère  une  équation  algébrique  quelconque 
dont  le  premier  membre  est  ordonné  et  dont  le  second  est  nul,  et 
si  l'on  fait  le  compte  des  variations  des  signes  des  coefficients,  le 
nombre  des  racines  positives  de  l'équation  est  au  plus  égal  au 
nombre  des  variations,  et  s'il  en  diffère,  il  en  diffère  toujours  d'un 
nombre  pair. 

4°    LES    ÉCHIQUIERS    ANALLAGMATIQUES. 

L'échiquier  anallagmatique  est  un  carré  formé  de  cases  noires 
et  blanches,  en  nombre  égal  ou  inégal,  de  telle  sorte  que,  sur 
deux  lignes  ;  horizontales)  ou  sur  deux  colonnes  (verticales)  quel- 
conques, le  nombre  des  variations  des  couleurs  soit  toujours 
égal  au  nombre  des  permanences. 

Nous  représenterons  les  cases  par  des  pions  noirs  et  blancs.  La 

Fig.  1Ô8. 

••    !    OO 

•o   i  om 

A  e'- 

Jîg.  i68  représente  deux  échiquiers  anallagmatiques  A  et  B  que 
nous  appellerons  complémentaires,  parce  qu'aux  cases  noires  de 
chacun  d'eux  correspondent  des  cases  blanches  dans  l'autre. 

Remplaçons  chaque  case  noire  de  l'échiquier  A  par  un  échi- 
quier A  et  chaque  case  blanche  par  un  échiquier  B,  et  opérons  de 
même  pour  l'échiquier  B;  nous  formons,  dans  \Oifig.  169,  les 


2  38  Note  III. 

échiquiers  anallagmatiques  complémentaires  C  et  D,  ayant  quatre 
cases  de  côté. 

D'ailleurs,  il  est  évident  que  l'on  peut  déduire  d'un  échiquier 
anallagmatique  un  certain  nombre  d'autres  échiquiers  anallag- 
matiques, soit  en  échangeant  deux  lignes  ou  deux  colonnes  quel- 
conques autant  de  fois  que  l'on  voudra,  soit  en  changeant  la 

Fig.  169. 


0000 

0#0   I   0#0( 


.00     oo<. . 
oo#  I  o#«o 


couleur  de  toutes  les  cases  d'une  ou  de  plusieurs  rangées  quel- 
conques. Il  y  aurait  lieu  d'étudier  ainsi  le  nombre  total  des  échi- 
quiers anallagmatiques  de  2,  4,  8,  16,  ...,  cases  de  côté. 

La/ig.  170  représente  deux  échiquiers  anallagmatiques  complé- 


Fig.   170. 


omoo 

OOfO 

ooo«  i  ••io 


mentaires,  et  que  l'on  peut  considérer  comme  identiques,  lorsque 
l'on  fait  tourner  l'un  d'eux  d'un  {  de  tour  autour  de  son  centre. 
Chacun  d'eux  contient  le  même  nombre  de  cases  blanches  et  de 
cases  noires.  Ces  figures  ont  été  indiquées  pour  la  première  fois 
par  M.  Sylvester  et  reproduites  comme  dallage  en  marbre  blanc 
et  rose  dans  un  établissement  public  de  Londres. 


Soie  II.  2?9 

Pour  obtenir  les  carrés  anallagmatiques  de  huit  cases  de  côté, 
en  part  d'un  échiquier  anallagmatique  quelconque  de  quatre 
cases  de  côté,  et  l'on  y  remplace  chacune  des  cases  noires  par 
l'échiquier  A  et  chacune  des  cases  blanches  par  l'échiquier  B  ;  et 
de  même  pour  les  échiquiers  de  seize,  trente-deux,  soixante- 
quatre,  ...  cases  de  côté,  et  ainsi  en  doublant  indéfiniment. 

Nous  engageons  le  lecteur  à  reproduire  les  échiquiers  obtenus 
en  remplaçant  chacune  des  cases  noires  de  l'échiquier  E  par  cet 
échiquier  lui-même,  et  chacune  des  cases  blanches  par  l'échiquier 
complémentaire  F.  On  forme  ainsi  un  joli  dallage. 


(^^^^ 


i^o  Note  III. 


NOTE  III. 
Sur  la  troisième  Récréation  du  tome  III, 

Sur  les  observations  qui  nous  ont  été  présentées  parM.Fleury,  inventeur 
du  Caméléon  et  du  Paradoxal,  nous  avons  reconnu  que  les  données  et  les 
figures  sur  lesquelles  sont  basées  les  explications  qu'on  a  lues  dans  le 
tome  III  ne  se  rapportaient  pas  exactement  aux  modèles  qu'on  trouve 
dans  le  commerce. 

Nous  n'avions  pas,  en  effet,  ces  modèles  sous  les  yeux;  nous  ne  connais- 
sions ces  jeux  que  par  une  figure  et  une  description  sommaire  données  par 
un  journal.  Nous  avons  cherché  à  rendre  la  solution  aussi  difficile  que 
possible.  Pour  cela,  dans  le  Caméléon,  nous  avons  imposé  l'obligation  de 
ne  parcourir  certains  côtés  que  dans  un  sens,  puis  nous  avons  même  sup- 
primé une  des  diagonales.  Pour  le  Paradoxal,  nous  avons  admis  implici- 
tement que  le  pion  vert  portant  le  chiffre  i  devait  toujours  être  amené 
sur  la  même  case  verte,  celle  qui  est  la  plus  voisine  de  la  case  jaune  n"  i. 
Et  le  problème  était  ainsi  rendu  impossible  dans  la  moitié  des  cas. 

M.  Fleury  est  parti  d'une  idée  opposée  à  la  nôtre.  Il  s'est  attaché,  dans 
la  construction  de  ses  jeux,  à  rendre  la  solution  toujours  possible,  pensant 
—  peut-être  avec  raison  —  que  la  vogue  du  Taquin  n'avait  pas  été  plus 
longue  parce  que  les  chercheurs  se  rebutaient  de  ne  pouvoir  réussir  une 
fois  sur  deux. 

Nous  jugeons  convenable  de  reproduire  ici  la  description  et  la  solution 
des  jeux  en  question,  telles  qu'elles  ont  été  données  par  l'inventeur. 

Le  Caméléon.  —  Le  jeu  se  compose  d'une  boîte  ronde  contenant  un 
casier  et  des  pions,  marqués  chacun  d'une  des  lettres  du  mot  caméléon.  La 
fig.  171  représente  le  casier  formé  d'un  octogone  étoile,  aux  sommets  du- 
quel se  trouvent  quatre  cases  jaunes  (blanches  sur  la  figure)  et  quatre 
cases  rouges  (les  cases  ombrées),  portant  les  mêmes  lettres  que  les  pions. 
Il  existe,  en  outre,  une  case  centrale  noire. 

Les  cases  jaunes  et  rouges  sont  reliées  deux  à  deux  par  des  lignes  droites. 
Les  cases  rouges  sont,  de  plus,  reliées  entre  elles  par  deux  diamètres  pas- 
sant sur  la  case  centrale. 


\ote  HT. 


24f 


Les  huit  pions  étant  placés  au  hasard,  chacun  sur  une  des  neuf  cases  du 
eu,  il  faut,  en  jouant,  les  ramener  tous  sur  les  cases  affectées  des  mêmes 
lettres,  en  sorte  que  le  mot  caméléon  se  lise  sur  les  pions  comme  autour 
.:es  cases. 

La  règle  du  jeu  consiste  à  pousser  chaque  fois  un  pion  sur  la  case  vide, 
suivant  la  ligne  droite  qui  va  du  pion  à  la  case. 

Voici  la  solution  donnée  par  l'inventeur  : 

a  Lorsque  les  huit  pions  sont  à  leurs  places  respectives,  c'est-à-dire  sur 


les  cases  affectées  des  mômes  lettres,  ils  se  présentent  sur  le  pourtour  dans 
l'ordre  C,  A,  M,  É,  L,  É,  O,  N;  tandis  qu'en  suivant  la  ligne  continue 
formée  par  les  côtés  du  polygone  étoile,  on  les  rencontre  dans  l'ordre  C,  E, 
O,  A,  L,  N,  M,  E.  En  cet  état,  nous  dirons  qu'ils  sont  ordonnés  et  rendus 
à  destination. 

»  Si  alors  on  pousse  un  pion  rouge  sur  la  case  centrale,  le  train  formé  par 
les  sept  autres  pions  pourra  circuler  à  volonté  sur  la  ligne  polygonale. 
Dans  ce  mouvement,  les  pions  se  suivent  en  conservant  le  même  ordre;  et, 
par  conséquent,  ils  restent  toujours  ordonnés.  Mais  ce  n'est  que  quand 
lis  sont  revenus  sur  les  cases  affectées  des  mêmes  lettres,  qu'ils  sont  ren- 
.:us  à  destination. 

»  Maintenant,  supposons  que  les  huit  pions  soient  placés  au  hasard,  chacun 
sur  une  des  neuf  cases  du  jeu;  la  solution  comprendra  les  deux  opérations 
suivantes  : 

»  1°  Ordonner  les  pions. 

»  Puisque,  pour  être  ordonnés,  les  pions  doivent  se  suivre  dans  l'ordre 

E.  Lucas.  —  Récréations  mathém.,  IV.  i6 


242  Note  III. 

C,  É,  O,  A,  L,  N,  M,  E,  sur  la  ligne  polygonale,  le  pion  C  devra  y  être 
suivi  du  pion  É;  celui-ci  du  pion  O,  du  pion  A,  et  ainsi  de  suite. 

»  Pour  faire  passer  un  pion  derrière  un  autre,  on  le  pousse  au  centre,  où 
il  attend  que  cet  autre  quitte  une  case  rouge,  pour  venir  l'occuper  après  lui. 

»  Si,  au  moment  où  l'on  veut  conduire  un  pion  sur  la  case  centrale,  il 
n'est  pas  déjà  sur  une  case  rouge,  on  en  pousse  au  centre  un  autre  non 
encore  ordonné,  et  situé  sur  une  case  rouge;  puis  on  joue  jusqu'à  ce  que 
le  premier  soit  arrivé  sur  une  case  rouge,  et  qu'on  ait  pu  reconduire  aussi 
celui  du  centre  sur  une  case  rouge  sans  couper  le  train  déjà  formé. 

»  2°  Conduire  les  pions  à  destination. 

»  Une  fois  que  tous  les  pions  sont  ordonnés,  si  l'on  en  pousse  un  au 
centre,  il  sera  facile  de  conduire  à  destination  le  train  formé  par  les  sept 
autres  pions.  Pour  cela,  on  joue  un  pion  sur  la  case  vide,  et  les  autres  à 
la  suite,  en  tournant  toujours  dans  le  même  sens;  et,  comme  il  y  a  deux 
pions  que  l'on  peut  jouer  sur  la  case  vide,  on  tournera  dans  un  sens  ou 
dans  l'autre,  suivant  que  l'on  commencera  par  l'un  ou  par  l'autre  de  ces 
deux  pions.  Or,  le  polygone  étoile  ayant  huit  côtés,  si,  en  tournant  dans 
un  sens,  chaque  pion  doit  parcourir  six  côtés  avant  d'arriver  à  sa  place, 
en  tournant  en  sens  contraire,  il  y  arrivera  en  parcourant  deux  côtés  seu- 
lement. C'est  donc  en  commençant  qu'il  faut  choisir  celui  des  deux  pions 
que  l'on  jouera  le  premier. 

»  Lorsque  les  huit  pions  seront  ordonnés,  mais  non  rendus  à  destination, 
il  pourra  se  présenter  deux  cas,  suivant  que  le  pion  M  se  trouvera  sur  une 
case  rouge  ou  sur  une  case  jaune. 

»  Premier  cas.  —  Si  le  pion  M  se  trouve  sur  une  case  rouge,  poussez-le 
au  centre;  puis  conduisez  le  train  à  destination,  et  le  pion  M  sur  sa  case. 

»  Second  cas.  —  Si  le  pion  M  se  trouve  sur  une  case  jaune,  jouez  suc- 
cessivement les  pions  E,  C,  É,  E,  C;  puis  conduisez  le  train  à  destination, 
et  le  pion  C  sur  sa  case.  » 

Avant  le  Caméléon,  M.  Fleury  avait  inventé  un  autre  jeu,  auquel  il 
donna  le  nom  de  la  Rose  mystique. 

La  Rose  viystique.  —  La  figure  se  compose  d'une  case  centrale  et  de 
dix  autres  cases  rouges  placées  aux  sommets  d'un  décagone  étoile,  portant 
les  numéros  i  à  9,  le  numéro  4  étant  répété  deux  fois  [fig.  172.) 

Les  dix  pions  étant  placés  au  hasard,  chacun  sur  une  case  du  jeu,  il  faut 
les  ramener  tous  sur  les  cases  de  mêmes  numéros,  en  se  conformant  à  la 
règle  du  jeu,  qui  consiste  à  pousser  chaque  fois  un  pion  sur  la  case  vide, 
suivant  la  ligne  droite  qui  va  de  ce  pion  à  cette  case. 

Le  procédé  au  moyen  duquel  le  problème  est  rendu  toujours  possible, 


Note  III. 


243 


est  le  même  que  pour  le  Caméléon.  Pour  le  faire  comprendre,  supposons 
que,  dans  une  boîte  de  Taquin,  on  mette  deux  numéros  4.  Les  deux  der- 
niers numéros  seront  1 3  et  14,  au  lieu  d'être  14  et  i5.  Or,  quand  en  jouant 
on  a  conduit  tous  les  dés  à  leurs  places  respectives,  à  l'exception  des  deux 
derniers,  le  problème  est  reconnu  impossible  dans  le  Taquin  ordinaire. 


indis  que,  dans  le  Taquin  à  deux  4,  il  suffit  de  conduire  l'un  de  ces  deux 
ùcs  à  la  place  de  l'autre,  pour  que  le  problème  s'achève  facilement. 

C'est  ce  secret  que  M.  Fleury  a  introduit  dans  la  Rose  mystique  en  y 
mettant  deux  numéros  4.  Mais,  à  la  vue  de  ces  deux  4,  on  se  demande 
pourquoi  deux  4?...  et  l'on  pense  que  le  secret  est  là....  Tandis  que  per- 
sonne n'aura  l'idée  de  demander  pourquoi  deux  E  dans  Caméléon  ?  Sous 
ce  rapport,  nous  considérons  le  Caméléon  comme  mieux  réussi  que  la 
Rose  mystique. 

Le  Paradoxal.  — hzfig.  lyS  représente  ce  jeu.  Les  cases  blanches,  noires 
et  ombrées  de  cette  figure  sont  respectivement  rouges,  vertes  et  jaunes  sur 
le  casier  du  jeu.  La  boîte  au  fond  de  laquelle  est  dessiné  ce  casier  con- 
tient seize  pions  :  quatre  jaunes  numérotés  i,  2,  3,  4;  quatre  verts  numc- 
otés  I,  4,  7,  10,  et  huit  rouges  portant  les  numéros  2,  3,  5,  6,  8,  9,  11,  12. 

Les  seize  pions  étant  placés  au  hasard  sur  les  cases  du  jeu,  on  en  retire 
un  jaune,  et  l'on  joue  en  poussant  chaque  fois  un  pion  sur  la  case  vide, 
suivant  la  ligne  droite  qui  va  de  ce  pion  à  cette  case. 

C'est  en  jouant  toujours  de  cette  manière  qu'il  faut  obtenir;  i*  que  les 
trois  pions  jaunes  arrivent  chacun  à  sa  place  sur  le  carré  central;  a*  que 


244  Note  m. 

les  douze  autres  pions  se  trouvent  sur  les  cases  de  même  couleur,  et  leurs 
numéros  disposés  par  ordre  de  grandeur,  dans  le  même  sens  que  ceux  qui 
marquent  les  heures  d'une  pendule. 
Voici  la  solution  de  M.  Fleury  : 

«  Lorsqu'il  y  a  quatre  pions  au  carré  central,  le  train  des  onze  pions  qui 
restent  au  pourtour  peut  avancer  à  volonté  dans  un  sens  ou  dans  l'autre; 
et  si,  à  un  moment  donné,  on  pousse  dans  la  case  vide  un  pion  du  carré 

Fig.  173. 


central,  il  arrive  entre  deux  pions  du  pourtour,  devant  l'un  et  derrière 
l'autre,  selon  le  sens  de  la  marche  du  train. 

»  De  même,  lorsque  la  case  vide  se  trouve  au  carré  central,  on  peut  faire 
circuler  à  volonté  le  train  des  trois  pions  restants,  et  amener  l'un  d'eux  sur 
telle  case  du  centre  que  l'on  veut. 

»  Par  cette  double  manœuvre,  deux  pions  quelconques  peuvent  toujours 
être  mis  en  vue,  c'est-à-dire  amenés  aux  extrémités  de  la  droite  qui  joint 
une  case  du  centre  à  une  case  du  pourtour. 

»  Cela  compris,  pour  résoudre  la  question  proposée, on  fera  d'abord  passer 
sur  une  case  rouge  le  pion  vert  numéro  i,  s'il  n'y  est  déjà;  puis,  ayant 
amené  le  pion  rouge  numéro  2  en  vue  du  numéro  i,  on  le  fait  passer  der- 
rière lui.  On  fera  de  même  passer  le  3  derrière  le  2,  et  ainsi  de  suite. 

»  De  celte  manière,  on  arrivera  assez  facilement  à  conduire  tous  les  pions 
à  leurs  places,  à  l'exception  des  deux  derniers  du  pourtour,  comme  du 
carré  central,  qui  pourront  se  trouver  l'un  à  la  place  de  l'autre, 

»  Lorsque  l'opération  en  est  arrivée  là,  trois  cas  peuvent  se  présenter. 

»  Premier  cas.  —  Les  pions  11  et  1 2  sont  à  la  place  l'un  de  l'autre,  en  même 
temps  que  deux  pions  du  centre. 


Note  III.  245 

»  Poussez  le  12  sur  la  case  adjacente  du  carré  central,  puis  le  10  à  la  place 
que  vient  de  quitter  le  12,  et  faites  suivre  les  pions  9  et  8.  Ensuite  glissez 
entre  le  7  et  le  8  le  pion  jaune  qui  est  en  vue;  puis  opérez  sur  le  train  cen- 
tral un  mouvement  qui  amène  le  12  en  vue  du  1 1  ;  faites  rentrer  le  pion 
jaune  que  vous  avez  glissé  entre  le  7  et  le  8;  ramenez  à  leurs  places  les 
pions  8,  g,  10  et  1 1.  Enfin,  glissez  le  12  entre  les  numéros  i  et  1 1,  et  con- 
duisez à  leurs  places  les  trois  pions  jaunes. 

»  Deuxième  cas.  —  Tous  les  pions  sont  à  leurs  places,  à  l'exception  des 
numéros  11  et  12,  qui  sont  Tun  à  la  place  de  l'autre. 

B  Poussez  le  12  au  carré  central,  et  faites  avancer  de  trois  rangs  tout  le  train 
de  ceinture,  de  manière  que  le  numéro  i,  qui  occupe  une  case  verte,  arrive 
sur  la  case  verte  suivante;  puis,  ayant  glissé  le  12  entre  les  numéros  i  et  ii, 
il  ne  vous  reste  plus  qu'à  régulariser  la  position  du  petit  train  central. 

»  Troisième  cas.  —  Tous  les  pions  sont  à  kurs  places,  à  rexception  de  deux 
jaunes,  qui  sont  l'un  à  la  place  de  l'autre. 

»  Poussez  le  12  au  carré  central;  faites  avancer  de  trois  rangs  tout  le  train 
de  ceinture,  et  glissez  entre  le  10  et  le  11  le  pion  jaune  qui  est  en  vue. 
Ensuite,  imprimez  au  petit  train  central  un  mouvement  qui  amène  le  12  en 
vue  de  1 1  ;  faites  rentrer  le  pion  jaune,  en  ayant  glissé  le  12  entre  les  nu- 
méros I  et  II,  il  ne  vous  reste  plus  qu'à  régulariser  la  position  des  pions 
jaunes. 

»  Remarque.  —  Toutes  les  fois  que  la  solution,  commencée  par  une  case 
verte,  est  impossible,  elle  devient  possible  en  commençant  par  la  case  verte 
suivante.  Or,  la  figure  étant  symétrique  par  rapport  aux  quatre  cases  vertes, 
on  ne  voit  pas  de  prime  abord  pourquoi  le  problème  est  possible  ou  impos- 
sible en  commençant  par  une  case  verte  plutôt  que  par  la  case  verte  sui- 
vante. C'est  en  cela  que  consiste  le  paradoxe.  » 

L'explication  est  la  même  que  pour  le  Taquin,  où,  pour  rendre  possible 
une  solution  qui  ne  l'est  pas,  il  suffit  de  tourner  la  boîte  de  00°  et  de  re- 
former dans  ce  nouveau  sens  les  rangées  de  pions.  Si  les  pions  du  Taquin 
étaient  ronds,  au  lieu  d'être  carrés,  cette  rotation  ne  serait  pas  sensible 
à  l'œil  et,  cependant,  elle  change  la  classe  de  la  permutation  considérée. 

Le  problème  ne  présente  que  des  cas  possibles  quand  le  pion  sorti  du  jeu 
est  jaune,  tandis  que,  s'il  était  rouge  ou  vert,  le  problème  présenterait  des 
cas  possibles  et  des  cas  impossibles.  C'est  un  second  paradoxe  qui  justifie 
le  nom  donné  au  Paradoxal. 

M.  Fleury  a  inventé  toute  une  série  d'autres  jeux  scientifiques  :  le  Moulin 
rouge,  le  Trifolium  diabolique,  France  et  Russie,  le  Cadran  étoile,  VHy fer- 
taquin,  la  Boite  magique,  les  Cartes  hypnotiques,  etc.,  etc. 


làfi 


Note  III. 


Le  principe  de  ces  divers  jeux  est  le  même  que  celui  des  deux  jeux  pré- 

.:édents. 

Le  Moulin  rouge.  —  Ce  petit  jeu  vient  d'être  édité  par  la  maison  très 
connue  à  Paris  sous  le  nom  de  Paradis  des  Enfants. 

Fig.  174. 


Ce  jeu  {fig.  174)  a  neuf  cases,  dont  les  huit  du  pourtour  renferment  les 
lettres  qui  forment  le  moulin,  et  communiquent  entre  elles  par  une  ligne 
droite.  Les  quatre  qui  sont  aux  extrimités  des  ailes  du  moulin  commu- 
niquent de  même  avec  la  case  centrale. 


Note  III.  247 

On  pose  le  problème  en  plaçant  au  hasard  les  huit  pions,  chacun  sur 
une  des  neuf  cases;  et,  pour  le  résoudre,  il  faut  conduire  tous  les  pions, 
cnacun  sur  la  case  affectée  de  la  même  lettre.  La  règle  à  observer,  en  jouant, 
consiste  à  pousser  chaque  fois  un  pion  sur  la  case  vide,  suivant  la  ligne  qui 
va  de  ce  pion  à  cette  case. 

N.  B.  —  Le  problème  présente  des  cas  faciles  et  des  cas  difficiles,  mais 
jamais  de  cas  impossibles. 

C'est,  comme  le  Caméléon,  un  Taquin  à  neuf  cases  avec  une  lettre  répétée 
deux  fois. 

Le  Trifolium  diabolique.  —  Le  jeu  se  compose  d'une  boîte  ronde  conte- 
nant un  casier  et  des  pions  numérotés. 

La  _fig.  175  représente  le  casier,  formé  de  trois  polygones  étoiles,  aux 
sommets  desquels  se  trouvent  des  cases  numérotées. 

Les  cases  du  polygone  de  sept  côtés  sont  rouges;  celles  d'un  des  deux 
polygones  de  cinq  côtés  sont  vertes,  et  celles  de  l'autre  sont  jaunes  (sur  la 
fîg-.  1/5  elles  sont  respectivement  blanches,  noires  et  ombrées). 

Les  pions  rouges  sont  numérotés  de  1  à  7,  comme  les  cases  de  même 
couleur.  Les  pions  verts  et  les  pions  jaunes  sont  numérotés  de  i  à  5. 

Pour  poser  la  question,  on  met  au  hasard  les  dix-sept  pions  sur  les  dix- 
sept  cases,  et  l'on  retire  du  jeu  deux  pions  rouges. 

Le  problème  à  résoudre  consiste  à  conduire  les  i5  pions  restés  au  jeu,  à 
leurs  places  respectives,  c'est-à-dire  chacun  sur  la  case  de  même  couleur  et 
de  même  numéro. 

Pour  jouer,  il  faut  pousser  chaque  fois  un  pion  sur  une  des  deux  cases 
vides,  en  suivant  la  droite  qui  va  du  pion  à  la  case. 

L'inventeur  du  jeu  a  donné  la  solution  suivante  : 

«  Pour  arriver  à  comprendre  les  solutions,  répétez  les  exercices  suivants  : 

»  Premier  exercice. —  Tous  les  pions  étant  hors  du  jeu,  prenez-en  un  rouge 
à  la  main,  et  faites-lui  parcourir  toute  la  ligne  polygonale  rouge,  en  pas- 
sant successivement  par  les  cases  1,4,  7,  3,  6,2,  5.  Notez  bien  l'ordre  dans 
lequel  les  pions  rouges  doivent  se  suivre  sur  la  ligne  polygonale. 

»  Deuxième  exercice.  —  Tous  les  pions  rouges  étant  posés  sur  le  jeu  à 
leurs  places  respectives,  enlevez  le  pion  5,  puis,  sur  sa  case  restée  vide, 
poussez  le  pion  i  et,  à  sa  suite,  successivement  les  pions  4,  7,  3,  6,  2. 
Maintenant  que  les  six  pions  ont  fait  chacun  un  pas,  continuez  à  pousser 
le  pion  I  et  les  autres  à  sa  suite,  jusqu'à  ce  que  chacun  d'eux  soit  revenu 
à  sa  place  après  avoir  parcouru  toute  la  ligne  polygonale. 

»  Troisième  exercice.  —  Les  six  pions  se  trouvant  sur  leurs  cases,  prenez 


248 


Note  III. 


les  deux  pions  2  et  7,  et  portez-les  l'un  à  la  place  de  l'autre.  Comme  alors 
ces  deux  pions  ne  sont  plus  à  leur  rang  sur  la  ligne  polygonale,  il  faut 
les  y  ramener,  c'est-à-dire  le  2  après  le  6  et  le  7  après  le  4,  suivant  l'ordre 
noté  au  premier  exercice.  Pour  cela,  jouez  le  pion  i  sur  la  case  5,  et  les 

Fig.  175. 


autres  en  suivant,  jusqu'à  ce  que  le  2  arrive  sur  la  case  i,  et  de  là  vous  le 
poussez  sur  la  case  i  verte  ou  jaune,  où  il  attend  que  le  pion  4  ait  passé 
sur  la  case  i,  pour  y  revenir. 

»  Au  moment  où  le  pion  2  est  poussé  sur  une  autre  étoile,  les  cases  rouges 
I  et  4  étant  vides,  c'est  sur  la  case  4  qu'il  faut  jouer  le  pion  3,  en  suivant 
toujours  dans  le  même  sens  la  ligne  polygonale,  et,  lorsqu'un  pion"devra 
être  joué  sur  la  case  i,  ce  qui  va  arriver  aux  3  et  ti,  il  la  franchira  pour 
aller  se  poser  sur  la  case  5,  et  c'est  quand  il  y  sera  arrivé  que  le  2  viendra 
prendre  son  rang  derrière  lui. 


Note  III.  249 

»  Vous  opérerez  sur  le  pion  7  comme  sur  le  pion  2;  vous  le  ferez  sortir  du 
rang  quand  il  arrivera  sur  la  case  i,  pour  l'y  faire  rentrer  ensuite  derrière 
le  4.  Après  cela,  il  ne  restera  plus  quà  faire  marcher  le  train  des  six 
pions  jusqu'à  ce  que  chacun  soit  à  sa  place. 

»  Quatrième  exercice.  —  Répétez  l'exercice  précédent  sur  l'étoile  verte  ou 
aune. 

»  Après  avoir  noté  que  les  pions  doivent  se  suivre,  sur  la  ligne  polygonale, 
dans  l'ordre  i,  3,  5,  2,  4,  vous  enlevez  le  4,  et  ayant  porté,  l'un  à  la  place 
de  l'autre,  les  pions  2  et  3,  vous  les  ramènerez  à  leur  rang,  c'est-à-dire  le  2 
derrière  le  5,  et  le  3  derrière  le  pion  i. 

»  Cinquième  exercice.  —  Placez  au  hasard  tous  les  pions  rouges  sur  l'étoile 
rouge,  de  même  les  verts  sur  l'étoile  verte,  et  les  jaunes  sur  l'étoile  jaune, 
puis  sortez  les  deux  pions  qui  sont  sur  les  cases  i  rouge  et  verte.  Cela 
fait,  il  faut  conduire  à  sa  case  chacun  dcâ  quinze  pions  restés  sur  le  jeu. 
Poussez  d'abord  sur  la  case  i  verte  le  pion  qui  est  sur  la  case  i  jaune,  puis 
faites  circuler  le  train  des  quatre  pions  restés  sur  l'étoile  jaune,  jusqu'à  ce 
que  le  pion  i  vienne  sur  sa  case  et  poussez-le  sur  la  case  i  rouge.  Ensuite 
faites  rentrer  l'autre  pion  jaune  et  conduisez,  chacun  à  sa  case,  les  quatre 
pions  de  l'étoile  jaune,  puis  aussi  le  pion  i.  Vous  conduisez  de  même  à 
leurs  cases  les  quatre  pions  de  l'étoile  verte,  et  enîîn  les  six  pions  de  l'étoile 
rouge. 

»  Sixième  exercice.  —  Ayant  placé  tous  les  pions  sur  leurs  cases  respec- 
tives, sortez  du  jeu  les  deux  pions  i  rouge  et  vert;  puis  portez,  l'un  à  K 
place  de  l'autre,  le  3  vert  et  le  5  rouge.  Il  faut,  en  jouant,  ramener  ces  deux 
pions  sur  leurs  cases;  ce  qui  se  fait  en  huit  mouvements  :  i"  Conduisez  le 
3  vert  sur  la  case  i  verte;  2»  le  jaune  i  sur  la  case  5  rouge;  3»  le  3  vert  sur 
la  case  i  rouge;  4"  le  5  vert  sur  la  case  i  jaune;  5»  le  3  vert  sur  la  case  3 
verte;  6*  le  jaune  i  sur  la  case  i  verte;  7»  le  5  rouge  sur  la  case  5  rouge 
8°  le  jaune  i  sur  la  case  i  jaune.  Après  ces  huit  mouvements,  tous  les  pions 
sont  à  leurs  places. 

»  Pour  que  deux  pions  puissent  être  permutés  en  huit  mouvements,  il  faut 
que  celui  qui  est  sur  l'étoile  rouge  soit  à  la  case  4  ou  5,  et  l'autre  à  la  case 
3  eu  4  sur  l'étoile  verte  ou  jaune.  Le  pion  qui  ne  s'y  trouve  pas  y  est  con- 
duit en  faisant  circuler  le  train. 

»  Solution  générale.  —  Ayant  placé  tous  les  pions  au  hasard,  chacun  sur 
une  case  du  jeu,  et  sans  distinction  de  couleur,  enlevez-en  deux  rouges  au 
hasard.  La  question  étant  ainsi  posée,  la  solution  consiste  à  ramener  les 
quinze  pions  restants,  chacun  sur  sa  case. 

»  Supposons  que  les  deux  rouges  enlevés  du  jeu  soient  le  2  et  le  5.  J'adopte 


2  5o  Note  III. 

le  pion  I  verl  pour  représenter  le  2  rouge  sur  le  jeu;  en  sorte  que  les  deux 
pions  qui  manquent  au  jeu  sont  censés  le  5  rouge  et  le  1  vert.  Par  cette 
supposition,  la  question  est  ramenée  à  l'exercice  cinquième,  où  il  manque 
un  rouge  et  un  vert. 

»  Maintenant,  par  la  répétition  de  l'exercice  sixième,  faites  passerions  les 
pions  d'une  couleur  sur  l'étoile  de  la  même  couleur,  en  ayant  soin  de  traiter 
toujours  le  pion  i  vert  comme  si  c'était  le  pion  2  rouge. 

»  Si  les  cases  i  rouge  et  verte  ne  sont  pas  vides,  jouez  quelques  pions  jusqu'à 
ce  qu'elles  le  soient.  Cela  posé,  vous  régulariserez  l'étoile  jaune,  en  suivant 
la  marche  indiquée  au  cinquième  exercice.  Après  cela,  vous  conduisez,  cha- 
cun sur  sa  case,  les  quatre  pions  qui  sont  sur  l'étoile  verte.  Ensuite  vous 
passez  à  l'étoile  rouge,  qui  a  six  pions,  y  compris  le  pion  vert  représentant 
le  2  rouge.  Vous  les  faites  arriver  chacun  à  son  rang  sur  la  ligne  polygo- 
nale, c'est-à-dire  dans  l'ordre  i,  4,  7,  3,  6,  2;  puis  vous  faites  marcher  le 
train  de  ces  six  pions  jusqu'à  ce  que  le  2  rouge,  représenté  par  le  pion  vert, 
arrive  sur  la  case  i,  et  de  là  vous  le  poussez  sur  la  case  i  verte;  après 
quoi,  vous  continuerez  à  faire  circuler  le  train  des  cinq  pions  rouges  jusqu'à 
ce  que  chacun  occupe  sa  place.  » 

Le  Trifolium  peut  être  remplacé  par  un  Taquin  continental,  d'une  forme 
spéciale,  représenté  sur  la  Jig.  176. 

Ayant  enlevé  deux  pions  pris  parmi  ceux  qui  sont  numérotés  de  i  à  7,  la 
solution  consiste  : 

1°  A  ramener  dans  le  carré  les  cinq  pions  restants  parmi  les  sept  pre- 
miers, c'est-à-dire  à  échanger  ceux  de  ces  pions  qui  se  trouvent  dans  les 
rectangles  avec  ceux  des  pions  8  à  17  qui  sont  dans  le  carré. 

Pour  cela,  les  cases  6  et  7  étant  vides,  on  commence  par  amener  sur  la 
case  I  le  pion  à  passer  du  carré  dans  un  rectangle  et  sur  la  case  12  (ou  9) 
le  pion  à  passer  du  rectangle  de  droite  dans  le  carré;  puis  on  joue  les  sept 
coups  suivants  : 

De  i3  en  6,  —  de  8  en  7,  —  de  12  en  i3,  —  de  8  en  12,  —  de  i  en  8,  — 
de  12  en  I.  —  de  6  en  i3. 

2°  A  ramener  dans  le  rectangle  de  droite  les  pions  numérotés  de  8  à  1 2,  et 
dans  le  rectangle  de  gauche,  les  pions  i3  à  17,  c'est-à-dire  à  échanger  ceux 
des  pions  i3  à  17  qui  sont  dans  le  rectangle  de  droite  avec  ceux  des  pions 
8  à  12  qui  sont  dans  le  rectangle  de  gauche. 

Pour  cela,  les  cases  6  et  7  étant  vides,  on  commence  par  amener  sur  la 
case  12  (ou  Q)  le  pion  à  passer  dans  le  rectangle  de  gauche  et  sur  la  case 
14  (ou  17)  le  pion  à  passer  dans  le  rectangle  de  droite,  puis  on  joue  les 
sept  coups  suivants  : 

De  8  en  6,  —  de  1 3  en  8,  —  de  14  en  7,  —  de  8  en  14,  —  de  12  en  i3, 
de  14  en  12,  —  de  6  en  8. 


Note  m. 


25l 


3°  A  replacer  dans  l'ordre  naturel  les  pions  du  carré. 

Les  deux  cases  vides  sont  toujours  6  et  7. 

Jouer  de  8  en  6,  puis  amener  sur  la  case  8  le  pion  que  l'on  veut  placer 

Fig.  176. 


à  la  suite  d'un  autre  et  le  faire  rentrer  dans  le  carré  quand  le  pion  qui  doit 
le  précéder  arrive  sur  la  case  6. 

4"  A  remettre  dans  l'ordre  naturel  les  pions  de  chaque  rectangle. 

Pour  le  rectangle  de  droite  : 

Jouer  de  1 3  en  6;  amener  le  pion  8  sur  la  case  i3,  les  pions  9  et  10  sur 
les  cases  7  et  8;  faire  rentrer  ces  deux  pions  dans  le  rectangle;  amener  12 
en  7,  mettre  en  place  les  pions  9,  10,  1 1,  puis  les  pions  12  et  8;  enfin  jouer 
de  6  en  i3. 

Marche  analogue  pour  le  rectangle  de  gauche. 

France  et  Russie.  —  De  tous  les  jeux  inventés  par  M.  Fleury,  celui-ci 
nous  paraît  le  plus  savamment  combiné. 

Il  se  compose  d'un  échiquier  formé  de  treize  cases  reliées  entre  elles  par 
des  lignes  droites  [fig.  1 77  ),  et  de  douze  pions,  dont  six  jaunes  et  six  rouges. 

Les  cases  jaunes,  comme  les  pions  jaunes,  portent  les  lettres  qui  forment 
le  mot  RUSSIE;  tandis  que  les  cases  rouges,  comme  les  pions  rouges, 
portent  les  lettres  qui  forment  le  mot  FRANCE. 

Les  cases  jaunes  et  les  cases  rouges,  placées  aux  sommets  de  deux  hexa- 
gones concentriques,  communiquent  entre  elles  et  avec  la  case  noire  placée 
au  centre,  par  des  lignes  droites,  comme  l'indique  la  fifç.  177. 

On  pose  le  problème  en  plaçant  au  hasard  tous  les  pions,  chacun  sur  une 
des  treize  cases,  et  pour  le  résoudre  il  faut,  en  jouant,  conduire  chaque  pion 
sur  la  case  qui  a  la  même  couleur  et  la  même  lettre. 


252 


Note  III. 


La  règle  à  suivre,  en  jouant,  consiste  à  pousser,  chaque  fois,  sur  la  case 
vide,  un  pion  voisin,  en  suivant  la  ligne  droite  tracée  entre  ce  pion  et  cette 
case. 

Nota.  Le  problème  présente  des  cas  difficiles,  mais  jamais  de  cas  impos- 
sibles. 
Voici  la  solution  donnée  par  l'auteur  : 

«  Les  douze  pions  étant  placés  au  hasard,  chacun  sur  une  des  treize  cases, 


on  pourra,  sans  trop  de  difficulté,  faire  passer  les  pions  jaunes  sur  les  cases 
jaunes  et  les  quatre  premiers  sur  leurs  cases  respectives.  Il  en  sera  de  même 
pour  les  pions  rouges. 

»  En  cet  état,  quatre  cas  peuvent  se  présenter,  et,  dans  l'explication  qui  va 
suivre,  les  lettres  des  pions  rouges  seront  plus  hautes  que  celles  des  pions 
jaunes. 

»  Premier  cas.  —  Tous  les  pions  sont  à  leurs  places  respectives,  et  le 
problème  est  résolu. 

»  Deuxième  cas.  —  Tous  les  pions  sont  à  leurs  places,  à  l'exception  des 
deux  jaunes  i,  e,  qui  sont  à  la  place  l'un  de  l'autre.  Pour  achever  le  pro- 
blème, jouez  successivement  les  pions 

NssuriessNEeirdssieE. 


Note  m.  253 

»  Troisième  cas.  —  Tous  les  pions  sont  à  leurs  places,  excepté  les  deux 
jaunes  i,  k,  et  les  deux  rouges  C,  E.  Jouez  successivement  les  pions 

CiesNCiesNCEeiEGNsieCNsieE. 

>  Quatrième  cas.  —  Tous  les  pions  sont  à  leurs  places,  à   l'exception 

des  deux  rouges  C,  E.  Alors,  jouez  les  pions 

NssuRNssuRNssECssAEssFANRussNRuss 
NRAFCNEARENCE.  » 

Nous  ne  pouvons  pas  donner  la  description  de  VHypertaquin,  qui  est 
encore  en  préparation.  Mais  nous  savons,  par  l'auteur,  que  le  jeu  contient 
seize  pièces  carrées,  comme  le  Taquin  ordinaire,  et  que  le  problème  ne 
présente  que  des  cas  possibles. 

Nous  empruntons  au  journal  la  Nature  un  article  paru,  sous  la  signa- 
ture de  M.  Henri  Fleury,  qui  y  donne  l'explication  de  sa  Boîte  magique. 

a  La  petite  boîte  qui  constitue  la  récréation  contient  six  cartons,  sur 
chacun  desquels  sont  inscrits  trente-deux  noms  d'enfants.  Les  cartons  sont 
une  transformation  des  cartes  dites  mystérieuses,  dont  nous  allons  expli- 
quer la  construction. 

»  Je  prends  six  petits  cartons  blancs,  que  je  désigne  parles  nombres  i,  2, 
4,  8,  16,  32,  placés  en  haut  de  ces  cartons.  En  additionnant  ces  nombres  de 
toutes  les  manières  possibles,  on  obtient  tous  les  autres  nombres  entiers 
jusqu'à  64.  Ainsi, 

3=n-2,        5  =  1+4,        6=2-+-4,        7  =  n-2-i-4,        ..., 
63  =  I -H 2 -4- 44-8 -h  164- 32. 

»  Ayant  la  liste  des  63  nombres  entiers  qui  précèdent  64,  j'écris  sous  le 
nombre  que  désigne  chaque  carton  tous  ceux  dans  la  formation  desquels  il 
est  entré.  Par  exemple,  le  nombre  23  sera  inscrit  sur  les  cartons  i,  2,  4,  16 
puisque  23  =  i  -i-2-4-4-f- 16.  Lorsque  cette  opération  est  finie,  j'ai  six  car- 
tons qui  contiennent  chacun  trente-deux  nombres,  le  premier  présentant 
les  trente-deux  nombres  impairs  qui  précèdent  64. 

»  Voici  maintenant  comment  s'exécute  le  tour.  Pour  que  je  devine  le 
nombre  que  vous  avez  choisi,  vous  remettez  les  cartons  qui  le  contiennent 
et  vous  gardez  les  autres.  Par  exemple,  si  vous  me  remettez  les  cartons 
I,  2,  4,  16,  je  fais  la  somme  de  ces  nombres  et  je  dis  que  vous  avez  choisi 
le  nombre  23. 


2  34  Note  m. 

»  Les  nombres  inscrits  sur  les  cartons  peuvent  aussi  désigner  des  noms 
quelconques,  que  l'on  écrit  à  leur  droite.  C'est  ainsi  que  l'on  obtient  les 
cartes  dites  mystérieuses,  au  moyen  desquelles  on  devine  le  nom  choisi 
ou  pensé,  ce  qui  se  fait  en  calculant  le  nombre  correspondant. 

»  Le  jeu  des  cartes  mystérieuses  étant  depuis  longtemps  trop  vulgaire- 
ment connu,  je  l'ai  transformé  en  un  tour  nouveau  vraiment  surprenant, 
même  pour  le  mathématicien. 

«  D'abord  j'ai  supprimé  tous  les  nombres,  en  sorte  que  les  cartons  ne  con- 
tiennent que  des  noms  d'enfants.  On  comprend  alors  qu'un  calcul  soit 
moins  difficile  sur  des  nombres  connus  que  sur  des  nombres  disparus. 
En  second  lieu,  vous  ne  me  remettez  que  les  cartons  qui  ne  contiennent 
pas  le  nom  à  deviner.  On  comprend  encore  qu'il  devienne  plus  difficile  de 
trouver  ce  nom  sur  les  cartons  qui  ne  le  contiennent  pas. 

('  Comme  je  l'ai  dit  tout  à  l'heure,  le  tour  est  étonnant  quand  on  le  voit 
exécuter.  Mais  le  mystère  disparaît  quand  on  lit  l'instruction  qui  accom- 
pagne le  jeu.  En  effet,  on  y  voit,  d'une  part,  que  les  nombres  qui  dési- 
gnent les  cartes  mystérieuses  se  trouvent  remplacés  sur  mes  cartons  par 
un  système  très  simple  de  points  adroitement  dissimulés  dans  l'encadre- 
ment. Par  exemple,  le  nombre  32  y  est  remplacé  par  un  petit  groupe  de 
six  points.  D'autre  part,  on  voit  comment  une  liste  générale,  collée  au 
fond  de  la  boîte,  reste  invisible  pour  les  spectateurs  pendant  l'exécution 
du  tour. 

»  Si  l'instruction  qui  accompagne  le  jeu  en  dévoile  le  mystère,  elle  ne 
lève  pourtant  pas  toute  difficulté  théorique;  car  elle  ne  dit  pas  par  quel 
secret  on  peut  trouver  le  nombre  pensé,  au  moyen  des  cartes  qui  ne  le 
contiennent  pas.  Mais  il  est  bien  simple,  car  il  suffit  de  savoir  que  le 
nombre  donné  par  celles-ci  est  le  complément  du  nombre  donné  par  les 
autres  pour  faire  63.  Par  exemple,  si  le  nombre  choisi  est  23,  il  se  trouve 
sur  les  cartes  i,  2,  4,  i6  et  les  cartes  qui  ne  le  contiennent  pas  sont  dési- 
gnées par  8  et  32,  dont  la  somme  est  40,  complément  de  23.  Or,  l'opéra- 
tion même  qui  consiste  à  soustraire  40  de  63,  pour  avoir  23,  est  supprimée 
par  l'emploi  des  cartons  de  la  Boîte  magique.  Il  m'a  suffi  pour  cela  de  per- 
muter les  noms  désignés  par  23  et  40. 

»  J'ajouterai  que  le  secret  des  jeux  que  j'ai  inventés  repose  sur  des 
propriétés  numériques  fort  simples,  mais  généralement  inconnues,  parce 
qu'elles  ne  sont  pas  expliquées  dans  les  traités  classiques.  » 


Note  IV.  2  55 


NOTE  IV. 
Sur  la  huitième  Récréation  du  tome  I. 

Dans  le  tome  I  des  Récréations  mathématiques,  le  paragraphe  consacré 
au  Taquin  complet  (p.  284)  n'a  pas  reçu  tous  les  développements  néces- 
saires. Aussi,  croyons-nous  devoir  revenir  sur  cette  question  et  donner, 
d'après  M.  Paul  Redon,  quelques  explications  complémentaires. 

Voici  d'abord  l'énoncé  de  la  question  :    . 

Les  sei^je  pions  du  Taquin  étant  placés  dans  un  ordre  donné,  retirer  l'un 
d'eux  et  parvenir  à  une  position  également  donnée. 

Nous  appellerons  l'ordre  primitif  dans  lequel  les  pions  sont  placés  :  posi- 
tion initiale,  et  celle  quil  s'agit  d'atteindre  :  position  finale.  Si  tous  les  dés 
étaient  rangés  dans  l'ordre  i,  2,  3,  .. .,  i5,  16,  nous  dirions  qu'ils  £ont 
dans  \cuT  position  naturelle  on  fondamentale. 

On  a  vu  (t.  I,  p.  201)  que,  dans  n'importe  quelle  position,  si  Ton  per- 
mute deux  dés,  on  obtient  un  changement  de  classe. 

Ceci  rappelé,  concevons  le  fond  de  la  boîte  du  Taquin  divisé  en  seize 
cases  alternativement  noires  et  blanches  comme  celles  d'un  échiquier,  et 
convenons  de  dire  qu'un  pion  est  sur  sa  couleur  naturelle  lorsqu'il  est 
placé  sur  une  case  de  même  couleur  que  celle  qu'il  occupe  dans  la  position 
fondamentale. 

Si,  après  avoir  retiré  un  pion  de  la  position  initiale,  on  remarque  la 
couleur  de  la  case  sur  laquelle  était  ce  pion,  qu'on  pousse  à  sa  place  un 
pion  voisin  et  qu'on  remette  sur  la  nouvelle  case  vide  le  pion  précédem- 
ment enlevé,  la  position  aura  changé  de  classe,  et  le  pion  enlevé,  de  cou- 
leur. On  comprend  que,  en  continuant  ainsi,  après  un  nombre  impair  de 
coups,  joués  comme  il  vient  d'être  dit,  la  position  a  changé  de  classe  et  la 
case  vide  de  couleur,  tandis  que,  après  un  nombre  pair  de  coups,  ni  la 
classe  ni  la  couleur  ne  sont  modifiées. 

Dès  lors,  si  la  position  initiale  et  la  position  finale  sont  toutes  deux  de 
même  classe,  on  doit  jouer  un  nombre  pair  de  fois  et,  par  suite,  pour 
réussir,  il  faut  et  il  suffit  que  le  cube  enlevé  occupe,  dans  les  deux  posi- 
tions, un  case  de  même  couleur.  Si  la  position  initiale  et  la  position  finale 


256  Note  IV. 

appartiennent  à  deux  classes  différentes,  il  faut  et  il  suffit  que  le  cube  en- 
levé occupe,  dans  les  deux  positions,  une  case  de  couleur  différente,  puis- 
que, dans  ce  cas,  on  doit  jouer  un  nombre  impair  de  fois. 

Cette  règle  est  générale  et  s'applique  à  tous  les  problèmes  du  Taquin. 

Si,  par  exemple,  on  se  propose  d'atteindre  la  position  fondamentale,  il 
faut  enlever  un  cube  qui  soit  sur  sa  couleur  naturelle.  Si  l'on  pose  comme 
condition  de  toujours  enlever  le  numéro  i6,  on  ne  peut  parvenir  à  la  posi- 
tion fondamentale  que  si  l'on  est  dans  un  des  deux  cas  suivants  :  i»  la 
position  initiale  est  de  première  classe  et  le  numéro  i6  est  sur  une  case  de 
même  couleur  que  celle  du  coin  inférieur  droit  du  Taquin;  2°  la  position 
est  de  deuxième  classe  et  le  numéro  16  occupe  une  case  qui  est  de  la  cou- 
leur oppose  à  celle  du  coin  inférieur  droit. 

Quand  on  commence,  avant  toute  chose,  par  retirer  le  numéro  16  et  qu'on 
met,  au  hasard,  dans  la  boite  les  quinze  autres  pions,  de  façon  que  la  case 
vide  soit  toujours  en  dernier,  le  problème  devient  très  simple  lorsqu'on  se 
propose  seulement  d'arriver  à  la  position  naturelle.  C'est  avec  cet  énoncé 
que  nous  fut  importé  ce  jeu  qui  est  connu,  en  Amérique  et  en  Angleterre, 
sous  le  nom  de  «  i5  Pw^jf/e,  c'est-à-dire  le  jeu  des  Quinze.  »  Alors,  il  suffit 
de  remarquer  que,  puisque  la  case  vide  de  la  position  initiale  et  celle  de 
la  position  finale  se  confondent  en  une  seule  et  même  case,  il  est  évident 
que,  pour  que  le  problème  soit  possible,  il  faut  et  il  suffit  que  les  quinze 
premiers  numéros  présentent  une  position  de  première  classe.  Dans  cette 
question,  la  considération  de  l'échiquier  est  donc  superflue,  quoique  très 
utile  pour  rendre  nettement  compte  de  la  séparation  infranchissable  entre 
les  cas  possibles  et  les  cas  impossibles. 

A  l'aide  de  cette  méthode  on  explique  avec  la  plus  grande  facilité  tous  les 
jeux  qui  dérivent  du  Taquin  et  dont  nous  nous  sommes  occupés  dans 
le  tome  III  des  Récréations  :  l'Etoile  nationale,  le  Paradoxal,  le  Camé- 
léon, etc.,  etc. 


v^:^ 


Xote   V.  2b-/ 


NOTE   V. 
Sur  les  Carrés  magiques. 


L'impression  du  tome  IV  des  Récréations  était  terminée,  quand  nous 
avons  retrouvé,  dans  les  papiers  de  Lucas,  le  carré  magique  restauré  dont 
il  est  question  à  la  page  89.  Nous  le  donnons  ci-contre. 

Il  ne  reste  malheureusement  rien  en  ce  qui  concerne  le  nombre  des 
solutions  du  problème  que  Lucas  espérait  donner  d'après  les  indications 
de  Fermât. 


E.  Lucas.  —  Récréations  matliém.,  IV.  17 


258 


Note  V, 


Restauration 


23 

464 

459 

457 

109 

m 

108 

IIO 

l32 

i33 

25 

4' 

436 

435 

433 

432 

196 

195 

2/^1 

2^2 

27 

45 

i3 

47I 

469 

467 

82 

81 

72 

9« 

461 

55 

i5 

34 

45o 

449 

447 

446 

i56 

"7 

456 

56 

17 

42 

3 

484 

479 

477 

66 

65 

'37 

428 

471 

4i 

5 

127 

126 

125 

36i 

362 

2 

i53 

43 1 

466 

3i 

7 

347 

,',8 

338 

339 

145 

1 

i54 

439 

98 

453 

48i 

325 

161 

169 

168 

3i8 

3 

384 

266 

407 

445 

476 

292 

293 

'91 

190 

299 

2 

383 

268 

406 

442 

424 

270 

280 

272 

273 

211 

2 

379 

265 

?92 

172 

60 

2^8 

227 

230 

25l 

23o 

2 

378 

267 

891 

173 

59 

226 

249 

228 

229 

252 

2 

35i 

282 

4o5 

,76 

74 

204 

2.4 

206 

207 

277 

2 

35o 

263 

390 

177 

73 

182 

192 

3oi 

3oo 

189 

i 

334 

199 

77 

33o 

423 

171 

3i5 

323 

322 

164 

I 

333 

216 

96 

3ii 

4i3 

■49 

346 

147 

i46 

340 

3 

100 

221 

76 

3io 

4.4 

389 

359 

36o 

124 

123 

I 

99 

223 

75 

291 

483 

I 

6 

8 

4'9 

420 

4 

io4 

202 

97 

452 

35 

36 

38 

39 

329 

328 

3 

io5 

238 

473 

II 

16 

18 

4o3 

404 

393 

395 

3. 

i36 

438 

49 

5o 

52 

53 

289 

290 

244 

243 

2; 

463 

21 

26 

28 

376 

374 

377 

375 

353 

352 

3, 

Note  V. 


1; 

S'sinte 

",  de  Fermai 

;  n 

3-3 

3,1 

357 

356 

372 

382 

370 

335 

3o 

22 

284 

287 

246 

245 

288 

261 

5i 

58 

47 

460 

4oi 

400 

396 

398 

399 

397 

20 

12 

440 

458 

JÏ 

826 

327 

3o6 

307 

44 

37 

33 

470 

43o 

24 

E 

422 

421 

4.6 

4i5 

10 

2 

443 

468 

429 

29 

i4 

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366 

n8 

117 

116 

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186 

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101 

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279 

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256 

257 

258 

237 

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106 

255 

234 

235 

236 

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295 

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222 

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482 

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465 

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201 

198 

239 

340 

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324 

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427 

437 

349 

112 

.,4 

128 

129 

ii3 

iu3 

ii5 

i5o 

455 

462 

TABLE  DES  MATIERES. 


Paxes. 
Avertissement vu 


Première  Récréation.  —  Le  Calendrier  perpétuel  et  le  Calcul 
automatique  des  résidus. 

Dédicace  et  épigraphe i 

Le  calendrier  julien  et  grégorien 3 

De  Romulus  à  Jules  César 4 

La  réforme  julienne 3 

La  réforme  grégorienne 6 

But  du  calendrier 6 

Règle  pour  le  calendrier  julien S 

Règle  pour  le  calendrier  grégorien 9 

Calcul  mental  des  dates 10 

Utilité  du  calendrier  perpétuel 11 

Le  calcul  automatique  des  résidus 12 

Le  calendrier  perpétuel  à  réglettes 17 


y.(32  Table  des  matières. 


Deuxième  Récréation.  —  L Arithmétique  en  boules. 

Pages. 

Dédicace  et  épigraphe 21 

L'A  rithmétique  en  boules 2  3 

L'addition 24 

La  multiplication 25 

Les  nombres  triangulaires 26 

La  pile  d'obus 27 

Calcul  direct  des  triangulaires 29 

Les  nombres  carrés. .  ; 3o 

La  Table  des  carrés ...  32 

Les  restes  des  carrés 34 

Les  décompositions  d'un  carré 34 

Les  nombres  pentagonaux 35 

La  Table  des  pentagonaux 36 

Les  nombres  hexagonaux 3q 

Les  nombres  polygonaux 40 

Table  des  nombres  polygonaux 42 

Deux  problèmes  de  Fermât 44 

La  Table  des  quarts  de  carrés. 45 


<^g§*>^ 


Troisième  Récréation.  —  L'Arithmétique  en  bâtons. 

Dédicace  et  épigraphe 5i 

Dans  l'Inde,  au  temps  de  Clovis 53 

Le  Fakhrl  d'Alkarkhî 54 

Les  nombres  en  baguettes 55 

Table  de  multiplication  des  Arabes Sy 

Les  nombres  pyramidaux  à  base  triangulaire 58 

Table  des  pyramidaux  triangulaires 60 

Les  pyramidaux  quadrangulaires 62 

Les  piles   de  boulets 63 

La  pile  des  cubes 64 


Table  des  matières.  263 


Quatrième  Récréation.  —  Le  Jeu  des  Mérelles  au  xiii*  siècle. 

Pages 

Epigraphe 67 

Le  Jeu  des  Mérelles  au  xine  siècle 69 


Cinquième  Récréation.  —  Les  Carrés  magiques  de  Fermât. 

Epigraphe 87 

Les  carrés  magiques  de  Fermât 89 

Les  carrés  magiques  de  trois 92 

La  rotation  et  la  symétrie g3 

Les  carrés  magiques  de  quatre gS 

De  l'addition  et  de  la  multiplication  des  carrés 96 

Transformations  générales  des  carrés gg 

Les  Tables  de  Frénicle i  o  i 

Egalités  à  quatre  boules 102 

Egalités  à  deux  boules 1 04 

Des  carrés  à  quartiers  égaux.   107 

La  Table  d'addition 1 09 

Le  carré  magico-magique 112 

Formules  d'Arithmétique 1 1 3 

Les  neuf  types  des  carrés  à  quartiers 114 

L'addition  d'équidifFérences 119 

Les  carrés  5  des  Tables  de  Frénicle 120 


Sixième  Récréation.  —  La  Géométrie  des  réseaux 
et  le  problème  des  dominos. 

Dédicace  et  épigraphe I23 

Sur  le  jeu  de  dominos liS 

Une  remarque  de  M.  Laisant 127 

Solution  de  MM.  Joli vald  et  Tarrv 128 


264  Table  des  matières. 


Pages. 

Les  réseaux  géométriques 129 

Du  tracé  des  réseaux 1 3  3 

Procédé  de  M.  Fleury 1 04 

Pérégrinations  d'une  fourmi i33 

Les  réseaux  à  points  impairs 137 

Fermeture  d'une  impasse i  Sy 

Labyrinthes  à   un  seul  carrefour 1 38 

Ciiemin  de  fer  à  double  voie i  Sg 

Chemin  de  fer  de  ceinture 140 

Théorème  des  impasses 141 

Théorème  des  carrefours 143 

Description  du  pentagone 145 

Description  de  l'heptagone 147 


<^^ 


Septième  Récréation.  —  La  Géométrie  des  régions,   le  problème 
géographique  des  quatre  couleurs  et  les  réseaux  à  points  triples. 

Dédicace  et  épigraphe 1 53 

Les  régions i  5  3 

Les  points  multiples lûo 

Les  polyèdres i63 

Les  polyèdres  réguliers  convexes 166 

Le  Problème  géographique  des  quatre  couleurs 1 68 

Le  coloriage  des  cartes 168 

Les  surfaces  simples 1 69 

Sur  l'anneau  de  Saturne 170 

Le  problème  de  Guthrie 171 

Théorème  du  coloriage 172 

Division  de  la  carte 173 

Carrefour  de  quatre  frontières 1 74 

Carrefour  de  cinq  frontières 175 

La  contexture  d'une  carte 177 

La  garniture  des  pièces 178 

Développement  de  la  carte 180 

Généralisation  du  théorème  de  Descartes 182 

Théorème  de  Kempe 1 83 

Les  pièces  auxiliaires  1 84 


Table  des  matières.  205 


Pages. 

Pratique  du  coloriage i85 

Cas  particuliers 187 

Le  problème  des  liaisons 1 87 

Les  réseaux  à  points  triples 1 88 

Théorèmes  de  Tait 189 

Théorème  de  Kirkman 192 

Corollaire  du  coloriage 193 


Huitième  Récréation.  —  La  machine  à  marcher. 
La  machine  à  marcher 197 


NOTES. 

Note  I.  —  Le  saut  du  cavalier  au  jeu  des  échecs 2o5 

Définition 2o5 

Un  problème  de  Guarini 207 

Les  rectangles  de  1 2  cases 208 

Les  croix  d'Euler 209 

La  course  et  le  circuit 210 

Le  cavalier-sphinx 214 

La  planchette  de  Vandermonde 2i5 

Le  cavalier-domino 218 

Le  cavalier-loto 219 

Les  réseaux  géométriques 22 1 

Note  IL  —  Les  carrés  magiques 224 

Sur  le  carré  de  3  et  sur  les  carrés  à  deux  degrés 224 

Amusements  scientifiques  sur  l'Arithmétique 228 

Le  testament  du  nabab 228 

La  multiplication  rapide  par  9,  99,  099 23 1 

Multiplications  curieuses 232 

Le  blanc  et  le  noir 235 

Les  échiquiers  anallagmatiques 237 


266 


Table  des  matières. 


Pages. 

Note  III.  —  Sur  la  troisième  Récréation  du  tome  III 240 

Le  Caméléon 240 

La  Rose  mystique 242 

Le  Paradoxal 243 

Le  Moulin  rouge 246 

Le  Trifolium  diabolique 247 

France  et  Russie 25 1 

La  Boîte  magique 253 

Note  IV.  —  Sur  la  huitième  Récréation  du  tome  1 255 

Note  V.  —  Sur  la  Carrés  magiques 257 


Paris.  —  Imp.  Gauthier-Villars  et  fils,  55,  quai  des  Grands-Augustins. 


■■■  j 


QA 

95 

L83 

1891 

pt.4 


Lucas ,  Edouard 

Récréations  mathématiques 


P&AS«L 


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